Décision

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Trans Global Warranty Corp. c. Agence du revenu du Québec

2021 QCCQ 13824

COUR DU QUÉBEC

« Division administrative et d’appel »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

MONTRÉAL

LOCALITÉ DE

MONTRÉAL

« Chambre civile »

 :

500-80-036241-173

 

DATE :

Le 16 décembre 2021

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

GATIEN FOURNIER, J.C.Q.

______________________________________________________________________

 

 

TRANS GLOBAL WARRANTY CORP.

Demanderesse

c.

AGENCE DU REVENU DU QUÉBEC

Défenderesse

 

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

______________________________________________________________________

 

[1]   La demanderesse, Trans Global Warranty Corp. (« TGW »), en appelle d’une cotisation établie par la défenderesse, l’Agence du revenu du Québec (« ARQ »), pour l’année d’imposition 2013 en application de la Loi sur les impôts[1] (la « L.I. »).

[2]   TGW a vendu au cours de l’année d’imposition 2013 des programmes de garantie supplémentaire Programmes de garantie ») à la clientèle de magasins The Brick faisant affaire au Québec.

[3]   TGW a inclus dans le calcul de son revenu le montant des primes perçues. Elle a néanmoins déduit un montant de 126 933 232 $ suivant l’alinéa 2 de l’article 152 L.I. à titre de provisions à l’égard de la partie non acquise à la fin de l’année d’imposition 2013 de celles-ci.

[4]   Le ministre a refusé cette déduction soutenant qu’une telle déduction n’est pas permise aux termes de l’article 152 L.I. à l’égard de garanties ou d’indemnités.

[5]   L’instruction de la présente affaire qui, au départ, a été présidée par la juge Dominique Gibbens, j.c.q. a eu lieu le 23 octobre 2019. Celle-ci a été mise en délibéré ce jour-là.

[6]   Le juge soussigné a été par la suite désigné par l’Honorable Lucie Rondeau, juge en chef de la Cour du Québec, aux termes d’une ordonnance rendue par elle le 6 octobre 2020 pour continuer et terminer l’instruction de la présente cause.

LE CONTEXTE FACTUEL

[7]   Les faits ne font pas l’objet de grande contestation. À ce titre, l’enquête a duré à peine deux heures.

[8]   L’authenticité de toutes les pièces a été reconnue par les parties pour les fins de leur production en preuve. Il n’y a, par ailleurs, que les pièces P-2, P-10 et P-11 dont la véracité de leur contenu n’a pas été reconnue par l’ARQ.

[9]   TGW a fait entendre un seul témoin alors que l’ARQ a fait entendre deux de ses représentants.

[10]           M. Orest Pyshniak (« Pyshniak ») est le vice-président finance de The Brick Warehouse LP (« TBW »). Il est comptable de formation. Il a obtenu en 1994 la désignation de comptable agrée (CA) et en 2006 celle d’analyste financier agrée (CFA).

[11]           Il a débuté en 2005 pour TBW à titre de directeur principal de l’information financière alors que celle-ci était une société inscrite à la bourse de Toronto.

[12]           En fait, Pyshniak est responsable de la comptabilité, de la trésorerie, de l’information financière et de la fiscalité de l’ensemble des entités qui forme le Groupe The Brick dont la société mère est The Brick Ltd.

[13]           The Brick Ltd est une société de portefeuille. Elle contrôle TBW qui est une société exploitante.

[14]           TBW possède 160 magasins de détail à travers le Canada qui vendent des meubles, des matelas, des appareils électroménagers et des appareils électroniques.

[15]           TBW contrôle indirectement, via une autre société de portefeuille, TGW.

[16]           Toutes ces entités ont leur principale place d’affaires à Edmonton en Alberta.

[17]           TGW est donc une filiale de TBW qui offre des Programmes de garantie aux clients de cette dernière qui se portent acquéreurs de meubles, matelas, appareils électroménagers et appareils électroniques.

[18]           TGW a débuté ses opérations en 1985. TGW portait alors le nom de The Brick Protection Corporation.

[19]           TGW élabore les Programmes de garantie lesquels sont offerts aux clients de TBW, via tous ses magasins de détail à travers le Canada.

[20]           Les Programmes de garantie sont souscrits par TGW.

[21]           Ainsi, lorsqu’un tel programme est vendu à un client de TBW, le produit de la vente est comptabilisé par elle comme revenu de TGW et celui-ci est remis à cette dernière. En retour, TGW paie une commission de 20% à TBW et plus particulièrement au magasin de détail qui en a fait la vente.

[22]           Pyshniak explique que plusieurs des Programmes de garantie vendus par TGW sont pour une période de cinq ans. Dans ce cas, TGW répartit le produit de la vente pour les fins comptables à raison de 20% par année. TGW procède de la sorte puisqu’elle demeure obligée à l’égard du client sur une période de cinq ans.

[23]           Pysniak précise que les revenus provenant de la vente des Programmes de garantie sont traités pour les fins fiscales de la même façon que pour les fins comptables[2] :

[]

A.  So, in calculating our taxable income, those policy sales are treated the same way as they are for accounting purposes. So, just to go through the example again, if we sold $100.00 policy in 2010 and it’s now 2013, we would have taken three years worth of that revenue into income in the three years subsequent to sale, so let’s say 2010, 2011, 2012 and in 2013, we’d be sitting with still two fifths of that sale price to be taken into revenue in the following two years.

So, another way to say it is we treat it the same way as we treat it for accounting purposes.

THE COURT :

Q.  I’m not sure I understand. Does it mean you actually pay taxes on the portion that you use up each year?

A.  Correct.

Q.  But you… in the first year, if you account $20.00, the one fifth, you would pay taxes on that $20.00?

A.  Correct.

Q.  And differ, you wouldn’t pay taxes for the other portion and in any event, it’s…

A.  Correct, until subsequent years.

Q.  Okay.

Me POITRAS :

Q.  And when did Trans Global start taking a reserve similar to the one that is in dispute before the Court for the sales of extended warranties?

A.  Trans Global has always taken this reserve deduction for income tax purposes since it filed its first tax return.

Q.  Would you know when that be?

A.  That would have been for the year 1987.

Q.  And in which provinces do you use such fiscal treatment?

A.  So, for purposes of income tax, we file the same way in every jurisdiction in Canada, whether it’s provincial or federal.

[]

[citation intégrale]

[24]           Pyshniak ajoute que la dépense que représente la commission de 20% payable suivant la vente d’une garantie supplémentaire offrant une protection de cinq ans est répartie pour les fins comptables, comme le produit de la vente, sur une période cinq ans.

[25]           Pyshniak explique dans son témoignage en quoi consiste la déduction de 126 933 232 $ refusé à titre de provisions par l’ARQ pour l’année d’imposition 2013[3] :

[]

A.  So, that amount represents the unexpired portion of all policies that had been sold. So, if we use the example with the average term of policy being five years, at any given point in time, we would have some obligation, some small obligation remaining with respect to the policy it was sold five years ago. It’s going to expire this year but it hasn’t yet expired.

Similar for the policy that was sold four years ago, we’re still going to have the year’s worth of obligation and if we sold it three years ago, we’re still going to have three years worth of obligation, again using a five year policy term example. So, if we think about the thousands of policies that we sell in any given year and the proceeds from all of those policies related to the unexpired portion of all those policies added up to the 126 million dollars.

So, another way to look at it that that’s our remaining obligation to provide our part of the deal on the warranty contract. In other words, if someone should come in with a claim, we’re obligated to deal with that customer.

[]

A.  So, if the year is 2013 and we sold that policy in 2010, assuming it’s a five year policy. In 2013, three years have gone by. I still have two years of obligation.

So, I would still have in my differed revenue two fifths of the sale price. So, if that was $100.00, I would still have $40.00 of obligation or what we refer to as differed revenue on my balance sheet.

So, effectively that’s what is inside the 126 million albeit multiplied by thousands of contracts that were sold within a five year window.

