Pierre c. R. | 2023 QCCA 84 | ||||
COUR D’APPEL | |||||
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CANADA | |||||
PROVINCE DE QUÉBEC | |||||
GREFFE DE
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N° : | |||||
(500-01-088674-137) | |||||
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DATE : | 23 janvier 2023 | ||||
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VICKNEY STANDLEY PIERRE | |||||
APPELANT – accusé | |||||
c. | |||||
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SA MAJESTÉ LE ROI | |||||
INTIMÉ – poursuivant | |||||
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MISE EN GARDE : Une ordonnance de non-publication en vertu de l’article
[1] Le 26 février 2018, près de 5 ans après sa mise en accusation[1], alors que le dossier est prêt et que la durée prévue de son procès est de 5 jours, l’appelant plaide coupable à l’infraction d’avoir, le 5 septembre 2012, agressé sexuellement X, alors que cette dernière était âgée de 14 ans[2] et lui de 26.
[2] En 2012, ce crime était passible d’une peine d’emprisonnement maximale de 10 ans. Le 17 juillet 2015, la Loi sur le renforcement des peines pour les prédateurs d’enfants[3] entre en vigueur et porte la peine maximale à 14 ans[4].
[3] Cela étant, le 25 mars 2021, la Cour du Québec, Chambre criminelle et pénale, district de Montréal (l’honorable Nathalie Duchesneau), condamne l’appelant à une peine d’emprisonnement de quatre ans[5].
[4] L’appelant se pourvoit. Il soutient que la juge a commis des erreurs en droit ou de principe lors de la détermination de la peine et que cette dernière est manifestement non indiquée. Il requiert que la Cour y substitue une peine de deux ans moins un jour.
[5] La Cour conclut au rejet de l’appel.
[6] Les circonstances pré, per et post agression ont fait l’objet d’un « résumé des faits sur plaidoyer » convenu entre les parties. La juge le reproduit dans le jugement entrepris :
L’accusé rencontre la victime X, âgée de 14 ans, en juillet 2012 via Facebook, suivant une « demande d’ajout d’ami » de cette dernière après qu’elle eut visionné une vidéo musicale où l’accusé chante. Elle mentionne à ce moment qu’elle le trouve « cute » ce à quoi l’accusé a répondu merci. Des échanges virtuels s’en sont suivis et l’accusé lui a donné son numéro de téléphone cellulaire. X communique avec lui et ils entretiennent par la suite des contacts téléphoniques fréquents.
À un certain point, l’accusé invite X chez lui. Après sa journée d’école, vêtue de son uniforme scolaire, elle se présente chez l’accusé pour cette première rencontre physique. L’accusé lui offre un mélange d’alcool vodka et jus d’orange qu’elle accepte. Suivant cette consommation qu’elle trouve très forte, la victime indique être en état d’ébriété mais a consommé d’autre vodka à l’insistance de l’accusé.
Ils ont regardé la télévision pendant quelques minutes et ensuite, ils se sont dirigés dans la chambre à coucher où ils ont eu une relation sexuelle complète, avec pénétration vaginale et fellation. X mentionne à plusieurs reprises, au cours de cet événement, qu’elle ne veut pas, d’arrêter, que ça lui fait mal et que ça brûle. L’accusé a utilisé de l’huile de bébé afin de faciliter la pénétration. Dès le début et tout au cours des attouchements, elle a tenté de le repousser avec le peu de force dont elle était capable malgré son état d’intoxication.
Suivant cet événement, la victime ne se sent pas bien et manifeste le désir de quitter l’appartement. Elle demande à l’accusé de la conduire à l’arrêt d’autobus, ce qu’il accepte. En chemin, la victime est prise de nausées et débarque de la voiture pour vomir, où elle s’effondre à demi-consciente suivant son état d’intoxication.
Il est à noter que l’alcoolémie de X au moment des événements est évaluée de 198mg à 208mg/100ml, état d’intoxication étant qualifié d’ébriété avancé ou d’ivresse franche. La fraction spermatozoïde de l’ADN de l’accusé a également été trouvé sur la culotte de la victime lors d’une analyse biologique.[6]
[7] À la suite du plaidoyer de culpabilité de l’appelant le 26 février 2018, des ordonnances sont rendues par la juge afin d’obtenir un rapport présentenciel et une évaluation psychosexuelle et, à la suite de la transmission de ces deux documents aux parties, les observations sur la peine sont reportées de plusieurs mois, essentiellement en raison des délais associés à deux requêtes infructueuses pour retrait de plaidoyer initiées successivement par l’appelant, représenté à chaque occasion par des procureurs différents. La première fut rejetée, la seconde également, mais dans ce cas de façon sommaire, sur requête en rejet de l’intimé. Au soutien du rejet de la première requête, la juge écrit ce qui suit[7] :
[21] En réponse à la requête pour retrait de plaidoyer, l’intimée a déposé divers documents en liasse et a fait entendre M. Gabriel Spina, représentant du ministre pour l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC).
[22] M. Spina est venu brosser un portrait de la situation actuelle du requérant tout en résumant les étapes importantes qui ont jalonné son dossier d’immigration.
[23] À l’heure actuelle, vu l’antécédent de fraude de plus de 5 000$ déjà à son dossier et considérant qu’il n’a plus le statut de résident permanent, la demande d’asile étant par le fait même devenue irrecevable, le requérant fait déjà face à une mesure d’expulsion, et ce, quelle que soit l’issue de la présente requête.
[24] Tel qu’expliqué par le témoin, la seule option alors restante pour celui-ci étant celle de présenter une demande d’examen des risques avant renvoi, processus au cours duquel pourraient être considérés plusieurs éléments dont, entre autres, toutes condamnations du requérant.
[…]
[71] En définitive, compte tenu de toutes les circonstances dont l’historique du dossier d’immigration du requérant, ses prétentions selon lesquelles, au moment où il a enregistré son plaidoyer de culpabilité, il n’était pas en mesure de savoir que son statut était possiblement en péril ne sont pas supportées par la preuve et apparaissent aux yeux Tribunal totalement dépourvues de crédibilité.
[Italiques dans l’original; soulignement ajouté; renvoi omis]
[8] L’appelant n’a pas tenté de porter ce jugement en appel, ni celui rendu en octobre 2020 accueillant la requête de l’intimé et rejetant sommairement sa deuxième requête en retrait de plaidoyer[8].
[9] L’audition sur la peine a finalement lieu les 16 et 17 décembre 2020. À ces dates, en sus du rapport d’évaluation psychosexuelle et du rapport présentenciel requis par la juge, l’appelant produit un rapport daté du 8 décembre précédent de son psychologue traitant, lequel le suit alors depuis sept mois.
[10] Le jugement entrepris, qui compte 126 paragraphes de motifs, 4 annexes et 83 notes de bas de page, est rendu le 25 mars 2021.
[11] Le jugement est structuré et minutieux. La juge résume d’abord les étapes du dossier depuis le plaidoyer de culpabilité de l’appelant en 2018[9] et cerne la position des parties[10]. Elle analyse ensuite la preuve, notamment celle concernant le changement dans le statut d’immigration de l’appelant, et les rapports des experts de 2018 et 2020[11]. Puis, elle revoit les principes de détermination de la peine, incluant les fourchettes applicables à l’aune des directives de la Cour suprême dans l’arrêt Friesen[12], analyse le tout[13] et conclut que l’atteinte à l’intégrité physique, sexuelle et psychologique de la victime est « considérable »[14] et que la responsabilité de l’appelant est « manifestement élevée et entière »[15]. Au bout du compte, la juge lui impose une peine d’emprisonnement de quatre ans[16].
