Décision

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Directeur des poursuites criminelles et pénales c. 3095-2899 Québec inc.

2021 QCCA 1222

COUR D’APPEL

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

GREFFE DE

 

MONTRÉAL

N° :

500-10-007474-206

(455-36-000117-192, 455-61-016399-170)

 

DATE :

4 août 2021

 

 

FORMATION :

LES HONORABLES

JACQUES CHAMBERLAND, J.C.A.

GENEVIÈVE MARCOTTE, J.C.A.

GUY COURNOYER, J.C.A.

 

 

DIRECTEUR DES POURSUITES

CRIMINELLES ET PÉNALES

APPELANT - intimé/poursuivant

c.

 

3095-2899 QUÉBEC INC.

INTIMÉE - appelante/défenderesse

 

 

ARRÊT

 

 

[1]       L’appelant, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (le « DPCP »), se pourvoit contre un jugement rendu oralement le 27 novembre 2020[1] par la Cour supérieure, district de Bedford (l’honorable Claude Dallaire). Les motifs ont été mis par écrit à la demande du DPCP et sont intitulés « Transcription révisée des motifs du jugement rendu oralement le 27 novembre 2020 » (la « Transcription révisée »)[2] et portent la date du 5 février 2021.

[2]       La juge accueille l’appel de l’intimée, 3095-2899 Québec inc. (« Ski Bromont »), annule le jugement rendu par la Cour du Québec (Mme Tanya Larocque, juge de paix magistrat) (le « Jugement de première instance »)[3], acquitte l’intimée et condamne l’appelant aux frais devant les deux instances.

[3]       Elle considère que la juge du procès a commis une erreur dans l’interprétation de l’article 5 de la Loi sur les barrages [« LSB »][4] et dans l’appréciation des témoignages d’experts, en concluant que l’infraction reprochée à l’intimée a été prouvée hors de tout doute raisonnable.

[4]       Le contexte de l’affaire est bien résumé dans le Jugement de première instance :

[3]     Un barrage de type « déversoir libre en enrochement » crée le Lac artificiel Sheffington situé à Bromont au pied de la montagne. Ce barrage est considéré à forte contenance vu sa hauteur et sa capacité de rétention d’eau. L’eau du lac sert à la fabrication de neige artificielle pour la station de ski de la défenderesse.

[4]     Le 5 octobre 2016, l’inspecteur Tanguay du MDDEP se présente au Lac Sheffington, à la suite d’une plainte pour travaux illégaux sur le barrage.

[5]     Il constate la présence de traces de pelle mécanique ainsi que du matériel granulaire dans le littoral du cours d’eau et une matière granuleuse sur les grosses roches. Il note aussi la présence de matières organiques sur les roches telle que de la terre, des branches, des racines et du sable. Il observe une différence marquante entre le barrage actuel et des photos du barrage prises avant les travaux.

[6]     Au cours de son enquête, il apprend que la compagnie d’excavation de Dany St-Pierre est mandatée par la défenderesse pour replacer les grosses roches ayant descendu du barrage afin de bloquer l’eau. Le 27 septembre 2016, une pelle mécanique est utilisée à cet effet.

[7]     Après vérification par l’inspecteur, aucun certificat d’autorisation n’est émis par le MDDEP pour les travaux effectués par Excavation St-Pierre.

[8]     Le 14 octobre 2016, Éric Martel, ingénieur civil pour le MDDEP, se déplace sur les lieux. Il constate, en comparant avec des photos antérieur du site, que la pente du déversoir est modifiée et que l’imbrication de l’enrochement est réaménagée.

[5]       Le 11 août 2017, l’appelant signifie à l’intimée un constat d’infraction lui reprochant d’avoir contrevenu à l’article 5 de la LSB.

[6]       L’affaire est entendue les 30 novembre 2018 et 25 février 2019 devant la juge de paix magistrat Larocque. Le 8 mai 2019, cette dernière rend jugement et déclare l’intimée coupable de l’infraction reprochée.

[7]       Le 6 juin 2019, l’intimée se pourvoit en appel.

[8]       Le 23 août 2019, la juge de paix magistrat impose à l’intimée l’amende de 2 000 $ prévue par la loi, en sus des frais prévus par le tarif judiciaire, à acquitter dans un délai de 90 jours.

[9]       Le 23 novembre 2020, l’audition en appel a lieu en Cour supérieure devant la juge Dallaire, qui rend jugement oralement quatre jours plus tard, soit le 27 novembre 2020[5].

[10]    Le 30 novembre 2020, l’avocate du DPCP demande une transcription des motifs du jugement rendu oralement. À compter de la mi-décembre, l’appelant renouvelle sa demande. S’ensuit une série d’échanges de courriels avec la juge Dallaire où celle-ci indique que les transcriptions ne seront vraisemblablement pas disponibles avant le retour des Fêtes et suggère à l’appelant de produire éventuellement une inscription en appel modifiée, si nécessaire.

[11]    Le 22 décembre 2020, le DPCP dépose une requête pour permission de faire appel du jugement du 27 novembre 2020. En date du 5 février 2021, la Transcription révisée est complétée[6].

[12]    Le 12 février 2021, le DPCP dépose une requête pour permission d’appeler amendée. Celle-ci est accueillie par un juge de la Cour le 26 février 2021[7].

* * *

[13]    Outre les moyens d’appel soulevés à l’égard du jugement de la Cour supérieure, le pourvoi soulève la question de savoir si la juge a outrepassé les limites de son droit de remanier ses motifs, au sens de l’arrêt Kellogg’s[8], par le biais de la Transcription révisée fournie après l’échéance du délai d’appel et le dépôt de la requête pour permission d’appeler.

[14]    L’appelant soutient que la Transcription révisée est une version bonifiée visant à défendre ou justifier a posteriori les conclusions initiales du jugement rendu oralement, après qu’il eut manifesté son intention de se pourvoir en appel. Selon lui, à l’instar du raisonnement de la Cour dans Roy c. Patenaude[9], la juge était dessaisie du dossier en vertu de l’article 225 du Code de procédure pénale[10] et elle était functus officio. Il demande donc à la Cour d’écarter la Transcription révisée pour les fins de l’examen des moyens d’appel.

[15]    L’arrêt Kellogg's de cette Cour est venu consacrer le principe qu’un juge peut par jugement subséquent, dans ce cas par le biais d’une minute déposée quelques jours après la tenue de l’audience, ajouter des motifs au soutien du dispositif rendu oralement et inscrit au procès-verbal[11].

[16]    Dans l’arrêt Teskey, la Cour suprême confirmait par ailleurs que la pratique qui consiste à rendre un verdict en indiquant que les « motifs suivront » n’a rien de foncièrement inapproprié[12] :

16        Rien n’empêche un juge de rendre un verdict en précisant que des « motifs suivront ». En matière civile, la juge Arbour (plus tard juge de notre Cour) a énoncé avec justesse le principe suivant dans l’arrêt Crocker c. Sipus (1992), 1992 CanLII 7466 (ON CA), 57 O.A.C. 310 (C.A.), au par. 15 :

[TRADUCTION]  L’intérêt de la justice dans une affaire donnée pourrait être mieux servi par le prononcé de la décision dès le processus de réflexion terminé, mais avant la remise des motifs écrits aux parties. Le dépôt d’un avis d’appel après le prononcé de cette décision n’empêche pas à lui seul l’examen en appel des motifs déposés ultérieurement.

