Décision

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A.T. c. R.

2023 QCCA 1018

COUR D’APPEL

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

GREFFE DE

 

QUÉBEC

 :

200-10-003828-212

(600-01-017164-190)

 

DATE :

9 août 2023

 

 

FORMATION :

LES HONORABLES

MARIE-FRANCE BICH, J.C.A.

MICHEL BEAUPRÉ, J.C.A.

GUY COURNOYER, J.C.A.

 

 

A… T...

APPELANT – accusé

c.

 

SA MAJESTÉ LE ROI

INTIMÉ - poursuivant

 

 

ARRÊT

 

 

MISE EN GARDE : Une ordonnance limitant la publication a été prononcée en vertu de l’article 486.4 C.cr. afin d’interdire la publication ou la diffusion de quelque façon que ce soit de tout renseignement qui permettrait d’établir l’identité de la victime ou d’un témoin.

[1]                L’appelant se pourvoit contre un jugement rendu le 22 décembre 2020 par la Cour du Québec, district de Rouyn-Noranda (l’honorable Marc E. Grimard), plus précisément à l’égard des déclarations de culpabilité sur 8 des 13 chefs d’accusation portés contre lui et des deux chefs sur lesquels le juge a ordonné l’arrêt conditionnel des procédures[1].

[2]                La Cour conclut que l’appel est bien fondé et qu’il y a lieu d’ordonner un nouveau procès sur les chefs 1 à 9 et 11.

[3]                Un résumé du contexte sera d’abord utile à la compréhension de ce dispositif et des raisons qui le sous-tendent.

Contexte

[4]                La plaignante et l’appelant se rencontrent en 2003. Elle est âgée de 16 ans et lui de 18 ans. Ils forment un couple peu de temps après et sont bénéficiaires de l’aide sociale. Ils emménagent à Val-d’Or en 2005. Dès cette époque, ils consomment beaucoup de drogues. Le juge retient cependant que, durant cette période et jusqu’en 2007, la relation va « relativement bien »[2].

[5]                Le 8 septembre 2007, une altercation survient, les évènements et leur cause ayant fait l’objet de versions contradictoires lors du procès. Il n’est toutefois pas contesté qu’à cette occasion, la plaignante reçoit du beurre chaud dans le cou et se rend à l’hôpital pour soigner ses brûlures. Selon la plaignante, après qu’elle eut prononcé des paroles dont elle ne se souvenait toutefois pas lors du procès, l’appelant, en colère, lui a lancé le beurre chaud qu’il était à faire fondre dans une poêle pour préparer un steak. Selon l’appelant, ils se disputaient parce qu’après environ trois jours de consommation soutenue, la plaignante ne voulait pas arrêter pour manger, contrairement à lui. C’est dans ce contexte qu’en colère, elle a saisi la poêle pour le frapper, qu’il a bloqué le coup avec son bras et que le beurre l’a éclaboussée.

[6]                L’appelant et la plaignante se séparent à la suite de cet évènement. Ils reprennent toutefois leur relation en 2010 et décident de s’établir dans un appartement à Rouyn-Noranda.

[7]                De 2011 à 2015, la plaignante, l’appelant et la mère de ce dernier résident ensemble dans un appartement de quatre pièces et demie dans cette même ville.

[8]                En 2015, le couple emménage dans l’une des unités d’un duplex. La mère de l’appelant réside dans l’autre unité. Vu la relation tendue entre la plaignante et sa belle-mère, le couple emménage quelques temps en 2018 dans une roulotte située à Cadillac, sur un terrain propriété du père de l’appelant et de ce dernier.

[9]                Le [...] 2017, X naît. Les tensions dans le couple s’aggravent par la suite et la consommation de drogues dures s’accroît.

[10]           En juillet 2018, un autre événement survient. Selon la plaignante, alors que les parties sont dans la roulotte, l’appelant la frappe au visage en présence de leur fils, après avoir découvert qu’un de ses outils, une pince, était brisé. Pour l’appelant, une querelle est plutôt survenue parce qu’il désapprouvait la consommation excessive de la plaignante. Fâchée, cette dernière l’aurait poussé, lui aurait lancé des objets et serait partie.

[11]           Puis, le 13 octobre 2018, l’appelant et la plaignante retournent chercher leur fils après une période de gardiennage chez la mère de cette dernière, qui habite à Blainville. Sur place, la plaignante et l’appelant consomment du crystal meth. Plus tard dans la journée, sur la route du retour vers l’Abitibi, à proximité de Mont-Tremblant, une autre altercation éclate. Selon le témoignage de la plaignante, l’appelant est en colère parce qu’il la soupçonne d’envoyer des messages textes à un autre homme et il la frappe de sa main droite alors qu’il conduit. Elle lui demande alors d’arrêter au bord de la route et de la laisser sortir du véhicule, ce qu’il refuse. Alors qu’elle entrouvre la portière et déboucle sa ceinture de sécurité pour exprimer le sérieux de sa demande, ajoute-t-elle, il l’aurait poussée hors du véhicule en marche. Elle subit plusieurs lésions cutanées et une plaie profonde au coude. L’appelant fait demi-tour et, puisque son enfant est encore dans le véhicule et qu’elle ne veut pas partir sans lui, explique-t-elle, elle remonte dans le véhicule. L’appelant présente pour sa part une version tout autre des événements, basée à nouveau sur les problèmes de consommation du couple, particulièrement de la plaignante, et selon laquelle cette dernière, intoxiquée, serait elle-même sortie du véhicule en marche, disant avoir peur de lui ou que les policiers découvrent le crystal meth dans la voiture s’ils les interceptaient. Interloqué de ce geste, il fait demi-tour, tente de calmer la plaignante, qui, au bout de quelques instants, remonte dans le véhicule.

[12]           À la suite de cet incident, et après un détour par une pharmacie pour soigner les blessures de l’appelante, les parties s’arrêtent dans un motel à Mont-Laurier pour y passer la nuit. Une relation sexuelle complète s’ensuit. La plaignante a témoigné ne pas y avoir consenti; quant à lui, l’appelant a admis ne pas lui avoir demandé si elle voulait faire l’amour, mais avoir cru qu’elle le désirait parce qu’elle venait de lui faire une fellation.

[13]           Le lendemain, la plaignante explique à l’appelant qu’elle souhaite prendre une pause, ce qu’il accepte. Sa mère vient la chercher à Mont-Laurier. Elle habitera chez cette dernière jusqu’en janvier 2019, alors qu’elle déménage en Beauce pour se rapprocher d’un homme qu’elle a commencé à fréquenter.

[14]           Quatre mois plus tard, la plaignante, qui veut donner une autre chance au couple et à l’appelant, le rejoint à Cadillac. Après quelques jours, elle retourne chez sa mère, mais fait par la suite des allers-retours fréquents pour se rendre chez l’appelant.