[]

[citation intégrale]

[26]           Pyshniak décrit TGW comme étant une société de garantie (Warranty company). Elle est ainsi responsable des obligations découlant des Programmes de garantie vendus par elle.

[27]           À ce titre, elle a des employés et un centre d’appel pour gérer les demandes des clients en lien avec les Programmes de garantie achetés par eux.

[28]           Par exemple, si une demande d’un client est couverte par un tel programme, TGW fera le nécessaire pour que le meuble, le matelas, l’appareil électroménager ou l’appareil électronique en cause soit réparé ou remplacé. Les coûts qui en résultent sont ainsi assumés par TGW. En d’autres termes, la gestion des Programmes de garantie par TGW engendre pour elle des dépenses annuelles d’exploitation.

[29]           En contre-interrogatoire, Physniak confirme que d’autres entités du Groupe The Brick opèrent dans le domaine de l’assurance. Par exemple, il y a la société Trans Global Insurance Corporation. Celle-ci évolue, entre autres, dans le domaine de l’assurance de biens et de dommages. Il y a aussi la société Trans Global Life Insurance qui évolue, notamment, dans les domaines de l’assurance-vie et de l’assurance invalidité.

[30]           Ces deux sociétés sont, par ailleurs, inscrites comme des compagnies d’assurance, ce qui n’est pas le cas pour TGW.

[31]           Physniak confirme que les Programmes de garantie vendus par TGW dans les magasins The Brick au Québec dont il est question dans la présente affaire sont essentiellement les mêmes que ceux qui étaient en cause devant les tribunaux de l’Alberta dans un dossier concernant la taxe de vente provinciale[4].

[32]           Physniak concède que les Programmes de garantie vendus par TGW dans les magasins The Brick au Québec contiennent un avis concernant la garantie légale prévue dans la Loi sur la protection du consommateur[5].

[33]           Physniak confirme que les provisions prises par TGW pour une année donnée à l’égard des revenus provenant de la vente des Programmes de garantie ne sont aucunement fonction d’une évaluation des réclamations qui pourrait être faite dans le futur aux termes de ces mêmes Programmes de garantie.

[34]           Le vérificateur de l’ARQ, Steve Lagrange (« Lagrange ») a témoigné. Il est détenteur d’un baccalauréat en sciences comptables et il travaille à l’ARQ depuis 2004. Lagrange est chef d’équipe d’une équipe en vérification depuis plus de huit ans.

[35]           Lagrange a préparé le rapport de vérification dans la présente affaire[6].

[36]           En contre-interrogatoire, Lagrange confirme qu’au moment de compléter le rapport de vérification il n’avait pas en mains les Programmes de garantie vendus par TGW. Ceux-ci n’ont été fournis qu’à l’étape de l’opposition.

[37]           Lagrange a conclu suivant son analyse que TGW ne pouvait être une société réputée exploiter une entreprise d’assurance au sens de l’article 817 L.I.

[38]           L’agente d’opposition, Audrey Jacques (« Jacques »), a également témoigné.

[39]           Elle a repris sommairement dans son témoignage les motifs qui l’ont amené à conclure comme elle l’a fait dans la décision sur opposition[7] :

[]

The assessment was made in accordance with the provisions of the law, more specifically, but without restricting the generality of the foregoing, in that the “Plans” offered by TransGlobal Warranty are “guarantee plans” and not “insurance policies”, and thus:

-          No deduction is allowed under section 150 of the Taxation Act («TA») in respect of guarantees or indemnities as per the first paragraph of section 152 of the TA;

-          TransGlobal Warranty is involved in the commerce of selling extended warranty plans and is not acting as an insurer selling insurance policies, and thus, cannot be granted the exception set out in the second paragraph of section 152 of the TA;

-          TransGlobal Warranty is not a party to an insurance contract or other arrangement of a particular class whereby it can reasonably be regarded as undertaking to insure other persons against loss, damage or expense of any kind, and thus, cannot be a corporation deemed to carry on insurance business as per section 817 of the TA;

[]

[citation intégrale]

QUESTION EN LITIGE

[40]           L’ARQ était-elle en droit de refuser pour l’année d’imposition 2013 la déduction d’un montant de 126 933 232 $ réclamé par TGW suivant l’alinéa 2 de l’article 152 L.I. à titre de provisions à l’égard de la partie non acquise à la fin de l’année d’imposition 2013 des primes perçues suivant la vente des Programmes de garantie?

ANALYSE ET DÉCISION

1) Position des parties

TGW

[41]           TGW est d’avis qu’elle est une société réputée exploiter une entreprise d’assurance suivant les termes de l’article 817 L.I.

[42]           Elle soutient en effet avoir été partie pendant l’année d’imposition 2013 à des contrats d’assurance ou à d’autres arrangements d’une catégorie particulière d’après lesquels elle peut raisonnablement être considérée comme entreprenant d’assurer d’autres personnes contre des pertes, dommages ou frais de toute nature.

[43]           Étant ainsi réputée exploiter une entreprise d’assurance, TGW est donc en droit de déduire suivant l’alinéa 2 de l’article 152 L.I., à titre de provisions dans le calcul de son revenu pour l’année d’imposition 2013, un montant qui n’excède pas le montant prescrit à son égard pour l’année.

[44]           Cette façon de faire de TGW ne serait pas nouvelle. Elle aurait en effet toujours préparé ses déclarations fiscales de façon constante et régulière en se conformant aux lois fédérale et provinciale sur la base qu’elle était en 2013 et qu’elle a toujours été assujettie au paragraphe 138(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu[8]  LIR ») et à l’article 817 L.I.[9].

ARQ

[45]           La position de l’ARQ est exposée dans sa défense[10].

II. LE DROIT APPLICABLE

[]

45.  La réponse à la question en litige repose principalement sur l’interprétation et l’application de l’article 152 LI;

46.  Il important de souligner que l’article 152 LI utilise distinctement les expressions « garanties » et « polices d’assurance » et prévoit un traitement fiscal différent pour chacune d’elles;

A. Le premier alinéa de l’article 152 de la LI

47.  Les dispositions du premier alinéa de l’article 152 LI sont clairs : aucune déduction n’est admise en vertu de l’article 150 LI à l’égard de garanties ou d’indemnités;

48.  Le secteur d’activité de la demanderesse est la vente de plans de garantie aux consommateurs qui ont acheté des biens de Warehouse et la demanderesse ne peut manifestement bénéficier des dispositions du premier alinéa de l’article 152 de la LI;

49.  Pour une entreprise qui offre des garanties prolongées à l’instar de la demanderesse, la dépense fiscale est plutôt permise à l’égard de frais découlant du remplacement ou de la réparation des produits défectueux;

B. Le deuxième alinéa de l’article 152 de la LI

50.  Le deuxième alinéa de l’article 152 LI énonce aucune déduction n’est pas plus admise en vertu de l’article 150 LI à l’égard de polices d’assurance, sauf exception;

51.  En vertu de l’exception prévue au deuxième alinéa de l’article 152 LI, un assureur peut déduire une déduction en vertu de l’article 150 LI dans le calcul de son revenu pour une année d’imposition provenant d’une entreprise d’assurance qu’il exploite, autre qu’une entreprise d’assurance sur la vie, un montant raisonnable, suivant des prévisions également raisonnables, qui n’excèderait pas le montant prescrit à son égard pour l’année;

52.  Le deuxième alinéa de l’article 152 LI s’applique a) à un assureur; b) dont le revenu provient d’une entreprise d’assurance; et c) duquel il peut déduire un montant raisonnable qui n’excède pas le montant prescrit à son égard pour l’année;

La notion d’assureur

53.  La demanderesse n’est pas constituée en tant que compagnie d’assurance;

54.  La demanderesse n’est pas une société qui exerce un commerce d’assurance au sens de l’article 1 LI;

55.  La demanderesse n’est pas une société réputée pour exploiter une entreprise d’assurance au sens de l’article 817 LI. En ce qu’elle n’est pas partie à un contrat d’assurance, ni à un autre arrangement, d’après lesquels elle peut raisonnablement être considérée comme entreprenant d’assurer d’autres personnes contre des pertes, dommages ou frais de toute nature;

56.  Plus précisément, la demanderesse est partie à des plans de garanties qui se rattachent principalement aux défectuosités de biens ou à leur mauvais fonctionnement, à leurs défauts de fabrication dans le cas des meubles, ou encore à certains types de salissures ou marques dans le cas des tissus et autres types de surfaces;

[]

[citation intégrale]

[46]           En somme, selon l’ARQ l’article 817 ne trouverait pas application en l’espèce. TGW ne saurait, en effet, être une société réputée exploiter une entreprise d’assurance au sens de cet article puisqu’elle est partie à des plans de garanties qui se rattachent principalement aux défectuosités de biens ou à leur mauvais fonctionnement, à leurs défauts de fabrication dans le cas des meubles, ou encore à certains types de salissures ou marques dans le cas de tissus et autres types de surfaces[11].

