Durko c. 5350 MacDonald inc. |
2012 QCRDL 7020 |
RÉGIE DU LOGEMENT |
||
Bureau de Montréal |
||
|
||
No : |
31 100325 162 G |
|
|
|
|
Date : |
27 février 2012 |
|
Régisseure : |
Francine Jodoin, juge administratif |
|
|
||
Margaret Durko |
|
|
Locataire - Partie demanderesse |
||
c. |
||
5350 Macdonald Inc. |
|
|
Locateur - Partie défenderesse |
||
|
||
D É C I S I O N
|
||
[1] La locataire réclame une diminution de loyer de 20 % durant les mois de mai à octobre de chaque année, à compter du 1er mai 2007 ainsi qu’une ordonnance pour faire cesser les troubles subis.
[2] La locataire occupe les lieux depuis plus de 20 ans. L’immeuble a 17 étages et contient plus de logements.
[3] Elle vit dans un studio et partage son balcon avec le voisin. Celui-ci est quand même séparé par un mur de division.
[4] En 2007, le locateur procède aux changements des appareils de climatisation de l’immeuble. Or, son voisin l’utilise de façon constante durant l’été et elle est indisposée par le bruit.
[5] Auparavant, cela la dérangeait occasionnellement mais depuis les changements apportés, la locataire croit que son voisin l’utilise plus souvent qu’avant.
[6] Elle a fait de nombreuses plaintes et a transmis des « courriels » au locateur à compter de 2008. Une lettre a été transmise le 5 mars 2010 où elle écrit :
« I have been subjected to the non-stop noise coming from the air-conditioner of Apartment 1207 for a period for four months (June to September) over the years 2007 to 2009. The noise was unbearable and my living conditions were intolerable. »
[7] La locataire fait entendre à l’audience un enregistrement des bruits ambiants entendus. Elle ne peut utiliser son balcon ou recevoir des visiteurs, tellement c’est fort, dit-elle.
[8] Le mandataire du locateur fait valoir que les appareils de climatisation sont neufs et fonctionnent normalement. La locataire qui habite au douzième étage serait plus incommodée que les autres car elle garde sa porte et ses fenêtres ouvertes durant l’été.
[9] Son voisin, monsieur Steven Edelstein, habite son logement depuis six ans. Il a toujours utilisé l’appareil de climatisation de la même façon en raison de son état de santé (asthme). Il entretient celui-ci et en fait un usage normal. La température est fixée à 21°C durant l’été et 20°C durant l’hiver. Il n’a décelé aucun problème de fonctionnement de son appareil. Lorsque la locataire a commencé à lui laisser des notes sur sa porte il s’en est plaint au gestionnaire de l’immeuble. Son lit est placé près de l’appareil et il n’en est pas indisposé. Il n’entend pas le compresseur qui démarre ou arrête.
[10] Les sons émis par l’appareil de climatisation sont comparés, selon les témoins entendus, aux sons émis par le système de ventilation utilisés pour la salle d’audience.
[11] Les employés du locateur sont allés vérifiés les plaintes de la locataire qui s’avèrent, selon eux, non fondées.
[12] Monsieur Zakarov ajoute que si les fenêtres et porte demeurent fermés, la locataire n’entend rien.
[13] La locataire soutient que le bruit est plus élevé que le système de ventilation entendu en audience. Le mur de séparation sur le balcon est partiel et en bois. Elle décrit la situation comme « un cauchemar ».
[14] Le mandataire du locateur ajoute qu’il n’y a aucune solution aux problèmes invoqués par la locataire. L’appareil fonctionne normalement et tous les logements sont pourvus d’un appareil de climatisation. Chacun des locataires est libre de l’utiliser comme il l’entend.
[15] Pour obtenir gain de cause, la locataire doit établir que le locateur manque à ses obligations contractuelles.
[16] La preuve doit révéler l’imputabilité du locateur dans le trouble constaté.
[17] L'article 1861 du Code civil du Québec donne, aussi, ouverture à l'octroi d'une diminution de loyer lorsqu'un locataire est troublé dans la jouissance paisible de son logement par un autre locataire. Évidemment, la situation doit être dénoncée au locateur et les problèmes doivent persister.
[18] En l’occurrence, aucune faute ne peut être imputée au locateur ni au locataire voisin.
[19] La preuve révèle que tous les logements sont pourvus d’un appareil de climatisation. Ceux-ci ont été remplacés en 2005 et ils fonctionnement normalement. La locataire semble avoir une intolérance marquée pour les sons en découlant. Toutefois, rien ne démontre que cela soit, objectivement, anormalement élevé ou excessif. Le témoignage de la locataire est demeuré relativement court, imprécis et peu documenté sur la nature, fréquence et durée des bruits entendus.
[20] L’enregistrement réalisé au douzième étage en provenance de l’appareil de la locataire lui-même est, selon toute évidence, contaminé par les bruits ambiants. Cela ne constitue pas une preuve déterminante pour le tribunal.
[21] Le tribunal est confronté à deux versions contradictoires sur l’ampleur des bruits émanant de l’appareil de climatisation.
[22] L'article
[23] Quant à ce fardeau de preuve, l'auteur Léo Ducharme dans son traité sur la preuve écrit :
« 146. S'il est nécessaire de savoir sur qui repose l'obligation de convaincre, c'est afin de pouvoir déterminer qui doit assumer le risque de l'absence de preuve. En effet, si, par rapport à un fait essentiel, la preuve offerte n'est pas suffisamment convaincante, ou encore si la preuve est contradictoire et que le juge est dans l'impossibilité de déterminer où se situe la vérité, le sort du procès va se décider en fonction de la charge de la preuve : celui sur qui reposait l'obligation de convaincre perdre. »[2]
[24] Vu la preuve contradictoire offerte, le tribunal doit conclure que la locataire n'a pas prouvé, par prépondérance de preuve, le fondement de sa demande et celle-ci sera, en conséquence, rejetée.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[25] REJETTE la demande.
|
Francine Jodoin |
|
|
||
Présence(s) : |
la locataire le mandataire du locateur |
|
Date de l’audience : |
30 janvier 2012 |
|
[1] Article
[2] Ducharme, Léo, Précis de la preuve, Précis de preuve, 6e Édition, 2005, Wilson & Lafleur Ltée, p. 62.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
appel; la consultation
du plumitif s'avère une précaution utile.