[15]           Environ trois mois plus tard, le 15 juillet 2019, alors que la plaignante dort dans le duplex où le couple est maintenant installé, l’appelant l’aurait réveillée en lui lançant de l’eau au visage et une autre dispute survient. Selon la plaignante, elle se rend dans la salle de bain pour s’essuyer. L’appelant l’y rejoint, la dispute se poursuit et l’appelant la pousse violemment au point où elle tombe à la renverse dans le bain et se blesse. Elle prend son fils, senfuit chez sa belle-mère où l’appelant la suit; elle retourne de leur côté du duplex par la porte arrière, qu’elle verrouille derrière elle avant de se rendre dans la chambre de son fils à l’étage pour ramasser ses choses et l’emmener avec elle. Toujours selon la plaignante, l’appelant s’y présente et la menace avec un marteau. La mère de ce dernier arrive elle aussi et prend l’enfant. L’appelant dépose le marteau et elle en profite pour se sauver. Dans sa fuite, elle tombe dans les escaliers, puis quitte en auto pour se rendre chez une amie. Selon l’appelant, la plaignante s’était couchée intoxiquée après une période prolongée de consommation et sans avoir dormi depuis quelques jours. Inquiet parce qu’elle cesse parfois de respirer, il tente de la réveiller, mais ne réussit pas, d’où son recours à l’eau dans le visage. En colère, elle se rend dans la salle de bain, dont elle verrouille la porte. Entendant un bruit de chute, il réussit à ouvrir la porte et constate qu’elle n’y est plus; elle est sortie par la fenêtre de cette pièce pour accéder au balcon et entrer dans l’unité de sa belle-mère, où il se rend. La plaignante serait ensuite revenue dans leur unité en verrouillant la porte de l’intérieur. Alerté par sa mère, l’appelant aurait forcé la porte arrière avec un marteau qui se trouvait avec d’autres outils dans la véranda arrière, serait monté à l’étage et aurait déposé le marteau sur un bureau dès son entrée dans la chambre où se trouvait la plaignante en état de panique, avec leur fils, et criant « Ils veulent me tuer ». Il tente de la calmer, mais en vain. La plaignante sort de la chambre en emmenant son fils, mais trébuche dans les escaliers. La mère de l’appelant, alors présente, récupère le petit et la plaignante quitte, puis revient pour prendre ses clés d’auto et repart.

[16]           À la suite de cet événement, les parties portent plainte l’une à l’égard de l’autre et sont assujetties à des conditions, dont celle de ne pas communiquer entre elles.

[17]           La plaignante va vivre chez sa mère quelques semaines, puis retourne à nouveau à Rouyn-Noranda avec l’appelant, où, le 3 septembre 2019, survient la dernière série d’événements en litige.

[18]           Selon la plaignante, après s’être injecté de la cocaïne tard dans la nuit, l’appelant commence à croire qu’elle lui a volé de la drogue et devient agressif. Alors qu’elle sort et tente de partir avec sa voiture, l’appelant l’en empêche, lui donne un coup de poing au visage et la tire en dehors du véhicule. La plaignante s’enfuit à pied vers un bar qui se trouve à proximité et entend derrière elle l’appelant qui la menace de sévices physiques. Le propriétaire du bar lui ouvre la porte même si l’établissement est fermé et la conduit à l’hôpital, à sa demande. Par la suite, elle appelle l’appelant pour aller récupérer sa voiture et son cellulaire. Ce dernier l’informe alors que la police la cherche et suggère qu’ils se rejoignent dans un appartement où réside un ami dénommé C.... Ils s’y rendent, discutent de l’incident, puis la plaignante indique vouloir partir; l’appelant, selon elle, l’empêche de partir, l’étrangle, puis l’emmène dans une chambre où, sur le lit, il lui assène plusieurs coups de poing et de tête. Il pleure ensuite, craignant de perdre son fils; elle le console, il consomme de la cocaïne et ils retournent ensemble au duplex.

[19]           Au procès, l’appelant a présenté une autre version. Lui-même n’avait rien consommé, contrairement à la plaignante qui, à un certain moment, jette un mouchoir. Il lui demande s’il contenait de la méthamphétamine. La tension monte, la plaignante sort pour quitter avec son véhicule mais, voyant que l’appelant vient la rejoindre, elle fuit à pied vers le bar situé tout à proximité. Il ne la suit pas et rentre au duplex. Plus tard, des policiers se présentent chez lui et le questionnent sur la présence du véhicule de la plaignante toujours en marche. Cette dernière l’appelle sur ces entrefaites et, vu la présence des policiers, lui propose de la rejoindre à l’appartement de C.... Rendus là, la plaignante, en état de paranoïa, veut consommer, ce qu’ils font ensemble sur place après discussion, avant de repartir au duplex.

[20]           La plaignante quitte l’appelant pour de bon le 19 septembre 2019. Elle se rend dans une maison d’hébergement avec son fils. À la suite de son départ, l’appelant lui envoie plusieurs textos et l’appelle, et ce, malgré la condition à laquelle il est toujours assujetti de ne pas communiquer avec elle.

[21]           Le 1er octobre 2019, l’appelant est arrêté et comparaît au Palais de justice de Rouyn-Noranda pour faire face aux 13 chefs d’accusation suivants, dont la Cour précise les circonstances sous-jacentes pour plus de commodité :

Événement du 8 septembre 2007 – Brûlures en raison du beurre fondu

1. Le ou vers le 8 septembre 2007, à Val-d’Or, district de l’Abitibi, s’est livré à des voies de fait contre D.G. et lui a infligé par là des lésions corporelles, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 267b) du Code criminel.

Événement de juillet 2018 – Voies de fait dans la roulotte

2. Entre le 1er janvier 2010 et le 3 septembre 2019, à Rouyn-Noranda, district de Rouyn-Noranda, s’est livré à des voies de fait contre D.G., commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 266a) du Code criminel.

Événements du 13 au 14 octobre 2018 – Sur la route du retour entre Blainville et Rouyn-Noranda : voies de fait, chute du véhicule en marche à Mont-Tremblant et agression sexuelle à Mont-Laurier,

3. Le ou vers le 13 octobre 2018, à Mont-Tremblant, district de Terrebonne, a commis des voies de fait graves contre D.G., en mettant sa vie en danger, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 268 du Code criminel.

4. Le ou vers le 13 octobre 2018, à Mont-Laurier, district de Labelle, a agressé sexuellement D.G., commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 271a) du Code criminel.

5. Le ou vers le 13 octobre 2018, à Mont-Tremblant, district de Terrebonne, s’est livré à des voies de fait contre D.G. et lui a infligé par là des lésions corporelles, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 267b) du Code criminel.

Événements du 15 juillet 2019 – Chicane, voies de fait et menaces avec le marteau dans le duplex de Rouyn-Noranda

6. Le ou vers le 15 juillet 2019, à Rouyn-Noranda, district de Rouyn-Noranda, s’est livré à des voies de fait contre D.G. et lui a infligé par là des lésions corporelles, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 267b) du Code criminel.

7. Le ou vers le 15 juillet 2019, à Rouyn-Noranda, district de Rouyn-Noranda, s’est livré à des voies de fait contre D.G., alors qu’il menaçait d’utiliser une arme, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 267a) du Code criminel.

Événements du début septembre 2019 – Fuite de la plaignante vers le bar, menaces, séquestration et voies de fait dans l’appartement de C...

8. Le ou vers le 3 septembre 2019, à Rouyn-Noranda, district de Rouyn-Noranda, a commis des voies de fait graves contre D.G., en mettant sa vie en danger, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 268 du Code criminel.

9. Le ou vers le 3 septembre 2019, à Rouyn-Noranda, district de Rouyn-Noranda, a séquestré, emprisonné ou saisi de force D.G., commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 279(2)a) du Code criminel.

10. Le ou vers le 3 septembre 2019, à Rouyn-Noranda, district de Rouyn-Noranda, a sciemment proféré une menace de causer la mort ou des lésions corporelles à D.G., commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 264.1(1)a)(2)a) du Code criminel.

11. Le ou vers le 3 septembre 2019, à Rouyn-Noranda, district de Rouyn-Noranda, s’est livré à des voies de fait contre D.G. et lui a infligé par là des lésions corporelles, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 267b) du Code criminel.