2) Cadre légal

Loi sur les impôts

1. […]

«assureur» signifie une société qui exerce un commerce d’assurance;

[]

150. Lorsque des montants visés au paragraphe a de l’article 87 ont été inclus dans le calcul du revenu provenant d’une entreprise du contribuable pour l’année ou pour une année antérieure, ce dernier peut déduire un montant raisonnable à titre de provision à l’égard:

a) de marchandises ou de services qui, suivant des prévisions raisonnables, devront être livrées ou rendus après la fin de l’année;

b) de périodes pour lesquelles le loyer ou d’autres montants relatifs à la possession ou à l’usage d’un terrain ou de biens meubles ont été payés d’avance; ou

c) de remboursements, en vertu d’arrangements ou d’ententes visés au sous-paragraphe ii du paragraphe a de l’article 87 qui, suivant des prévisions raisonnables, devront être faits après la fin de l’année sur remise ou revente au contribuable d’articles autres que des bouteilles.

[]

152. Aucune déduction n’est admise en vertu de l’article 150 à l’égard de garanties ou d’indemnités, à l’égard d’une obligation en matière de restauration, ou lorsqu’il s’agit d’une entreprise agricole et que le contribuable se sert de la méthode de comptabilité de caisse conformément à l’article 194.

Il en est de même des provisions à l’égard de polices d’assurance, sauf qu’un assureur peut déduire à ce titre, dans le calcul de son revenu pour une année d’imposition provenant d’une entreprise d’assurance qu’il exploite, autre qu’une entreprise d’assurance sur la vie, un montant qui n’excède pas le montant prescrit à son égard pour l’année.

[]

816. Toute société, mutuelle ou non, ci-après appelée «assureur», qui exploite au Québec, dans un but lucratif, une entreprise d’assurance d’une catégorie particulière au cours d’une année d’imposition doit calculer son revenu et son revenu imposable pour cette année conformément au présent titre.

817. Pour l’application de la présente partie, une société est réputée exploiter une entreprise d’assurance pendant une année d’imposition si, au cours de cette année, elle est partie à un contrat d’assurance ou autre arrangement d’une catégorie particulière d’après lesquels elle peut raisonnablement être considérée comme entreprenant:

a) d’assurer d’autres personnes contre des pertes, dommages ou frais de toute nature; ou

b) de payer des prestations d’assurance à d’autres personnes lors du décès d’une personne, à l’occasion d’un événement ou d’une éventualité inhérente à la vie humaine, pour une durée dépendant de la vie humaine ou à une date fixée ou déterminable dans l’avenir.

Il en est ainsi quelles que soient la forme et la portée de ce contrat ou arrangement, et même si les personnes visées sont membres ou actionnaires de la société.

[]

822. Les règles suivantes s’appliquent aux fins du calcul du revenu d’un assureur:

a) tout montant reçu aux termes ou en vertu d’un contrat ou arrangement mentionnés à l’article 817 est réputé être reçu dans le cours de l’exploitation de cette entreprise d’assurance;

b) son revenu doit, sauf dispositions au contraire dans le présent titre, être calculé conformément aux règles applicables au calcul du revenu aux fins de la présente partie;

c) tout revenu provenant des biens dévolus à l’assureur est réputé être son revenu;

d) tous les gains en capital imposables et pertes en capital admissibles résultant de l’aliénation de biens dévolus à l’assureur sont réputés être de tels gains ou pertes de l’assureur.[12]

[]

[47]           Le Tribunal reprend pour les fins du présent jugement le résumé présenté par TGW des dispositions législatives pertinentes[13] :

9. Les dispositions législatives se résument comme suit :

9.1  En vertu du paragraphe a) de l’article 87 L.I., un contribuable doit inclure dans le calcul de son revenu provenant pour une année d’imposition d’une entreprise tout montant qu’il reçoit pendant l’année dans l’exploitation d’une entreprise, même si ce montant lui est versé pour des services qui ne sont pas rendus avant la fin de l’année ou s’il peut être considéré comme n’ayant pas été gagné dans l’année ou dans une année antérieure.

9.2  Toutefois, l’article 150 L.I. prévoit que lorsque des montants visés au paragraphe a) de l’article 87 L.I. ont été inclus dans le calcul du revenu provenant d’une entreprise du contribuable pour l’année ou pour une année antérieure, ce dernier peut déduire un montant raisonnable à titre de provision à l’égard de services qui, suivant des prévisions raisonnables, devront être rendus après la fin de l’année.

9.3  Selon le premier paragraphe de l’article 152 L.I., aucune déduction n’est admise en vertu de l’article 150 L.I. à l’égard de garanties ou d’indemnités.

9.4  Toutefois, en vertu du deuxième paragraphe de cet article 152, cette restriction ne s’applique pas à l’égard d’un assureur, celui-ci pouvant déduire à titre de provision dans le calcul de son revenu pour une année d’imposition provenant d’une entreprise d’assurance qu’il exploite, un montant qui n’excède pas le montant prescrit à son égard pour l’année d’imposition.

9.5  En vertu de l’article 1, l’expression « assureur » signifie pour les fins de la Partie 1 de la L.I., une société qui exerce un commerce d’assurance.

9.6  L’article 817 prévoit que, pour les fins de la Partie 1 de la L.I., une société est réputée exploiter une entreprise d’assurance pendant une année d’imposition si, au cours de cette année, elle est partie à un contrat d’assurance ou autre arrangement d’une catégorie particulière d’après lequel elle peut raisonnablement être considérée comme entreprenant d’assurer d’autres personnes contre des pertes, dommages ou frais de toute nature; le deuxième paragraphe de cet article précise qu’il en est de même quelles que soient la forme et la portée de ce contrat ou arrangement.

9.7  Toutes les dispositions législatives mentionnées ci-dessus sont incluses à la Partie 1 de la L.I.

[citation intégrale]

[48]           Le Tribunal ajoute qu’une société réputée exploiter une entreprise d’assurance d’une catégorie particulière au cours d’une année d’imposition suivant l’article 817 L.I. doit calculer son revenu et son revenu imposable pour cette année conformément au Titre V – Sociétés d’assurance de la L.I.[14].

[49]           Par ailleurs, aux fins du calcul du revenu d’une société réputée exploiter une entreprise d’assurance, tout montant reçu aux termes ou en vertu d’un contrat ou arrangement mentionnés à l’article 817 L.I. est également réputé être reçu dans le cours de l’exploitation de cette entreprise d’assurance[15] et son revenu doit, sauf disposition contraire dans le Titre V - Sociétés d’assurance de la L.I., être calculé conformément aux règles applicables au calcul du revenu aux fins de la Partie I – Impôt sur le revenu de la L.I.[16].

[50]           Ainsi, dans la mesure où TGW est réputée exploiter une entreprise d’assurance, celle-ci doit se soumettre aux règles applicables au calcul d’un assureur pour tout montant reçu aux termes ou en vertu d’un contrat ou arrangement mentionnés à l’article 817 L.I.

[51]           Il est enfin acquis que TGW n’est pas une société qui exerce un commerce d’assurance. Elle n’est donc pas un assureur tel que le définit la L.I.[17].