[12] C’est au paragraphe 124 du jugement que la juge résume les facteurs qu’elle retient pour déterminer la peine :
[124] En résumé, à titre de facteurs pertinents, le Tribunal retient les suivants:
[13] L’appelant formule quatre questions en litige, auxquelles la Cour s’emploie maintenant à répondre.
[14] Les remords et l’introspection qu’invoque l’appelant semblent constituer des variations sur le même thème. La Cour en traitera néanmoins séparément.
[15] Cela dit, rappelons d’emblée qu’un jugement doit être apprécié globalement, plutôt qu’en analysant certains de ses passages en vase clos.
[16] Dans l’arrêt récent R. c. G.F.[17], la Cour suprême rappelle par ailleurs la norme applicable à l’examen des motifs du juge d’instance au stade de l’appel. Avec les adaptations qui s’imposent, certains enseignements qui ressortent de cet arrêt sont pertinents à l’analyse de toutes les questions que l’appelant soulève :
(1) Examen en appel des motifs de première instance
[68] […] [D]ans l’arrêt Sheppard, la Cour a souligné que, aux fins d’examen en appel, « l’obligation d’exposer des motifs est dictée par les circonstances de l’affaire plutôt que par des notions abstraites de responsabilité judiciaire ». En appel, il s’agit de savoir s’il y a erreur susceptible de révision. Ce qui est exigé, c’est que les motifs soient suffisants dans le contexte de l’affaire sur laquelle ils portent.
[69] […] Les juridictions d’appel ne doivent pas décortiquer avec finesse les motifs du juge du procès à la recherche d’une erreur. Leur tâche est beaucoup plus retreinte : elles doivent se demander si les motifs, situés dans leur contexte et pris dans leur ensemble, à la lumière des questions en litige au procès, expliquent ce qu’a décidé le juge du procès et les raisons pour lesquelles il l’a fait d’une façon qui permet un examen efficace en appel. […]
[70] La Cour a aussi mis l’accent sur l’importance d’examiner le dossier lorsqu’il s’agit de déterminer si les motifs du juge du procès sont suffisants. Il en est ainsi parce que les « mauvais motifs » ne constituent pas un moyen d’appel indépendant. Si les motifs de première instance n’expliquent pas le « résultat » et le « pourquoi », mais que les réponses à ces questions ressortent clairement du dossier, il n’y aura pas d’erreur.
[71] Les motifs doivent être suffisants autant sur le plan factuel que sur le plan juridique. Sur le plan des faits, les motifs doivent permettre de comprendre ce que le juge du procès a décidé et pourquoi. Il s’agit habituellement d’un critère très peu exigeant, particulièrement compte tenu de la possibilité d’examiner le dossier. Même si le juge du procès s’est mal exprimé, la cour d’appel qui comprend le « résultat » et le « pourquoi » à partir du dossier peut expliquer le fondement factuel de la conclusion à la partie lésée. Il est très rare que ni la partie lésée ni la cour d’appel ne pourra comprendre le fondement factuel des conclusions du juge du procès.
[…]
[74] […] La suffisance en droit est étroitement liée au contexte et doit être appréciée à la lumière des questions en litige au procès. Le juge du procès n’a aucune obligation d’expliquer les éléments du droit criminel qui ne sont pas contestés dans l’affaire dont il est saisi. Il en est ainsi en raison de la présomption d’application correcte, soit celle portant que « [le juge du procès] comprend les principes fondamentaux du droit criminel en cause dans le procès ». Comme il est indiqué dans l’arrêt R. c. Burns […], « [l]es juges du procès sont censés connaître le droit qu’ils appliquent tous les jours ». Il faut garder cette présomption à l’esprit lors de l’interprétation fonctionnelle et contextuelle. Les juges présidant des procès sont occupés. Ils n’ont pas à faire la démonstration de leur connaissance des principes fondamentaux du droit criminel.
[…]
[76] Malgré les indications claires données par la Cour depuis que l’arrêt Sheppard a été rendu il y a 19 ans, selon lesquelles l’examen des motifs doit être fonctionnel et contextuel, nous continuons à voir des décisions des juridictions d’appel où le tribunal passe au peigne fin le texte des motifs de première instance à la recherche d’une erreur. Cela se produit particulièrement dans des affaires d’agression sexuelle […].
[Soulignements et caractères gras ajoutés; références omises]
[17] La lecture du jugement entrepris permet de constater que, si la juge ne les mentionne pas expressément au titre de facteurs atténuants, elle a bel et bien, plusieurs fois plutôt qu’une, considéré les remords exprimés par l’appelant et la démarche thérapeutique qu’il a entreprise auprès du Dr Ravart[18].
[18] Ainsi, plutôt qu’une omission pure et simple d’avoir considéré un facteur atténuant pertinent, comme le suggère cette première question telle que l’appelant la formule, ce qui traduirait une erreur de principe, ce dernier remet en réalité en question l’insuffisance du poids donné par la juge à l’expression de ses remords et à ses démarches de réhabilitation.
[19] Il est en effet révélateur que l’appelant lui reproche d’avoir erré en accordant une importance « démesurée » à l’évaluation psychosexuelle du Dr Bergeron, psychologue, et au rapport présentenciel de l’agente de probation Baudard, tous deux réalisés en mai 2018. Il propose que, ce faisant, la juge a accordé un poids trop faible à la démarche thérapeutique et à l’introspection dont il a fait preuve, tel qu’en atteste son psychologue traitant, le Dr Ravart, dans son propre rapport du 8 décembre 2020. Ce rapport, ajoute l’appelant, est ainsi plus représentatif de son « portrait » en date des observations sur la peine.
[20] Or, comme le rappelle aussi la Cour suprême, cette fois dans l’arrêt Lacasse[19], la décision d’accorder plus ou moins d’importance à des circonstances aggravantes ou atténuantes relève strictement du pouvoir discrétionnaire du juge qui prononce la peine[20]. Une cour d’appel ne peut intervenir simplement parce qu’elle leur aurait attribué un poids différent[21]. Il en va de même du poids accordé par le juge des faits à l’opinion d’un expert par rapport à celle d’un autre[22].
[21] Les situations pouvant justifier l’intervention d’une cour d’appel en matière de peine sont bien connues. Elles ont été énoncées dans l’arrêt Lacasse, et réitérées notamment dans l’arrêt Friesen : (1) la peine n’est manifestement pas indiquée ou (2) le juge de la peine a commis une erreur de principe qui a eu une incidence sur la détermination de la peine[23]. L’erreur de principe est par ailleurs définie ainsi dans Friesen :
[26] […] Parmi les erreurs de principe, mentionnons l’erreur de droit, l’omission de tenir compte d’un facteur pertinent ou encore la considération erronée d’un facteur aggravant ou atténuant. La manière dont le juge de première instance a soupesé ou mis en balance des facteurs peut constituer une erreur de principe seulement s’il a « exercé son pouvoir discrétionnaire de façon déraisonnable, en insistant trop sur un facteur ou en omettant d’accorder suffisamment d’importance à un autre ». Ce ne sont pas toutes les erreurs de principe qui sont importantes : la cour d’appel ne peut intervenir que lorsqu’il ressort des motifs du juge de première instance que l’erreur a eu une incidence sur la détermination de la peine. Si une erreur de principe n’a eu aucun effet sur la peine, cela met un terme à l’analyse de cette erreur et l’intervention de la cour d’appel ne se justifie que si la peine n’est manifestement pas indiquée.[24]
[Soulignements ajoutés; références omises]
[22] En l’espèce, l’appelant échoue à démontrer que la juge a commis l’un ou l’autre de ces types d’erreur révisable.
