Décision

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Décision

Derosema c. Montréal (Office municipal d'habitation de)

2013 QCRDL 10052

 

 

RÉGIE DU LOGEMENT

Bureau dE Montréal

 

No :          

31 110110 055 G

 

 

Date :

21 mars 2013

Régisseure :

Brigitte Morin, juge administratif

 

Roseline Derosema

 

Locataire - Partie demanderesse

c.

Office MunICIPAL D'HabITATION De Montréal

 

Locateur - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]      La locataire a introduit une demande le 10 janvier 2011. Elle requiert une diminution de loyer ainsi que des dommages de 1 000 $ pour troubles et inconvénients subis lors d'une infiltration d'eau. Le 15 août 2011, la locataire amende la procédure pour y ajouter 1 000 $ en dommages moraux et 600 $ en frais de remorquage de son auto. Le recours a été signifié par courrier recommandé.

Les faits :

[2]      Les parties sont liées par un bail débutant le 1er juillet 2010 et se terminant le 30 juin 2011 au loyer mensuel de 393 $.

[3]      Pour l'année 2009-2010, la locataire versait un loyer mensuel de 382 $, il en va de même pour l'année 2008-2009.

[4]      La locataire a quitté le logement en juin 2011.

[5]      La locataire témoigne que les problèmes ont commencé à la mi-décembre 2008 alors qu'elle se lève le matin et constate qu'il y a de l'eau sur le plancher provenant du plafond de la salle de bain. La locataire habite un 3 pièces et demie, situé au 3e étage de l'immeuble. Elle appelle en urgence un représentant du locateur et la semaine suivante, Monsieur Pierre Durocher, gestionnaire, lui mentionne ne pouvoir rien faire avant l'été.

[6]      La locataire affirme qu'elle devait mettre des seaux dans la salle de bain afin de recueillir l'eau.

[7]      Selon la locataire, le locateur, par l'intermédiaire de son gestionnaire, lui mentionne que le dossier serait réglé à l'amiable. N'ayant pas d'autres nouvelles, elle envoie une mise en demeure, le 22 novembre 2010, dans laquelle elle mentionne que de décembre 2008 au mois d'août 2009, il y a eu infiltration d'eau dans son logement, portant atteinte à la jouissance paisible des lieux loués. Elle réclame en conséquence une diminution de loyer pour les 9 mois ainsi qu'un montant de 1 000 $ pour les troubles et inconvénients que la situation lui a causés.


[8]      La locataire déclare de plus qu'elle a perdu plusieurs jours de travail mais ne peut préciser à combien s'élève la perte qu'elle a subie.

[9]      Le 21 juin 2011, la locataire met en demeure à nouveau le locateur afin de réclamer un montant de 600 $ à titre de dommages et intérêts pour les frais de remorquage effectué à la demande du locateur le 9 juin 2011 ainsi que pour les réparations qu'elle devra faire effectuer sur sa voiture puisque le remorqueur a abimé la peinture de la carrosserie. Elle réclame au surplus la somme de 1 000 $ pour les inconvénients subis. Elle admet avoir cessé de payer un stationnement alors qu'elle considérait qu'il s'agissait d'une modification au bail. Suite à l'arrêt de paiement du stationnement, le locateur a fait remorquer son véhicule.

[10]   Quant au locateur, représenté par Monsieur John Johnston, il admet qu'il y a eu infiltration d'eau dans le logement de la locataire, les réparations ont été effectuées en juin 2009. Il admet aussi que la locataire a perdu 3 ou 4 jours de travail afin de laisser accès au logement.

[11]   Quant au stationnement, Monsieur Johnston soutient que la locataire a cessé de façon unilatérale de payer le stationnement pour lequel elle a signé un contrat le 9 août 2010. D'ailleurs, une décision de la Régie du logement dans le dossier 31-100408-154-V-110216 confirme que le stationnement n'était pas inclus au bail et que la locataire devait payer un supplément de 15 $ par mois afin d'y avoir accès.

Le droit :

[12]   Pour commencer, il appartient à celui qui veut faire valoir un droit de prouver les faits qui soutiennent sa prétention de façon prépondérante et probable. Ainsi, la preuve qui rend l’existence d’un fait plus probable que son inexistence est suffisante[1]. Si une partie ne s’acquitte pas de son fardeau de convaincre le tribunal ou que ce dernier soit placé devant une preuve contradictoire, c’est cette partie qui succombera et verra ses prétentions rejetées.