3) Motifs de la décision

[52]           La question centrale ici consiste à savoir si TGW est, suivant l’article 817 L.I., partie à des contrats d’assurance ou à d’autres arrangements d’une catégorie particulière d’après lesquels elle peut raisonnablement être considérée comme entreprenant d’assurer d’autres personnes contres des pertes, dommages ou frais de toute nature, et ce, quelles que soient la forme et la portée de ces contrats ou arrangements.

[53]           En d’autres termes, les Programmes de garantie constituent-ils de tels contrats d’assurance ou autres arrangements au sens de l’article 817 L.I.?

[54]           L’ARQ soumet que non.

[55]           Voici les conclusions et les hypothèses de faits sur lesquels le ministre s’est fondé pour établir la cotisation en cause dans la présente affaire[18] :

[]

I.  les faits et circonstances ayant donné lieu à l’avis de cotisation

23.  En établissant la cotisation à l’égard de la demanderesse, la défenderesse s’est fondée, notamment, sur les conclusions et les hypothèses de faits ci-après énoncées;

24.  La demanderesse est une société résidente du Canada et constitue une société canadienne imposable;

25.  Warehouse, l’actionnaire majoritaire de la demanderesse, œuvre dans le commerce de gros et de détail de meubles de maison, d’appareils ménagers, d’appareils électroniques ainsi que de matelas et possède plusieurs établissements qui constituent l’ensemble des détaillants « The Brick » situés à travers le Québec;

26.  La demanderesse exploite une entreprise offrant des plans de garanties prolongées (« plans de garanties ») aux clients des magasins Warehouse qui achètent des électroménagers, des appareils électroniques, des meubles et des matelas;

27. Selon le registre des entreprises du Québec, le secteur d’activités de la demanderesse est décrit plus précisément comme étant « Sale of product warranties to customers of the Brick Warehouse LP »;

28.  Par ailleurs, au moment où la décision sur opposition était rendue en juin 2017, le site internet de The Brick Inc. contenait, notamment, les informations suivantes :

« Also part of The Brick Group is TransGlobal Service, which provides after-sales support to customers, and TransGlobal Insurance, which sells property and life insurance across Canada. TransGlobal Warranty Corp., meanwhile, administers our extended warranty programs. »

29.  Au cours de l’année d’imposition visée, la demanderesse a vendu des plans de garanties prolongées aux consommateurs qui ont acheté de Warehouse au Québec des appareils électroménagers, des appareils électroniques ou des meubles;

30.  Les plans de garanties prolongées sont vendus à ces consommateurs par l’intermédiaire des vendeurs des magasins Warehouse et les prix de vente ainsi perçus par les vendeurs le sont pour le compte de la demanderesse;

31.  La demanderesse a payé à The Brick inc. ou Warehouse les commissions afférentes à la vente des plans de garanties;

32.  La demanderesse n’est pas liée au fabricant des biens commercialisés par Warehouse;

33.  Les plans de garanties prolongées s’ajoutent à la garantie de base du fabricant;

34.  De plus, les plans de garanties couvrent généralement les risques pouvant découler de défauts de fabrication dans le cas des meubles et de certains types de salissures ou de marques dans le cas des tissus et autres types de surfaces;

35.  Selon le plan de garanties portant sur les électroménagers et les appareils électroniques, la demanderesse s’engage de réparer ou remplacer, à sa discrétion et à ses frais, le produit défectueux ou la ou les pièces défectueuses du produit et ce, sous certaines conditions, limites ou exclusions;

36.  Toujours à l’égard de ce plan de garanties, la responsabilité de la demanderesse se limite strictement aux services couverts par le plan et se dégage de toute responsabilité pour toute blessure corporelle, ou mortalité, ou dommages aux biens réels ou personnels, peu importe la cause, ainsi que toute perte ou dommage particuliers, accessoires et indirects;

37.  Le plan de garanties sur les électroménagers et les appareils électroniques peut être transféré au bénéfice d’un acquéreur subséquent;

38.  Par ailleurs, en vertu du plan de garanties pour taches et marques, la demanderesse s’engage à remplacer la partie tachée du produit acheté en cas d’inefficacité du protecteur de tissu appliqué et de l’inefficacité du produit nettoyant prescrits;

39.  En outre, les plans de garanties mentionnent généralement que celles-ci portent sur des risques reliés à l’usage normal du bien et non sur des bris reliés à un accident;

40.  Par ailleurs, certains des plans de garanties indiquent que la demanderesse se réserve le droit de ne pas honorer les garanties et qu’elle ne peut en être tenu responsable si le manquement à l’obligation est causé par des circonstances en dehors de son contrôle incluant, notamment, la non-disponibilité des pièces de remplacement, de composantes ou du produit, les grèves, les lockouts et le feu;

41.  Enfin, il appert que le détaillant a droit à un « remboursement » équivalent à cinquante pour cent (50%) du montant payé pour le plan de garanties lorsque celui-ci est versé par le détaillant à la demanderesse dans les dix (10) jours suivants sa perception;

42.  Clairement, les plans de garantie demeurent accessoires à la vente des biens de consommations par Warehouse;

[]

[citation intégrale]

[56]           Selon l’ARQ, les Programmes de garantie couvrent généralement les risques pouvant découler de défauts de fabrication ou de défectuosité du produit acheté par le client[19]. Il s’agit de garanties qui s’ajoutent à celle offerte par le fabricant[20].

[57]           L’ARQ reconnaît également, sous réserves de limites et exclusions, que les Programmes de garantie couvrent aussi les risques pouvant découler de certains types de salissures ou de marques dans le cas de tissus et autres types de surface[21].

[58]           TGW est de son côté d’avis que les Programmes de garantie constituent des contrats d’assurance ou d’autres arrangements tels que l’entend l’article 817 L.I.

[59]           Selon celle-ci, les Programmes de garantie qu’elle vend et auxquels elle est partie se composent de divers programmes, à savoir le programme de garantie sur les appareils électroménagers et électroniques; le programme de garantie pour taches et marques; le programme de couverture pour les meubles; le programme de couverture pour la fabrication de meubles; et le programme de couverture pour la surface[22].

[60]           Les Programmes de garantie, sous réserves de certaines conditions et exclusions, offrent des couvertures variant selon le type de produit, telles que[23] :

[]

a)  une protection contre la perte de nourriture;

b)  un crédit équivalent à la prime payée pour le programme si aucune réclamation n’a été présentée pendant la période de couverture;

c)  une protection pour les produits en bois endommagés accidentellement contre les taches d’eau, les marques de liquides, les taches de produits alimentaires, de boissons, d’encre, de cosmétiques et de vernis à ongles;

d)  une protection pour les biens meubles recouverts de tissu, de cuir ou de vinyle contre les taches accidentelles laissées par les produits alimentaires et les boissons, les lubrifiants domestiques, la salive d’êtres humains et d’animaux domestiques, l’urine, le sang et les taches accidentelles causées par l’encre des stylos à bille, les taches de cosmétiques, de vernis à ongles, de crayons et de marqueurs.

e)  une protection pour les matelas pour les taches accidentelles laissées par les produits alimentaires et les boissons, les lubrifiants domestiques, la salive, l’urine, les fluides gastriques et le sang d’êtres humains et d’animaux domestiques;

f)  une protection pour les biens meubles finis en cuir contre les brûlures, les perforations accidentelles, les coupures, les déchirures, l’écaillement du revêtement extérieur et le craquelage;

g)  la possibilité en cas de sinistre d’obtenir un service à domicile;

h)  la possibilité en cas de sinistre d’exiger que le service de réparation soit effectué à domicile ou que le remplacement y soit livré, et, partout au Canada;

i)  la possibilité en cas de sinistre d’obtenir le remplacement du produit plutôt que sa réparation; et

j)  une protection contre les pannes répétitives;

[…]

[citation intégrale]

[61]           Sous réserve de certaines conditions et exclusions, les Programmes de garantie mettent à la charge de TGW des frais de réparation ou de remplacement des produits couverts[24]. « Il s’agit toutes de protections ou avantages qui sont au risque de la demanderesse qui s’engage à prendre à sa charge des dommages et frais de différentes natures. Au surplus, plusieurs de ces protections ou avantages protègent les produits contre des endommagements accidentels et qui s’ajoutent aux obligations du fabricant en vertu de son devoir de garantir la qualité d’un produit. »[25].

