Bergeron c. Pelletier |
2021 QCTAL 427 |
TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT |
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Bureau dE Québec |
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No dossier : |
479194 18 20190904 G |
No demande : |
2839393 |
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Date : |
07 janvier 2021 |
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Devant le juge administratif : |
Philippe Morisset |
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Nadia Bergeron |
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Locatrice - Partie demanderesse |
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c. |
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Mario Pelletier
Nathalie Musquet |
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Locataires - Partie défenderesse |
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D É C I S I O N
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[1] Par
une demande introduite le 4 septembre 2019, la locatrice réclame aux locataires
une somme de 1 482,82 $ pour dommages au logement, le tout avec l’intérêt
légal, l’indemnité additionnelle prévue à l’article
[2] La réclamation de la locatrice se détaille comme suit :
- Dommages au plancher : 800 $
- Dommage à la douche : 137,97 $
- Frais de peinture : 363,79 $
- Frais de nettoyage du tapis : 104,90 $
- Dommage au gazon : 76,16 $
CONTEXTE
[3] Les parties étaient liées aux termes d’un bail pour la période du 1er juillet 2016 au 30 juin 2017 au loyer mensuel de 1 300 $[1], lequel a été reconduit jusqu’au 30 juin 2018 au loyer mensuel de 1 305 $[2].
[4] Le logement est un immeuble unifamilial de type jumelé.
Preuve de la locatrice
[5] La locatrice explique que le logement loué était habité par elle avant sa location aux locataires.
[6] Le logement était en très bon état et avait été peinturé préalablement à la prise de possession des locataires.
[7] Suivant le départ des locataires, la locatrice mentionne que le logement n’est pas dans le même état que lors de la livraison en juillet 2016.
[8] Deux chambres ont été peinturées avec de la couleur et des murs comportent des dommages laissés par des accessoires de décoration. Il y a également un trou au plafond de l’une des chambres[3]. Une somme de 80,47 $ est réclamée pour la peinture[4].
[9] La locatrice réclame également une somme de 80,47 $, puisqu’un mur du salon a été peinturé en rouge[5].
[10] Aux termes du bail, les locataires devaient remettre la couleur originale au moment de leur départ[6], ce qu’ils n’ont pas fait.
[11] La locatrice mentionne que le tapis du sous-sol a dû être nettoyé. Lors d’un dégât d’eau, la locatrice a constaté la présence d’excréments de chat sur le tapis[7]. De plus, selon le bail, les locataires ne pouvaient garder des animaux dans le logement. Une somme de 104,90 $ est réclamée pour la location et les produits nécessaires au nettoyage du tapis[8].
[12] En ce qui a trait à la réclamation de 76,16 $, la locatrice explique que les locataires ont endommagé une partie du gazon par l’installation d’une petite piscine. Afin de remettre le terrain en état, des rouleaux de gazon ont dû être posés[9].
[13] Un éclat sur le plancher de la douche a également été constaté. Une somme de 137,97 $ a été engagée pour faire la réparation[10].
[14] La locatrice réclame une somme de 11,26 $ pour un dommage à une moustiquaire[11].
[15] Finalement, une somme de 800 $ est réclamée en raison de dommages au plancher de bois près de l’entrée. Des taches rouges sont présentes sur le revêtement, lesquelles sont toujours présentes malgré des tentatives de nettoyage. Afin de pouvoir retirer ces taches, un sablage et un vernissage du plancher est nécessaire, au coût de 800 $[12]. À ce jour, les travaux n’ont toujours pas été effectués, puisque le locataire actuel ne désire pas subir ces travaux.
[16] Monsieur Éric Breton a témoigné. Il est le conjoint de la locatrice. Essentiellement, il confirme que le logement était en bon état au 1er juillet 2016 et qu’au départ des locataires, il y avait un éclat dans la douche, que des murs dans les chambres étaient brisés et de couleur différente à celle originale, que le plancher de bois comportait des taches rouges et que le gazon avait été abîmé. Il confirme également que le tapis a été nettoyé.
Preuve des locataires
[17] À l’audience, seule la locataire est présente, refusant de représenter le locataire malgré une procuration.