Événements de septembre 2019 – Appels et textos harcelants à la plaignante par l’appelant

12. Entre le 4 septembre 2019 et le 25 septembre 2019, à Rouyn-Noranda, district de Rouyn-Noranda, a agi à l’égard de D.G., dans l’intention de la harceler ou sans se soucier qu’elle se sente harcelée, en posant un acte interdit prévu à l’alinéa  264(2)               du Code criminel, ayant pour effet de lui faire raisonnablement craindre pour sa sécurité ou celle d’une de ses connaissances, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 264(1)(3)a) du Code criminel.

13. Entre le 16 juillet 2019 et le 25 septembre 2019, à Rouyn-Noranda, district de Rouyn-Noranda, a omis de se conformer à une condition d’une promesse remise à un agent de la paix ou à un fonctionnaire responsable, soit : s’abstenir de communiquer directement ou indirectement avec D.G. ou se rendre à son lieu de travail/résidence si ce n’est pas en conformité avec les conditions suivantes : échange de la garde d’enfant au besoin, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 145(5.1)a) du Code criminel.

[22]           Le procès se tient les 15, 16 et 17 juillet 2020 et se poursuit les 8 et 11 septembre 2020. Cinq témoins sont entendus (soit la plaignante, l’appelant, leur mère respective et le propriétaire du bar), des pièces et cinq déclarations écrites et vidéos de chacune des parties sont produites. À cette dernière date, le juge reporte le dossier au 14 octobre 2020 pour jugement. Quelques semaines plus tard, il demande aux avocats de déposer des plaidoiries écrites.

[23]           Le 22 décembre 2020 le juge rend le jugement entrepris, oralement.

Le jugement entrepris

[24]           Le juge reprend d’abord les chefs d’accusation[3], puis amorce l’historique de la relation entre les parties de la façon suivante :

Alors, ce sont les chefs d’accusation qui ont été déposés. Maintenant, je prends les… la plaidoirie écrite de maître Jacob [i.e. l’avocate du ministère public] qui, en somme, cerne le portrait de la relation entre monsieur T... et sa conjointe du temps[4].

[Le texte entre crochets est de la Cour]

[25]           Après avoir ainsi résumé la relation entre les parties entre 2003 et la rupture en 2019, le juge mentionne les dates des déclarations écrites et vidéos des parties[5], soulignant au passage le plaidoyer de culpabilité de l’appelant, en 2008, à une accusation de possession de drogue dans le but de trafic, son emprisonnement et la reprise par la plaignante de ses études pour terminer son secondaire V[6]. À noter que le juge reprend aussi oralement les extraits correspondants de la plaidoirie écrite du ministère public[7].

[26]           Le juge résume ensuite la preuve et les témoignages entendus, en débutant ainsi :

Alors, comme je vous dis, je reprends les termes de… de la plaidoirie, mais ensuite, on va venir au procès avec les différents témoignages qu’on a eus.[8]

[27]           Puis, avant de procéder au résumé des témoignages entendus, le juge mentionne l’admission que la déclaration vidéo de l’appelant fut donnée librement et volontairement, que la chaîne de possession de certaines pièces est admise, puis identifie les témoins entendus et la preuve documentaire produite de part et d’autre[9]. La comparaison de cette section du jugement avec la plaidoirie écrite de l’intimé permet de constater que le juge, à nouveau, répète mot pour mot certains extraits de cette dernière[10].

[28]           Le juge résume ensuite la teneur des cinq témoignages administrés[11], en commençant par celui de la plaignante, notant, relativement à certains des évènements qui ont donné lieu aux accusations, que la version de l’appelant est toute autre[12]. En fait, la suite du résumé des témoignages et le dossier d’appel révèlent que les versions des parties ne concordent en rien quant aux éléments essentiels de chacune des infractions.

[29]           Puis, le juge débute la section de son jugement que l’on comprend être son analyse de la preuve. Il aborde d’emblée de la façon suivante la question cruciale de la crédibilité et de la fiabilité de la version des événements présentée par l’appelant :

Selon la Poursuite, la version de l’accusé doit être rejetée. D’abord, est-ce que le Tribunal doit croire l’accusé? La réponse à cette question ne peut être… ne peut être… ne peut qu’être à la négative. Les mots suivants résument bien le témoignage de l’accusé : réticences, imprécisions, invraisemblances, contradictions et manques de transparence.

Commençons par souligner que le témoignage de l’accusé fut des plus ardus, difficile à suivre, mais également difficile à diriger. En effet, tant en interrogatoire principal, qu’en contre interrogatoire, monsieur T... avait la fâcheuse habitude de ne pas répondre aux questions posées, et ce, malgré de nombreuses interventions des avocats et du Tribunal lui demandant de répondre aux questions.

Il était constamment nécessaire de poser des questions jusqu’à l’accusé [sic] y réponde. Son propre avocat n’a eu d’autre choix que de poser des questions plus directives, voire suggestives, afin d’éviter les débordements.[13]

[30]           De façon révélatrice, la section « APPRÉCIATION DES TÉMOIGNAGES » du plan de plaidoirie écrite de l’intimé, concernant plus particulièrement le témoignage de l’appelant, débute ainsi :

D’abord, est-ce que le Tribunal doit croire l’accusé? La réponse à cette question ne peut qu’être à la négative. Les mots suivants résument bien le témoignage de l’accusé : réticence, imprécision, invraisemblance, contradictions et manque de transparence.

Commençons par souligner que le témoignage de l’accusé fut des plus ardus, difficile à suivre, mais également difficile à diriger. En effet, tant en interrogatoire principal, qu’en contre interrogatoire, Monsieur T... avait la fâcheuse habitude de ne pas répondre aux questions posées, et ce malgré les nombreuses interventions des avocats et du Tribunal lui demandant de répondre aux questions.

Il était constamment nécessaire de poser les questions jusqu’à ce que l’accusé y réponde. Son propre avocat n’a eu d’autre choix que de poser des questions plus directives, voire suggestives, afin d’éviter les débordements.[14]

[31]           Le juge poursuit son analyse de la crédibilité de l’appelant avec certaines observations qui paraissent davantage de son cru et qui concernent certains aspects de la vie de ce dernier. Nous y reviendrons lors de l’analyse des questions en litige.

[32]           Au bout du compte, le juge acquitte l’appelant du chef 10 et le déclare coupable des chefs 1 à 4, 6 à 9 et 12 et 13 précités. Il prononce par ailleurs un arrêt conditionnel des procédures sur les chefs 5 (vu la déclaration de culpabilité sur le chef 3) et 11 (vu la déclaration de culpabilité sur le chef 8) afin d’éviter les condamnations multiples, sans toutefois en avoir préalablement déclaré l’appelant coupable[15]. De plus, le chef 11 (voies de fait causant des lésions corporelles) concerne un évènement distinct (le prétendu étranglement dans l’appartement de C...) et survenu temporellement avant celui à la base du chef 8 (voies de fait graves; les coups de poing et de tête prétendument assénés plus tard à la plaignante dans la chambre de l’appartement) ayant entraîné l’arrêt conditionnel. La procureure de l’intimé l’a d’ailleurs fait remarquer au juge lors du prononcé de l’arrêt conditionnel sur le chef 11, comme on le verra aussi plus après.

Les questions en litige

[33]           L’appelant formule les trois questions en litige suivantes dans son mémoire :

-          Le juge a-t-il été juste dans l’appréciation des témoignages?

