Décision

Les décisions diffusées proviennent de tribunaux ou d'organismes indépendants de SOQUIJ et pourraient ne pas être accessibles aux personnes handicapées qui utilisent des technologies d'adaptation. Visitez la page Accessibilité pour en savoir plus.
Copier l'url dans le presse-papier
Le lien a été copié dans le presse-papier

9412-9632 Québec inc. c. Brais

2024 QCTAL 15209

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Québec

 

No dossier :

763242 18 20240205 G

No demande :

4194487

 

 

Date :

03 mai 2024

Devant le juge administratif :

Philippe Morisset

 

9412-9632 Québec Inc

 

Locateur - Partie demanderesse

c.

Marie-Pier Brais

 

Sean Masfrand

 

Locataires - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]         Par une demande introduite le 5 février 2024, le locateur recherche la résiliation du bail et l’expulsion des locataires, la condamnation solidaire des locataires pour le recouvrement du loyer dû au moment de l’audience, le tout avec l’intérêt légal et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec, en plus de l’exécution provisoire de la décision malgré l’appel et du remboursement des frais.

[2]         Au soutien de sa demande, le locateur invoque que les locataires sont en retard de plus de trois semaines dans le paiement du loyer et qu’ils paient fréquemment leur loyer en retard.

CONTEXTE

[3]         Les parties sont liées par un bail pour la période du 1er juillet 2023 au 30 juin 2022 au loyer mensuel de 735 $, lequel a été reconduit jusqu’au 30 juin 2024 au loyer mensuel de 1 545 $[1].

[4]         Le bail ne stipule pas que les locataires sont solidairement responsables envers le locateur[2].

[5]         Pour la période du 1er juillet 2022 au 30 juin 2023, le loyer mensuel payable était de 1 500 $.

[6]         Le locateur réclame aux locataires un solde de loyer au montant de 75 $, selon la règle de l’imputation des paiements. Pour soutenir sa prétention, le locateur produit le relevé des virements pour la période de décembre 2022 au mois d’avril 2024[3].


[7]         Quant aux locataires, ceux-ci nient devoir un solde de 75 $. Ils prétendent avoir payé des montants supérieurs aux loyers exigibles, créant ainsi à leur bénéfice un solde créditeur au montant de 640 $[4].

[8]         Bien que le Tribunal ait invité les parties à discuter entre elles pour vérifier leurs chiffres et leurs conciliations des paiements, celles-ci ont refusé cette invitation.

[9]         Relativement aux retards fréquents, le locateur témoigne que les retards dans le paiement des loyers lui ont occasionné des problèmes économiques en raison du manque ou du peu de liquidités disponibles pour payer les frais afférents à l’immeuble.

[10]     En défense, les locataires admettent certains retards mais nient que ces situations ont occasionné au locateur un préjudice sérieux.

DÉCISION

[11]     Dans un premier temps, le Tribunal se doit de faire la conciliation des paiements allégués par les parties.

 

MOIS

MONTANT DU LOYER

PAIEMENT SELON LE LOCATEUR

PAIEMENT SELON LES LOCATAIRES

SOLDE

Décembre 2022

1 500 $

2 paiements de 750 $ les 8 et 22 décembre 

Total : 1 500 $

Aucune preuve de paiement

 

Janvier 2023

1 500 $

2 paiements de 750 $ les 5 et 26 janvier

Total : 1500 $

Aucune preuve de paiement

 

Février 2023

1 500 $

2 paiements de 750 $ les 2 et 16 février

Total : 1500 $

Aucune preuve de paiement

 

Mars 2023

1 500 $

1 paiement de 750 $ le 2 mars et 1 paiement de 500 $ le 16 mars

Total : 1250 $

Aucune preuve de paiement

Solde : 250 $

Avril 2023

1 500 $

3 paiements

-         200 $ le 4 avril;

-         300 $ le 4 avril;

-         575 $ le 14 avril.

Total : 1 075 $

Aucune preuve de paiement

Solde : 675 $

 

Mai 2023

1 500 $

2 paiements

-         500 $ le 15 mai;

-         250 $ le 15 mai.

Total : 750 $

Idem

Solde : 1 425 $

Juin 2023

1 500 $

3 paiements

-       1 000 $ le 2 juin;

-       1 250 $ le 15 juin;

-       1 250 $ le 30 juin.