17        Les mêmes principes s’appliquent en matière pénale. […]

[17]    S’agissant toutefois, dans ce cas, de motifs écrits détaillés déposés par le juge du procès 11 mois après le prononcé des verdicts et après le dépôt d’un avis d’appel, les juges majoritaires choisissaient d’écarter ces motifs, non pas pour la seule raison du délai écoulé entre la déclaration de culpabilité et l’envoi des motifs, ni parce qu’ils semblaient être rédigés en fonction de l’appel interjeté (puisqu’ils ne l’étaient pas), mais parce qu’une série de facteurs donnaient à penser qu’ils avaient été rendus « en fonction du résultat » et constituaient une preuve convaincante et suffisante pour repousser la présomption d’intégrité et d’impartialité du juge du procès, à savoir les facteurs suivants que résumait ainsi la juge Charron[13] :

-      la difficulté manifeste qu’a éprouvée le juge du procès à arrêter le verdict au cours des mois qui ont suivi la clôture de la preuve;

-      la déclaration de culpabilité prononcée sans aucune indication du raisonnement à sa base;

-      le fait que le juge du procès se soit dit disposé à reconsidérer les verdicts immédiatement après leur prononcé;

-      la nature de la preuve, qui commandait un examen et une analyse approfondis avant que tout verdict puisse être arrêté;

-      le défaut du juge du procès de donner suite aux demandes répétées des avocats en vue d’obtenir des motifs écrits;

-      la teneur des motifs, qui font état d’événements survenus longtemps après le prononcé du verdict, ce qui donne à penser qu’ils ont été élaborés après la décision;

-      le délai excessif mis à déposer les motifs, conjugué à l’absence de toute indication qu’ils étaient prêts à un moment ou à un autre pendant les 11 mois ayant suivi le prononcé du verdict ou que le juge du procès avait délibérément différé leur dépôt avant qu’il ait été statué sur la demande de déclaration de délinquant dangereux.

[18]    En 2010, dans l’arrêt R. v. Wang[14], la Cour d’appel de l’Ontario proposait une vision plus étroite de la portée des changements pouvant être apportés aux motifs rendus oralement, reflétant l’idée que les motifs additionnels ne doivent pas changer substantiellement la décision rendue à l’audience. Elle soulignait alors l’importance de préserver l’intégrité et la transparence des procédures et de rassurer les avocats présents qu’ils peuvent se fier aux motifs livrés oralement, notamment quand vient le temps de décider s’il est opportun de porter l’affaire en appel, sans craindre que ces motifs ne soient altérés par la suite. Elle signalait par ailleurs que des motifs subséquents peuvent faire naître la crainte que le juge du procès cherche à défendre sa décision plutôt qu’à simplement l’expliquer, notamment lorsque les motifs écrits sont rendus après le dépôt d’un appel[15] :

[9]  In my view, it is inappropriate to modify, change or add to a transcript of oral reasons rendered in court. There may well be circumstances, such as when the original transcription is no longer available, where the improper alteration of the transcript would be sufficient to warrant ordering a new trial. That said, editing the transcript for readability and to assist in catching errors by the transcriber - not the judge - is appropriate. This would normally be limited to matters such as punctuation, grammatical errors and the like. It is not an opportunity to revise, correct or reconsider the words actually spoken and no changes of substance are to be made. It must be recalled that the transcription of oral reasons rendered in court is exactly that, a transcript of what occurred in court. The reporter preparing the transcript is called upon to certify that the transcript is “a true and accurate transcription of my recordings, to the best of my skill and ability.”  To seek to alter the transcript places the reporter in the invidious position of either refusing to certify the transcription or king a certification that he or she does not feel is true and accurate.

[10]  The integrity of the trial record and of in court proceedings is fundamental to the judicial system and to the transparency of those proceedings. Counsel who are present when oral reasons are delivered in court should have confidence that the decisions they make with their client based on these oral reasons will not be undermined by alterations that represent something substantially different from what in fact occurred in the courtroom. Nor should counsel, upon receiving a transcript of the oral reasons, be left to wonder whether it in fact reflects what was said in the court, or rather constitutes a version of the reasons as later modified by the judge. It is even a greater concern when the alterations to the transcript of the reasons are made after a notice of appeal has been filed: see R. v. Geesic, 2010 ONCA 365.          

[Soulignements ajoutés]

[19]    La Cour suprême, toujours dans l’arrêt Teskey, s’était exprimée ainsi au sujet d’une telle crainte[16] :

18   Le fait que des motifs soient déposés longtemps après le prononcé du verdict, particulièrement des motifs ayant de toute évidence été rédigés entièrement après le prononcé du verdict, peut amener une personne raisonnable à craindre que le juge du procès n’ait pas examiné et considéré la preuve avec un esprit ouvert, comme il a le devoir de le faire, mais qu’il ait plutôt énoncé son raisonnement en fonction du résultat. En d’autres mots, lorsque le verdict a déjà été prononcé, en particulier un verdict de culpabilité, il faut se demander si le juge a procédé à l’examen et à l’analyse de la preuve après le prononcé de sa décision dans le but — même inconscient — non pas d’arriver à ce verdict mais plutôt de le défendre. Il est très important dans une affaire criminelle de prendre garde de ne pas examiner la preuve en fonction du résultat, étant donné que l’accusé est présumé innocent et a droit au bénéfice du doute raisonnable. La présence d’un doute raisonnable ne ressort pas toujours de façon évidente. En effet, elle peut parfois être très subtile et n’apparaître qu’aux yeux de la personne qui garde un esprit ouvert. En ce sens, lorsque le juge du procès semble avoir arrêté un verdict de culpabilité avant d’avoir complété la nécessaire analyse de la preuve, une personne raisonnable pourrait alors être amenée à craindre que le juge n’ait pas gardé un esprit ouvert. En outre, si le verdict a été porté en appel, comme c’est le cas en l’espèce, et que les motifs traitent de certaines questions soulevées dans l’appel, cela peut donner l’impression que le juge du procès a tenté de défendre un résultat donné plutôt que de formuler les motifs sur lesquels il s’est fondé pour rendre sa décision.

[Soulignements ajoutés]

[20]    Dans l’arrêt R. v. Thompson, la Cour d’appel de l’Ontario discutait de la doctrine du functus officio, tout en insistant sur l‘importance de faire la part des choses lorsque les ajouts ont pour but de corriger une erreur dans le raisonnement du juge lors du prononcé de la peine pour expliquer celle-ci sans la modifier pour autant[17] :

[21]      In the present case, the sentence imposed was clear and manifest. There was no need for clarification. Indeed, in the addendum, the sentencing judge neither altered nor clarified the sentence that he imposed. His added comments were directed towards correcting an error in his reasons for sentence, and not towards the sentence itself. He sought to clarify not what he decided, but why he decided it. The doctrine of functus officio is concerned with what a given decision was, not why the decision was made.

[22]      As a result, I do not view the functus officio analysis as being of assistance in this matter.

[Soulignement ajouté]

[21]    Elle poursuivait en signalant que le cadre mis de l’avant par la Cour suprême dans Teskey convient pour évaluer s’il y a lieu de considérer les motifs supplémentaires[18] :

[23]   The present case is more in the nature of the issuance of supplementary reasons and is therefore guided by different principles: see R. v. R.(J.) (2008), 2008 ONCA 200 (CanLII), 59 C.R. (6th) 158, (Ont. C.A.) at para. 15.

[24]   In R. v. Teskey, 2007 SCC 25 (CanLII), [2007] 2 S.C.R. 267 the Supreme Court of Canada held that reasons delivered after judgment could be considered by an appellate court, unless there was a reasonable apprehension that the reasons were, in reality, an after-the-fact justification for the decision, and not a bona fide expression of the reasons that led the court to reach its verdict.

[Soulignement ajouté]

[22]    Les propos de la Cour d’appel de l’Ontario dans R. v. Thompson ont été avalisés par cette Cour dans l’arrêt Dufour c. R.[19] alors que, sans se prononcer explicitement sur la question du functus officio, elle concluait qu’il n’y avait pas lieu de considérer les motifs qui relèvent d’une justification a posteriori. La juge en chef Duval Hesler écrivait[20] :

[30]   Je partage l’opinion de la Cour d’appel d’Ontario à l’effet que des motifs complémentaires du juge ne doivent pas être pris en considération s’ils constituent plutôt, comme ici, « an after-the-fact justification for the decision ».

[31]   Lorsqu’elle rend ses motifs additionnels dans le cadre de la procédure visant à faire déclarer l’appelant délinquant dangereux, la juge affirme qu’ils visent à préciser sa pensée, puisque après relecture de ses motifs à l’appui de la déclaration de culpabilité, elle réalise qu’elle n’avait pas été aussi claire qu’elle l’aurait voulu.

