Décision

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Gestion Noto c. Gignac

2022 QCTAL 2129

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Montréal

 

No dossier :

597166 31 20211110 G

No demande :

3389856

 

 

Date :

28 janvier 2022

Devant la juge administrative :

Lise Gélinas

 

Gestion Noto

 

Locateur - Partie demanderesse

c.

Pierre Gignac

 

Locataire - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]         Par une demande le 10 novembre 2021, le locateur demande la résiliation du bail pour retard de paiement du loyer et l’éviction du locataire et de tous les occupants pour troubles et inconvénients.

[2]         Par un amendement le 22 novembre 2021, le locateur demande également la résiliation du bail pour retards fréquents dans le paiement du loyer.

[3]         Le Tribunal note l’absence de réclamation des frais de justice.

[4]         Les parties sont liées par un bail du 1er juillet 2021 au 30 juin 2022 au loyer mensuel de 800 $. Il s’agit d’un immeuble de 17 logements. Le locataire habite un logement de grandeur 3 ½ pièces, situé au sous-sol.

CONTEXTE

[5]         Le locateur témoigne que le locataire paie fréquemment en retard son loyer. D’ailleurs, allègue-t-il, les mois de novembre et décembre ne sont pas payés au jour de l’audience. Le locataire admet devoir ces deux mois de loyer.

[6]         Le locateur, interrogé par le Tribunal quant au préjudice sérieux pour retards fréquents du paiement du loyer, témoigne ne subir aucun préjudice financier.

[7]         Quant au motif de résiliation pour troubles et inconvénients, le locateur témoigne qu’il y a un va-et-vient constant dans l’immeuble, tant le jour que la nuit, et ce, depuis l’arrivée du locataire dans l’immeuble.

[8]         Madame Coulombe témoigne qu’au mois de juillet 2021, le locataire est absent et un ami de ce dernier occupe le logement. Le 27 juillet 2021, il y a des cris et du brasse-camarade au logement du locataire. Madame Coulombe fait appel aux policiers pour faire cesser le bruit.

[9]         Selon monsieur Noto, au mois de juillet 2021, un ami du locataire quitte l’immeuble avec un bac de plastique, accroche la vitre de la porte d’entrée de l’immeuble et la casse.


[10]     Selon le locateur, monsieur Colagero Noto et madame Marie Coulombe, locataire et gestionnaire de l’immeuble, plusieurs personnes se présentent la nuit chez le locataire. Ces personnes sonnent à tous les logements pour entrer dans l’immeuble, cognent dans les fenêtres, crient, courent partout dans l’immeuble et à quelques occasions, se bagarrent. Des interventions policières sont requises à cet effet.

[11]     Il s’avère que la sonnette pour entrer dans l’immeuble est défectueuse et que les amis du locataire cognent très fort dans les fenêtres afin qu’on leur ouvre la porte.

[12]     Le locataire confirme que ses connaissances doivent cogner pour entrer dans l’immeuble. Cependant, il explique que la vitre et la sonnette de la porte d’entrée sont réparées depuis peu.

[13]     Afin de pallier ces dérangements, le locataire propose d’apposer des affiches indiquant de ne pas cogner dans les fenêtres, mais les dérangements et interventions policières continuent.

[14]     Quant au bruit, le locataire témoigne qu’un autobus s’arrête tous les matins vers 5 h 30 du matin devant son logement. Cet autobus vient chercher des travailleurs tous les matins, soit une trentaine environ, ce qui fait beaucoup de va-et-vient. Il suppose que certains d’entre eux peuvent aussi entrer dans l’immeuble et causer du bruit.

[15]     Tel se résume l’essentiel de la preuve.

ANALYSE ET DÉCISION

Fardeau de preuve

[16]     Le Tribunal juge opportun de rappeler les articles 2803, 2804 et 2845 du Code civil du Québec (C.c.Q.), lesquels prévoient que celui qui veut faire valoir ses droits doit démontrer, de façon prépondérante, les faits au soutien de ses prétentions et la force probante du témoignage étant laissée à l'appréciation du Tribunal.

Résiliation du bail pour retard de paiement du loyer

[17]     La preuve démontre que le locataire admet devoir 1 600 $, soit le loyer des mois de novembre et décembre 2021. Il est donc en retard de plus de trois semaines dans le paiement du loyer, la demande de résiliation est justifiée.

[18]     Cependant, malgré la démonstration de retards fréquents dans le paiement du loyer, le locateur n’a pas démontré, par preuve prépondérante, en subir un préjudice sérieux lui permettant d’obtenir la résiliation sur cette demande.

Troubles et inconvénients

[19]     Le Code civil du Québec, au chapitre intitulé : « Du louage », impose certaines obligations au locataire, notamment aux articles 1860 et 1863 :

1860. Le locataire est tenu de se conduire de manière à ne pas troubler la jouissance normale des autres locataires.

Il est tenu, envers le locateur et les autres locataires, de réparer le préjudice qui peut résulter de la violation de cette obligation, que cette violation soit due à son fait ou au fait des personnes auxquelles il permet l'usage du bien ou l'accès à celui-ci.

Le locateur peut, au cas de violation de cette obligation, demander la résiliation du bail.

1863. L'inexécution d'une obligation par l'une des parties confère à l'autre le droit de demander, outre des dommages-intérêts, l'exécution en nature, dans les cas qui le permettent. Si l'inexécution lui cause à elle-même ou, s'agissant d'un bail immobilier, aux autres occupants, un préjudice sérieux, elle peut demander la résiliation du bail.

L'inexécution confère, en outre, au locataire le droit de demander une diminution de loyer; lorsque le tribunal accorde une telle diminution de loyer, le locateur qui remédie au défaut a néanmoins le droit au rétablissement du loyer pour l'avenir.

[20]     Ainsi, le premier paragraphe de l'article 1860 du Code civil du Québec impose au locataire de ne pas troubler la jouissance normale des autres locataires. Selon le second paragraphe du même article, cette obligation s'impose tant au locataire qu'aux personnes qui occupent le logement avec lui ou à qui il donne simplement accès au logement.


[21]     Lorsqu'il s'agit d'un bail de logement, comme dans le cas actuel, ces articles du Code civil du Québec sont déclarés d'ordre public[1], ce qui signifie que les parties ne peuvent déroger à ces règles. Cela démontre à quel point les normes de comportement imposées par la Loi à un locataire sont jugées essentielles.

[22]     Quant aux troubles et inconvénients causés par le locataire, l’ensemble de la preuve prépondérante du locateur démontre l'existence d'un préjudice sérieux justifiant la résiliation du bail à cet égard.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[23]     ACCUEILLE en partie la demande du locateur;

[24]     RÉSILIE le bail et ORDONNE l’éviction du locataire et de tous les occupants;

[25]     CONDAMNE le locataire à payer au locateur la somme de 1 600 $;

[26]     REJETTE la demande quant au surplus.

 

 

 

 

 

 

 

 

Lise Gélinas

 

Présence(s) :

le mandataire du locateur

le locataire

Date de l’audience : 

17 décembre 2021

 

 

 


 


[1] Selon les dispositions de l'article 1893 du Code civil du Québec.

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