Habitations communautaires de la Shapem c. Leduc |
2021 QCTAL 3591 |
TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT |
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Bureau dE Montréal |
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No dossier : |
543164 31 20201030 G |
No demande : |
3102383 |
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Date : |
12 février 2021 |
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Devant la juge administrative : |
Manon Talbot |
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Habitations communautaires de la SHAPEM |
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Locateur - Partie demanderesse |
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c. |
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Céline Leduc |
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Locataire - Partie défenderesse |
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D É C I S I O N I N T E R L O C U T O I R E
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CONTEXTE PROCÉDURAL
[1] Le Tribunal est saisi d’une demande du locateur du 30 octobre 2020 en résiliation du bail de la locataire.
[2] Le locateur allègue essentiellement que le logement est dans un état d’insalubrité majeure causant des dommages à l’immeuble et à son voisinage.
[3] Une première audience prévue le 27 novembre 2020 est remise au motif que la locataire est hospitalisée. Le procès-verbal d’audience indique que le dossier doit être fixé rapidement à une autre date en raison d’une infestation majeure de punaises de lit dans le logement.
[4] L’audition est reportée au 18 janvier 2021. À cette date, la locataire est absente, car elle est toujours hospitalisée. Elle demande donc la remise de l’audience, laquelle est accordée. Selon le procès-verbal, en raison de l’urgence de cette affaire, le Tribunal demande au Maître des rôles de convoquer à nouveau les parties dans un délai de 15 jours.
[5] La soussignée est saisie du dossier le 9 février 2021.
[6] Dans l’intervalle, le locateur amende son recours pour ajouter des motifs de résiliation de bail, notamment. Cette procédure est signifiée par huissier le jour même de l’audience, mais au logement sous l’huis de la porte. Or, la locataire est toujours hospitalisée.
[7] De plus, la locataire est, depuis quelques jours seulement, représentée par un stagiaire du Bureau d’aide juridique de Montréal-Nord.
[8] Il demande la remise de l’audience aux motifs que le dossier lui a été confié depuis quelques jours seulement et que la locataire est toujours hospitalisée, billet médical à l’appui. Celui-ci indique que la locataire ne peut se présenter au Tribunal « avant au moins un mois ».
[9] La représentante du locateur conteste vigoureusement cette troisième demande de remise.
[10] Dans les circonstances, et vu l’urgence de la situation décrite par la représentante du locateur et son témoin, le Tribunal accorde la remise sur la demande de résiliation de bail, mais permet la présentation de la preuve dans le but de déterminer si des ordonnances de sauvegarde doivent être prononcées à l’égard de l’état d’insalubrité du logement et à la présence de punaises de lit.
[11] Pour ce faire, le Tribunal a autorisé la locataire a assisté à l’audience et de témoigner à distance, soit par téléphone cellulaire.
LA PREUVE
[12] Les parties sont liées par un bail reconduit jusqu’au 30 juin 2021, au loyer mensuel subventionné de 611 $, dont la part payable par la locataire est de 446 $ par mois.
[13] Le logement constitué de 3 ½ pièces se situe dans un immeuble de 16 logements répartis sur quatre étages.
[14] Le témoignage de Zoé Naum, appuyé par celui de Mélanie Shaw, intervenante psychosociale en logement communautaire et coordonnatrice de la gestion parasitaire, révèle que le logement est infesté de punaises de lit, laquelle infestation se propage dans les autres logements de l’immeuble. Les lieux sont également encombrés, insalubres et ne permettent pas les traitements efficaces contre la vermine.
[15] Il est également soutenu que la locataire n’offre pas la collaboration requise à l’extermination des punaises en négligeant notamment de préparer son logement adéquatement lors des visites de l’exterminateur et en refusant l’aide proposée par un organisme spécialisé pour l’accompagner.
[16] Le témoignage de madame Shaw convainc le Tribunal que l’infestation du logement est telle, que tous les biens de la locataire doivent être retirés du logement pour être entreposés dans un endroit non chauffé, ce qui permettra l’extermination des punaises de lit vivantes et en dormance par l’effet du froid.
[17] Il s’avère également important qu’un grand nettoyage soit effectué pour remettre le logement en bon état de salubrité afin que les traitements d’extermination puissent être efficaces
[18] La locataire admet à l’audience que son logement est infesté de punaises de lit et qu’il est malpropre. Elle soulève toutefois qu’elle n’est pas responsable de la situation. Elle refuse donc d’assumer les frais engendrés par les travaux qui y seront effectués.