[18] La locataire admet les taches rouges sur le plancher.
[19] Quant à l’éclat dans la douche, elle mentionne qu’il était présent lors de la prise de possession du logement. Il en est de même quant au dommage à la moustiquaire.
[20] Pour les dommages aux murs, elle mentionne qu’il s’agit d’un usage normal, soit l’installation de décorations. Pour le mur du salon, elle mentionne que celui-ci était de couleur rouge lors de leur emménagement.
[21] Elle ajoute qu’il y a eu une entente avec la locatrice pour les travaux de peinture et la réparation du gazon pour une somme de 100 $[13]. Malgré un virement de 100 $ à la locatrice, celle-ci ne l’a pas accepté.
[22] En ce qui a trait au tapis du sous-sol, elle nie que celui-ci était souillé. Elle mentionne que le tapis était très propre lors de son départ.
[23] Elle admet que le bail stipule que les animaux sont interdits. Elle ajoute cependant avoir requis l’autorisation de la locatrice avant de se procurer un chat et qu’elle l’a obtenue. Elle ajoute que jamais la locatrice ne s’est plainte de la présence du chat.
[24] Voilà ce qui résume l’essentiel de la preuve des parties.
DÉCISON
[25] Un locataire se doit
d’utiliser le logement avec prudence et diligence en vertu de l’article
«1855. Le locataire est tenu, pendant la durée du bail, de payer le loyer convenu et d'user du bien avec prudence et diligence. »
[26] L’article
« 1890. Le locataire est tenu, à la fin du bail, de remettre le bien dans l'état où il l'a reçu, mais il n'est pas tenu des changements résultant de la vétusté, de l'usure normale du bien ou d'une force majeure.
L'état du bien peut être constaté par la description ou les photographies qu'en ont faites les parties; à défaut de constatation, le locataire est présumé avoir reçu le bien en bon état au début du bail. »
[27] Le deuxième alinéa prévoit une présomption qu’un locataire est présumé avoir reçu le logement en bon état à défaut de constat des lieux ou de photographie.
[28] Il s’agit d’une présomption simple qui peut être repoussée par une preuve contraire[14].
[29] À cela s’ajoutent les
principes de l’article
« 1862. Le locataire est tenu de réparer le préjudice subi par le locateur en raison des pertes survenues au bien loué, à moins qu’il ne prouve que ces pertes ne sont pas dues à sa faute ou à celle des personnes à qui il permet l’usage du bien ou l’accès à celui-ci.
Néanmoins, lorsque le bien loué est un immeuble, le locataire n’est tenu des dommages-intérêts résultant d’un incendie que s’il est prouvé que celui-ci est dû à sa faute ou à celle des personnes à qui il a permis l’accès à l’immeuble. »
[30] Ce dernier article fait peser sur les épaules du locataire le fardeau de démontrer que les préjudices subis par le locateur ne proviennent pas de ses gestes.
[31] Dans l’affaire Maria-Chapdelaine (Municipalité régionale de comté de) c. Bleuetière péninsule Albanel inc.[15], la Cour supérieure rappelle l’obligation du locataire et le droit du locateur quant à la remise en état des lieux en ces termes :
« [132] Le locateur a droit à la remise des lieux dans l’état où ils se trouvaient lors de la prise de possession initiale. Il ne peut cependant réclamer une remise à neuf, car il doit assumer la détérioration et l’usure normales. Les lieux doivent donc être remis dans un état qui permet de les relouer sans avoir à procéder à plus que des travaux mineurs[13]. »
(Référence omise)
[32] Cela dit, le départ d'un locataire peut causer un rafraîchissement nécessaire au logement, de façon à favoriser sa relocation. Lorsque cela résulte d'une occupation normale, le locataire n'assume, en principe, aucune responsabilité, à cet égard. C'est le cas, notamment d'un nettoyage régulier, des travaux de plâtre et peinture rendus nécessaires par l'apposition de rideaux, stores, tableaux aux murs ou autres objets décoratifs. De la même façon, lorsqu'il y a restauration du plancher qui n'est pas causée par un abus ou une détérioration anormale, le locateur ne peut réclamer les coûts reliés à de tels travaux.