[23] En ce qui concerne l’expression des remords, le moment où le contrevenant les exprime peut influer sur le poids que leur accorde le juge chargé de déterminer la peine. Par exemple :
[25] Il va de soi que l’expression tardive de regrets survenant de plus, à l’approche de l’imposition d’une sanction, peut influer sur la perception de leur sincérité et sur le poids qui leur seront accordés par le juge.[25]
[Soulignement ajouté]
[24] Si la juge n’a pas expressément commenté la sincérité des remords exprimés par l’appelant, dans l’arrêt G.B. c. R.[26], la Cour a néanmoins considéré suffisant que le juge d’instance ait mentionné les remords du contrevenant dans le cadre de son résumé du témoignage de ce dernier[27]. Or, la juge va plus loin en notant que le psychologue de l’appelant, le Dr Ravart, considère que son patient éprouve des remords sincères[28], et en faisant référence aux regrets et aux excuses exprimés par l’appelant à titre d’observations finales[29]. On ne saurait conclure qu’elle n’a pas analysé le tout dans l’exercice global de détermination de la peine simplement parce qu’elle ne réitère pas expressément les remords lorsqu’elle résume les facteurs pertinents qu’elle retient[30].
[25] D’autant plus qu’il est possible de déduire d’une lecture globale du jugement entrepris qu’elle a pris ces remords en considération. Au surplus, alors que l’intimé lui suggérait une peine de cinq ans en insistant notamment sur la tardiveté de ces remords et des démarches thérapeutiques de l’appelant, la juge n’a pas retenu cette suggestion et lui a imposé une peine moindre.
[26] L’examen du dossier et le jugement révèlent effectivement que l’appelant n’a exprimé ses remords que tardivement, soit en 2020 lors des observations sur la peine[31], huit ans après l’infraction, sept ans après sa mise en accusation et deux ans après son plaidoyer de culpabilité et après avoir reçu copie de l’évaluation psychosexuelle et du rapport présentenciel, lesquels faisaient état de cette lacune d’autocritique.
[27] Ainsi, dans son évaluation, le Dr Bergeron, qui évalue le risque de récidive à « faible-modéré », note entre autres que la version que lui présente l’appelant comporte « d’importantes divergences d’avec les documents officiels et le résumé des faits » et que « [l]e sujet ne nous semble pas entièrement inconscient des impacts de ses comportements sur la victime mais l’ampleur des défenses qu’il met en place pour s’abstraire de sa responsabilité en la faisant assumer à la victime l’empêche d’éprouver de véritables remords »[32]. Il ajoute : « Confronté à la réaction de la victime et aux conséquences, les conduites subséquentes de Monsieur témoignent d’un fort besoin de se décharger de toute responsabilité. Ses propos peuvent s’avérer par moments dénigrants à l’égard de l’adolescente »[33]. Dans son rapport présentenciel, Mme Baudard, agente de probation, qui conclut quant à elle à un risque de récidive modéré, écrit que « [b]ien que le sujet ait plaidé coupable aux faits contenus au résumé des faits sur plaidoyer, il a peu de reconnaissance face à ceux-ci. […] [I]l réfute [que la victime] lui ait demandé d’arrêter les gestes sexuels ou même qu’elle ressentait de la douleur »[34].
[28] Ce n’est que dans son rapport du 8 décembre 2020, après les tentatives infructueuses de l’appelant pour retirer son plaidoyer de culpabilité en 2019 et à l’automne 2020[35], que le Dr Ravart, psychologue traitant de ce dernier (qui prend la peine de souligner qu’il n’agit pas à titre d’évaluateur indépendant[36]), note que « [f]ace à son délit, monsieur Pierre reconnaît qu’il a manqué de prudence et de considération envers la victime. Il s’en veut et ressent une grande peine en regard des torts qu’il a causés et de la situation actuelle qu’il vit. L’expression de ses sentiments de remords m’apparaît honnête et sincère ». Il est incidemment opportun de souligner, voire de réitérer, que l’appelant a initié ses démarches auprès du Dr Ravart quelques mois avant les observations sur la peine, en mai 2020, soit huit ans après la commission du crime.
[29] Étant donné ce qui précède, l’appelant a tort de reprocher à la juge d’avoir omis de tenir compte de ses remords, qu’il a effectivement exprimés avec retard, bien qu’il eût été plus prudent et clair pour d’aucuns qu’elle les mentionne expressément dans la liste des facteurs pertinents.
[30] En ce qui concerne l’introspection dont a fait preuve l’appelant et que la juge, selon lui, aurait aussi omis de considérer, cette dernière, au contraire, considère manifestement cette introspection liée à la démarche initiée auprès du Dr Ravart lorsqu’elle observe :
Par ailleurs, tout en demeurant un élément fondamental à prendre en compte, les efforts de réhabilitation entrepris, cependant tardifs, ne suffisent pas non plus à écarter ou atténuer l’importance et la gravité des gestes.[37]
[Soulignements ajoutés; renvoi omis]
[31] De même, elle mentionne également l’implication de l’appelant dans ce processus thérapeutique[38] et prend spécifiquement en compte les « considérations extrinsèques à l’infraction ayant trait […] à sa réhabilitation entreprise » à la fin de son jugement[39].
[32] Pour ces raisons, cet argument, qui constitue au moins en partie une variation sur celui de l’omission d’avoir considéré les remords, n’est pas davantage fondé et doit être rejeté.
[33] Selon l’appelant, la juge a commis une erreur de droit en retenant ce facteur aggravant puisqu’il n’a pas été prouvé hors de tout doute raisonnable. Le résumé conjoint des faits, précise-t-il, ne fait état de rien qui pourrait dénoter l’existence d’une relation « forte et axée sur la confiance de la plaignante à l’égard de l’appelant »[40]. En retenant ce facteur non prouvé, la juge a conséquemment accordé trop de poids aux objectifs de dénonciation et de dissuasion[41].
[34] Ce reproche est mal fondé.
[35] Les situations d’abus de confiance ou d’autorité ne sont pas restreintes au « cas classique » mettant en cause un membre de la famille, un gardien, enseignant ou médecin[42]. La relation de confiance établie entre un agresseur et une victime n’a pas non plus à être « forte », comme le propose l’appelant, pour être prise en compte parmi les facteurs aggravants. Le degré de cette relation pourra toutefois affecter le poids à lui donner dans la pondération globale des facteurs pertinents. Mais, indubitablement, quel que soit le degré de la relation de confiance établie entre un adulte et une victime âgée de moins de 18 ans, son existence constitue selon le législateur une circonstance aggravante[43], d’une part, et accroîtra l’importance de l’attention particulière que le juge devra porter aux objectifs de dénonciation et dissuasion, d’autre part[44].