-          Le juge a-t-il omis de procéder à l’analyse de la crédibilité des témoins?

-          Le juge a-t-il suffisamment motivé sa décision?

Analyse

[34]           Comme le révèle notamment l’argumentation des parties, l’analyse des questions en litige telles que formulées par l’appelant fait ressortir des dénominateurs communs qui permettent de sceller le sort de l’appel sans nécessité de procéder à un examen des moyens question par question.

-          Certains principes

[35]           Dans l’arrêt Sheppard, la Cour suprême soulignait que les motifs revêtent une importance particulière lorsque le juge doit démêler des éléments de preuve embrouillés et contradictoires sur une question clé[16].

[36]           Dans la même veine, la Cour renchérissait récemment en rappelant « l’importance centrale » de la question de la crédibilité des témoins dans les affaires de nature sexuelle le juge fait face à des versions contradictoires, de même que la nature de sa tâche dans de telles circonstances :

[10] En matière d’infraction à caractère sexuel, comme en l’espèce, où la preuve est constituée essentiellement de témoignages contradictoires, l’appréciation de la crédibilité des témoins revêt une importance centrale. Il est bien établi qu’en pareilles circonstances, la juge d’instance ne peut choisir la version qu’elle estime être la plus crédible et écarter de ce fait les témoignages à l’effet contraire. Même si la juge ne croit pas l’accusé, elle doit néanmoins examiner la preuve dans son ensemble afin de déterminer si le ministère public a satisfait son fardeau de prouver sa culpabilité hors de tout doute raisonnable.[17]

[Soulignements ajoutés; renvois omis]

[37]           L’appréciation de la crédibilité des témoins et des versions contradictoires revêt un degré d’importance accru en l’espèce, alors que le procès ne concernait pas uniquement une agression sexuelle survenue à un moment déterminé dans le temps, mais 12, voire 13, événements distincts, survenus en 2007, puis au cours des années 2018 et 2019, sur certains desquels plus d’un témoin a donné sa version.

[38]           Cela étant, la Cour est fort consciente de la difficile tâche qui incombe aux juges dinstance en matière criminelle, laquelle découle non seulement des drames humains et des affaires délicates dont ils sont fréquemment saisis, mais aussi d’un fort volume de dossiers et de ressources trop souvent limitées. Il est raisonnable de penser que c’est manifestement ce à quoi référait en peu de mots la juge Karakatsanis dans l’arrêt R. c. G.F.[18] lorsqu’elle notait que « les juges présidant des procès sont occupés »[19]. Néanmoins, une tâche judiciaire difficile et délicate n’autorise pas un juge à choisir des raccourcis lorsque la difficulté augmente, au contraire[20]. Une justice criminelle garante de la confiance du public, en faveur duquel l’obligation de motiver est établie[21], commande non seulement qu’il paraisse que justice a été rendue, mais que les justiciables, et les accusés en particulier, ne doutent pas que le juge saisi d’une affaire a apprécié les témoignages et la crédibilité des témoins de façon judiciaire, c’est-à-dire de façon rigoureuse, impartiale et à l’abri de toute influence indue. La facture générale du jugement entrepris ne satisfait pas ces exigences.

[39]           La Cour n’ignore pas non plus que les juges d’instance ne sont pas tenus à un standard de perfection dans l’expression, écrite ou orale, de leurs motifs[22]. De même, les juges sont censés connaître le droit qu’ils appliquent tous les jours[23], la démarche d’analyse de versions contradictoires issue de l’arrêt R. c. W.(D.)[24] n’est pas « sacro-sainte »[25] et les décisions du juge du procès relatives à la crédibilité commandent un degré élevé de déférence[26]. Ainsi, lorsque la Cour examine les motifs pour déterminer s’ils sont suffisants, il importe de les considérer globalement, « dans le contexte de la preuve présentée, des arguments invoqués et du procès, en tenant compte des buts ou des fonctions de l’expression des motifs »[27], ces buts étant atteints si les motifs, considérés dans leur contexte, indiquent pourquoi le juge a rendu sa décision[28].

[40]           Quant à la suffisance des motifs sur le plan des faits, même si le juge du procès s’est mal exprimé, une cour d’appel qui comprend le « résultat » et le « pourquoi » à partir du dossier peut expliquer le fondement factuel de la conclusion à la partie lésée[29].

[41]           Ces principes et mises en garde connus ne suffisent toutefois pas à mettre le jugement entrepris à l’abri d’une intervention. En effet, d’autres principes, dont ce dernier révèle une économie, sont tout aussi importants.

[42]           Au premier chef, si la Cour rappelait récemment dans L.C. c. R.[30] que la grille d’analyse de R. c. W. (D.) ne s’impose pas mécaniquement, elle soulignait du même souffle que le juge du procès commet une erreur révisable s’il ne traite pas d« importantes contradictions » entre certains éléments de la preuve du poursuivant et celle de la défense[31]. La Cour allait aussi en ce sens dans l’arrêt Dufour[32] :

[45] Les tribunaux ont souvent affirmé que l’omission de considérer un élément de preuve pertinent constitue une erreur de droit.

[46] En effet, l’accusé a droit à un examen des éléments de preuve qui peuvent lui être favorables et qui se rapportent à la question ultime à trancher. L’omission de ce faire, si l’élément concerné revêt suffisamment d’importance, justifie l’intervention d’un tribunal d’appel.

[47] Cette obligation est d’autant plus importante lorsque l’accusé, comme en l’instance, fait face à une sanction sévère.

[Soulignements ajoutés; renvois omis]

[43]           Quant à la suffisance des motifs en droit, il importe que la partie lésée soit capable d’exercer valablement son droit d’appel : « Les avocats doivent être capables de déterminer la viabilité d’un appel et les juridictions d’appel doivent être capables d’établir si une erreur s’est produite »[33].

-          Application en l’espèce

[44]           L’« analyse » par le juge de la preuve, de la crédibilité des témoins et des versions contradictoires qui parsèment la séquence des évènements survenus au cours des années 2007, 2018 et 2019 culmine avec l’énoncé suivant de ses motifs particularisés au soutien des déclarations de culpabilité sur les chefs qui font l’objet du présent appel, lesquels motifs dénotent pour plus d’un une confusion ou des va-et-vient qui ne peuvent qu’affecter davantage l’intelligibilité du raisonnement :

-          sur le chef 1 (les voies de fait causant des lésions corporelles/brûlures causées par le beurre fondu) :

Après avoir entendu monsieur, voir son comportement versus le comportement de madame…C’est certain qu’il y a certaines imprécisions. On parle d’événements de v’là dix (10) ans, alors on fait des erreurs, c’est sûr, mais …

Alors, comme je l’ai mentionné, je ne crois pas l’accusé, il ne soulève aucun doute et la Poursuite a fait la preuve qu’effectivement, sur le premier chef, monsieur a jeté du beurre sur la personne de madame qui s’est retrouvé dans son cou. En tout cas…Alors, en Défense… Alors, Monsieur, je vous trouve coupable de l’infraction sur le premier chef.[34]

-          sur le chef 2 (les voies de fait, l’épisode dans la roulotte à Cadillac) :

On parle de la période de violence du premier (1er) janvier deux mille dix (2010) au trois (3) septembre deux mille dix-neuf (2019), le chef numéro 2. L’accusé … on mentionne, là, que l’accusé a également témoigné de la consommation… que la consommation a augmenté et que la qualité de la relation s’est détériorée à la suite de l’arrivée de l’enfant X, le couple avait commencé à consommer du crystal meth.