[32]   Ces motifs additionnels de la juge de première instance veulent compléter les motifs rendus au soutien de sa décision, puisqu’elle les estime imprécis et insuffisants. Cela étant, ces motifs additionnels ne visent pas à clarifier la décision, mais plutôt à la justifier.

[33]   Comme nous l’avons vu, la Cour suprême enseigne qu’il faut être très prudent lorsque des motifs sont ajoutés dans ce contexte, puisqu’il est possible qu’ils ne représentent pas le raisonnement de la juge de première instance ayant mené à la déclaration de culpabilité, mais qu’ils soient plutôt une justification postérieure de sa décision.

[34]   C’est le cas en l’espèce. Une personne raisonnable pourrait craindre que les motifs complémentaires de la juge constituent une justification a posteriori du verdict. Ils ne seront pas pris en compte aux fins de cet appel.

                                                                                    [Soulignements ajoutés]

[23]    Un peu plus tôt, dans l’arrêt Béton Brunet ltée[21], la Cour n’hésitait toutefois pas à conclure, dans le cadre d’un recours en matière civile, qu’en présence de deux séries de motifs, le juge se trouve dessaisi par la première série et, par ce fait, se rend functus officio. Ceci, malgré le constat que les deux séries de motifs menaient à des conclusions parfaitement compatibles et que le second jugement n’était en fait qu’une réponse exhaustive aux arguments soulevés. Précisons cependant que, dans ce cas, le premier jugement, comportant 20 paragraphes et rendu neuf mois après la mise en délibéré, avait été suivi trois mois plus tard d’un second jugement comportant cette fois 164 paragraphes. Entre-temps, deux requêtes pour permission de faire appel avaient été déposées à l’égard du premier jugement et avaient dû être modifiées à la suite du second. La Cour précisait par ailleurs qu’elle n’était pas requise d’aborder l’argument de la crainte de partialité, puisque le Code de procédure civile, et notamment son article 471 C.p.c., suffisait à conclure au rejet du second jugement, le juge s’étant alors rendu functus officio.

[24]     Le juge Morissette écrivait pour la Cour :

[26]      Je ne puis me convaincre en l’espèce que l’arrêt R. c. Teskey donne raison aux appelantes sur ce point. Bien que rien au dossier ne nous éclaire sur ce pourquoi le juge, en cours de délibéré, a choisi de rendre un premier jugement, suivi trois mois plus tard de motifs considérablement plus étoffés, je ne crois pas que les motifs du 23 août 2013 soulèvent une quelconque crainte raisonnable de partialité au sujet de leur auteur. D’abord, bien que brefs, voire lapidaires, les motifs du 15 mai 2013 conduisent à des conclusions parfaitement compatibles avec celles tirées derechef par le juge dans ses motifs du mois d’août. De plus, la très grande ressemblance (pour ne pas dire l’exacte correspondance) entre les arguments soulevés dans les requêtes introductives d’instance en révision judiciaire et ceux plaidés par les appelantes devant la Cour d’appel démontre que les motifs du mois d’août ne sont qu’une réponse qui se veut exhaustive aux arguments déjà plaidés le 31 août 2012.

[27]      Quoi qu’il en soit, malgré ce que plaident les appelantes, il est inutile à mon sens de s’appuyer sur l’arrêt R. c. Teskey (rendu en matière criminelle) ou sur l’arrêt Crocker v. Sipus (rendu par la Cour d’appel de l’Ontario dans un cadre juridique autre que celui du Code de procédure civile) pour arriver au résultat qu’elles recherchent dans ce qui concerne le premier volet du débat en appel. L’arrêt rendu par notre cour dans l’affaire Roy c. Patenaude permet déjà de vider la question, sans qu’il soit besoin de s’interroger sur une hypothétique apparence raisonnable de partialité de la part du juge de première instance.

[28]      Je rappelle en quoi consistait cette décision. Un procès en responsabilité civile s’était instruit au sujet d’une arrestation illégale qui avait causé la mort d’un individu. Quinze mois après le procès, le juge fit droit à la réclamation de la conjointe de la victime par un jugement écrit qui, dans sa version dactylographiée, comportait 23 pages. Ce jugement contenait cependant un Nota Bene ainsi formulé : « Des motifs plus détaillés seront versés au dossier dans les meilleurs délais possibles, ainsi que l’énumération de la jurisprudence et des autorités citées ou consultées. » Par la suite, quelque deux mois après que les défendeurs eurent inscrit en appel, le juge déposa une série non datée de motifs additionnels.

[29]      Je citerai ici au texte les commentaires du juge Tyndale, auxquels souscrivent ses deux collègues :

In my opinion, with respect, the judge did not have the right to divide his judgment into two parts, particularly when the second part followed the inscription in appeal. The latter was filed in March, 1988; it complained that the judge did not decide objections, did not mention this, did not explain that. In his "Motifs supplémentaires à l'appui du jugement rendu", undated, filed on 10 May 1988, the judge does purport to decide objections, to mention this, to explain that.

Article 475 of the Code of Civil Procedure provides that even inadvertent errors in a judgment cannot be corrected after appeal; much less, in my view, may the judge improve on his judgment after appeal by deliberate and substantial additions.

I think that when the first "part" of the judgment was filed on 18 February 1988, 15 months after trial, or at the latest when the appeal was filed, the judge became functus officio as that term is explained in Chandler c. Alberta Association of Architects. He was disseized of the case and could no longer deal with it at all, except to correct a mistake in drafting of the judgment, or to correct an error in expressing the manifest intention of the court. See also Hôpital Joyce Memorial c. Gélinas, where Turgeon, JA wrote at page 841:

Dans notre système juridique, il est un principe bien établi: un Tribunal saisit d'une cause doit la décider tout entière par un seul et même jugement et n'a pas le pouvoir de scinder sa décision en deux étapes, sauf dans les cas exceptionnels où la loi lui permet par un texte clair d'agir ainsi. (...) Nous ne sommes pas ici en présence d'une simple question de procédure, mais d'un principe fondamental que les tribunaux doivent respecter.

The case of Kellog's Company of Canada c. P.G. du Québec, is slightly similar to this one but easily distinguished. In that case an oral judgment from the bench rendered on 7 January 1975 was recorded in the minutes of trial (“procès-verbal”) and signed by the clerk. Six days later the judge deposited a more elaborate written judgment with the identical conclusions; appellant objected, but the Court of Appeal allowed the written judgment. That is common practise in the Superior Court, to which there is no objection.

In my opinion, in the circumstances of this case, the trial judge had lost jurisdiction, and his supplementary reasons are not legally in the record of either the Superior Court or of this Court.

Je ne vois aucune raison de déroger à cette règle qui découle du libellé de l’article 471 C.p.c. En l’occurrence, le juge a déposé un jugement écrit le 15 mai 2013 qui a eu pour conséquence de le dessaisir du dossier et de le rendre functus officio.

[30]      Cela résout la première difficulté que soulèvent les pourvois. Il s’ensuit que le jugement entrepris dont les appelantes demandent la réformation est celui du 15 mai 2013.

[Soulignements ajoutés; renvois omis]

[25]    En l’espèce, nous sommes en présence d’une transcription bonifiée d’un jugement rendu oralement en matière pénale. La situation est quelque peu différente de l’affaire Dufour qui concernait des motifs complémentaires ou même des affaires Béton Brunet ltée et Roy c. Patenaude précitées, mettant en cause deux séries de motifs écrits en matière civile. Au moment d’accorder la permission de faire appel de la décision dans l’affaire Béton Brunet ltée[22], le juge Dalphond soulignait d’ailleurs la distinction qui s’impose entre la situation découlant de deux séries de motifs et celle de la transcription du jugement rendu oralement.

[26]    Dans le cas présent, il n’est pas opportun d’avoir recours à la doctrine du functus officio pour décider s’il y a lieu de considérer ou non la Transcription révisée pour les fins de l’appel. À l’instar de la Cour suprême dans l’affaire Teskey, l’appel peut être résolu en évaluant s’il y a crainte légitime de partialité en raison d’une justification a posteriori qui vienne compromettre la présomption d’intégrité du juge dans les circonstances particulières de l’affaire.