[36] Dans l’arrêt R. c. Audet, rendu en 1996, la Cour suprême commentait ainsi la notion de « situation de confiance » :
XXXVI. J’ajouterai que la définition de la portée des expressions utilisées par le législateur, tout comme la détermination dans chaque cas de la nature de la relation entre l’adolescent et l’accusé, doit se faire en fonction du but et de l’objectif poursuivis par le législateur de protéger les intérêts des adolescents qui, en raison de la nature de la relation qu’ils vivent avec certaines personnes, se trouvent à l’égard de celles-ci en situation de vulnérabilité et de faiblesse.
XXXVII. Même à la lumière de ces définitions, le concept de « situation de confiance », peut-être davantage que l’expression « situation d’autorité », demeure difficile à définir dans l’abstrait, en l’absence de contexte factuel. Pour cette raison, il serait inapproprié de la part de notre Cour de tenter d’en tracer les limites dans un vacuum factuel […].
XXXVIII. Il reviendra au juge du procès de déterminer, en analysant toutes les circonstances factuelles pertinentes à la qualification de la relation prévalant entre l’adolescent et l’accusé, si l’accusé se trouvait en situation d’autorité ou de confiance vis-à-vis de l’adolescent ou encore si l’adolescent était en situation de dépendance face à l’accusé au moment de l’infraction qu’on lui reproche. Nul doute qu’une des difficultés, dans certains cas, sera de déterminer les moments où, dans le temps, débute et où se termine la « situation » en question. Il serait inopportun de tenter d’énumérer de façon exhaustive les éléments dont devra tenir compte le juge des faits. Certes, la différence d’âge entre l’accusé et l’adolescent, l’évolution de leur relation et, surtout, le statut de l’un par rapport à l’autre seront pertinents dans bien des cas.[45]
[Soulignements et caractères gras ajoutés]
[37] Plus près de nous, la Cour suprême a souligné dans l’arrêt Friesen que, parmi les circonstances aggravantes visées à l’alinéa
[
[126] Tout abus de confiance est susceptible d’accroître le préjudice causé à la victime et, partant, la gravité de l’infraction. Comme la juge d’appel Saunders l’a expliqué dans l’arrêt D.R.W., dans de tels cas, on devrait mettre l’accent sur [traduction] « la mesure dans laquelle la relation de confiance a été violée ». […][46]
[Soulignements ajoutés; références omises]
[38] La Cour d’appel de l’Alberta s’exprimait au même effet dans l’arrêt Lemay :
[33] A trust, authority or dependency relationship is not based on fixed or stereotypic categories. "The law recognizes a large category of relationships which have elements of trust in them". Trust relationships can include situations where a person inserts himself as a friend or advisor, insinuates himself into the daily life of young persons or acts as a trusted friend.[47]
[Soulignements ajoutés; références omises]
[39] Enfin, la Cour abondait récemment en ce sens dans l’arrêt Mentor c. R. :
[98] L’acception de l’abus de confiance retenue par la Cour suprême dans l’arrêt R. c. Audet est large. La qualification est affaire de contexte, fait appel au concept de « situation de confiance », n’impose aucun rapport de dépendance ou relation de fiduciaire et est tributaire de la preuve administrée devant la juge du procès.[48]
[Soulignement ajouté; renvois omis]
[40] En l’espèce, suffisamment d’éléments permettaient à la juge de retenir un « contexte d’abus de confiance et d’autorité »[49] parmi les facteurs pertinents à la détermination de la peine. La victime et l’appelant, bien qu’ils se connaissaient assez peu, n’étaient pas des inconnus. Après que la victime l’eut contacté sur Facebook, notamment parce qu’il était chanteur au sein d’un groupe de musique, ils ont entretenu une relation constituée d’abord d’échanges virtuels puis, après que l’appelant lui eut donné son numéro de cellulaire, d’appels téléphoniques fréquents pendant deux à trois mois avant l’agression. Le Dr Ravart, psychologue traitant de l’appelant, mentionne dans son rapport que ce dernier « s’est accroché à l’attention positive que la victime avait à son égard au cours de leurs échanges téléphoniques »[50]. Au bout du compte, la victime accepte l’invitation de l’appelant à se rendre chez lui après l’école, où ce dernier lui offre un mélange de vodka et de jus d’orange et l’incite à continuer à en consommer, et ce, malgré qu’elle lui confie se sentir en état d’ébriété, augmentant ainsi sciemment son état de vulnérabilité et de faiblesse. Rappelons que l’appelant était alors âgé de 26 ans, et la victime de 14 ans à peine.
[41] Comme l’a observé la Cour suprême à plus d’une reprise, faisant ainsi écho à cette reconnaissance par le législateur, les relations sexuelles entre un adulte et un adolescent constituent intrinsèquement un acte d’exploitation en raison du manque de maturité, de jugement et d’expérience de ces derniers[51]. Récemment, dans l’arrêt Londono[52], le juge Gagnon, après un rappel d’énoncés de principe pertinents[53], rappelait pour la majorité que la différence d’âge entre l’auteur de l’agression et la victime (âgée de 13 ans dans cette affaire) constitue une considération importante puisqu’elle établit en soi, la plupart du temps, un rapport de force inégal et induit chez cette dernière un état de vulnérabilité[54].
[42] Au vu de ces circonstances, et considérant le spectre élargi des situations d’abus de confiance et d’autorité possibles, l’appelant échoue à convaincre la Cour que la juge a commis une erreur révisable en retenant l’existence d’une telle situation comme facteur aggravant en l’espèce.
3e question : La juge a-t-elle commis une erreur de droit déterminante en écartant l’ensemble de la jurisprudence pertinente antérieure à l’arrêt Friesen?
[43] En résumé, l’appelant reproche à la juge d’avoir écarté le processus d’individualisation de la peine fondé sur l’examen de toutes les circonstances, principe dont la Cour suprême a souligné l’importance dans l’arrêt Nasogaluak[55]. Ce principe, insiste-t-il, aurait dû amener la juge à lui imposer une peine de deux ans moins un jour conformément à la fourchette inférieure des peines établie dans Cloutier[56]. Au vu de l’ensemble des circonstances et malgré sa situation individuelle, la juge a commis une erreur de droit en mettant une emphase déraisonnable sur l’alourdissement des peines préconisé dans l’arrêt Friesen en matière d’agression sexuelle contre les enfants et les adolescents.
[44] En effet, ajoute l’appelant, cet arrêt « n’a pas sonné le glas d’une évaluation judiciaire des facteurs et caractéristiques personnelles du contrevenant qui doivent être pris en compte et pondérés dans le respect des principes de proportionnalité et d’individualisation »[57].
[45] Cet exposé de principe de l’appelant est théoriquement sans faille, mais sa prétention que la juge l’a ignoré ne résiste pas à l’analyse.
[46] Certes, la Cour suprême a rappelé dans l’arrêt Nasogaluak, en insistant au passage sur le pouvoir discrétionnaire du juge à cet égard, qu’afin de respecter le principe suivant lequel la peine imposée doit être proportionnelle à la gravité de l’infraction et au degré de responsabilité du délinquant, la peine doit être le résultat d’un processus d’évaluation individualisé :
[43] Les articles
[Soulignements et caractères gras ajoutés; références omises]
[47] Toutefois, dix ans plus tard, dans Friesen, la Cour suprême opère « une mise à niveau des principes de sentencing »[59] dans le cas particulier des infractions sexuelles commises contre des enfants et adolescents. Le message est clair : ces infractions sont intrinsèquement répréhensibles et causent des torts considérables[60]. Cela doit se refléter à la hausse, tant en ce qui concerne la gravité de l’infraction que le degré de responsabilité du délinquant qui la commet, ce qui, en retour, a une incidence sur l’application du principe de proportionnalité[61].