Madame le mentionne aussi, là, qu’elle consommait. Elle n’a pas honte de dire qu’elle consommait. Alors, on pose des questions concernant sa… sa consommation, on lui demande ça a l’air de quoi à ce moment-là, lorsque X arrive : […]

Alors, on nous demande… on me demande, nous réitérons que le Tribunal doit analyser la preuve présentée sur ce chef d’accusation en gardant à l’esprit que la fiabilité de la plaignante est affectée par sa consommation de drogue. Alors, on parle ensuite du … des chefs 3 et 5. Si je reviens au chef numéro 2, l’accusation étant entre le premier (1er) janvier deux mille dix (2010) au trois (3) septembre deux mille dix-neuf (2019), s’est livré à des voies de fait, alors c’est bien clair. Je retiens le témoignage encore de madame contrairement au témoignage de monsieur pour les raisons que j’ai données tout à l’heure. La question invraisemblable. Lui, c’est toujours la faute de l’autre. Il n’y a jamais de participation de lui. Ça, c’est clair, c’est tout l’autre et encore une fois, la façon qu’il a témoigné.

Maître Jolicoeur…Et j’ai dit un moment donné, j’ai dit : « Monsieur T..., vous avez un excellent avocat, laissez-le travailler, répondez à ses questions. » Combien de fois je l’ai dit? Parce que, monsieur, encore, on essayait de le suivre, on n’était pas capables de le suivre. Alors, je vous trouve coupable du chef numéro 2.[35]

-          sur le chef 3 (voies de fait graves, la chute du véhicule) :

Madame explique qu’elle a entrouvert la porte, qu’elle voulait lui signifier qu’elle voulait sortir, qu’elle voulait qu’il arrête et pour ça, elle a défait sa ceinture et entrouvert la portière pour lui faire signe. Elle lui demandait d’arrêter, elle lui demandait qu’elle voulait sortir de l’auto et monsieur, comme par hasard, là, elle s’est jetée en bas. Bon. Je retiens que monsieur l’a poussée

[…]

Oui, oui. Bon. Alors, est-ce que cet… cet acte-là mettait en danger sa vie, la vie de madame G…? Effectivement. Je veux dire, écoutez, c’est clair avec les blessures qu’elle a eues. Alors, je vous trouve coupable du chef numéro 3.[36]

-          Sur le chef 4 (l’agression sexuelle) :

Alors, monsieur nous donne des explications. On sait que madame, là, vient tout juste d’avoir un accident sérieux, puis là elle aurait le goût, là, de faire l’amour. Elle lui fait une fellation avec le bras qui n’est pas… qui n’est pas blessé. Madame pleure, il ne sait pas pourquoi qu’elle pleure, mais elle est consentante à avoir une relation sexuelle, selon lui.

On a contre-interrogé madame sur la durée de la relation, on parle de dix minutes (0 :10), … on parle de dix (0 :10) à quinze (0 :15) minutes. On a parlé aussi de quinze (15) coups, c’est ce qui avait été dit dans la déclaration vidéo, mais… puis on a … on a tenté de … d’attaquer sa crédibilité parce qu’un moment donné elle aurait dit que c’était court, que… ou c’était long puis… Écoutez, ce sont des détails qui n’ont aucune incidence sur le comportement de monsieur ou l’acte qu’il a posé. Ça n’attaque pas la crédibilité de madame, mais en aucun temps. Alors, Monsieur, je vous trouve coupable du chef numéro 4.[37]


-          sur le chef 5 (voies de fait dans le véhicule en marche) :

Alors, concernant le chef numéro 5, étant donné que je vous ai trouvé coupable du chef numéro 3, il y aura arrêt des procédures sur le chef numéro 5.[38]

-          sur le chef 6 (voies de fait, poussée dans le bain dans le duplex) :

Concernant le chef numéro 6, on parle de l’événement du quinze (15) juillet. Alors, encore une fois, c’est clair dans mon esprit, là, que l’événement est survenu comme mentionné par la plaignante et dans les circonstances, je vous trouve coupable du chef numéro 6.[39]

-          sur le chef 7 (menace d’utiliser une arme, le marteau, dans le duplex) :

Monsieur admet qu’il avait un marteau pour réparer la poignée de la porte d’entrée et qu’il serait monté avec le marteau, qu’un moment donné il dépose le marteau. Une chose est certaine, c’est que monsieur confirme le témoignage de madame, sauf sur la question qu’il l’aurait brandi. Il n’a pas frappé madame avec, mais qu’il l’aurait brandi à ce moment-là pour ensuite le déposer. Alors, le chef numéro 7, encore une fois, je vous trouve coupable de cette infraction-là.[40]

-          sur le chef 8 (voies de fait graves, l’épisode de l’étranglement dans l’appartement de C...) :

Alors, on va parler à ce moment-là de l’événement chez monsieur C... où monsieur a… l’a pris à la gorge et un moment donné c’est quand elle voulait quitter qu’il l’a pris à la gorge et madame mentionne qu’elle a perdu en somme d’air et qu’elle aurait même perdu, peut-être un petit moment, perdu connaissance. Alors, dans les circonstances, je vous trouve coupable de l’infraction, soit le chef numéro 8.[41]

-          sur le chef 9 (séquestration dans l’appartement de C...) :

Madame voulait quitter et monsieur l’a empêchée un moment donné et c’est vrai qu’elle a peut-être continué de consommer, mais une chose est certaine, c’est qu’un moment donné, voulant quitter à ce moment-là, elle… il l’empêchait et je vous trouve coupable du chef numéro 9.[42]

-          sur le chef 11 (voies de fait, coups dans la chambre de l’appartement de C...) :

Concernant le chef numéro 3, il y aura arrêt conditionnel étant donné que j’ai trouvé …Oui, le chef numéro 11?

[…]

O.K. Étant donné que je l’ai trouvé coupable du chef numéro 8. C’est exact, Maître Jacob?

PAR Me JOANNIE JACOB POUR LA POURSUIVANTE

Bien, pour ma part, pas tellement parce qu’il y avait d’autres gestes que l’étranglement […]. Par contre, il a donné par la suite des coups également.

PAR LE TRIBUNAL :

Des coups à la tête, oui.

PAR Me JOANNIE JACOB POUR LA POURSUIVANTE

Oui, Donc, pour moi, ça ne serait pas arrêt conditionnel, mais évidemment, ça demeure votre décision.

PAR LE TRIBUNAL :

Mais …Non. Alors, il aura arrêt conditionnel sur le chef numéro 11.[43]

[Soulignements ajoutés]

[45]           Cela étant, certaines observations additionnelles concernant ces motifs du juge au soutien des chefs 1 et 7 sont opportunes.

[46]           D’abord, outre que, comme on l’a vu précédemment, les motifs du juge au soutien de l’appréciation de la crédibilité de l’appelant constituent un copier/coller, au sens propre, de l’extrait correspondant de la plaidoirie écrite du ministère public, le recours par le juge au « comportement » de l’appelant lors de son témoignage laisse encore davantage dubitatif concernant la validité de l’exercice global. D’autant plus qu’en cette matière, le juge Doyon rappelait pour la Cour que les tribunaux ne doivent pas se laisser indûment influencer par ce constat[44] :

[88] On peut certes s’interroger sur l’évaluation fondée sur le comportement ou l’attitude de l’appelant en témoignant et sur l’à-propos des mots « l'accusé cherche ses mots, hésite, bafouille et joue constamment avec ses mains ». Un juge peut évidemment tenir compte du comportement d’un témoin, de sa façon de témoigner : []. Il ne faut toutefois pas se laisser indûment influencer par un tel examen et, entre autres, il ne faut pas se baser sur ce seul constat : [], d’autant qu’il est de plus en plus reconnu qu’un tel exercice peut être déficient […].