[19] Il est aussi admis que son état de santé ne lui permettrait pas, à court terme du moins, de remédier à la situation si elle obtenait congé de l’hôpital dans les prochains jours, comme souhaité.
[20] La locataire exprime sa compréhension à l’égard du fait que ses biens seront entreposés pendant sûrement quelques semaines, l’empêchant de réintégrer son logement entretemps, si elle obtient son congé.
[21] Madame Catherine Letarte, travailleuse sociale de l’hôpital en présence de la locataire, mentionne que celle-ci sera prise en charge dans une ressource d’hébergement adéquate, le cas échéant.
ANALYSE ET DÉCISION
[22] Le Tribunal juge qu’à l’issue de la preuve et des admissions des parties à l’effet qu’il y a urgence d’agir dans les circonstances, que des ordonnances de sauvegarde doivent être prononcées.
[23] Le Tribunal retient que la locataire consent à donner au locateur l’accès immédiat à son logement pour qu’il procède à l’enlèvement temporaire de ses biens, au nettoyage des lieux et à l’application des traitements d’extermination nécessaires.
[24] CONSIDÉRANT l'ensemble de la preuve testimoniale et documentaire;
[25] CONSIDÉRANT l'ajournement de l'audience à une date ultérieure;
[26] CONSIDÉRANT la preuve de l'urgence, de l'apparence de droit, du préjudice grave et irréparable et de la balance des inconvénients, le Tribunal, après avoir entendu les représentations des parties, en exercice des pouvoirs qui lui sont conférés par l'alinéa 2 de l'article 9.8 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement[1] prononce les ordonnances de sauvegarde suivantes valant jusqu'au jugement final;
[27] CONSIDÉRANT que le Tribunal peut prononcer toutes les ordonnances qu'il estime propres à sauvegarder les droits des parties;
[28] CONSIDÉRANT
l'article
[29] CONSIDÉRANT la preuve de la contravention de la locataire à ses obligations en matière d'entretien et de propreté du logement et de collaboration pour l’extermination des punaises de lit;
[30] CONSIDÉRANT l'urgence de faire une inspection et de procéder à l'extermination des punaises de lit au logement concerné sans délai;
[31] CONSIDÉRANT que les présentes ordonnances de sauvegarde sont prononcées, à titre de mesure conservatrice, dans le cadre du litige qui oppose les parties;
[32] CONSIDÉRANT que les présentes ordonnances sont une mesure temporaire, sujette à réévaluation dans la décision finale;
[33] CONSIDÉRANT que l'exécution provisoire immédiate de la présente décision interlocutoire est justifiée malgré l'appel;
[34] Le Tribunal, en exercice des pouvoirs qui lui sont conférés par l'alinéa 2 de l'article 9.8 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement, prononce les ordonnances de sauvegarde suivantes valant jusqu'au jugement final.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[35] ORDONNE à la locataire :
· De permettre aux représentants du locateur et à toute personne mandatée par lui de vider le logement de tous ses biens pour les entreposer dans un endroit permettant l’extermination des punaises de lit;
· De permettre aux représentants du locateur et à toute personne mandatée par lui de nettoyer le logement;
· De permettre aux représentants du locateur et au personnel en gestion parasitaire de procéder à l'extermination des punaises de lit au logement concerné selon les règles de l’art;
· De ne pas entraver, nuire ou obstruer le travail du locateur ou de ses représentants, et du personnel désigné pour le déménagement de ses biens, du nettoyage de son logement, de sa préparation et du technicien en gestion parasitaire désignés par le locateur.
[36] ET, EN CONSÉQUENCE :
[37] PERMET aux représentants du locateur et à toute personne mandatée par ce dernier à accéder au logement, à faire une inspection et à effectuer les traitements d'extermination contre les punaises de lit selon les règles de l'art en la matière, à retirer les biens de la locataire pour les entreposer le temps nécessaire seulement et de nettoyer le logement, et ce, dans le but de permettre la réintégration des lieux par la locataire et en permettant la surveillance d’une personne désignée par celle-ci;
[38]
DÉCLARE les présentes ordonnances de sauvegarde rendues en vertu
de l'article
[39] ORDONNE l'exécution immédiate de la présente décision malgré l'appel;
[40] DÉFÈRE le dossier au maître des rôles pour convoquer les parties devant la soussignée pour terminer l'instruction de la demande, pour une durée d'un rôle complet.
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Manon Talbot |
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Présence(s) : |
la mandataire du locateur Me Marc-Antoine Gignac, stagiaire en droit de la locataire |
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Date de l’audience : |
9 février 2021 |
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AVIS :
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