[62]           Les Programmes de garantie sont donc selon TGW des contrats d’assurance ou encore d’autres arrangements d’une catégorie particulière d’après lesquels elle peut raisonnablement être considérée comme entreprenant d’assurer d’autres personnes contre des pertes, dommages ou frais de toute nature, quelles que soient la forme et la portée de ces contrats ou arrangements[26].

i- Contrat d’assurance

[63]           La L.I. ne définit pas ce qu’est un contrat d’assurance.

[64]           L’article 2389 du Code civil du Québec C.c.Q. ») définit le contrat d’assurance comme étant :

2389. Le contrat d’assurance est celui par lequel l’assureur, moyennant une prime ou cotisation, s’oblige à verser au preneur ou à un tiers une prestation dans le cas où un risque couvert par l’assurance se réalise.

[]

[65]           La Cour d’appel du Québec dans l’arrêt Association pour la protection des automobilistes inc. c. Toyota[27] a eu à se prononcer sur la nature d’un contrat de garantie supplémentaire permettant aux acheteurs de véhicules neufs de se protéger pour une période maximale de six ans contre les coûts associés à certains bris survenant au-delà de la garantie offerte par le fabricant.

[66]           La Cour d’appel avait donc dans cette affaire à déterminer si les parties étaient en présence d’une garantie conventionnelle au sens de l’article 152 de la Loi sur la protection du consommateur[28] L.P.C. ») ou plutôt s’il s’agissait d’un contrat de la nature d’une assurance qui par conséquent est exclu de l’application de la L.P.C.

[67]           Dans cet arrêt, la Cour d’appel énonce les principes permettant de distinguer le contrat de garantie supplémentaire du contrat d’assurance[29].

IV. De la difficulté de distinguer entre contrat de garantie supplémentaire et contrat d'assurance :

[58] En pratique, la distinction entre un contrat d'assurance et un contrat de garantie supplémentaire peut s'avérer difficile puisque dans les deux cas il y a versement d'une contrepartie pour obtenir une protection advenant un certain événement.

[59] Commentant cette difficulté, le professeur Jean-Guy Bergeron écrit dans Précis de droit des assurances, Sherbrooke, Les Éditions Revue de droit Université de Sherbrooke, 1996, p. 122 :

L'article 2389 C.c.Q. combine les anciens articles 2468 et 2469 C.c.B.C. Trois éléments sont donc toujours exigés pour être en présence d'un contrat d'assurance :

un risque;

le paiement d'une prime par l'assuré;

le versement d'une prestation par l'assureur.

D'autres contrats peuvent comporter ces trois éléments. La garantie rattachée à l'écoulement d'un bien ou d'un service en est un exemple. Si elle porte sur les risques découlant d'un défaut de fabrication, elle garde son caractère accessoire et constitue une simple garantie et non une assurance. Si au contraire, on entend garantir contre des risques non reliés à l'usage normal du bien, l'opération pourra en être une d'assurance. En somme, lorsque la protection contre un risque est l'objet principal d'un contrat, celui-ci est un contrat d'assurance.

(je souligne)

[60] Dans son ouvrage Les contrats d'assurances (terrestres), Tome 1, Les Éditions SEM inc., 1989, p. 129 et s., il avait écrit précédemment :

La définition du contrat d'assurance est donnée à l'article 2468 C. c. : « Le contrat d'assurance est celui en vertu duquel l'assureur, moyennant une prime ou cotisation, s'engage à verser au preneur ou à un tiers une prestation en cas de réalisation d'un risque ».

Cette définition est très générale et nous apprend qu'un contrat d'assurance, pour être qualifié tel, doit rassembler trois éléments essentiels, soit un risque, une prime, payée par l'assuré, et une prestation, fournie par l'assureur en cas de réalisation d'un risque. D'autres contrats peuvent lui ressembler. Il est opportun d'examiner ces traits communs, afin de pouvoir qualifier correctement ces autres contrats. Le régime juridique applicable est dépendant de cette qualification.

[…]

2. Le contrat d'assurance et les garanties

Les garanties dont nous parlons ici sont les garanties qui s'attachent aux biens dans le commerce : la garantie attachée à votre voiture, télévision, etc.

Les contrats de garantie réunissent les trois éléments essentiels du contrat d'assurance :

il y a un risque de dommage;

il y a une prime, habituellement intégrée dans le prix du bien : certains concessionnaires de voitures diminueront le prix de vente d'une voiture si vous renoncez à la garantie;

il y a une prestation : la prestation sera la remise en état du bien ou l'échange du bien pour un autre.

Au Québec, il y a peu de jurisprudence sur le sujet. Nous connaissons deux arrêts.

[…]

Nous croyons que la distinction faite par les tribunaux nous amène à ceci : certaines assumations de risques accessoires à un contrat d'écoulement des biens ou de services peuvent être des contrats d'assurance; quand on garantit un produit contre quelques risques que ce soit, il s'agit d'assurance; quand on garantit un produit contre les risques découlant de son défaut de fabrication, il s'agit d'une garantie.

Appliquons ce principe. Si le pneu que vous achetez est garanti contre tous les hasards de la route, il s'agit d'un contrat d'assurance. Si au contraire le pneu n'est garanti que pour les risques découlant d'un défaut de fabrication, il s'agit d'une garantie. D'ailleurs, il est normal qu'un bien ou un service puissent satisfaire les normes de sa finalité.

Évidemment, même dans le cas où il s'agirait d'une simple garantie, dans la mesure où l'assumation du risque est prise par un tiers, étranger à l'écoulement d'un bien ou du service, l'opération risque fort d'en être une qualifiée d'assurance. […]

(je souligne)

[61] Il existe donc une distinction importante : la garantie se rattache à une défectuosité du bien vendu et le garant a un intérêt économique dans l'achat du bien par un consommateur, comme c'est le cas du fabricant, du distributeur et du commerçant. Qui plus est, ces personnes ont l'obligation légale de garantir que le bien n'est pas affecté par un vice caché. Par contre, l'assurance est offerte par une partie qui n'est pas tenue de garantir la qualité du bien en raison de son rôle dans sa mise en marché et dont l'activité principale est la spéculation sur les risques.

[62] Il est par ailleurs possible de se trouver en présence d'un assureur qui offre une couverture équivalente à une garantie supplémentaire. En pareil cas, comme le soutient le président de l'OPC, le produit offert participe de l'assurance et échappe à la LPC. Par contre, lorsque le produit est offert par un commerçant dans le cadre de la mise en marché d'un bien qu'il distribue ou fabrique et ne consiste en réalité qu'à prolonger la garantie conventionnelle, il s'agit d'une garantie supplémentaire au sens de la LPC, régie par cette dernière.

[références omises] [citation intégrale]

[68]           La Cour d’appel a conclu qu’il s’agissait d’un contrat de garantie supplémentaire, entre autres, parce que celui-ci n’offrait comme bénéfice que la réparation du véhicule y décrit advenant une défectuosité; qu’il est offert par la filiale du manufacturier qui est aussi tenu de garantir le véhicule vendu contre les vices cachés; qu’il était subsidiaire à la garantie de base et qu’il était offert par une société qui n’était pas un assureur au sens de la Loi sur les assurances, mais un commerçant au sens la L.P.C.[30].

[69]           Il existe donc, selon la Cour d’appel, une distinction importante selon que l’assumation du risque est prise par une partie ayant un intérêt économique dans l’achat du bien par un consommateur, comme c’est le cas du fabricant, du distributeur et du détaillant ou encore par un tiers, étranger à l’écoulement du bien.