[…]

[90] En d’autres mots, c’est plutôt comme point de départ à un examen plus approfondi en cours d’interrogatoire que le comportement du témoin devrait être pris en compte par le juge.

[Soulignements ajoutés; renvois omis]

[47]           Par ailleurs, si la Cour a observé à juste titre dans d’autres affaires l’« indulgence relative » dont les tribunaux d’appel doivent faire preuve à l’égard de jugements en matière criminelle rendus oralement en première instance dans des salles à volume[45], cette indulgence ne s’impose pas en l’espèce : le jugement entrepris, bien que rendu oralement, l’a été après quatre mois de délibéré et, comme on l’a vu, environ un mois après la réception par le juge des plaidoiries écrites qu’il avait requises des parties.

[48]           Si un juge peut s’inspirer, voire utiliser, le plan de plaidoirie de l’une et/ou l’autre des parties aux fins de son jugement, la Cour suprême a tout de même souligné dans l’arrêt Cojocaru que le processus de formulation des motifs du jugement dans les propres mots du juge contribue à garantir qu’il a pris les questions en litige en considération et qu’il s’est formé une opinion à leur égard de façon indépendante[46].

[49]           Or, la facture générale du jugement, au vu de la preuve reproduite dans le dossier d’appel, n’offre pas cette garantie que le juge s’est formé une opinion de façon indépendante sur les contradictions dans la preuve et les questions en litige sur chacun des chefs d’accusation, particulièrement en raison de l’importation sans réserve et mot pour mot, lors du prononcé du jugement, de l’extrait de la plaidoirie écrite du ministère public concernant la question cruciale de la crédibilité de l’appelant. On comprend d’ailleurs mal au vu du dossier d’appel l’importance déterminante qu’a donnée le juge, répétant en cela la plaidoirie écrite de l’intimé, au fait que le témoignage de l’appelant aurait été truffé de « réticences, imprécisions, invraisemblances, contradictions et manques de transparence ». Si la transcription de son témoignage révèle que l’appelant a balbutié, a parfois été imprécis ou s’est contredit, ce qui peut caractériser à certains égards un témoignage relatif à plusieurs évènements survenus à différentes époques et sur une période dune dizaine dannées, les qualificatifs précités empruntés par le juge à la plaidoirie de l’intimé laissent perplexe, d’autant plus que le jugement ne permet pas de voir en quoi de telles lacunes l’auraient emporté sur celles de même nature qui affectent aussi le témoignage de la plaignante sur plus d’un des évènements en litige. En présence de telles versions contradictoires, sur tous les évènements qui ont donné lieu aux divers chefs d’accusation, le juge devait indiquer au moyen d’une analyse suffisante et compréhensible comment il les a tranchées au regard de l’ensemble de la preuve, plutôt que de se limiter à arbitrer un concours de crédibilité.

[50]           Cela étant dit, il importe aussi de souligner que sur le chef 7, le juge déclare l’appelant coupable d’avoir menacé la plaignante avec le marteau, après avoir retenu de la preuve que l’appelant n’a pas frappé la plaignante avec, mais qu’il a admis « qu’il l’aurait brandi à ce moment-là pour ensuite le déposer »[47]. Or, cette admission ne ressort aucunement de la preuve, au contraire. Le juge semble avoir retenu la teneur de questions posées à l’appelant en contre-interrogatoire, sans égard pour les dénégations fermes de ce dernier, incompatibles avec quelque admission que ce soit, et sans considérer que même l’admission d’une possibilité n’aurait pu constituer une preuve[48] :

Q. O.K. Donc, pour revenir à l’événement du marteau, vous arrivez dans la chambre de X, votre mère est déjà là, D… est déjà là.

R. Hum, hum.

Q. En rentrant dans la chambre, est-ce que c’est possible que, bien, premièrement, vous aviez encore le marteau dans vos mains?

R. Je l’ai déposé en rentrant dans la chambre.

Q. O.K. Fait qu’en montant les escaliers, vous avez encore le manteau…euh, le marteau, le marteau dans vos mains?

R. Oui.

Q. Est-ce que c’est possible que …si je vous dis que vous êtes encore en train de le brandir lorsque vous êtes rentré dans la chambre, c’est possible?

R. Non.

Q. C’est impossible?

R. Oui, c’est impossible. Impossible.

Q. C’est où que vous l’avez déposé?

R. Je l’ai déposé en rentrant…aussitôt que j’ai rentré dans la chambre, sur le bureau.

Q. Et vous le teniez où avant ça, le marteau?

R. Dans ma main.

Q. O.K. Positionné de quelle manière?

R. J’ai monté les escaliers avec dans les mains. Quand je suis rentré dans la chambre, je l’ai mis sur le bureau.

Q. C’est possible que vous laviez levé dans les airs?

R. Non.

[Soulignements ajoutés]

[51]           Enfin, comme on l’a vu, la décision du juge d’ordonner l’arrêt des procédures sur le chef 11, en raison de la déclaration de culpabilité sur le chef 8, soulève elle aussi des questionnements auxquels le dossier ne permet pas de répondre dans la mesure où ces chefs concernent des gestes qui, bien que survenus peu de temps l’un après lautre, sont distincts dans le temps et en nature, ce qu’illustrent d’ailleurs les échanges entre la procureure du poursuivant et le juge à la fin du prononcé des jugements de culpabilité.

[52]           Force est donc de constater, pour ne pas dire plus, que le jugement entrepris est difficile à suivre sur plus d’un point.

[53]           Outre les extraits précités dans la section précédente, le jugement entrepris ne contient par exemple aucune présentation des trois volets du cadre d’analyse de R. c. W. (D.), malgré que les témoignages des uns et des autres soient contradictoires sur plus d’un aspect, ni une analyse digne de ce nom des contradictions dans le témoignage de la plaignante elle-même lors du procès ou avec ses déclarations antérieures aux policiers, ou encore avec le témoignage de sa belle-mère concernant les évènements du 15 juillet 2019 dans le duplex qui ont donné lieu aux chefs d’accusation 6 et 7. Le jugement est entièrement silencieux sur le témoignage de madame R… qui contredit fondamentalement celui de la plaignante sur le fait que l’appelant l’aurait menacée avec un marteau, élément essentiel de l’infraction de menace avec une arme. Certes, le juge du procès n’a pas à consigner par écrit, ou à relater dans son jugement, son appréciation de chacun des éléments de preuve[49]. Mais la conséquence de l’omission de prendre en considération des témoignages pertinents à la question ultime à trancher est l’ordonnance d’un nouveau procès[50].

[54]           Au mieux, le juge identifie certaines de ces contradictions, mais rien ne permet vraiment de comprendre comment il procède pour les régler en défaveur de l’appelant; sinon qu’il semble avoir globalement réglé l’application de R. c. W. (D.) en posant d’entrée de jeu qu’il ne croit aucunement ce dernier. Cette affirmation dès le départ semble au surplus expliquer qu’il ne procède pas par la suite à l’analyse des témoignages en regard des autres évènements à la base de chaque autre chef d’accusation.