[27]    Ici, la Transcription révisée ne modifie pas le dispositif du Jugement du 27 novembre 2020 et ne vise pas non plus à corriger un élément de ce jugement, du moins explicitement. Elle détaille cependant les motifs de manière exhaustive et s’avère une version bonifiée produite après le dépôt de la requête pour permission de faire appel de l’appelant menant à s’interroger sur l’existence d’une crainte raisonnable de partialité en raison de l’apparence d’une justification a posteriori.

[28]    Depuis les arrêts Teskey, Wang et Thompson[23], les tribunaux canadiens reconnaissent, de façon générale, que les motifs additionnels qui visent de manière avouée à renforcer ou à corriger les motifs rendus antérieurement relèvent de la justification a posteriori[24], sauf s’ils visent la correction d’une erreur qu’on pourrait assimiler à une erreur d’inadvertance au sens de l’article 338 C.p.c.[25].

[29]    Dans l’arrêt Cojocaru, la Cour suprême rappelle que l’analyse de l’intégrité des motifs d’un juge a comme point de départ la présomption d’impartialité judiciaire[26]. Cette présomption ne peut être réfutée « qu’au moyen d’une preuve convaincante »[27] qui démontre « qu’eu égard aux circonstances de l’espèce, une personne raisonnable craindrait que les motifs constituent une justification a posteriori du verdict plutôt que l’exposé du raisonnement ayant conduit à celui-ci »[28]. Cette preuve peut être intrinsèque, c’est-à-dire qu’elle ressort des motifs eux-mêmes, ou extrinsèque[29].

[30]    L’appelant soulève en l’espèce les éléments extrinsèques suivants au soutien de son argument d’une crainte de partialité :

·         Le délai entre la décision rendue oralement et les motifs révisés;

·         Le fait que les motifs révisés ont été reçus après la manifestation de son intention de se pourvoir en appel;

·         L’invitation de la juge à déposer une inscription modifiée en appel après réception des motifs révisés; et,

·         Le défaut de la juge de transmettre une transcription des motifs malgré les demandes répétées de l’appelant.

[31]    Ces éléments, à eux seuls, ne permettent toutefois pas de conclure de manière évidente à une justification a posteriori.

[32]    D’une part, le délai entre le jugement oral et la transmission de la transcription écrite n’est pas aussi significatif en l’espèce que dans les autres exemples jurisprudentiels où cet élément a été considéré pour justifier le rejet des motifs additionnels[30].

[33]    D’autre part, le fait que la Transcription révisée a été complétée après la manifestation de l’intention de faire appel du DPCP n’est pas fatal. Il s’agit d’un élément parmi d’autres qui pourra être considéré dans l’analyse, dans la mesure où la motivation postérieure est exhaustive et donne à croire qu’elle tente de défendre ou justifier sa position après le fait[31]. Dans l’affaire R. v. Arnaout[32], la Cour d’appel de l’Ontario s’exprimait ainsi :

[44]  If an appeal from a verdict has been filed, subsequently released reasons or amendments that deal with issues raised on appeal could create the appearance — whether real or not — that the trial judge is advocating a particular verdict rather than articulating the reasons that led him or her to the verdict: Teskey, at para. 18.

[45]  In this case, the trial judge said that although he expected an appeal, he had not read the notice of appeal and did not know the grounds of appeal. The appellant does not allege otherwise.

[46]  The mere fact that the trial judge expected that an appeal had been filed when he delivered his amendments does not mean the amendments signal partiality. Trial judges frequently release decisions with reasons to follow, and those decisions do not fail simply because a trial judge learns of an appeal before releasing his or her reasons. As with other considerations, the existence of an appeal and the trial judge's knowledge of that appeal are but factors to take into account: Cunningham, at para. 47. Here, the ultimate question remains whether an informed and reasonable observer would believe that the amendments are an after-the-fact justification for the verdicts rather than the articulation of the reasoning that led to the verdicts. 

[47]  In our view, an informed and reasonable observer would, on this record, see the amendments delivered by the trial judge as motivated, at least in part, by the desire to defend his decision against the likely challenges on appeal.

[48]  While the trial judge may not have known the particulars of the appellant’s notice of appeal, the amendments to his original reasons were specifically directed at what was arguably the appellant’s strongest ground of appeal. Without the trial judge’s addition of an alternative theory of liability, the appellant would have had an argument that the trial judge’s finding of guilt on the tainted water attempted murder charges was made in error and on the basis of an erroneous factual finding; namely, that the appellant added Ricin to the water bottles. This, combined with the fact that the trial judge “expected” an appeal and was put on notice of the impending appeal by the psychiatric report filed in relation to the dangerous offender proceedings, created the appearance that the trial judge was attempting to defend his verdict against the primary challenge on appeal.

[49]  Whether this was actually the trial judge’s intention or not, a judge who releases post-verdict reasons after a lengthy delay must always be mindful of the importance that justice not only be done, but that it appear to be done: Teskey, at para. 17.

[34]    En ce qui concerne les demandes répétées pour l’obtention de la transcription des motifs, si elles ont été considérées comme un élément militant en faveur d’une justification a posteriori lorsqu’elles s’ajoutaient à d’autres éléments problématiques dans R. v. Cunningham[33], elles n’ont pas ici à elles seules un caractère déterminant, en raison des difficultés soulevées par la juge pour justifier le retard à transcrire les motifs semblent liées, à tout le moins en partie, à un manque de soutien administratif.

[35]    Concernant les motifs intrinsèques, il n’est pas aisé de tracer la ligne entre clarification significative et justification a posteri. Toutefois, une comparaison rapide du Jugement du 27 novembre 2020 avec la Transcription révisée mène au constat que les motifs ont été bonifiés en l’espèce de manière importante[34] et que la juge s’écarte par ailleurs significativement des commentaires faits aux parties à l’audience, alors qu’elle leur expliquait qu’elles pourraient, au besoin, lui demander la transcription révisée de ses motifs en précisant en quoi elle consisterait[35] :

Alors, qu’est-ce que ça vous donne comme nanane une transcription révisée ? D’une part, ça vous permet d’avoir les références à la preuve, dont je ne ferai pas état pour des questions de temps parce qu’il y a des gens qui doivent retourner à la Cour pour deux heures (14h00) et on essaie d’être efficace.

Donc, vous aurez les références à la preuve dans les notes sténographiques, dans les pièces, des références à des paragraphes du jugement, des références aux articles de loi que vous aurez cités au complet, que j’aurai pas besoin de vous citer, mais je vais vous dire lesquelles dont on parle et des références également à la jurisprudence que vous m’avez cité de part et d’autre à laquelle je ne référerai pas de manière spécifique pour rendre le jugement de ce jour. Donc voilà comment ça fonctionne.

On a la possibilité avec l’arrêt Kellogg de faire un peu d’amplification des motifs. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que le canevas, la structure, le corps du jugement est là et le juge peut ajouter quelques paragraphes pour étoffer un argument plus qu’un autre dans la mesure où ça ne change pas le sens de l’argument, ni le sens du jugement. Alors, ne vous surprenez pas si vous trouvez quelques paragraphes de plus qui élaboreront sur des sujets que vous entendrez et qui sont dûment enregistrés pour fins de référence et comparaison si le besoin se faisait sentir de faire une telle comparaison.

[Caractères gras et soulignements ajoutés]

[36]    Dans les faits, la Transcription révisée va bien au-delà de l’amplification mineure annoncée à l’audience. Les quelques paragraphes se transforment en un texte de 177 paragraphes, dont 29 paragraphes seront consacrés à un nouvel exposé de la preuve[36], 29 traiteront de la réévaluation de la crédibilité des experts[37], 19 comporteront de nouveaux motifs relatifs à l’interprétation législative, la notion de sécurité du barrage et la nécessité de calculs[38], 6 aborderont une nouvelle analyse comparative des articles 5 et 20 LSB[39], tandis que 4 paragraphes soulèveront un nouveau reproche à l’égard de la juge du procès quant à l’usage de ses connaissances personnelles[40] et 5 seront consacrés à l’erreur qu’elle aurait commise en permettant la contre-preuve[41].