[48] En ce sens, ajoute la Cour suprême, lorsque les circonstances le nécessitent, les tribunaux peuvent, et parfois doivent, s’écarter, vers le haut, des précédents et des fourchettes de peines antérieures afin d’infliger une peine proportionnelle en ces matières[62], d’autant plus que le législateur a augmenté la peine maximale pour ce type d’infraction et que la société comprend mieux aujourd’hui la gravité du préjudice qui en découle[63]. Concernant plus particulièrement la situation des adolescentes, la Cour ajoute :
[136] Or, les tribunaux doivent aussi prendre bien soin d’infliger des peines proportionnelles dans les cas où la victime est un adolescent. Des peines disproportionnellement clémentes sont infligées depuis longtemps dans de tels cas, surtout dans ceux mettant en cause des adolescentes, alors que les adolescents forment peut‑être un groupe d’âge qui est de façon disproportionnée victime de violence sexuelle. Plus particulièrement, la violence sexuelle commise par des adultes de sexe masculin à l’endroit d’adolescentes s’accompagne de taux plus élevés de blessures physiques, de suicide, de toxicomanie et de grossesses non désirées.[64]
[Soulignements ajoutés, références omises]
[49] La juge a pris tous ces enseignements en compte. En effet, rappelant notamment l’importance du principe de proportionnalité[65], les extraits pertinents de l’arrêt Nasogaluak en matière d’individualisation de la peine[66], les fourchettes de peines pré-Friesen discutées dans l’affaire Cloutier et l’opinion des auteurs à ce sujet[67], puis celles proposées par le juge Moldaver, alors de la Cour d’appel de l’Ontario, dans R. v. Woodward[68], et rappelé les énoncés de principe de l’arrêt Friesen[69], la juge résume adéquatement sa tâche de la façon suivante :
[81] Partant de tous ces principes, le Tribunal devra maintenant les harmoniser aux enseignements modernes de la Cour suprême dans Friesen.
[…]
[88] Rappelons qu’en individualisant la peine, le Tribunal doit toujours se pencher sur tous les faits propres à chaque dossier et seulement sur ces derniers.
[50] De plus, contrairement à ce que suggère cette troisième question telle que formulée par l’appelant, la juge réfère aux fourchettes de peines pré-Friesen au paragraphe 75 de son jugement. Le paragraphe 23 et la note de bas de page 12 permettent quant à eux de constater qu’elle distingue la jurisprudence soumise par l’une et l’autre des parties, qu’elle prend la peine d’énumérer aux annexes I, IIa et IIb du jugement. On ne saurait certes lui reprocher de ne pas l’avoir passée en revue pour en expliquer les distinctions dans chaque cas. Enfin, certaines autres notes de bas de page et les annexes IIa et IIb confirment que la juge a bel et bien référé à des décisions antérieures à Friesen, dont au moins une soumise par l’appelant concernant spécifiquement la détermination de la peine pour agression sexuelle, soit le jugement rendu dans R. c. Rasul[70]. Ce jugement réfère au surplus aux fourchettes de peines applicables à ce type d’infraction selon l’affaire Cloutier, soit avant Friesen, et aux auteurs et à la jurisprudence soumis tant par le poursuivant que par le contrevenant[71].
[51] Concernant plus spécifiquement l’erreur que l’appelant reproche à la juge d’avoir commise en situant sa peine dans une fourchette plutôt qu’une autre, ou plus exactement en ne l’ajustant pas à la baisse parmi les fourchettes antérieures à l’arrêt Friesen, dans le récent arrêt Parranto[72], la Cour suprême a renforcé le pouvoir discrétionnaire du juge chargé de la détermination de la peine, d’une part, et discuté du rôle des fourchettes aux fins de cet exercice ainsi que de la norme d’intervention en appel, d’autre part. Il est opportun de reproduire les extraits les plus pertinents de cet arrêt aux fins qui nous occupent :
(1) Principes fondamentaux en matière de détermination de la peine
[9] […]. S’apparentant davantage à un art qu’à une science, la détermination de la peine oblige les juges à examiner et à mettre en équilibre une multitude de facteurs. Bien qu’il soit régi par des objectifs et des principes clairement définis à la partie XXIII du Code criminel, le processus de la détermination de la peine implique l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire de la part des tribunaux chargés de déterminer les peines, qui doivent mettre en balance tous les facteurs pertinents afin d’atteindre les objectifs fondamentaux visés par la détermination de la peine.
[…]
[12] En ce qui concerne le rapport entre, d’une part, l’individualisation et, d’autre part, la proportionnalité et la parité, notre Cour a fait remarquer avec justesse ce qui suit dans l’arrêt Lacasse :
La proportionnalité se détermine à la fois sur une base individuelle, c’est‑à‑dire à l’égard de l’accusé lui‑même et de l’infraction qu’il a commise, ainsi que sur une base comparative des peines infligées pour des infractions semblables commises dans des circonstances semblables.
[…]
[29] Il est de jurisprudence constante que les cours d’appel ne peuvent modifier à la légère les décisions relatives à la peine. Il y a lieu d’accorder une grande latitude au juge qui prononce la peine, et ses décisions commandent un degré élevé de déférence en appel. […]
[30] Il vaut la peine de souligner que le choix de la fourchette de peines ou de l’une de ses catégories relève du pouvoir discrétionnaire du juge chargé de déterminer la peine et que ce choix ne peut, en soi, constituer une erreur susceptible de contrôle. Commet une erreur de droit la cour d’appel qui intervient pour la seule raison qu’elle aurait placé la peine dans une fourchette ou une catégorie différente. […]
[Soulignements et caractères gras ajoutés; références omises]
[52] Enfin, l’arrêt récent de la Cour dans l’affaire Fruitier[73] éprouve lui aussi l’argumentaire de l’appelant. Certains des propos suivants pourraient d’ailleurs être applicables, avec les adaptations qui s’imposent et en gardant à l’esprit la déclaration de la victime concernant les séquelles importantes et durables qu’elle éprouve toujours en raison de l’agression :
1. L’incidence de l’arrêt Friesen
[…]
[38] L’arrêt constitue une mise à niveau des principes de sentencing (ou d’application des peines) dans ce champ du droit criminel. […]. La Cour suprême y conclut que la détermination de la peine en matière de crimes sexuels contre des enfants doit refléter la compréhension actuelle de la violence sexuelle faite aux enfants. En conséquence, elle trace en formulant quelques directives le parcours à suivre à l’avenir.