[55]           Contrairement à ce que laisse penser la facture générale du jugement, le juge ne pouvait ainsi analyser de façon défavorable la crédibilité de l’appelant dans le cadre de son examen du premier chef d’accusation, concernant incidemment un événement survenu en 2007, et régler ainsi le sort de la crédibilité de ce dernier aux fins de l’analyse de chacun des autres chefs d’accusation auxquels il faisait face. D’autant plus que, ce faisant, le juge semble avoir imposé à l’appelant le fardeau de réfuter la version de la plaignante.

[56]           Le juge est d’ailleurs pour le moins expéditif au moment d’énoncer la grille d’analyse ou les principes applicables à l’appréciation de versions contradictoires, ce qui, au vu du dossier et de l’ensemble du jugement, ajoute à l’insuffisance de motivation. Ainsi, le juge énonce la question au centre du débat et le cadre d’analyse applicable de la façon suivante :

On s’entend que c’est une question que…de…de la fonction…alors R. c. W.(D.). Alors c’est toujours la même chose, on a deux (2) versions, deux (2) versions qui sont contradictoires.[51]

[Soulignements ajoutés]

[57]           L’approche que le juge adopte d’emblée n’est pas redirigée ensuite de façon acceptable par ses allusions çà et là dans le jugement, telles de simples formules de style dans les circonstances, au fait que le témoignage de l’appelant ne soulève en aucun temps un doute et que le ministère public « a fait la preuve de cet événement-là et aucun doute raisonnable [sic].[52]

[58]           Le procédé laisse perplexe lorsqu’on constate au surplus que le juge souligne au passage, parfois de façon réductrice ou décousue, comme pour tenter de solidifier les fondements insuffisants de son appréciation de la crédibilité, certains aspects de la vie de l’appelant qui laissent à penser que certains préjugés défavorables et des éléments sans rapport avec les questions essentielles qu’il avait à trancher ont aussi alimenté sa réflexion générale sur la crédibilité :

De plus, il y avait des invraisemblances. Juste à penser à la question de ses revenus. Là, ses revenus, c’étaient des …des jeux de vidéo poker où il gagnait de l’argent. Au niveau des biens, monsieur est sur l’Aide sociale depuis des années et il a une roulotte qu’on va qualifier de très bien, il nous dit qu’il l’a eue pour un prix dérisoire, je ne le crois pas. Écoutez, ça n’a aucun sens.[53]

[…]

On va aller aussi dans la question de la salle de bain [i.e. chefs 6 et 7], qu’elle saute sur le toit. Je veux dire, ça n’a aucun sens. Ça n’a aucun sens dans le…dans le cas aussi où la question monétaire, là, deux (2) explications de données, là. Ça ne tient pas la route. Ça ne tient vraiment pas la route. Tellement, que monsieur, je pense qu’il a une poursuite d’environ quatre-vingt-mille dollars (80 000,00 $) pour des sommes qui ont été versées en trop par la Sécurité du revenu parce qu’il n’a pas déclaré que madame était… demeurait avec… avec lui et qu’elle avait certains revenus.[54]

[Le texte entre crochets est de la Cour]

[59]           L’appelant faisait face à 13 chefs d’accusation le rendant passible de peines sévères, ces chefs découlant de plusieurs événements distincts survenus au cours des années 2007, 2018 et 2019 et sur lesquels plus d’un témoin ont donné des versions généralement contradictoires. L’ensemble de ces considérations requérait de la part du juge une analyse délicate et certes difficile, mais néanmoins nécessaire, en fait et en droit. Or, le jugement entrepris ne révèle pas une telle analyse et le cumul des questions insolubles que soulève le jugement entrepris au regard de la preuve et des versions contradictoires des témoins sur plusieurs des évènements en litige justifie une ordonnance de nouveau procès sur l’ensemble des chefs dont l’appelant a été déclaré coupable, à l’exclusion des chefs 12 et 13, dont il ne conteste pas les verdicts.

[60]           En somme, les motifs suivants de la Cour au soutien de l’ordonnance de nouveau procès dans Dubé c. R.[55] sont transposables en l’espèce, avec les adaptations qui s’imposent :

[1] Le jugement dont appel a été prononcé oralement quelque six semaines après le procès.

[2] Le juge de première instance prononce deux phrases, l'une au début de son analyse et l'autre à la fin, qui donnent à penser qu'il s'est mal dirigé en droit dans son analyse de la preuve contradictoire :

1) la première, en tout début d'analyse, alors que le juge traite de la première étape de l'examen suggéré dans R. c W. (D.) :

Est-ce que le Tribunal ici croit l'accusé, la version de l'accusé?  La réponse est non, car outre sa grande nervosité tout au long de son témoignage, la version de la défense est contredite par la preuve (sic) la Poursuite qui est au moins aussi crédible à première vue que celle de la défense.

2) la seconde, à la toute fin du jugement, alors que le juge s'apprête à conclure :

Comme il croit la plaignante, le Tribunal ne peut entretenir aucun doute raisonnable à la version de la défense qui souffre d'invraisemblance par surcroît.

[3] Ces deux extraits du jugement laissent croire que le juge de première instance a procédé à un exercice de comparaison entre les versions de l'accusé et de la plaignante, renversant ainsi le fardeau de la preuve et ne faisant pas bénéficier l'accusé de la présomption d'innocence.  Il s'agit, selon la Cour, d'une erreur de droit que la lecture de l'ensemble du jugement ne permet pas d'occulter.

[61]           Il en va de même ici, alors que le juge, comme l’illustrent notamment les passages de ses motifs reproduits précédemment au paragraphe 44 du présent arrêt, a procédé à un semblable exercice de comparaison, appuyé de stéréotypes au sujet de certaines des habitudes de vie de l’appelant.

[62]           La Cour ne saurait par ailleurs clore sans souligner que les présents motifs ne sauraient être interprétés comme si elle concluait que le témoignage de la plaignante sur tous ou certains des évènements aurait dû être rejeté par le juge, ou que celui de l’appelant ou de sa mère auraient dû lui être préféré. Il importe plutôt de retenir que la façon dont le juge a résolu ces nombreuses contradictions dans les témoignages, ce qu’il devait faire en considérant l’ensemble de la preuve, ne ressort pas du jugement entrepris ou est insuffisamment motivée ou expliquée, ce qui constitue une erreur de droit justifiant le nouveau procès.

[63]           En terminant, malgré sa longueur, la Cour estime opportun de citer l’extrait suivant d’un récent article de la professeure Paciocco, lequel trouve ici tout son sens :

In Sheppard, the Court characterized an order for a new trial as a “serious” remedy requiring “serious justification. The seriousness of this remedy is particularly acute in the sexual assault context, where, as in G.F., prosecution usually requires that the complainant testify in a process that is often experienced as harmful and traumatic.

The goal of finality is vitally important, then, particularly in this context. Yet, it should not be allowed to eclipse other imperatives, including accuracy and fairness to the accused.

[…]

In his concurring appellate reasons in Al-Rawi, Saunders J.A. made some general observations about appellate review that merit our renewed attention. He wrote:

Sitting on appeal, we require trial judges to make strong findings of fact, decide matters of credibility, apply the law to the evidence correctly, and express themselves in plain, unambiguous language. That is the law, which is there to protect the rights of any citizen whose actions form the basis of a criminal prosecution. And those are obligations that apply to every kind of case, so that when matters are appealed, the record from the court below will provide a proper basis for meaningful appeal.

If it is shown that the trial judge erred, to the extent where appellate intervention is warranted, the appeal will be allowed, the judgement set aside, and a suitable remedy granted. Those are the “checks and balances” our system of justice provides.  That is how the system is supposed to work. Just as it did in this case.[56]

To the extent the system works at all, it is in part thanks to the “checks and balances” provided by clear reasons for judgment and by the opportunity for meaningful appellate review.