[37]    Ces ajouts donnent à penser qu’ils sont formulés pour améliorer de manière substantielle et solidifier les motifs livrés le 27 novembre 2020.

[38]    Les propos de la Cour d’appel d’Ontario dans l’arrêt Wang[42] mettent en évidence les différentes possibilités qui s’offrent pourtant au juge qui constate la nécessité de compléter ses motifs de manière substantielle :

[11]      As stated by Dickson J. in Baxter Travenol Laboratories v. Cutter (Canada), 1983 CanLII 30 (SCC), [1983] 2 S.C.R. 388 at 398: “Reasons for judgment are not meant to be tentative.”  When parties to a proceeding receive reasons that on their face are final, they ought to be entitled to rely on this apparent finality. The Supreme Court of Canada in R. v. Teskey, 2007 SCC 25 (CanLII), [2007] 2 S.C.R. 267 recognized, however, that in some circumstances there may be good reason for announcing a decision prior to delivering the full reasons that led to it. There may be urgency in the outcome being known or, as frequently occurs in the case of rulings in the course of a trial, the judge does not want to delay the progress of the trial so will indicate the result arrived at with or without brief oral reasons. Similarly, a summary conviction appeal judge might choose to announce the decision and outline the reasons for the decision in the presence of the parties. In such cases the judge should give a clear indication that the transcription of the decision (and any brief oral reasons that may have been given) will be supplemented by more comprehensive reasons, written or oral, to follow.

[12]      If unforeseen circumstances arise such that, after delivery of reasons that were meant to be final, a trial judge wishes to correct or supplement the reasons that were already delivered, various options are available. These include the issuance of an addendum, providing supplementary reasons or, when the original reasons were oral, subsequently issuing a set of amended reasons, written or oral. Candour and transparency are however, essential. Where changes or additions are made to the reasons, counsel as well as any reviewing court should have a clear record of what occurred and be in a position to opine as to the legal effect, if any, of the changes or additions made by the judge.

[Soulignements ajoutés]

[39]    Appliquant ces principes à la présente affaire, il aurait été opportun pour la juge, avant même de rendre jugement oralement, de s’interroger sur l’opportunité de le faire quelques jours après avoir entendu l’affaire, si elle estimait ne pas disposer de suffisamment de temps pour clarifier sa pensée de manière à livrer un message complet et cohérent aux parties[43].

[40]    De plus, si au moment de rendre sa décision, la juge envisageait devoir peaufiner significativement ses motifs oraux étant donné la complexité de l’analyse entreprise, elle devait faire preuve de transparence sur ce point (« candour and transparency »), plutôt que de laisser sous-entendre qu’il n’y aurait qu’une légère amplification dans la transcription révisée éventuelle.

[41]    Elle aurait également pu en faire état dans le cadre de ses premiers échanges de courriels avec l’avocate de l’appelant, sachant que ce dernier souhaitait appeler de la décision. Par ailleurs, dans la mesure où elle jugeait nécessaire de bonifier ses motifs après l’audience, il faut se demander si cela découlait ou pouvait raisonnablement laisser croire que cela découlait de la requête pour permission d’appeler ou du fait qu’elle estimait les motifs livrés préalablement à l’audience comme étant incomplets ou inadéquats.

[42]    Le raisonnement ne serait pas différent s’il s’agissait d’un jugement rendu dans un contexte civil en présence d’un raisonnement fragile ou flou, un manque d’assise ou une réflexion inachevée donnant lieu à un message confus et plus ou moins structuré qui ne permettrait pas aux parties d’en saisir tous les tenants et aboutissants.

[43]    Les propos qui précèdent ne doivent pas pour autant être perçus comme condamnant la pratique du jugement rendu à l’audience ou rendu oralement dans les jours qui suivent. Il est évidemment dans l’intérêt de la justice que les jugements soient rendus avec célérité et que les juges prononcent des jugements « séance tenante » lorsqu’ils sont en mesure de le faire, sans pour autant sacrifier le raisonnement ou la réflexion qui s’impose, dans le respect des droits des parties et des règles d’équité. Cela dit, le juge doit toujours être conscient du droit d’appel et par conséquent du délai applicable que les parties doivent respecter et de leur droit d’avoir en main des motifs suffisamment complets afin de rédiger les procédures d’appel, et ce, même s’il est toujours possible d’amender celles-ci. Il convient de rappeler à cet égard les propos du juge Dickson dans l’arrêt Baxter Travenol, tels que repris par la Cour d’appel de l’Ontario dans l’extrait de l’arrêt R. v. Wang reproduit précédemment au paragraphe [38], selon lesquels les parties devraient pouvoir se fier sur le caractère définitif des motifs du jugement rendu.

[44]    En l’espèce, la facture des motifs du jugement oral, lorsque comparé aux ajouts substantiels relatés précédemment, permet de douter de l’intérêt de la justice de procéder de la sorte et surtout du caractère équitable d’une telle démarche. Ces ajouts, combinés aux éléments extrinsèques relevés par l’appelant, mènent à conclure qu’il y a ici une crainte raisonnable de partialité et un renversement de la présomption d’intégrité de la juge.

[45]    C’est d’autant plus le cas que la juge s’avère dans l’impossibilité de donner suite à la demande de transcription écrite formulée par une partie pour lui permettre de faire appel dans les délais avec le bénéfice de cette transcription alors que cette impossibilité peut paraître en partie liée à la nécessité de bonifier ou retravailler le raisonnement pour le solidifier en vue de l’appel.

[46]    De l’avis de la Cour et à l’instar des principes et facteurs énoncés dans l’arrêt Teskey[44] et dans la jurisprudence subséquente citée précédemment, y incluant l’arrêt de cette Cour dans Dufour c. R.[45], la situation soulève, en l’espèce, une crainte chez une personne raisonnable et bien informée que les motifs constituent une justification a posteriori. Cette crainte justifie d’écarter la Transcription révisée pour les fins de l’examen des moyens d’appel pour ne considérer à cet égard que le Jugement du 27 novembre 2020.

* * *

[47]    Avant toutefois d’aborder ces autres moyens, il importe de retracer les grandes lignes du Jugement de première instance ainsi que du jugement de la Cour supérieure siégeant en appel de cette décision.

 

 

Jugement de première instance

[48]    Après avoir résumé le contexte de l’affaire[46], la juge de paix magistrat Larocque débute son analyse en reproduisant le texte du premier alinéa de l’article 5 de la LSB[47] :

5. La construction, la modification de structure et la démolition de tout barrage à forte contenance sont subordonnées à l’autorisation du ministre du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs.

[49]    Elle interprète le mot « modification » en considérant le sens commun du verbe « modifier », tel que défini par le dictionnaire[48]. Elle résume ensuite la preuve matérielle et la preuve testimoniale d’expert administrée au procès afin de déterminer si les travaux ont « modifié » la structure du barrage.

[50]    En outre, elle ne retient pas l’opinion de l’expert retenu par l’intimée, Richard Landriault, selon laquelle l’absence de calculs l’empêchait de conclure à une modification à la structure du barrage. Elle juge que cet expert « n’a pratiquement aucune expérience en matière de barrage ». Aussi, selon elle, sa crédibilité est minée, notamment par son utilisation du terme « parement en aval », calqué sur les propos du Journal des débats parlementaires entourant l’adoption de l’article 5 LSB, qu’on ne retrouve pas par ailleurs dans son rapport écrit. Elle ne retient donc pas la thèse voulant que les travaux relèvent d’un entretien du barrage et ne requièrent pas d’autorisation préalable. Elle considère que les travaux ont modifié la structure du barrage et retient à cet égard l’opinion de l’expert Éric Martel retenu par la poursuite. Elle écrit :

[16]      La défense soutient que la remise en place des pierres n’est pas une modification à la structure, mais de l’entretien qui ne requiert pas d’autorisation.