[39] […] Un délinquant n’a donc pas droit aux principes et objectifs de détermination de la peine qui prévalaient au moment de la commission de l’infraction dont il a été déclaré coupable. Ce sont ceux en vigueur à l’époque de la détermination de la peine que l’on considère, sous réserve de la règle de la non-application d’une peine plus sévère que la peine maximale prévue lors de la commission de l’infraction. […]
[40] […]En s’inspirant de l’arrêt Friesen et en se fondant sur la compréhension actuelle des violences sexuelles faites aux enfants, le juge de première instance a correctement abordé la question de la détermination de la peine dans le cas de l’appelant. Certes, il n’y a aucune commune mesure entre les agissements de l’appelant et les circonstances des infractions commises dans l’affaire Friesen, marquées comme elles l’étaient par un degré anormalement élevé de dépravation. Et il est concevable que, si l’appelant s’était vu imposer une peine en 1976, celle-ci aurait été plus clémente que celle infligée en août 2021. Mais sa victime a témoigné sur les conséquences durables et préjudiciables que les infractions ont eues sur elle et cet aspect des choses, l’impact émotionnel et psychologique sur le plaignant, s’inscrit dans le droit sillage de l’arrêt Friesen. […]
[Soulignements et caractères gras ajoutés; italiques dans l’original; renvois omis]
[53] En somme, la juge a respecté la méthode de détermination de la peine expliquée dans l’arrêt Nasogaluak[74], elle a identifié les objectifs auxquels il lui fallait accorder plus de poids en l’espèce[75], elle a discuté des fourchettes de peines[76] et elle a considéré les facteurs atténuants et aggravants afin d’ajuster la peine imposée[77]. Et elle explique clairement ainsi son évaluation des peines pré et post Friesen imposées dans les jugements et arrêts que les parties lui ont soumis de part et d’autre :
[27] Ainsi, considérant que les peines imposées pour ce type d’infraction sont très variées et puisqu’aucune de ces décisions ne reflète précisément la situation sous étude, le Tribunal devra, dans son processus d’individualisation, pondérer l’ensemble de tous les facteurs pertinents dans la détermination de la peine, et ce, à la lumière des enseignements récents de la Cour suprême.[78]
[54] Pour toutes ces raisons, la démarche analytique suivie par la juge et le discernement[79] dont elle fait preuve à l’égard de la jurisprudence antérieure et postérieure à l’arrêt Friesen sont à l’abri de toute intervention.
[55] Les « effets de la peine » dont il est question ici réfèrent à son impact possible sur la décision que les autorités administrative et exécutive fédérales prendront à l’égard de l’appelant en vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés[80] (« LIPR »).
[56] Il est incidemment opportun de mentionner ici qu’outre la peine en litige qui lui fut imposée pour l’infraction d’agression sexuelle commise en 2012, l’appelant a aussi été déclaré coupable, le 14 décembre 2016, d’avoir commis une fraude d’une valeur de plus de 5 000 $[81]. La peine d’emprisonnement maximale prévue pour ce crime est de 14 ans[82]. Le 15 mai 2017, l’appelant s’est vu imposer pour cette infraction une peine d’une année de probation sans suivi et 150 heures de travaux communautaires. Cet aspect des antécédents de l’appelant ne fait pas l’objet de l’appel, mais fut abordé lors des observations à l’audience.
[57] Suivant la preuve d’expert administrée devant la juge, les déclarations de culpabilité en lien avec ces deux infractions emportent chacune une interdiction de territoire pour grande criminalité suivant l’alinéa
Grande criminalité
36 (1) Emportent interdiction de territoire pour grande criminalité les faits suivants :
a) être déclaré coupable au Canada d’une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans ou d’une infraction à une loi fédérale pour laquelle un emprisonnement de plus de six mois est infligé;
[…]
[Soulignements ajoutés] | Serious criminality
36 (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible on grounds of serious criminality for
(a) having been convicted in Canada of an offence under an Act of Parliament punishable by a maximum term of imprisonment of at least 10 years, or of an offence under an Act of Parliament for which a term of imprisonment of more than six months has been imposed;
[…]
[Underlinings added] |
[58] Ainsi, ne serait-ce qu’en raison de son plaidoyer de culpabilité à l’infraction d’agression sexuelle qui nous occupe en l’espèce, l’appelant fait face à une mesure de renvoi en Haïti, dont il a la nationalité. Il peut toutefois avoir recours à la procédure d’« examen des risques avant renvoi » afin de tenter d’obtenir la protection du ministre et éviter son expulsion, tel que le permet l’article
Demande de protection
112 (1) La personne se trouvant au Canada et qui n’est pas visée au paragraphe 115(1) peut, conformément aux règlements, demander la protection au ministre si elle est visée par une mesure de renvoi ayant pris effet ou nommée au certificat visé au paragraphe 77(1).
[…]
Restriction
(3) L’asile ne peut être conféré au demandeur dans les cas suivants :
a) […]
b) il est interdit de territoire pour grande criminalité pour déclaration de culpabilité au Canada pour une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans ou pour toute déclaration de culpabilité à l’extérieur du Canada pour une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans;
[…]
|
Application for protection
112 (1) A person in Canada, other than a person referred to in subsection 115(1), may, in accordance with the regulations, apply to the Minister for protection if they are subject to a removal order that is in force or are named in a certificate described in subsection 77(1).
[…]
Restriction
(3) Refugee protection may not be conferred on an applicant who
(a) […]
(b) is determined to be inadmissible on grounds of serious criminality with respect to a conviction in Canada of an offence under an Act of Parliament punishable by a maximum term of imprisonment of at least 10 years or with respect to a conviction outside Canada for an offence that, if committed in Canada, would constitute an offence under an Act of Parliament punishable by a maximum term of imprisonment of at least 10 years;
[…]
[Underlinings added] |
[59] La demande d’examen des risques avant renvoi est par ailleurs évaluée selon des critères qui diffèrent selon le statut du demandeur au Canada, les risques auxquels l’exposerait son renvoi, la nature de l’infraction en cause et, ce qui nous occupe en l’espèce, la durée de la peine qui lui a été imposée pour le crime commis, le tout suivant les articles 96 à 98[83] et 113 de la LIPR. S’agissant d’une personne interdite de territoire pour « grande criminalité », ce qui est le cas de l’appelant vu la peine maximale rattachée au crime dont il a été déclaré coupable, une peine d’emprisonnement égale ou inférieure à deux ans moins un jour, ce que réclame l’appelant par le présent appel, n’est pas ajoutée aux facteurs que les autorités doivent prendre en considération, alors qu’une peine de deux ans ou plus l’est et peut affecter d’autant le sort de l’examen des risques que pose le demandeur :
96 A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :
a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;
b) soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.
Personne à protéger
97 (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :
a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;
b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :
(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,
(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,
(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,
(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.
[…]
Examen de la demande
113 Il est disposé de la demande comme il suit :
a) le demandeur d’asile débouté ne peut présenter que des éléments de preuve survenus depuis le rejet ou qui n’étaient alors pas normalement accessibles ou, s’ils l’étaient, qu’il n’était pas raisonnable, dans les circonstances, de s’attendre à ce qu’il les ait présentés au moment du rejet;
b) une audience peut être tenue si le ministre l’estime requis compte tenu des facteurs réglementaires;
c) s’agissant du demandeur non visé au paragraphe 112(3), sur la base des articles 96 à 98;
d) s’agissant du demandeur visé au paragraphe 112(3) — sauf celui visé au sous-alinéa e)(i) ou (ii) —, sur la base des éléments mentionnés à l’article 97 et, d’autre part :
(i) soit du fait que le demandeur interdit de territoire pour grande criminalité constitue un danger pour le public au Canada,
(ii) soit, dans le cas de tout autre demandeur, du fait que la demande devrait être rejetée en raison de la nature et de la gravité de ses actes passés ou du danger qu’il constitue pour la sécurité du Canada;
e) s’agissant des demandeurs ci-après, sur la base des articles 96 à 98 et, selon le cas, du sous-alinéa d)(i) ou (ii) :
(i) celui qui est interdit de territoire pour grande criminalité pour déclaration de culpabilité au Canada pour une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans et pour laquelle soit un emprisonnement de moins de deux ans a été infligé, soit aucune peine d’emprisonnement n’a été imposée,
(ii) celui qui est interdit de territoire pour grande criminalité pour déclaration de culpabilité à l’extérieur du Canada pour une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans, sauf s’il a été conclu qu’il est visé à la section F de l’article premier de la Convention sur les réfugiés.