[13]   Le bail est un contrat par lequel le locateur s’engage envers le locataire à lui procurer moyennant un loyer, la jouissance d’un bien meuble ou immeuble[2]. Plusieurs obligations découlent de ce contrat, notamment pour le locateur l’obligation générale de procurer au locataire la jouissance paisible du bien loué pendant toute la durée du bail, d’assurer le maintien des lieux en bon état d’habitabilité, d’y faire les réparations nécessaires à l’exception des menues réparations d’entretien[3]. Cette obligation confère au créancier le droit d’exiger qu’elle soit exécutée entièrement, correctement et sans retard[4].

[14]   Le locataire a, quant à lui, l’obligation générale d’user du bien loué avec prudence et diligence, l’obligation d’avertir le locateur des défectuosités dans un délai raisonnable, d’effectuer les menues réparations d’entretien[5].

[15]   En cas d’inexécution d’une obligation par l’une des parties, l’autre aura le droit de demander entre autres l’exécution en nature des obligations, la résiliation du bail, une diminution du loyer[6]. Afin de mettre en œuvre ces recours, le locataire doit, dans certains cas, mettre en demeure le locateur d’exécuter ses obligations[7]. Toutefois, en d’autres cas, le débiteur de l’obligation est en demeure de plein droit[8].

[16]   Afin d’obtenir une diminution de loyer, il est essentiel que les défectuosités soient majeures et diminuent de façon substantielle la jouissance paisible des lieux, l’auteur Denis Lamy dans son ouvrage La diminution de loyer[9] s’exprime ainsi :

« Des défectuosités mineures qui n’occasionnent qu’un simple désagrément aux locataires, sans pour autant diminuer de façon significative et substantielle la jouissance paisible des lieux ou la fonctionnalité du logement, ne justifient donc pas l’intervention du tribunal. 

En conséquence, pour obtenir une diminution de loyer, la perte de valeur locative ou la diminution de prestation d’une situation donnée ou encore les défectuosités dénoncées par le locataire doivent lui occasionner une diminution significative réelle ou une perte substantielle. Le trouble ne doit pas être mineur ou n’être qu’un simple préjudice esthétique, il doit être sérieux. »

[17]   Pour se prévaloir du recours en diminution de loyer, le locataire doit préalablement avoir avisé le locateur afin de lui permettre d’apporter les correctifs qui s’imposent. Une diminution de loyer ne peut donc être accueillie qu’à partir du moment où le locateur connaissait l’état du bien.

L’analyse :

[18]   La locataire a démontré, à la satisfaction du tribunal, qu'elle a avisé en temps opportun le locateur de l'infiltration d'eau dans son logement en décembre 2008. Il est par ailleurs admis par le représentant du locateur que les problèmes de toitures n'ont pu être réparés avant le mois de juin 2009. Il est aussi admis que la locataire a dû perdre plusieurs journées de travail afin de donner accès à son logement pour que les réparations soient effectuées.

[19]   En conséquence, le tribunal accorde à la locataire une diminution de loyer totalisant la somme de 268 $ pour l'infiltration d'eau dans la salle de bain, telle somme représentant environ 10 % de la valeur des lieux loués. En ce qui concerne la perte de salaire ainsi que les troubles et inconvénients, le tribunal arbitre les dommages à 600 $.

[20]   Quant au frais de remorquage et dommages-intérêts relatifs à la perte du stationnement, le Tribunal rejette la demande puisque la locataire a fait défaut de payer le stationnement pour lequel elle a signé un bail le 9 aout 2010. En cessant de payer le loyer supplémentaire parce que selon elle il s'agissait d'une modification au bail, elle s'est fait justice. D'ailleurs, une décision rendue le 19 septembre 2011 dans le dossier 31-100408-154-V-110216 confirme que l'espace de stationnement n'était pas inclus au bail. En conséquence cette demande est rejetée.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[21]   CONDAMNE le locateur à verser à la locataire la somme de 868 $, plus les intérêts au taux légal et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du C.c.Q., à compter du 10 janvier 2011, plus les frais judiciaires de 59 $;

[22]   REJETTE la demande quant au surplus.

 

 

 

 

 

Brigitte Morin

 

Présence(s) :

la locataire

le mandataire du locateur

Date de l’audience :  

17 janvier 2013

 


 



[1] Art 2803 et 2804 C.c.Q.

[2] Art. 1851 C.c.Q.

[3] Art. 1854 C.c.Q., 1910 C.c.Q., 1864 C.c.Q.

[4] Art. 1590 C.c.Q.

[5] Art. 1855 C.c.Q., 1866 C.c. Q. 1864 C.c.Q.

[6] Art. 1863 C.c.Q.

[7] Art. 1594 et 1595 C.c.Q.

[8] 1597 C.c.Q.

[9] Lamy, Denis, La diminution de loyer, Éd. Wilson & Lafleur ltée, 2004, p. 29-30.

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