[17]      Un exemple est donné dans le journal des débats voulant que de l’entretien au parement aval ne constitue pas une modification à la structure du barrage :

[…] si vous faites une réparation du parement aval du barrage, on n'affecte pas la structure, on fait seulement un entretien, je dirais, peut-être qui peut être majeur mais qui n'a pas d'effet sur la sécurité ou la stabilité de l'ouvrage comme tel. On ne considère pas ça comme étant susceptible d'avoir des conséquences sur la sécurité de l'ouvrage.

[18]      Il existe plusieurs sortes de barrage. Cet exemple est général et ne s’applique pas nécessairement à un barrage en empierrement.

[19]      Le Tribunal considère que la modification de la pente de l’écoulement des eaux en replaçant des pierres ne peut être considérée comme de l’entretien, et ce, malgré les coûts minimes et la courte durée des travaux.

[Références omises]

[51]    La juge de paix magistrat Larocque rejette ensuite l’argument de l’intimée selon lequel elle détenait une autorisation de procéder aux travaux, jugeant que cette autorisation datant de 2006 ne visait que des travaux temporaires et des travaux correctifs qui ont eu lieu en 2008 et ne pouvait être « valide après la fin de ces travaux et encore moins […] une décennie plus tard ».

[52]    Au surplus, tout en notant que l’infraction reprochée à l’intimée en est une de responsabilité stricte, la juge de paix magistrat Larocque écarte la défense de diligence raisonnable, puisque l’intimée ne s’est jamais informée de la légalité de ses actions.

[53]    Finalement, elle rejette l’argument selon lequel l’intimée bénéficierait d’un droit acquis, en raison du fait qu’elle entretient le barrage depuis 1967, faute d’avoir démontré qu’elle satisfait les critères pour se réclamer d’un tel droit.

[54]    Par conséquent, elle déclare l’intimée coupable de l’infraction qui lui est reprochée.

Jugement de la Cour supérieure, siégeant en appel de la décision de la Cour du Québec

[55]    Le jugement rendu oralement par la Cour supérieure, le 27 novembre 2020, conclut essentiellement :

·          que le cœur du litige est de savoir si les travaux qui ont été accomplis durant 3,5 heures à un coût de moins de 800 $ correspondent à un entretien selon l’article 20 LSB ou à une modification de la structure du barrage au sens de l’article 5 LSB[49];

·          que la LSB et son Règlement doivent être interprétés de manière globale et que l’article 5 LSB doit être lu conjointement avec l’article 20 LSB ainsi que l’article 58 du Règlement[50] qui énonce les différents éléments requis lorsque des modifications pourraient avoir un impact sur la structure du barrage. Les explications de la juge à cet égard méritent d’être reproduites pour bien saisir la teneur des motifs livrés aux parties à l’audience et sur la base desquelles elles devront décider ou non de l’opportunité de se pourvoir :

        Il y a différents éléments dans le syllogisme que la juge devait étudier pour arriver à sa conclusion. Une modification de structure du barrage évidemment, mais en lien avec un troisième (3e) élément qui est la sécurité de ce barrage. Et cette dernière portion est loin d’être anodine dans toute l’analyse et le résultat tout particulièrement.

        Lorsque l’on interprète la LSB, il faut la regarder de manière globale. Son titre est plus qu’évocateur. L’objet reprend le titre. La manière dont les différentes sections de la loi sont présentées démontre un souci omniprésent de s’assurer de la sécurité des ouvrages, que ce soit avant leur construction, une fois qu’ils sont construits en termes d’entretien et/ou de modifications, que ce soit lorsqu’ils cessent d’être en opération ou même lorsque l’on peut les démanteler, tout est adressé dans cette loi dont le cœur est la sécurité.

        Il en est de même du règlement, de l’application, le tout ayant été révélé en termes d’intention pour supposer que l’on puisse conclure que la loi en tant que telle dans la rédaction ne soit pas claire, par les débats sur l’intention du législateur, tout particulièrement sur l’objectif de l’adoption de cette loi précisé au début la pièce déposée à cet effet, de même que l’intention plus précise du législateur pour faire la distinction entre de simples travaux d’entretien versus des modifications un peu plus substantielles, présumons-le, qui pourraient avoir un impact sur la stabilité de l’ouvrage, que cette stabilité soit sur l’aspect hydraulique ou qu’elle soit sous un aspect autre plus technique en termes de construction du barrage.

        Or, la juge limite son analyse à un seul des aspects dont nous venons de faire état, c’est-à-dire le mot « modification » qu’elle utilise à partir du sens courant des mots, à partir du dictionnaire. Elle a bel et bien considéré les débats notamment sur l’article 5. Cependant, elle n’en tire pas l’inférence qu’elle aurait dû par rapport à l’interprétation globale de la loi dont nous venons de faire état.

        Ce n’est pas parce que l’article 5 et de façon plus particulière l’alinéa 1 n’est pas clair que cet exercice est fait, mais simplement qu’il est nécessaire pour déterminer les tenants et aboutissants d’une expression, c’est-à-dire « modification de structure » en l’occurrence, que de vérifier dans quel contexte particulier et précis cette expression, dont les mots sont clairs, a été utilisée par le législateur.

        Nous avons donc porté une attention particulière sur l’interaction puisqu’il doit y en avoir une en vertu des principes d’interprétation entre les différentes dispositions d’un même texte législatif et même de d’autres textes périphériques qui servent à mettre en œuvre un tel texte législatif. Les articles que nous avons considérés, outre l’article 5, sont évidemment les articles 20 sur l’entretien dans lequel le législateur ne prévoit pas de manière spécifique la nécessité de recourir à une autorisation dans un tel cas et l’article 58 qui prévoit les différents éléments requis lorsqu’il y a des modifications déterminées par un ingénieur qui pourraient avoir un impact sur la structure de l’ouvrage.

·          que le dossier est « en matière de barrage » et l’interprétation du texte de loi permet de comprendre que les ingénieurs sont omniprésents dans le processus de construction et de modification d’un barrage. Partant, selon elle, la juge de paix magistrat Larocque commet une erreur manifeste et déterminante en retenant le témoignage d’un expert qui ne s’appuie que sur un constat visuel et quelques photos démontrant qu’une dizaine de roches ont été déplacées[51];

·          que la juge du procès a choisi le témoignage de l’expert Martel, qui ne s’appuyait que sur des constats visuels ou des photos, plutôt que d’évaluer la preuve dans son ensemble pour voir si elle soulevait un doute raisonnable en l’absence d’un minimum de démonstration technique[52];

·          que la juge du procès a écarté à tort la thèse de l’expert de l’intimée, pourtant ingénieur en structure, et l’a discrédité pour l’utilisation d’un terme qu’il n’aurait pas employé à l’audition[53];

·          que la crédibilité de l’expert Martel, retenu par la poursuite, est entachée par les conclusions qu’il a retenues dans l’affaire Marchaudon[54] où il a estimé que des travaux beaucoup plus onéreux n’entraînaient pas une modification à la structure;

·          que la preuve présentée par l’intimée soulevait un doute raisonnable[55] en l’absence d’un minimum de démonstration technique;

·          que la juge du procès s’est limitée à la définition du mot « modification » selon le dictionnaire, plutôt que de considérer la définition du mot « structure » et les débats parlementaires qui auraient dû la mener à conclure qu’il n’y avait pas eu la preuve d’une modification de structure[56];

·          que la juge du procès a erré en permettant une contre-preuve de la poursuite[57]. Le passage suivant reprend par ailleurs les grandes lignes de son raisonnement[58] :

En effet, selon nous, toute la question de comment trouver un problème de structure où une modification à une structure d’un ouvrage peut-il ne pas impliquer un minimum de données techniques. Le fait que la Défense ait présenté ses arguments et son expertise à la toute fin de l’audition ne faisait pas en sorte que la Couronne puisse réouvrir pour venir expliquer pourquoi elle avait choisi de ne pas faire de calculs ou d’expliquer pourquoi les calculs ne pouvaient pas être faits selon son expert.

