Décision

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Nicolas c. Aylmer Investments inc.

2024 QCTAL 33458

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Laval

 

No dossier :

731009 36 20230830 M

No demande :

4025286

 

 

Date :

22 octobre 2024

Devant la juge administrative :

Annie Hallée

 

Dave Nicolas

 

Locataire - Partie demanderesse

c.

Aylmer Investments Inc.

 

Locatrice - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]         Le Tribunal est saisi d’une demande du locataire, déposée le 30 août 2023, pour demander la fixation du loyer à compter du 1er juillet 2023 ainsi que les frais.

[2]         Les parties sont liées par un bail du 1er juillet 2023 au 30 juin 2024, au loyer mensuel de 899 $.

[3]         La locatrice invoque que la demande du locataire a été déposée hors délai et demande au Tribunal de trancher cette question de façon préliminaire.

PRÉTENTIONS DES PARTIES :

[4]         Le mandataire de la locatrice allègue que le locataire connaissait le montant du loyer payé par l’ancien locataire, Yves St-Pierre, lorsqu’il a signé le bail le 15 mai 2023.

[5]         En effet, il soumet avoir confirmé au locataire, par messages textes, que le loyer payé par l’ancien locataire après l’augmentation aurait été de 849 $, soit un montant au-dessous de celui du marché qui est plutôt de 950 $.

[6]         Lors de l’audience, il a déposé les pièces P-1 à P-5 au soutien de son objection préliminaire.

[7]         De son côté, le locataire confirme que l’ancien locataire lui a remis l’avis de modification du bail lorsqu’il a visité le logement le 17 avril 2023.

[8]         Lors de l’audience, il a déposé les pièces L-1 et L-2 au soutien de ses prétentions.

Argumentations de l’avocat de la locatrice

[9]         Il soumet que l’avis selon l’article 1896 du Code civil du Québec a été remis au locataire le 17 avril 2023 puisque ce dernier a reçu une copie de l’avis de modification du bail.

[10]     De plus, il a confirmé au locataire, par messages textes, le montant de 849 $, soit le loyer que l’ancien locataire aurait payé à compter du 1er juillet 2023. Même si le loyer indiqué dans le message texte adressé au locataire était de 849 $ au lieu de 845 $, cette ambiguïté n’existait plus après consultation de l’avis de modification du bail.


[11]     Il ajoute que le locataire connaissait le loyer payé par l’ancien locataire, soit 826 $.

[12]     Il soutient que le locataire avait, par conséquent, dix (10) jours à compter de la signature du bail pour déposer sa demande et non un délai de deux (2) mois du début du bail.

Argumentation du locataire

[13]     Il invoque que la partie G du bail n’avait pas été remplie par la locatrice au moment de sa signature.

[14]     Il affirme que le montant du loyer transmis par message texte n’était pas le bon puisqu’il était de 845 $ et non de 849 $ tel que mentionné par le représentant de la locatrice, Christopher Voland.

[15]     Il réitère donc qu’il avait deux (2) mois après le début du bail pour déposer son recours puisque l’annexe G n’y était pas complétée.

QUESTION EN LITIGE :

[16]     Est-ce que la demande du locataire a été déposée hors délais?

ANALYSE ET DROIT APPLICABLE :

[17]     Le Tribunal rappelle qu'il appartient à celui qui veut faire valoir un droit de prouver les faits qui soutiennent sa prétention, et ce, de façon prépondérante. La preuve qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence est suffisante. La force probante du témoignage est laissée à l'appréciation du Tribunal[1].

[18]     Ainsi, il doit démontrer que le fait litigieux est non seulement possible, mais probable. Par ailleurs, la preuve offerte ne doit pas nécessairement conduire à une certitude absolue. Il suffit que le fait litigieux soit, par la preuve, probable[2].

[19]     Si une partie ne s'acquitte pas de son fardeau, de convaincre le Tribunal elle verra sa demande rejetée.