5. Conclusion

Checks and balances are helpful, but they are also costly. Appeals and retrials are burdensome, especially when they involve serious charges, complex issues, voluminous evidence, and/or vulnerable witnesses. Relatedly, as stated in G.F., “[t]rial judges are busy.” In arguing for robust appellate scrutiny, I am mindful of these realities. I am attentive to the material limitations Tanovith identified twenty years ago. Like Tanovitch, however, I think these limitations undercut the presumption of correct application more than they justify it: to the extent that trial judges are rushed and under-ressourced, they are more likely to err, and hence they are more in need of appellate oversight.

At the end of the day, if trial judges cannot consistently provide clear, cogent reasons that facilitate thorough appellate review, then the problem is not that our expectations may be too high; the problem is that our expectations are too low. […] When it comes to both the quality of individual trial judgments and the material realities of the criminal justice system, we cannot expect perfection, but we should accept nothing less than sufficiency.[57]

[Soulignements ajoutés; certains renvois omis]

[64]           Ces propos sont en effet intégralement applicables à l’espèce : certes, le juge de première instance n’était pas tenu à un standard de perfection, mais simplement à celui de la suffisance, seuil qu’il n’a pas atteint.

POUR CES MOTIFS, LA COUR :

[65]           ACCUEILLE l’appel;

[66]           INFIRME les déclarations de culpabilité sur les chefs 1 à 9 et 11;

[67]           ORDONNE un nouveau procès sur les chefs 1 à 9 et 11.

 

 

 

 

MARIE-FRANCE BICH, J.C.A.

 

 

 

 

 

MICHEL BEAUPRÉ, J.C.A.

 

 

 

 

 

GUY COURNOYER, J.C.A.

 

Me Pascal Jolicoeur

CLICHE AVOCATS

Pour l’appelant

 

Me Julien Pelletier

DIRECTEUR DES POURSUITES CRIMINELLES ET PÉNALES

Pour l’intimé

 

Date d’audience :

14 mars 2023

 


[1]  R. c. A.T., C.Q. Rouyn-Noranda, no 600-01-017164-190, 22 décembre 2020, Grimard, j.c.q.; la transcription du jugement prononcé oralement est reproduite dans le mémoire de l’appelant, vol.1, p. 32-104 (le « jugement entrepris »); l’intimé n’a pas tenté d’appeler de l’acquittement sur le chef 10 (menaces de mort ou de lésions corporelles – art. 264.1 (1) a) et (2) a) C.cr.) et l’appelant a informé la Cour peu avant l’audience qu’il abandonnait son appel à l’égard des déclarations de culpabilité sur les chefs 12 (harcèlement – art. 264 (1) et (3) a) C.cr.) et 13 (bris de condition – art. 145(5.1) a) C.cr.).

[2]  Jugement entrepris, p. 41.

[3]  Jugement entrepris, p. 36-39.

[4]  Id., p. 40.

[5]  Id., p. 43.

[6]  Id., p. 41-42.

[7]  Voir la plaidoirie écrite P-13 de l’intimé, reproduite dans son mémoire (« M.I. ») aux pages 160-196, p.161-162 plus particulièrement.

[8]  Jugement entrepris, p. 43.

[9]  Id., p. 43-44.

[10]  M.I., p. 163 plus particulièrement.

[11]  Jugement entrepris, p. 45-84.

[12]  Id., p. 46 (sur le premier chef : « Je dois dire que la Défense et monsieur T... a une version autre »), p. 51 (sur les chefs 3 et 5 : « Alors il faut savoir que monsieur aura une version autre. »).

[13]  Id., p. 84-85.

[14]  M.I., p. 178.

[15]  Voir à ce sujet Martin Vauclair et Tristan Desjardins, Traité général de preuve et de procédure pénales, 29e éd., Montréal, Yvon Blais, 2022, paragr. 34.69 et 34.79; 34.76 et ss.

[16]  R. c. Sheppard, 2002 CSC 26, paragr. 55.

[17]  Briand c. R., 2022 QCCA 607.

[18]  R. c. G.F., 2021 CSC 20.

[19]  Id., paragr. 74.

[20]  R. c. Guerrero Silva, 2015 QCCA 1334, paragr. 52.

[21]  R. c. Sheppard, supra, note 16, paragr. 55.

[22]  Ibid.; voir aussi R. c. Gagnon, 2022 QCCA 552, paragr. 7.

[23]  R.c. Burns, [1994] 1 R.C.S. 656, p. 664; aussi R. c. G.F., supra, note 18, paragr. 74.

[24]  R. c. W.(D.), [1991] 1 R.C.S. 742.

[25]  R. c. Boucher, 2005 CSC 72, paragr. 29.

[26]  R. c. Vuradin, 2013 CSC 38, paragr. 11; R. c. G.F., supra, note 19, paragr. 81.

[27]  R.c. Vuradin, supra note 26, paragr. 12, citant R. c. R.E.M., 2008 CSC 51, paragr. 16.

[28]  Id., paragr. 12;  voir aussi R. c. G.F., supra, note 19, paragr. 69; Trudeau c. R., 2020 QCCA 319, paragr. 11; LSJPA – 1453, 2014 QCCA 1837, paragr. 30.

[29]  R. c. G.F., supra, note 18, paragr. 71.

[30]  L.C. c. R., 2022 QCCA 1677.

[31]  Id., paragr. 11.

[32]  Dufour c. R., 2017 QCCA 1159.

[33]  R. c. G.F., supra, note 18, paragr. 74.

[34]  Jugement entrepris, p. 94.

[35]  Id., p. 94-97.

[36]  Id., p. 97-98.

[37]  Id., p. 98-99.

[38]  Id., p. 99.

[39]  Id., p. 100.

[40]  Id., p. 101.

[41]  Ibid.

[42]  Id., p. 101-102.

[43]  Id., p. 102-103.

[44]  L.L. c. R., 2016 QCCA 1367 (demandes d’autorisation d’appel à la Cour suprême rejetées, 19 juillet 2018, no 37872); aussi LSJPA-1710, 2017 QCCA 757, paragr. 30-34.

[45]  Robitaille c. R., 2017 QCCA 2077, note infrapaginale 1 (la Cour y observe notamment qu’après quatre mois de délibéré, le jugement devrait, en principe, revêtir la forme écrite même s’il est rendu oralement); R. c. Guerrero Silva, supra note 21, paragr. 52; J.L. c. R., 2011 QCCA 1848, paragr. 25.

[46]  Cojocaru c. British Columbia Womens Hospital and Health Center,2013 CSC 30, paragr. 50; cité dans Inter-cité Construction ltée c. Arcelor Mittal Exploitation minière Canada, 2019 QCCA 1028, paragr. 30.

[47]  Jugement entrepris, p. 101; soulignement ajouté.

[48]  Lehoux c. R., 2023 QCCA 789, paragr. 49.

[49]  Dufour c. R., supra, note 32, paragr. 49.

[50]  Id., paragr. 50.

[51]  Jugement entrepris, p. 86.

[52]  Id., p. 94.

[53]  Id., p. 85-86.

[54]  Id., p. 94.

[55]  Dubé c. R., 2010 QCCA 669.

[56]  R. v. Al-Rawi, 2019 NSCA 10, paragr. 128-129

[57]  Palma Paciocco, Presumptions, Assumptions, and Reasons for Reasons: the Sufficiency of Trial Judgments After R. v. G.F., (2021) 71 C.R. (7th), 54.

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