Total : 3 500 $

Idem

Solde : - 575 $

Juillet 2023

1 545 $

1 paiement de 750 $ le 5 juillet

Idem

Solde :220 $

Août 2023

1 545 $

1 paiement de 1 500 $ le 1er août

Idem

Solde :265 $

Septembre 2023

1 545 $

2 paiements

-       1 000 $ le 1er sept.;

-       500 $ le 7 sept.

Total : 1 500 $

Idem sauf quant à un paiement de 45 $ le 7 septembre 2024

Solde selon le locateur : 310 $

Solde selon locataires : 265 $


Octobre 2023

1 545 $

1 paiement de 1 550 $ le 5 septembre.

Idem

Solde selon le locateur : 305 $

Solde selon locataires : 260 $

Novembre 2023

1 545 $

1 paiement de 1 550 $ le 20 novembre.

Idem

Solde selon le locateur : 300 $

Solde selon locataires : 255 $

Décembre 2023

1 545 $

2 paiements

-       1 000 $ le 14 déc.;

-       600 $ le 8c.

Total : 1 600 $

Idem

Solde selon le locateur : 245 $

Solde selon locataires : 200 $

Janvier 2024

1 545 $

Aucun paiement

Idem

Solde selon le locateur : 1790 $

Solde selon locataires : 1745 $

Février 2024

1 545 $

1 paiement de 3 100 $ le 22 février

Idem

Solde selon le locateur : 235 $

Solde selon locataires : 190 $

Mars 2024

1 545 $

1 paiement de 1 650 $ le 14 mars

Idem

Solde selon le locateur : 130 $

Solde selon locataires : 85 $

Avril 2024

1 545 $

1 paiement de 1 600 $

Idem

Solde selon le locateur : 75 $

Solde selon locataires : 30 $

 

[12]     Après analyse le Tribunal conclut donc que les locataires doivent au locateur un solde de 30 $ à titre de loyer impayé en date de l’audience.

[13]     En conséquence, les locataires ne sont pas en retard de plus de trois semaines dans le paiement de leur loyer.

[14]     La résiliation du bail en vertu de l’article 1971 du Code civil du Québec n’est donc pas justifiée.

[15]     Quant au deuxième motif résiliation du bail, soit en raison des retards fréquents dans le paiement du loyer, le locateur doit faire la preuve que les retards sont fréquents, qu'il en subit un préjudice et que ce préjudice est sérieux[5]. Le préjudice sérieux ne se limite pas à une question d'ordre économique ou pécuniaire. Celui-ci peut résulter également de l'alourdissement anormal de la gestion ou de la multiplication des démarches judiciaires antérieures pour percevoir le loyer[6]. Les simples inconvénients occasionnés par des retards ne constituent pas un préjudice sérieux.

[16]     En employant le terme sérieux, le législateur a imposé une preuve exigeante au locateur. La perception tardive d'un loyer crée en soi un préjudice. Cependant, pour justifier la résiliation d'un bail, il faut que ce préjudice soit plus grand que les simples inconvénients occasionnés par tout retard. Cette preuve ne peut donc uniquement se fonder sur une simple allégation. Le préjudice se doit d'être prouvé par une preuve documentaire, le cas échéant, et il doit être fondé sur des faits objectifs et précis.

[17]     Dans la présente affaire, le Tribunal conclut que la preuve soumise par le locateur est insuffisante pour démontrer, par prépondérance de preuve, que les retards des locataires lui ont causé un préjudice pouvant être qualifié de sérieux.

[18]     Ce motif de résiliation de bail est par conséquent rejeté.


POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[19]     ACCUEILLE en partie la demande;

[20]     CONDAMNE les locataires à payer au locateur la somme de 30 $, le tout avec intérêt légal et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec, en plus des frais au montant de 139,50 $.

 

 

 

 

 

 

 

 

Philippe Morisset

 

Présence(s) :

le mandataire du locateur

les locataires

Date de l’audience : 

11 avril 2024

 

 

 


 


[1] Voir Pièce P-1.

[2] Idem.

[3] Pièce P-2.

[4] Voir les Pièces L-1 à L-12.1 en liasse et qui concernent la période de mai 2023 à avril 2024.

[5] Allaire c. Boudreau, 2017 QCCQ 4963; FPI Boardwalk Québec Inc. c. Motera, 2020 QCCQ 1705; Co-op d'habitation La Petite cité (Montréal) c. Johnson, 2018 QCRDL 29865; Montréal (Office municipal d'habitation de) c. Nantel, 2006 QCCQ 4923.

[6] Idem.

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.