Décision

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Décision

Mohammed c. Choucair

2017 QCRDL 2329

 

 

RÉGIE DU LOGEMENT

Bureau dE Montréal

 

No dossier :

190060 31 20141218 T

No demande :

2136837

 

 

Date :

25 janvier 2017

Régisseure :

Linda Boucher, juge administrative

 

JUHARA SIED MOHAMMED

 

Locataire - Partie demanderesse

c.

Charles Choucair

 

Locateur - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]      La locataire demande la rétractation d’une décision rendue par le Tribunal le 14 novembre 2016 sur une demande du locateur déposée le 18 décembre 2014.

[2]      Cette décision, entre autres, condamne la locataire à payer au locateur 4 024,13 $.

[3]      Aux motifs de sa demande, la locataire fait valoir qu’elle n’a pas reçu l’avis d’audition qui la conviait au Tribunal le 26 octobre alors que la demande du locateur était entendue, et cela sans qu’il y ait faute de sa part.

[4]      La locataire fonde sa demande sur l’article 89 de la Loi sur la Régie du logement qui stipule ce qui suit :

89. Si une décision a été rendue contre une partie qui a été empêchée de se présenter ou de fournir une preuve, par surprise, fraude ou autre cause jugée suffisante, cette partie peut en demander la rétractation.

Une partie peut également demander la rétractation d'une décision lorsque la Régie a omis de statuer sur une partie de la demande ou s'est prononcée au-delà de la demande.

La demande de rétractation doit être faite par écrit dans les dix jours de la connaissance de la décision ou, selon le cas, du moment où cesse l'empêchement.

La demande de rétractation suspend l'exécution de la décision et interrompt le délai d'appel ou de révision jusqu'à ce que les parties aient été avisées de la décision.

[5]      La preuve démontre que la locataire a probablement déposé sa demande de rétractation de jugement dans le délai de 10 jours qui lui était imparti.

[6]      Plus avant, quant au motif de l’absence de la locataire devant le Tribunal le 26 octobre 2016, celle-ci affirme ne pas avoir reçu la demande du locateur.  Elle est cependant rapidement contredite par la représentante du locateur qui brandit un procès-verbal d’huissier démontrant la réception par celle-là, en main propre, de la demande en question.


[7]      Après vérification, il appert que tout au long des procédures, l’adresse de la locataire a été indiquée correctement aux diverses correspondances et à la décision.

[8]      Celle-ci maintient cependant ne pas avoir reçu l’avis d’audition du 15 août 2016.

[9]      La locataire révèle alors que du mois de juin au mois d’août 2016, elle se trouvait à l’extérieur du pays.  Un ami était chargé de recevoir son courrier et nul avis d’audition ne s’y trouvait à son retour après trois mois d’absence.

[10]   Livrant ensuite un sommaire de la défense qu’elle entendait faire valoir, elle affirme qu’elle n’est pour rien dans le bris de la porte de garage, mais que celle-ci s’est abattue inopinément sur le passage de son véhicule lui causant aussi des dommages.

[11]   La mandataire du locateur conteste la demande de la locataire et affirme que celle-ci était au courant de la tenue de l’audience, mais ne fournit aucune preuve au soutien de son affirmation.

[12]   Elle corrobore cependant que la locataire contestait sa responsabilité dans le bris de la porte du garage.

[13]   Dans la décision Lettrage Graphico-Tech inc. c. Quden inc., le juge François Marchand de la Cour du Québec écrit :

« [17] En matière de rétractation de jugement, il faut trouver un juste équilibre entre deux principes qui s'affrontent, soit celui de la stabilité des jugements rendus et celui du droit à une défense pleine et entière. Il est donc essentiel de déterminer si la négligence de la partie défenderesse de protéger adéquatement ses droits est excusable ou non. La jurisprudence la considère excusable lorsqu'elle a été en quelque sorte causée par des circonstances extérieures à la partie elle-même, soit parce qu'elle a été induite en erreur ou surprise par la partie adverse ou par des tiers dont elle ne répond pas. La situation est fort différente, lorsque la partie défenderesse a fait preuve d'un manque de sérieux flagrant dans la conduite de ses affaires, en ne faisant pas un suivi adéquat de son dossier. » (([1]))

[14]   L'article 16 du Règlement sur la procédure devant la Régie du logement établit une présomption de réception de l'avis d'audience par son destinataire.

[15]   Se prononçant sur la contestation de cette présomption de réception d'un avis d'audition, le juge Gérald Locas de la Cour du Québec opinait :

« (...) la Cour du Québec lui a accordé la permission d'en appeler de cette décision sur la question suivante :

« [1] La requérante devait-elle démontrer qu'elle n'avait pas reçu d'avis d'audition "à cause d'une erreur de la Régie" comme le mentionne la décision du régisseur. »

[2] À cette question, le Tribunal répond par la négative. L'appelante n'avait aucunement à établir que si elle n'avait pas reçu l'avis d'audition, c'était à cause d'une erreur de la Régie. Il lui suffisait de démontrer qu'elle n'avait effectivement pas reçu d'avis d'audition sans même avoir à en fournir une explication vu qu'il n'était pas question ici d'aveuglement volontaire. »  (([2]))

[16]   Après analyse, le Tribunal est convaincu par le motif invoqué par la locataire. D’une part, il apparait crédible qu’elle ait été absente du pays au moment de l’expédition de l’avis d’audition et qu’elle n’a pas reçu celui-ci.

[17]   Eu-t-elle été mise au courant de l’audition de la demande du locateur, qu’il parait évident qu’elle avait une défense raisonnable à faire valoir et qu’elle avait l’intention de s’y présenter pour la faire valoir.

[18]   Partant, le Tribunal juge que la locataire a fait valoir un motif sérieux pour ne pas avoir été présente au Tribunal le 26 octobre 2016 et fait droit à sa demande de rétractation de jugement.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[19]   ACCUEILLE la demande de rétractation;


[20]   RÉTRACTE la décision rendue le 14 novembre 2016;

[21]   DEMANDE au maître des rôles de convoquer à nouveau les parties pour enquête et audition au mérite de la demande originaire pour un demi-rôle. 

 

 

 

 

 

 

 

Linda Boucher

 

Présence(s) :

la locataire

la mandataire du locateur

Date de l’audience :  

21 décembre 2016

 

 

 


 

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