Décision

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Décision

9025-3501 Québec inc. c. Bordeleau

2014 QCRDL 28051

 

 

RÉGIE DU LOGEMENT

Bureau dE Joliette

 

No dossier :

163826 29 20140708 G

No demande :

1532005

 

 

Date :

08 août 2014

Régisseure :

Manon Talbot, juge administratif

 

9025-3501 Québec inc.

 

Locateur - Partie demanderesse

c.

Benoit Bordeleau

 

Locataire - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]      Le locateur demande la résiliation du bail et l'expulsion du locataire, le recouvrement du loyer (2 400 $) ainsi que le loyer dû au moment de l'audience, plus l'exécution provisoire de la décision malgré l'appel.

[2]      Le locateur demande de plus la résiliation du bail au motif que le locataire paie fréquemment son loyer en retard.

[3]      La demande a été signifiée par huissier.

[4]      Il s'agit d'un bail verbal à durée indéterminée renouvelé depuis décembre 2010 au loyer mensuel de 600 $, payable le premier jour de chaque mois.

[5]      La preuve démontre que le locataire doit 3 000 $, soit le loyer des mois d'avril, mai, juin, juillet et août 2014.

[6]      Le locataire admet devoir cette somme, mais il fait valoir en défense, qu'il ne paie pas son loyer car le locateur ne respecte pas ses obligations. Il réclame donc l'application de la défense d'exception d'inexécution prévue à l'article 1591 du Code civil du Québec.

[7]      Cet article prévoit en effet que :

« 1591.      Lorsque les obligations résultant d'un contrat synallagmatique sont exigibles et que l'une des parties n'exécute pas substantiellement la sienne ou n'offre pas de l'exécuter, l'autre partie peut, dans une mesure correspondante, refuser d'exécuter son obligation corrélative, à moins qu'il ne résulte de la loi, de la volonté des parties ou des usages qu'elle soit tenue d'exécuter la première. »

[8]      Le Tribunal ne peut retenir la défense du locataire. D’une part, il n’a jamais mis le locateur en demeure d’exécuter ses obligations et d’autre part, la retenue de loyer effectuée n’a pas été faite dans une mesure correspondante. De plus, tel qu’expliqué au locataire lors de l’audience, il ne peut se faire justice lui-même et décider de retenir son loyer de façon unilatérale. Dans les circonstances du présent dossier, le locataire devrait exercer les recours appropriés devant le Tribunal.


[9]      À l’audience, le locataire a remis un chèque au montant de 3 149 $ au mandataire du locateur représentant les loyers dus, les intérêts et les frais.

[10]   Cependant, le Tribunal a informé les parties que la remise d’un chèque ne constitue pas un paiement libératoire. Le locataire est donc en retard de plus de trois semaines dans le paiement du loyer, la résiliation du bail est donc justifiée par l’application de l’article 1971C.c.Q.

[11]   Le bail n'est toutefois pas résilié si le loyer dû, les intérêts et les frais sont payés avant jugement, conformément aux dispositions de l'article 1883 C.c.Q.

[12]   Sur le second motif de résiliation, en raison du loyer payé fréquemment en retard, le mandataire du locateur témoigne que les loyers de décembre 2013, janvier et février 2014 ont été encaissés au même moment, car les 3 chèques ont été remis par le locataire en février 2014.

[13]   Il en est ainsi pour les loyers de septembre, octobre et novembre 2013, lesquels ont été remis au locateur en novembre 2013.

[14]   De son côté, le locataire reconnaît que trois chèques ont été encaissés en même temps à deux reprises, tel qu’il le démontre au moyen de ses relevés bancaires.

[15]   Cependant, il fait valoir que le locateur retardait pour les encaisser.

[16]   Questionné par le Tribunal sur le mode de paiement pour la période du 1er juillet 2013 à ce jour, le locataire répondra qu’il a remis au mandataire du locateur en juin 2013, 12 chèques postdatés.

[17]   Le mandataire du locateur nie vigoureusement les allégations du locataire en faisant valoir que si tel avait été le cas, il aurait encaissé les chèques des loyers impayés des derniers mois. Il soutient que le locataire remet ses chèques au bureau ou à son épouse.

[18]   En réplique, le locataire se ravisera et précisera que la remise de 12 chèques postdatés a plutôt eu lieu l’année précédente, soit pour la période 2012-2013.

[19]   Finalement, il dira remettre son chèque de loyer le 30e ou le 31e jour du mois qui précède le loyer exigible.

[20]   Dans la présente affaire, vu la contradiction des témoignages, le Tribunal doit apprécier la crédibilité des intéressés.

[21]   L’article 2845 du Code civil du Québec prévoit ce qui suit :

« 2845.      La force probante du témoignage est laissée à l'appréciation du tribunal. »

[22]   En l’instance, le Tribunal conclut que le locataire n’a pas démontré de manière suffisante que ses paiements étaient effectués le premier jour de chaque mois, outre ceux réclamés dans la présente demande.

[23]   Le mandataire du locateur ayant démontré le préjudice sérieux occasionné par les fréquents retards du locataire à payer son loyer, il est en droit d’obtenir la résiliation du bail.

[24]   Cependant, le Tribunal considère qu'il y a lieu de surseoir à la résiliation du bail et d'y substituer une ordonnance selon l'article 1973 C.c.Q. :

« 1973.      Lorsque l'une ou l'autre des parties demande la résiliation du bail, le tribunal peut l'accorder immédiatement ou ordonner au débiteur d'exécuter ses obligations dans le délai qu'il détermine, à moins qu'il ne s'agisse d'un retard de plus de trois semaines dans le paie­ment du loyer.

                 Si le débiteur ne se conforme pas à la décision du tribunal, celui-ci, à la demande du créancier, résilie le bail. »

[25]   Le préjudice causé au locateur ne justifie pas l'exécution provisoire de la décision, comme il est prévu à l'article 82.1 L.R.L.


POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[26]   ORDONNE au locataire de payer son loyer le 1er de chaque mois;

[27]   RÉSILIE le bail et ORDONNE l'expulsion du locataire et de tous les occupants du logement;

[28]   CONDAMNE le locataire à payer au locateur la somme de 3 000 $, plus les intérêts au taux légal et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 C.c.Q., à compter du 8 juillet 2014 sur la somme de 2 400 $, et sur le solde à compter de l'échéance de chaque loyer, et ce, sous réserve de la bonification de l’encaissement du chèque remis au mandataire du locateur, plus les frais judiciaires de 79 $;

[29]   REJETTE la demande quant aux autres conclusions.

 

 

 

 

 

 

 

 

Manon Talbot

 

Présence(s) :

le mandataire du locateur

le locataire

Date de l’audience :  

5 août 2014

 


 

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