[Soulignements et caractères gras ajoutés] | 96 A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,
(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or
(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.
Person in need of protection
97 (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally
(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or
(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if
(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,
(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,
(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and
(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.
[…]
Consideration of application
113 Consideration of an application for protection shall be as follows:
(a) an applicant whose claim to refugee protection has been rejected may present only new evidence that arose after the rejection or was not reasonably available, or that the applicant could not reasonably have been expected in the circumstances to have presented, at the time of the rejection;
(b) a hearing may be held if the Minister, on the basis of prescribed factors, is of the opinion that a hearing is required;
(c) in the case of an applicant not described in subsection 112(3), consideration shall be on the basis of sections 96 to 98;
(d) in the case of an applicant described in subsection 112(3) — other than one described in subparagraph (e)(i) or (ii) — consideration shall be on the basis of the factors set out in section 97 and
(i) in the case of an applicant for protection who is inadmissible on grounds of serious criminality, whether they are a danger to the public in Canada, or
(ii) in the case of any other applicant, whether the application should be refused because of the nature and severity of acts committed by the applicant or because of the danger that the applicant constitutes to the security of Canada; and
(e) in the case of the following applicants, consideration shall be on the basis of sections 96 to 98 and subparagraph (d)(i) or (ii), as the case may be:
(i) an applicant who is determined to be inadmissible on grounds of serious criminality with respect to a conviction in Canada punishable by a maximum term of imprisonment of at least 10 years for which a term of imprisonment of less than two years — or no term of imprisonment — was imposed, and
(ii) an applicant who is determined to be inadmissible on grounds of serious criminality with respect to a conviction of an offence outside Canada that, if committed in Canada, would constitute an offence under an Act of Parliament punishable by a maximum term of imprisonment of at least 10 years, unless they are found to be a person referred to in section F of Article 1 of the Refugee Convention.
[Underlinings and bold characters added] |
[60] La situation de l’appelant est donc visée par les articles et alinéas 36,
[61] Cela étant, il est difficile de comprendre comment l’appelant peut reprocher à la juge de ne pas avoir pris en compte les effets de la peine dans le processus de détermination. Plus d’un des motifs de son jugement démontrent en effet le contraire :
[28] Sans vouloir revenir sur tout le débat concernant le changement dans son statut d’immigration, mentionnons que le délinquant, âgé de 35 ans, ne possède désormais plus le statut de résident permanent mais celui de « demandeur d’asile ».
[29] À cet effet, Me Guillaume Cliche-Rivard, avocat spécialisé dans le domaine du droit de l’immigration, est venu expliquer et mettre à jour pour le bénéfice du Tribunal, tant l’état actuel du dossier d’immigration de M. Pierre que les étapes subséquentes qui se tiendront ultérieurement.
[…]
[89] Dans le processus de détermination de la peine, le Tribunal doit tenir compte des circonstances personnelles du délinquant et la question des conséquences indirectes de la peine sur le statut d’immigration de celui-ci au Canada devient pertinente.
[…]
[91] Toutefois, leur importance dépend des faits particuliers de chaque affaire et doit être déterminée en fonction de ceux-ci en ne dénaturant pas le processus de détermination de la peine.
[92] Ces conséquences indirectes ne doivent donc pas servir à rendre appropriée une peine inappropriée dans les circonstances.
[…]
[62] Et au début de son analyse des facteurs atténuants, la juge ajoute :
[105] Il est de plus indéniable que son statut d’immigration emportera de nombreuses et importantes conséquences tant directes qu’indirectes.
[106] Le Tribunal n’est pas insensible à celles-ci et ne peut nier que les « conséquences ont une importance certaine ».
[107] Ceci dit, tel que précédemment mentionné, toutes ces considérations ne sauraient à elles seules éclipser les autres principes sentenciels à analyser. Il s’agira inévitablement d’un exercice de pondération.
[108] Ainsi, en dépit de l’existence de facteurs jugés atténuants et tout en considérant le statut d’immigration « précaire » du délinquant il s’agit d’une infraction dont la gravité objective est importante et la peine suggérée par la défense se retrouve nettement au plus bas, sinon à l’extérieur de la fourchette de peines généralement octroyées en semblable matière, qui plus est depuis l’avènement de l’arrêt Friesen.
[…]
[125] En définitive, malgré les considérations extrinsèques à l’infraction ayant trait au statut d’immigration du délinquant et à sa réhabilitation entreprise, le Tribunal ne peut se convaincre que la peine suggérée par la défense, laquelle représente une importante réduction de peine par rapport aux fourchettes déjà établies, que Friesen recommande par ailleurs de rehausser, constitue en l’espèce la peine appropriée.
[Soulignements ajoutés; italiques dans l’original; renvois omis]
[63] Il n’y a certes pas là omission de tenir compte des effets de la peine. Ce moyen d’appel traduit plutôt l’insatisfaction de l’appelant à l’égard de la façon dont la juge a pondéré ces effets avec l’ensemble des autres facteurs pertinents.
[64] Cela dit, la Cour n’ignore pas le cheminement difficile de l’appelant, les circonstances dramatiques de sa fuite d’Haïti vers les États-Unis avec certains membres de sa famille et les conséquences de la peine de 48 mois qui lui a été imposée sur les motifs qu’il pourra invoquer auprès des autorités fédérales pour éviter d’être expulsé.
[65] Il ne faut toutefois pas perdre de vue, premièrement, qu’à la base le fait qu’il soit interdit de séjour au Canada et contraint de demander la protection du ministre résulte de la « grande criminalité » associée par le législateur à la peine maximale rattachée au crime d’agression sexuelle auquel il a finalement décidé de plaider coupable.
[66] Deuxièmement, au regard de l’analyse sérieuse effectuée par la juge aux fins de déterminer la peine, il est vraisemblable que le présent appel est d’abord et avant tout motivé non par les prétendues failles révisables du jugement, mais par les conséquences de la peine imposée sur les chances de l’appelant de convaincre le ministre, au terme de la procédure d’examen des risques avant renvoi, de ne pas l’expulser du pays. Sa demande de diminuer la peine de plus de la moitié, à deux ans moins un jour, ce qui la ramènerait au rang des peines imposées pour des actes de « peu de gravité », tel un attouchement (selon la fourchette de peines pré-Friesen, doit-on le préciser), le paragraphe 44 de l’argumentation contenue dans son exposé[84] et ses observations à l’audience le confirment éloquemment.