En résumé, le Tribunal est donc d’avis qu’il y a plusieurs erreurs dans ce jugement, dont le fardeau approprié de preuve, de même que, et surtout, l’interprétation de l’article 5 de la LSB et que dans ce contexte pénal où le fardeau est strict et très exigeant, il ne saurait être question de s’accommoder d’un début de preuve ni de généralités étant donné que l’idée derrière tout cet exercice est en lien avec des questions de sécurité.

MOYENS SOULEVÉS EN APPEL

[56]    En appel, le DPCP soutient que la juge de la Cour supérieure a erré :

1)    Dans l’interprétation de l’article 5 LSB;

2)    En affirmant que la juge du procès avait erré dans l’évaluation du témoignage des experts;

3)    En reprochant à la juge du procès d’avoir conclu que l’infraction avait été prouvée hors de tout doute raisonnable;

4)    En concluant que la juge du procès avait erré en permettant la contre-preuve;

5)    En le condamnant aux frais dans les deux instances.

ANALYSE

1.    La juge de la Cour supérieure a-t-elle erré dans son interprétation de l’article 5 LSB?

[57]    L’appelant plaide que le libellé de l’article 5 LSB prévoit uniquement trois éléments à prouver hors de tout doute raisonnable : (1) la forte contenance du barrage, (2) la modification de structure du barrage et (3) l’absence d’autorisation du ministre. Or, selon lui, la juge Dallaire aurait ajouté un élément spécifique en exigeant de la poursuite qu’elle démontre que la modification était susceptible d’avoir des conséquences sur la sécurité de l’ouvrage, en se fondant sur sa propre interprétation de l’article 5 LSB et en se référant, à cette fin, aux débats parlementaires. Il mentionne que les débats sont un outil à utiliser avec circonspection[59] et souligne au passage la présomption contre l’ajout aux termes d’une loi[60].

[58]    Rappelons que l’article 5 LSB prévoit :

5. La construction, la modification de structure et la démolition de tout barrage à forte contenance sont subordonnées à l’autorisation du ministre du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs.

Sont aussi soumis à l’autorisation du ministre tout changement d’utilisation d’un barrage à forte contenance susceptible d’avoir des conséquences sur la sécurité de l’ouvrage ainsi que toute cessation définitive ou temporaire de l’exploitation d’un tel barrage.

5. The construction, structural alteration or removal of any high-capacity dam requires the authorization of the Minister of Sustainable Development, Environment and Parks.

The authorization of the Minister is also required for any change in use of a high-capacity dam likely to affect the safety of the works, and for any permanent or temporary stopping of the operation of the dam.

[Soulignements ajoutés]

[59]    Or, le premier alinéa qui concerne les travaux de construction, de modification de structure et démolition de tout barrage à forte contenance ne réfère pas aux conséquences des travaux sur la sécurité de l’ouvrage, contrairement au second alinéa qui ne le fait que lorsqu’il traite de changement d’utilisation d’un barrage.

[60]    Ainsi, en comparant les deux alinéas de l’article 5 LSB, il semble que le législateur n’ait pas voulu soumettre la modification de structure à la démonstration des conséquences de la modification sur la sécurité. Autrement, il l’aurait précisé. Assujettir la nécessité d’une autorisation du ministre à la démonstration des conséquences sur la sécurité de l’ouvrage de la modification de structure proposée reviendrait à dire que la précision du législateur au deuxième alinéa de l’article 5 LSB est inutile. Or, comme le rappelle Pierre-André Côté, en « lisant un texte de loi, on doit en outre présumer que chaque terme, chaque phrase, chaque alinéa, chaque paragraphe ont été rédigés délibérément en vue de produire quelque effet. Le législateur est économe de ses paroles : il ne “parle pas pour ne rien dire” » [Soulignement ajouté][61].

[61]    Par conséquent, l’argument de l’appelant, qui invoque la présomption contre l’ajout aux termes d’une loi, est convaincant et doit l’emporter. Il n’y a pas lieu d’imposer à la poursuite le fardeau de démontrer que les travaux posent un risque de sécurité pour réussir à démonter l’infraction.

[62]    Lorsqu’elle traite de la question du risque pour la sécurité, la juge se réfère aux débats parlementaires qui, à son avis, associent la « modification de structure » aux travaux susceptibles d’avoir un risque inhérent pour la sécurité[62], ce dont la juge du procès aurait omis de tenir compte.

[63]    Elle lui reproche par ailleurs de s’être arrêtée à définir le mot « modification » plutôt que le mot « structure ». Elle oriente cependant son analyse sur le sens technique du mot, plutôt que sur son sens courant. Elle affirme[63] :

Ainsi, nous considérons que l’erreur de la juge a été de se limiter à la définition du dictionnaire du mot « modification » et de ne pas pousser plus loin son analyse pour aller chercher celui dans le dictionnaire du mot « structure ». Si elle l’avait fait, la matière révélée par le Larousse sur la définition du mot « structure », à laquelle est ajoutée l’essence de l’intention du législateur dans les débats, lui aurait permis de conclure que la preuve présentée par le ministère Public était nettement insuffisante pour conclure à la responsabilité de Ski Bromont dans cette affaire.

[64]    Dans la Transcription révisée, la juge précisera qu’elle retient le sens du mot « structure » tel qu’on le retrouve défini dans le dictionnaire Larousse en référant toutefois au sens technique suivant : « un ensemble des pièces d'un ensemble supportant les efforts principaux et formant l'ossature sur laquelle sont fixés les autres éléments (carrosserie, fuselage, etc.) »[64]. Ce choix est important puisqu’il est à la base de la distinction qu’elle trace entre les modifications apportées au parement du barrage et celles en affectant la structure[65], un élément qui, nous le verrons, est crucial lors de l’appréciation de la crédibilité des témoins experts. Or, cette définition n’est pas évoquée dans le jugement rendu oralement.

[65]    Nulle part dans son jugement (que ce soit dans le Jugement du 27 novembre 2020 ou dans la Transcription révisée), la juge de la Cour supérieure ne mentionne ni ne motive son choix de retenir le sens technique des mots plutôt que leur sens courant. Or, rappelons qu’en principe, il y a lieu de présumer que le législateur emploie le sens courant des mots afin de se faire comprendre du justiciable[66].

[66]    En matière d’interprétation législative, l’auteure Ruth Sullivan suggère quelques éléments, outre la présomption en faveur du sens courant des mots[67], pour établir le sens d’un terme dans une loi. Elle mentionne notamment l’objet de la loi et les conséquences de préférer un sens plutôt qu’un autre[68].

[67]    Toutefois, dans la LSB, son Règlement et le Guide d’interprétation de la fiche technique d’un barrage[69], on ne peut dégager un sens précis au terme « structure » de manière à déterminer s’il renvoie spécifiquement à l’ossature du barrage, selon le sens technique du mot, comme le décide la juge Dallaire, plutôt que de manière plus générale « à la manière dont les parties d’un tout sont arrangées entre elles », selon le sens courant du terme « structure », tel que défini dans le dictionnaire Larousse, lequel correspond incidemment à l’interprétation que propose la juge du procès.

[68]    Ici, la juge de la Cour supérieure insiste, avec raison, sur l’idée que l’objet de la LSB est d’assurer la sécurité des riverains. Cela étant, en choisissant de limiter les travaux susceptibles d’autorisation aux seuls travaux qui concernent l’ossature du barrage plutôt que le parement, elle réduit d’autant la gamme des travaux sujets au contrôle de sécurité.

[69]    Ainsi, la Cour supérieure adopte le sens technique du terme « structure » en substituant son interprétation à celle de la juge de première instance, sans motiver son choix d’ignorer la présomption en faveur du sens courant des mots et sans preuve à l’appui[70]. L’interprétation de l’article 5 de la LSB adoptée par la Cour supérieure est erronée et constitue une erreur de droit[71] au sens des articles 286 et 313 du Code de procédure pénale.