[70]           Ainsi, dans la première éventualité, il s’agirait d’un contrat de garantie et dans la seconde, d’un contrat d’assurance.

[71]           Cet arrêt nous enseigne également que même une simple garantie se rapportant à une défectuosité du bien vendu, offerte par une partie dont l’activité principale est la spéculation sur les risques et qui n’est pas tenue de garantir la qualité du bien en raison de son rôle dans sa mise en marché, serait un contrat d’assurance[31].

[72]           Dans le cas qui nous occupe, les Programmes de garantie, qui de surcroît ne se rapportent pas exclusivement aux défectuosités des biens vendus, sont offerts par une partie, en l’occurrence TGW, qui est étrangère à leur écoulement, qui n’est pas tenue de garantir leur qualité en raison de son rôle dans leur mise en marché et dont l’activité principale est la spéculation sur les risques. En ce sens, les Programmes de garantie doivent être considérés comme des contrats d’assurance au sens de l’article 2389 C.c.Q. et de l’article 817 L.I., et ce, nonobstant que TGW ne soit pas un assureur tel que défini dans la L.I.

[73]           TGW est donc réputée exploiter une entreprise d’assurance[32]. Les primes qui résultent de la vente des Programmes de garantie sont aussi réputées être reçues dans le cours de l’exploitation de cette entreprise d’assurance[33].

[74]           Le revenu de TGW doit ainsi, sauf disposition contraire dans le Titre V - Sociétés d’assurance de la L.I., être calculé conformément aux règles applicables au calcul du revenu aux fins de la Partie I – Impôt sur le revenu de la L.I.[34].

ii- Autre arrangement

[75]           Mais même si les Programmes de garantie ne constituaient pas des contrats d’assurance au sens de l’article 817 L.I., ceux-ci répondent nécessairement à la définition de l’expression « autre arrangement » contenue à cet article.

[76]           La Cour d’appel du Québec dans l’arrêt ARQ c. Des Groseillers[35] a récemment rappelé les principes applicables en matière d’interprétation des lois fiscales.

[49] L’interprétation de toute loi, y compris une loi fiscale, exige l’application de la méthode moderne d’interprétation législative. 

[50] Toutefois, « les considérations générales touchant l’objet de la loi [ne peuvent] se substitue[r] aux termes précis employés par le législateur ». En effet, « la nature particulière des lois fiscales et les caractéristiques de leurs structures souvent complexes expliquent pourquoi on a toujours mis l’accent sur la nécessité d’examiner attentivement le texte même » de celles-ci « de manière à permettre aux contribuables de se fonder sur celuici, sans risque d’erreur, pour exploiter leur entreprise et organiser leurs affaires fiscales ».

[51] Dans l’arrêt Placer Dome Canada Ltd. c. Ontario (Ministre des Finances), le juge LeBel explique l’application de ces principes :

[21]  Dans l’arrêt Stubart Investments Ltd. c. La Reine, [1984] 1 R.C.S. 536, notre Cour a rejeté l’approche restrictive en matière d’interprétation des lois fiscales et a statué que la méthode d’interprétation moderne s’applique autant à ces lois qu’aux autres lois. En d’autres termes, « il faut lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur » (p. 578) : voir l’arrêt 65302 British Columbia Ltd. c. Canada, [1999] 3 R.C.S. 804, par. 50. Toutefois, le caractère détaillé et précis de nombreuses dispositions fiscales a souvent incité à mettre davantage l’accent sur l’interprétation textuelle : Hypothèques Trustco Canada c. Canada, [2005] 2 R.C.S. 601, 2005 CSC 54, par. 11. Les contribuables ont le droit de s’en remettre au sens clair des dispositions fiscales pour organiser leurs affaires. Lorsqu’il est précis et non équivoque, le texte d’une loi joue un rôle primordial dans le processus d’interprétation.

[22]  Par contre, lorsque le texte d’une loi peut recevoir plus d’une interprétation raisonnable, le sens ordinaire des mots joue un rôle moins important et il peut devenir nécessaire de se référer davantage au contexte et à l’objet de la Loi : Trustco Canada, par. 10. De plus, comme la juge en chef McLachlin l’a fait remarquer au par. 47, « [m]ême lorsque le sens de certaines dispositions peut paraître non ambigu à première vue, le contexte et l’objet de la loi peuvent révéler ou dissiper des ambiguïtés latentes. » La Juge en chef a ensuite expliqué que, pour dissiper les ambiguïtés explicites ou latentes d’une mesure législative fiscale, « les tribunaux doivent adopter une méthode d’interprétation législative textuelle, contextuelle et téléologique unifiée ».

[23]  Le degré de précision et de clarté du libellé d’une disposition fiscale influe donc sur la méthode d’interprétation. Lorsque le sens d’une telle disposition ou son application aux faits ne présente aucune ambiguïté, il suffit de l’appliquer. La mention de l’objet de la disposition [TRADUCTION] « ne peut pas servir à créer une exception tacite à ce qui est clairement prescrit » : voir P. W. Hogg, J. E. Magee et J. Li, Principles of Canadian Income Tax Law (5e éd. 2005), p. 569; Shell Canada Ltée c. Canada, [1999] 3 R.C.S. 622. Lorsque, comme en l’espèce, la disposition peut recevoir plus d’une interprétation raisonnable, il faut accorder plus d’importance au contexte, à l’économie et à l’objet de la loi en question. Par conséquent, l’objet d’une loi peut servir non pas à mettre de côté le texte clair d’une disposition, mais à donner l’interprétation la plus plausible à une disposition ambiguë.

[24]  Bien qu’il existe une présomption résiduelle en faveur du contribuable, elle demeure seulement résiduelle et ne s’applique donc que dans le cas exceptionnel où les principes d’interprétation ordinaires ne permettent pas de régler la question en litige : NotreDame de BonSecours, p. 19. Tout doute concernant le sens d’une loi fiscale doit être raisonnable et la présomption ne peut être invoquée que si l’application des règles d’interprétation habituelles n’a pas permis de déterminer le sens de la disposition en cause. […]

[références omises] [citation intégrale]

[77]           Le libellé de l’article 817 L.I. démontre clairement la volonté du législateur de pas restreindre son application au contrat d’assurance émis par un assureur qui exerce un commerce d’assurance au sens défini dans la L.I.[36] Assureur »)[37].

[78]           En fait, c’est tout le contraire. L’article 817 L.I. créée justement une présomption légale pour les sociétés qui ne sont pas des Assureurs et il prévoit qu’à certaines conditions, celles-ci sont réputées exploiter une entreprise d’assurance.

[79]           Qui plus est, et contrairement à ce que semble soutenir l’ARQ, cette présomption trouve application au-delà des seuls contrats d’assurance dont l’objet se limite à offrir une garantie contre des risques non reliés à l’usage normal du bien et qui ne découlent pas d’un défaut de fabrication de celui-ci.

[80]           En effet, l’article 817 L.I. réfère à des contrats d’assurance. Il fait aussi mention de d’autres arrangements qu’elles qu’en soient la forme ou la portée, et ce, en autant que la société qui en est partie puisse raisonnablement être considérée comme entreprenant d’assurer d’autres personnes contre des pertes, dommages ou frais de toute nature.

[81]           Le libellé de l’article 817 L.I. est en ce sens très large. Les expressions qu’il contient : « autre arrangement »; « peut raisonnablement être considéré comme entreprenant d’assurer »; « frais de toute nature » et « quelles que soient la forme et la portée de ce contrat ou arrangement » en témoignent.