[20]     En l’espèce, les articles 1950 et 1896 du Code civil du Québec (C.c.Q.), qui se lisent comme suit, sont pertinents:

« 1950. Un nouveau locataire ou un sous-locataire peut faire fixer le loyer par le tribunal lorsqu’il paie un loyer supérieur au loyer le moins élevé des 12 mois précédant le début du bail ou, selon le cas, de la sous-location, à moins que ce loyer n’ait déjà été fixé par le tribunal.

La demande doit être présentée dans les 10 jours de la conclusion du bail ou de la sous-location. Elle doit l’être dans les deux mois du début du bail ou de la sous-location lorsqu’elle est présentée par un nouveau locataire ou par un sous-locataire qui n’ont pas reçu du locateur, lors de la conclusion du bail ou de la sous-location, l’avis indiquant le loyer le moins élevé de l’année précédente; si le locateur a remis un avis comportant une fausse déclaration, la demande doit être présentée dans les deux mois de la connaissance de ce fait.

« 1896. Le locateur doit, lors de la conclusion du bail, remettre au nouveau locataire un avis indiquant le loyer le plus bas payé au cours des 12 mois précédant le début du bail ou, le cas échéant, le loyer fixé par le tribunal au cours de la même période, ainsi que toute autre mention prescrite par les règlements pris par le gouvernement. Dans les cas où aucun loyer n’a été payé au cours des 12 mois précédant le début du bail, l’avis doit indiquer le dernier loyer payé et la date de celui-ci.

Il n’est pas tenu à cette obligation lorsque le bail porte sur un logement visé aux articles 1955 à 1956. »

« 1898. Tout avis relatif au bail, à l'exception de celui qui est donné par le locateur afin d'avoir accès au logement, doit être donné par écrit à l'adresse indiquée dans le bail, ou à la nouvelle adresse d'une partie lorsque l'autre en a été avisée après la conclusion du bail; il doit être rédigé dans la même langue que le bail et respecter les règles prescrites par règlement.

L'avis qui ne respecte pas ces exigences est inopposable au destinataire, à moins que la personne qui a donné l'avis ne démontre au tribunal que le destinataire n'en subit aucun préjudice. »

(notre soulignement)


[21]     Ainsi, l’avis de l’article 1896 C.c.Q. indiqué à la clause « G » dans le formulaire obligatoire du bail et informant le locataire du loyer le plus bas payé au cours des douze (12) mois précédant le début du bail, doit être remis lors de la conclusion du bail.

[22]     En l’espèce, il appert que la locatrice a omis de remplir cette section lors de la signature du bail par les parties.

[23]     Les échanges de messages textes entre le représentant de la locatrice, Christopher Voland, et le locataire ainsi que l’avis d’augmentation de loyer adressé à l’ancien locataire ne peuvent dispenser la locatrice du respect de cette obligation.

[24]     Dans les circonstances, le Tribunal est d’avis que le locataire avait un délai de deux (2) mois du début du bail pour demander la fixation du loyer. La demande, introduite par le locataire le 30 août 2023, respecte donc le délai prévu à l’article 1950 C.c.Q.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[25]     REJETTE l’objection préliminaire de la locatrice;

[26]     DÉCLARE que la demande du locataire a été déposée dans les délais requis par la loi;

[27]     DEMANDE au Maître des rôles de convoquer à nouveau les parties pour enquête et audition sur la demande en fixation de loyer pour une durée d’une heure.

 

 

 

 

 

 

 

 

Annie Hallée

 

Présence(s) :

le locataire

le mandataire de la locatrice

Me Pierre-Olivier Bouvier-Leblanc, avocat de la locatrice

Date de l’audience : 

31 juillet 2024

 

 

 


 


[1] Articles 2803, 2804 et 2845 du Code civil du Québec, CCQ-1991 (C.c.Q.).

[2] Les jardins du roi société en commandite c. Jean-François Plante, RDL, 419462 18 20180921
No demande : 2590921, 4 février 2019.

 

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