[33] Dans le présent cas, le Tribunal doit donc évaluer la situation factuelle afin de déterminer si le logement rendu l’a été de façon conforme aux principes ci-devant mentionnés.
[34] Les dommages au revêtement de plancher de bois par la présence de taches rouges ont été admis par la locataire. La preuve démontre que ces taches n’ont pu disparaître malgré des tentatives de nettoyage, et que pour pouvoir les retirer, des travaux de sablage et de vernissage sont nécessaires.
[35] Bien que la locataire conteste le montant réclamé par la locatrice, aucune preuve n’a été faite que ces travaux pouvaient être réalisés à un moindre coût. En conséquence, le Tribunal fait droit à la réclamation de la locatrice au montant de 800 $.
[36] Le Tribunal retient également que les locataires sont responsables de l’éclat sur le plancher de la douche. La preuve est prépondérante que celui-ci n’était pas présent lors de la délivrance du logement. De plus, il ne s’agit pas d’une usure normale pour le Tribunal. Il fait donc droit à la réclamation au montant de 137,97 $.
[37] Quant à la moustiquaire, cette réclamation n’est pas comprise dans la demande de la locatrice. Le Tribunal ne pouvant adjuger au-delà de ce qui est réclamé, cette réclamation est rejetée. De plus, la preuve ne démontre pas que les locataires l’ont endommagée.
[38] Relativement à la réclamation pour le nettoyage du tapis, le Tribunal rejette cette réclamation. La preuve ne démontre pas que le tapis était souillé ou qu’il a été laissé dans un mauvais état de propreté. De plus, la preuve non contredite démontre que la locatrice a accepté que les locataires se procurent un chat sans condition particulière.
[39] Restent les réclamations pour la peinture et le gazon. Or, la preuve démontre qu’une entente est intervenue entre les parties sur ces deux réclamations.
[40] En effet, le 20 juin 2018, les locataires transmettent un message texte à la locatrice mentionnant : « Nous avons évalué la pelouse et peinture et arrivons au montant de 100 doll. Ce paiement final sera fait le 30 juin par virement interac. » [sic]
[41] Le 21 juin 2018, la locatrice répond : « Pour la peinture chambre enfant en haut et petit mur du salon et remplacement de tourbe pour piscine à 100$ c’est correct. » [sic]
[42] Pour le Tribunal, il y a eu échange de consentement
entre les parties et, par conséquent, transaction entre les parties au sens de
l’article
[43] Par conséquent, le Tribunal ne peut revenir sur cette entente qui lie les parties.
[44] Reste que la somme de 100 $ n’est pas payée par les locataires, puisque la locatrice a refusé le virement. Par conséquent, le Tribunal fait droit à cette réclamation pour une somme de 100 $ uniquement.
[45] Quant aux dommages de l’autre chambre, le Tribunal est d’avis que ceux-ci résultent d’un usage normal relié à l’installation d’articles de décoration.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[46] ACCUEILLE en partie la demande;
[47] CONDAMNE les
locataires à payer à la locatrice la somme de 1 037,97 $, le tout
avec les intérêts et l’indemnité additionnelle prévue à l’article
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Philippe Morisset |
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Présence(s) : |
la locatrice la locataire |
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Date de l’audience : |
27 novembre 2020 |
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[1] Pièce P-1.
[2] Pièce P-2.
[3] Voir photos, pièce P-3.
[4] Voir facture pièce P-3.
[5] Voir facture, pièce-7.
[6] Voir section E du bail, pièce P-1.
[7] Voir pièce P-4.
[8] Voir pièce P-10.
[9] Voir photos et factures en liasse, pièce P-6.
[10] Voir photos et facture en liasse, pièce P-9.
[11] Pièce P-7.
[12] Voir photos et soumission en liasse, pièce P-8.
[13] Voir message texte produit sous la pièce L-1.
[14] Article
[15] Maria-Chapdelaine
(Municipalité régionale de comté de) c.
Bleuetière péninsule Albanel inc.,
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
appel; la consultation
du plumitif s'avère une précaution utile.