[82]           Il en va de même de son équivalent fédéral qui se lit comme suit[38] :

138 (1) Toute société, qu’il s’agisse ou non d’une mutuelle, qui, au cours d’une année d’imposition, a été partie à des contrats d’assurance ou à d’autres ententes ou rapports d’une catégorie particulière d’après lesquels il est raisonnable de considérer qu’elle a entrepris :

a) soit d’assurer d’autres personnes contre des pertes, dommages ou frais de toute nature;

[83]           Le langage ainsi adopté par le législateur fait en sorte qu’une société, autre qu’un Assureur, qui est partie à un contrat d’assurance ou à un autre arrangement d’une catégorie particulière d’après lesquels elle peut raisonnablement être considérée comme entreprenant d’assurer d’autres personnes contre des pertes, dommages et frais de toute nature devient assujettie à la présomption légale établit par l’article 817 L.I. L’application de cette présomption légale permet cependant à cette société de répartir son revenu sur plus d’une année d’imposition, ce qu’elle ne pourrait pas faire autrement, et ce, par un mécanisme de provisions à l’égard de la partie non acquise à la fin d’une année d’imposition des primes perçues au cours de cette même année d’imposition et ainsi de différer le paiement de l’impôt.

[84]           Cette mesure fiscale apparaît, par ailleurs, justifiée puisqu’elle s’inscrit parfaitement dans le principe d’appariement des revenus et des dépenses.

[85]           Les termes de l’article 817 L.I. sont précis et non équivoque. Ainsi en l’absence d’ambiguïté, il faut s’en remettre au sens clair de la disposition de manière à permettre à TGW de se fonder sur celle-ci pour exploiter son entreprise et organiser ses affaires fiscales.

[86]           Les Programmes de garantie, en plus d’offrir une protection se rapportant à des défectuosités du bien vendu, couvrent aussi certains risques (taches accidentelles, perte de nourriture) aux termes desquels TGW s’oblige à verser une prestation dans le cas où le risque couvert se réalise.

[87]           L’ARQ admet que les Programmes de garantie contiennent une couverture qui peut être assimilée à de l’assurance[39]. Elle est cependant d’avis que le volet assurance est trop limité pour conclure, dans l’ensemble, que les Programmes de garantie constituent des contrats d’assurance ou autres arrangements aux termes desquels TGW peut raisonnablement être considéré comme entreprenant d’assurer d’autres personnes contre des pertes, dommages ou autres frais de toute nature.

[88]           Pour l’ARQ, les Programmes de garantie sont à des années-lumière de contrats d’assurance type, comme une police d’assurance[40] et ils sont plutôt, pour elle, des contrats de garantie[41]. Le Tribunal comprend de ces affirmations de l’ARQ que l’assurance type à laquelle elle fait allusion serait de l’assurance qui garantit contre des risques non reliés à l’usage normal du bien et qui ne couvre pas les risques découlant d’un défaut de fabrication.

[89]           D’abord si le législateur avait voulu restreindre la portée de l’article 817 L.I. aux seuls contrats d’assurance ou autres arrangements assimilables à un contrat d’assurances type ou à une police d’assurance comme l’entend l’ARQ, il aurait pu le faire, mais il ne l’a pas fait. Ainsi, que le volet assurance soit infime au sens strict du terme, cela est sans conséquence aux fins de l’article 817 L.I.

[90]           Ce qui importe, c’est que la société qui est partie à un contrat d’assurance ou à un autre arrangement peut raisonnablement, aux termes de ce contrat ou de cet arrangement, être considérée comme entreprenant d’assurer d’autres personnes contre des pertes, dommages ou autres frais de toute nature.

[91]           Or TGW, qui rappelons-le, n’a pas d’intérêt économique dans l’achat du bien par le consommateur contrairement au fabricant, au distributeur et au détaillant et qui n’a pas d’obligation légale de garantir que le bien n’est pas affecté de vices cachés ou de défectuosités et dont l’activité principale est la spéculation sur les risques entreprend très certainement, aux termes des Programmes de garantie, d’assurer[42] (et non de garantir) ses clients contre des pertes, dommages et autres frais de toute nature, et ce, même si la couverture offerte se rattache à une défectuosité du bien vendu.

[92]           Mais, il y a plus.

[93]           Le libellé de l’article 817 L.I. ne restreint pas son application à une simple couverture d’assurance, c’est-à-dire où l’assureur ne garantit que contre des risques non reliés à l’usage normal du bien ou à un défaut de fabrication.

[94]           En effet, l’article 817 L.I. fait plutôt d’une personne morale entreprenant d’assurer d’autres personnes contre des pertes, des dommages et des frais de toute nature, une société réputée exploiter une entreprise d’assurance. Il s’agit là d’une formulation très large qui n’exclut d’aucune façon les risques pouvant découler de défauts de fabrication, de vices cachés ou de défectuosités du bien vendu.

[95]           Au risque de se répéter, si le législateur avait voulu restreindre la portée de l’article 817 L.I. quant à la nature des pertes, des dommages et des frais couverts, il aurait pu le faire, mais il ne l’a pas fait. Ainsi, que TGW entreprenne, aux termes des Programmes de garantie, d’assurer des pertes, des dommages et des frais découlant de défauts de fabrication, de vices cachés ou de défectuosités du bien vendu, cela apparaît sans conséquence aux fins de l’article 817 L.I.

[96]           Il appert, par ailleurs, que ce soit l’interprétation que l’ARQ en a faite dans la lettre d’interprétation 09-006887 datée du 4 juin 2009[43] où il était question de contrats de garantie de remplacement et de contrats de garantie mécanique auxquels était partie une société qui n’était pas un Assureur.

[97]           Il en serait de même de l’Agence du revenu du Canada. Celle-ci a reconnu, suivant une vérification des affaires fiscales portant sur les années d’imposition 1987 et 1988 de TGW, connu alors sous le nom The Brick Protection Corporation, qu’elle exploitait une entreprise d’assurance aux fins de la LIR[44].

[98]           La présomption légale prévue à l’article 817 L.I. trouve application en l’espèce et TGW est ainsi réputée au sens de cet article exploiter une entreprise d’assurance.

[99]           Enfin, l’ARQ a fait grand état de la décision de la Cour d’appel de l’Alberta dans l’arrêt The Brick Protection Corporation v. Alberta (Provincial Treasurer)[45] pour soutenir sa position et justifier la cotisation en cause en l’espèce.

[100]       Dans cette affaire, The Brick Protection Corporation, qui est aujourd’hui TGW, en appelait d’une cotisation aux termes de laquelle, la défenderesse, la province de l’Alberta, a établi qu’elle était une compagnie d’assurance au sens de l’« Alberta Corporation Tax Act » puisque les garanties vendues par celle-ci constituaient de l’assurance telle que définie par l’« Insurance Act »[46] de l’Alberta. De son côté, The Brick Protection Corporation soutenait alors que ses programmes de garantie n’étaient pas de l’assurance au sens de l’« Insurance Act » et qu’en conséquence elle n’était pas une compagnie d’assurance.

[101]       Voici comment le tribunal de première instance a exposé le litige qui lui était alors soumis[47].

[1] The Defendant, Alberta, assessed tax against the Plaintiff, the Brick Protection Corporation, under s. 87(1) of the Tax Statutes Amendment Act, SA 1987, c. 36,  arguing that the definition of insurance in s.1(k.1) of the Insurance Act, RSA 1985, c. I5 applies to the extended warranties sold by Brick Protection as an " undertaking by one person to indemnify another person against loss ... in respect of certain risk or peril to which the object of the insurance might be exposed, or to pay a sum of money or other thing of value on the happening of a certain event."  Brick Protection argues that warranties are not insurance, as insurance provides indemnity for an occurrence unrelated to product defect or failure, while conversely, protection from product defect and failure is the purpose of a warranty.  The Crown, on the other hand, argues that the distinction between insurance and warranties turns on who is offering the protection; if the manufacturer or retailer offers it, it is a warranty, but if anyone else offers it, it is insurance.

[102]       L’interprétation de l’« Insurance Corporation Tax Act » et de la définition du terme assurance contenue dans l’« Insurance Act » étaient au cœur de ce litige.

[103]       Le tribunal de première instance a conclu que les programmes de garantie vendus alors par The Brick Protection Corporation n’étaient pas de l’assurance au sens de l’« Insurance Act »[48] :

[50] As submitted by the Defendant, the Plans appear to contain (at least on a preliminary analysis) the elements of an indemnity insurance contract. However on a detailed analysis I find that the Plans fall within those categories of "near insurance" described by Brown and Menezes and are not contracts of insurance.