[67] Force est de conclure que l’appelant tente ainsi d’élever sans le dire le facteur des « conséquences indirectes » de la peine au rang de facteur prédominant, alors que, selon la Cour suprême, ce facteur, dont l’application relève au surplus du pouvoir discrétionnaire du juge[85], doit plutôt être pris en considération avec les autres critères applicables et ne doit pas dominer ou dénaturer le processus de détermination :
[14] La règle générale demeure : la peine doit être juste eu égard au crime commis et au délinquant concerné. Autrement dit, le juge qui détermine la peine peut exercer son pouvoir discrétionnaire et tenir compte des conséquences indirectes en matière d’immigration, pourvu que la peine qui est infligée en définitive reste proportionnelle à la gravité de l’infraction et au degré de responsabilité du délinquant.
[15] La souplesse que permet notre processus de détermination de la peine ne doit pas donner lieu à l’infliction de peines inappropriées et artificielles dans le but d’éviter les conséquences indirectes susceptibles de découler d’un régime législatif ou autre texte de loi donné et, ainsi, d’éluder la volonté du législateur.
[16] Il ne faut pas permettre que ces conséquences dominent dans la détermination de la peine ou encore aient pour effet de dénaturer ce processus, et ce, que ce soit en faveur ou à l’encontre de l’expulsion. Qui plus est, elles ne doivent pas conduire à l’établissement d’un régime distinct de détermination de la peine qui serait assorti, dans les faits sinon en droit, d’une fourchette spéciale de décisions applicables dans les cas où l’expulsion constitue un risque.[86]
[Soulignements ajoutés]
[68] Compte tenu au surplus de la réduction de peine comparable que recherche l’appelant en l’espèce, les propos suivants de la Cour dans l’arrêt El Hami c. R. sont particulièrement pertinents, avec les adaptations qui s’imposent :
[19] La perte du droit d’appel devant la Section d’immigration ne peut, à elle seule, justifier la réduction de la peine de plus de la moitié; conclure autrement aurait pour effet d’accorder un poids dominant et démesuré aux conséquences en matière d’immigration dans le processus de détermination de la peine. Il en résulterait une peine artificielle et inappropriée, tout en ayant pour effet d’éluder la volonté du législateur exprimée en vertu de la LIPR.[87]
[Soulignement ajouté; renvoi omis]
[69] En somme, la juge n’a pas commis d’erreur révisable en imposant une peine d’emprisonnement de quatre ans à l’appelant, malgré les conséquences que ce dernier pourra encourir en matière d’immigration, d’autant plus que, compte tenu de la nature du crime et de l’âge de la victime au moment de sa commission, l’article
[70] Ce quatrième moyen doit donc lui aussi être rejeté.
POUR CES MOTIFS, LA COUR :
[71] REJETTE l’appel.
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| JACQUES J. LEVESQUE, J.C.A. | |
| ||
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| |
| STEPHEN W. HAMILTON, J.C.A. | |
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| MICHEL BEAUPRÉ, J.C.A. | |
| ||
Me Pierre Poupart | ||
Me Geoffroy Huet | ||
Me Alexandra Boulanger | ||
LES AVOCATS POUPART TOUMA | ||
Pour l’appelant | ||
| ||
Me Robert Benoit | ||
DIRECTEUR DES POURSUITES CRIMINELLES ET PÉNALES | ||
Pour l’intimé | ||
| ||
Date d’audience : | 23 novembre 2022 | |
[1] La question de la raisonnabilité des délais n’a pas été soulevée par l’appelant en première instance et n’est pas visée par le présent appel.
[2] Art.
[3] Loi sur le renforcement des peines pour les prédateurs d’enfants, L.C. 2015, ch. 23.
[4] Id., art. 14.
[5] R. c. Pierre,
[6] Jugement entrepris, paragr. 2.
[7] Pierre c. R.,
[8] Jugement entrepris, paragr. 8.
[9] Id., paragr. 1 et 3-9.
[10] Id., paragr. 11-27 et 50-51.
[11] Id., paragr. 2, 28-45 et 52-56.
[12] R. c. Friesen,
[13] Jugement entrepris, paragr. 98-126.
[14] Id., paragr. 123.
[15] Id., paragr. 122.
[16] Id., paragr. 126.
[17] R. c. G.F.,
[18] Jugement entrepris, paragr. 9, 55, 59, 109, 118 et 125.
[19] R. c. Lacasse,
[20] Id., paragr. 78
[21] Id., paragr. 49.
[22] Bibeau c. Ville de Saint-Sauveur,
[23] R. c. Friesen, supra, note 12, paragr. 26.
[24] Ibid.
[25] Lemonnier c. R.,
[26] G.B. c. R.,
[27] Id., paragr. 20.
[28] Jugement entrepris, paragr. 55.
[29] Id., paragr. 59.
[30] Id., paragr. 124.
[31] Id., paragr. 49 et 59.
[32] Évaluation psychosexuelle du Dr Bergeron, p. 8 et 10.
[33] Id., p. 18.
[34] Rapport présentenciel de madame Baudard, p. 5.
[35] Jugement entrepris, paragr. 6 et 8.
[36] Rapport de suivi du Dr Ravart, note de bas de page 1.
[37] Jugement entrepris, paragr. 109.
[38] Id., paragr. 118.
[39] Id., paragr. 125.
[40] Argumentation de l’appelant, paragr. 30.
[41] Id., paragr. 32.
[42] R. c. Friesen, supra, note 12, paragr. 126.
[43] Sous-al. 718.2 a) (ii.1) et (iii) C.cr.
[44] Art.
[45] R. c. Audet,
[47] R. v. Lemay,
[48] Mentor c. R.,
[49] Jugement entrepris, paragr. 124.
[50] Rapport de suivi du Dr Ravart, p. 7.
[51] R. c. Friesen, supra, note 12, paragr. 53; R. c. Georges,
[52] R. c. Londono,
[53] Id., paragr. 114-115.
[54] Id., paragr. 127 et 130.
[55] R. c. Nasogaluak,
[56] R. c. Cloutier, 2004 CanLII 48297 (C.Q.).
[57] Argumentation de l’appelant, paragr. 35.
[58] R. c. Nasogaluak, supra, note 55, paragr. 43.
[59] Fruitier c. R.,
[60] R. c. Friesen, supra, note 12, paragr. 74.
[61] Id., paragr. 75; voir aussi R. c. Londono, supra, note 52, paragr. 176-177.
[62] R. c. Friesen, supra, note 12, paragr. 108-114.
[63] Id., paragr. 108.
[64] Id., paragr. 136.
[65] Jugement entrepris, paragr. 60.
[66] Id., paragr. 64
[67] Id., paragr. 75-77.
[68] R. v. Woodward,
[69] Jugement entrepris, paragr. 80-86.
[70] R. c. Rasul,
[71] Id., paragr. 44-61.
[72] R. c. Parranto,
[73] Fruitier c. R., supra, note 59.
[74] R. c. Nasogaluak, supra, note 55, paragr. 43.
[75] Jugement entrepris, paragr. 60-66 et 78.
[76] Id., paragr. 72-86 et 102.
[77] Id., paragr. 104-125.
[78] Id., paragr. 27.
[79] R. c. Londono, supra, note 52, paragr. 176.
[80] Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.
[81] Al.
[82] Ibid.
[83] L’appelant n’est pas visé par l’article
[84] « [44] Conséquemment, la durée de la peine imposée à l’appelant modifie radicalement la gravité des conséquences indirectes de cette peine, une peine de deux (2) ans ou plus entrainant presqu’assurément une expulsion vers Haïti sans possibilité de retour; ».
[85] R. c. Pham,
[86] Id., paragr. 14-16.
[87] El Hami c. R.,
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