[104]       La Cour d’appel de l’Alberta a maintenu cette décision[49] :

[120] Interpreting s. 82(1) of the Insurance Corporations Tax Act and s. 1(k.1) of the Insurance Act “in their entire context and in their grammatical and ordinary sense harmoniously with the scheme of the Act, the object of the Act, and the intention of” the legislation, leads me to the conclusion that the legislation does not include extended warranties on products other than vehicles as “insurance”.

[121] For these reasons, the appeal should be dismissed. While I disagree with Gill J.’s reliance on the subsequent legislative history, his conclusion was otherwise reasonable.

[105]       Or cette décision n’est d’aucun secours à la position soutenue par l’ARQ.

[106]       La question qui nous occupe est tout autre et elle répond à des dispositions législatives différentes que les tribunaux albertains dans l’affaire The Brick Protection Corporation n’ont pas eu à considérer et qui n’ont évidemment pas fait l’objet d’une analyse par eux. En ce sens, l’affaire The Brick Protection Corporation à laquelle réfère l’ARQ n’est d’aucune application pour la présente cause.

[107]       À ce titre, le Tribunal reprend ci-après les représentations écrites soumises par TGW[50] :

[]

38. La cotisation de la défenderesse est essentiellement fondée sur l’arrêt de la Cour d’appel de l’Alberta dans la cause Brick Protection Corporation c. Alberta (Provincial Treasurer). Dans cette affaire, il s’agissait de savoir si Brick Protection (maintenant Trans Global Warranty) était une compagnie d’assurance pour les fins de l’Aberta Corporation Tax Act. Il est à noter que pour les fins de cette loi, l’expression « compagnie d’assurance » est définie comme « person or corporation carrying on in Alberta the business of insurance with the meaning of the Insurance Act ».

39. L’analyse quant à savoir si la demanderesse est réputée une société d’assurance au sens de la L.I. ne peut pas être tributaire d’une décision d’un tribunal de l’Alberta portant sur des dispositions législatives n’ayant aucune similarité avec les dispositions de l’article 817 L.I.

40. Le libellé de l’article 817 est beaucoup plus large que le texte législatif de la loi albertaine du fait que contrairement à la loi albertaine qui réfère tout simplement à la définition d’assureur se trouvant dans la loi sur les assurances, l’article 817 a pour effet de réputer des compagnies qui au sens ordinaire n’exercent pas une entreprise d’assurance, comme exerçant une entreprise d’assurance pour les fins de la Partie I de la L.I.

41. Plus particulièrement, l’article 817 ne requiert pas que la société, contrairement à la loi de l’Alberta, soit une société d’assurance au sens de la loi sur les assurances d’une province ou que la société ait un permis, une licence ou soit réglementée par les lois régissant les compagnies d’assurances.

42. À cet égard, lorsque l’intention du législateur québécois est que le contribuable soit régi à titre d’assureur, le texte de la L.I. l’indique clairement, comme c’est le cas à l’article 1166 de la L.I. À cet article, l’expression « société d’assurance » signifie, pour les fins de la Partie V de la L.I., un assureur au sens que donne à cette expression la Loi sur les assurances (chapitre A-32). Cette définition s’applique pour la Partie V de la L.I. et ne s’applique pas pour les fins de la Partie I de la L.I., qui est la partie pertinente pour les fins de ce dossier.

[]

[référence omise] [citation intégrale]

[108]       TGW a ainsi droit à la pleine déduction du montant de 126 933 232 $ réclamée par elle pour l’année d’imposition 2013 considérant que le calcul de ce montant, selon toute vraisemblance, ne fait pas l’objet du litige soumis au Tribunal, qu’aucune preuve n’a été administrée tendant à démontrer que le montant réclamée par TGW ait pu excéder le montant prescrit à son égard pour cette année d’imposition[51], que les procédures apparaissent muettes à ce sujet et que l’ARQ n’a, de toute façon, pas cotisé sur cette base.

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[109]       ACCUEILLE la demande introductive d’instance en appel d’un avis de cotisation émis en application de la Loi sur les impôts;

[110]       ANNULE l’avis de cotisation portant le numéro 1161 et la date du 22 octobre 2014 émis en application de la Loi sur les impôts pour l’année d’imposition 2013;

[111]       LE TOUT avec les frais de justice.

 

 

 

 

 

____________________

Gatien Fournier, J.C.Q.

 

Me Guy Poitras

Me Daniel Lacelle

Gowling WLG (Canada) S.E.N.C.R.L., s.r.l.

Avocats de la demanderesse

 

Me Normand Perreault

Larivière Meunier

Avocat de la défenderesse

 

Date d’audience :

Le 23 octobre 2019

 


[1]  RLRQ, c. I-3, telle que modifiée.

[2]  Transcription de l’audition du 23 octobre 2019, pages 24 et 25.

[3]  Transcription de l’audition du 23 octobre 2019, pages 20 à 22.

[4]  The Brick Protection Corporation v. Alberta (Provincial Treasurer), 2009 ABQB 744 (CanLII) et 2011 ABCA 214 (CanLII).

[5]  RLRQ, c. P-40.1.

[6]  Pièces P-6 et P-7.

[7]  Pièce P-3.

[8]  L.R.C. (1985), ch. 1 (5e suppl.), telle que modifiée.

[9]  Plan de plaidoirie de la demanderesse, para. 49.

[10]  Défense, par. 45 à 56.

[11]  Id., par. 55 et 56.

[12]  Art. 1 (définition d’assureur), 150, 152, 816, 817 et 822 L.I.

[13]  Plan de plaidoirie de la demanderesse, par. 9.

[14]  Art. 816 L.I.

[15]  Art. 822 a) L.I.

[16]  Art. 822 b) L.I.

[17]  Art. 1 L.I., définition d’« assureur ».

[18]  Défense, par. 23 à 42.

[19]  Id., par. 34 et 35.

[20]  Id., note 18, par. 33.

[21]  Id., note 18, par. 34 et 38.

[22]  Plan de plaidoirie de la demanderesse, par. 1 et Pièce P-4.

[23]  Plan de plaidoirie de la demanderesse, par. 21.

[24]  Id., par. 20.

[25]  Id., note 23, par. 22 et 23.

[26]  Id., note 23, par. 17.

[27]  2008 QCCA 761.

[28]  RLRQ, c. P-40.1.

[29]  Association pour la protection des automobilistes inc. c. Toyota, 2008 QCCA 761, par. 58 à 62.

[30]  Id., par. 32 et 63.

[31]  Id., note 29, par. 60 et 61.

[32]  Art. 817 L.I.

[33]  Art. 822 a) L.I.

[34]  Art. 822 b) L.I.

[35]  Agence du revenu du Québec c. Des Groseillers, 2021 QCCA 906.

[36]  Art. 1 L.I., définition d’assureur.

[37]  Cette expression peut être utilisée pour les fins du présent jugement au singulier ou au pluriel selon le besoin.

[38]  Art. 138(1) a) de la Loi de l’impôt sur le revenu.

[39]  Transcription de l’audition du 23 octobre 2019, p. 160, lignes 14 et ss et p. 165, lignes 3 et 4.

[40]  Id., p. 161, lignes 19 et 20.

[41]  Id., note 39, p. 164, lignes 5 et 6.

[42]  Association pour la protection des automobilistes inc. c. Toyota Canada inc., 2008 QCCA 761, par. 60 et 61.

[43]  Pièce P-5.

[44]  Pièce P-10.

[45]  2011 ABCA 214.

[46]  RSA 1985, c. I-5.

[47]  The Brick Protection Corporation v. Alberta (Provincial Treasurer), 2009 ABQB 744, par. 1.

[48]  Id., note 47, par. 50.

[49]  The Brick Corporation v. Alberta (Provincial Treasurer), 2011 ABCA 214, par. 120 et 121.

[50]  Plan de plan de plaidoirie de la demanderesse, par. 38 à 42.

[51]  Art. 152 L.I.

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