[70]     De l’avis de la Cour, la conclusion que tire la juge de la Cour supérieure quant au défaut de prouver l’infraction, hors de tout doute raisonnable, doit être infirmée en conséquence.

2.    La juge de la Cour supérieure a-t-elle erré en affirmant que la juge du procès commet une erreur dans son appréciation du témoignage des experts?

[71]    L’appelant rappelle le principe voulant que l’appréciation de la crédibilité des témoins, incluant celle des témoins experts, commande une grande déférence en appel. En l’absence d’une erreur manifeste et déterminante, le juge en appel ne doit pas intervenir.

[72]    Selon l’appelant, la juge de la Cour supérieure rehausse la valeur de l’opinion de l’expert Landriault et allègue des erreurs dans l’appréciation du témoignage de l’expert Martel par la juge du procès. Elle y substitue à nouveau son opinion sans pour autant relever d’erreur manifeste et déterminante pour écarter la conclusion de la juge de paix magistrat.

[73]    De plus, elle soutient que la juge contrevient au principe de l’arrêt Browne v. Dunn[72], en minant la crédibilité de l’expert Martel à partir de la position contraire qu’il aurait présentée dans l’affaire Marchaudon c. Bertrand[73], un élément que la juge du procès n’a pas considéré puisque l’expert n’avait pas eu l’occasion d’être contre-interrogé à ce sujet lors du procès.

[74]    Dans l’arrêt R. c. Gagnon, la Cour suprême rappelle la déférence qui doit être accordée à l’évaluation de la crédibilité en première instance[74] :

Apprécier la crédibilité ne relève pas de la science exacte. Il est très difficile pour le juge de première instance de décrire avec précision l’enchevêtrement complexe des impressions qui se dégagent de l’observation et de l’audition des témoins, ainsi que des efforts de conciliation des différentes versions des faits. C’est pourquoi notre Cour a statué — la dernière fois dans l’arrêt H.L. — qu’il fallait respecter les perceptions du juge de première instance, sauf erreur manifeste et dominante.

[75]    Cette déférence s’applique aussi à l’égard de l’appréciation des témoins experts[75].

[76]    Dans l’arrêt R. c. Lavallee[76], la Cour suprême pose le principe général selon lequel « pour que l’opinion d’un expert puisse avoir une valeur probante, il faut d’abord conclure à l’existence des faits sur lesquels se fonde l’opinion ».

[77]    Or, l’expert Martel a bien expliqué sa conclusion voulant que les travaux qui ont affecté la capacité d’évacuation du barrage en aient, ce faisant, modifié la structure[77] :

R. Bien essentiellement, comme ces travaux-là, dans le fond, on touchait à différents aspects qui, normalement sont des déclencheurs à une autorisation, bref comme les travaux ont touché à la stabilité du barrage, les travaux ont touché à la géométrie du barrage et ont même affecté dans un certain ordre la capacité d’évacuation, ils touchent aux trois (3) aspects qui, normalement, les travaux-là nécessitent une autorisation en vertu de la Loi sur la sécurité de barrages.

Q. Donc si je comprends bien, les trois (3) éléments que vous avez mentionnés, dès qu’il y a une modification d’un de ces éléments-là, ça entraîne une modification de structure?

R. Effectivement. C’est les trois (3) éléments qui sont normalement des déclencheurs à ce que des travaux nécessitent une autorisation.

[Emphase et soulignements ajoutés]

[78]    En contre-preuve, l’expert précisera que les travaux ont eu un impact sur la stabilité hydraulique du barrage, ce qu’admet aussi l’expert de l’intimée[78] :

Évidemment, dans le cas présent, rien n’a été fait. Donc moi, je peux pas faire de calculs de stabilité quand j’ai pas les données. Par contre, je serais capable d’émettre un avis à partir des travaux qui ont été réalisés, que ces travaux-là ont modifié ou ont un impact sur la stabilité hydraulique.

Il va sans dire, je veux dire même l’expert de la défense a mentionné qu’il a constaté — j’ai pas ses mots exacts — mais qu’il y a eu une amélioration à, l’écoulement suite à sa visite quand il comparait aux photos de deux mille seize (2016), dans le fond.

[Emphase et soulignements ajoutés]

[79]    De fait, de son côté, l’expert Landriault reconnaît le changement à la stabilité hydraulique du barrage, mais il distingue celle-ci de la stabilité du barrage[79] :

R. On parle pas de stabilité, c’est un déversoir. Ça fait juste dire qu’à l’endroit où qu’on a réparé, le débit a été modifié, ça fait que c’était uniforme, le débit passait partout, probablement de la même manière.

Q. Puis pour vous, ça, c’est pas une question de stabilité hydraulique ?

R. Non, c’est pas une... non, on parle de — là, il y a deux (2) choses : stabilité hydraulique, c’est l’eau; puis stabilité du barrage. Il faut faire attention. On parle stabilité hydraulique, oui, il y a pas de problème, c’était stable, mais c’est pas le barrage. Là, vous me parlez de la stabilité hydraulique.

Q. Um-hum. C’est ça que je vous parle.

R. Oui, oui.

Q. Exactement, vous êtes d’accord avec le fait que... le fait que ça devienne uniforme, on a touché à la stabilité hydraulique, dans le fond, de l’écoulement des eaux à ce moment-là ?

R. Oui, stabilité hydraulique, oui, pas la stabilité du barrage.

[Soulignements ajoutés]

[80]    Cette conclusion de l’expert Landriault paraît découler d’une distinction qu’il dresse entre le « parement » du barrage et le « cœur du barrage »[80] :

Q. Maintenant, vous parliez tout à l’heure de deux (2) ... deux (2) parties au barrage, soit le cœur du barrage et le parement, les travaux en question, les remises des dix (10) pierres alléguées par monsieur St-Pierre, c’est sur quelle partie qu’on a travaillé ?

R. Sur le barrage, le déversoir libre. Il y a aucun... il y a aucun travail, c’est la partie droite, si tu regardes le barrage à partir du bas, à la partie droite.

Q. Mais ça, c’est le parement ou la structure du barrage ?

R. Non, c’est un parement qu’on a ... c’est de la pierre d’enrochement qu’on a mis. On n’a pas travaillé sur le barrage en tant que tel. On a remis en place.

[Soulignement ajouté]

[81]    Aussi, au regard de ces extraits, la vraie nature du débat d’experts émerge plus clairement. Les deux experts s’entendent pour dire que la « capacité d’évacuation » et la « stabilité hydraulique » du barrage ont été modifiées en raison des travaux sur le parement. Or, de l’avis de l’expert Martel, ces éléments permettent de conclure à une « modification de structure », ce que conteste l’expert Landriault.

[82]    La juge du procès préfère l’opinion de l’expert Martel vu sa plus grande expérience en matière de barrage et le fait qu’elle est soutenue par la preuve matérielle photographique. Elle juge moins crédibles les propos de l’expert Landriault selon lesquels des travaux visant le « parement » ne modifient pas le « cœur du barrage ». Elle souligne que ces propos ne se retrouvent pas dans son rapport et qu’ils semblent calqués sur la preuve que cherche à faire l’intimée à l’aide du Journal des débats. Elle lui impute, il est vrai, l’utilisation du terme « parement en aval », alors que l’expert Landriault réfère seulement au « parement ». Il ne s’agit pas toutefois d’une erreur déterminante puisque, même sans ce commentaire, l’essence du raisonnement de la juge du procès demeure.

[83]    Quant aux propos tenus en commission parlementaire selon lesquels une « réparation » du « parement en aval »[81] ne relève pas de la modification de structure, ils ne permettent pas à eux seuls de tirer quelque conclusion sur la nature des travaux susceptibles d’entraver la « modification de la structure » du barrage, en l’absence de toute autre précision. Tel que le plaide l’appelant, et tel que le signalait récemment la Cour suprême dans MédiaQMI inc. c. Kamel[82], il faut se garder d’accorder plus de poids à des déclarations individuelles faites de manière spontanée dans le cours de débats parlementaires qu’au texte adopté par le législateur. C’est d’autant plus le cas lorsque le contexte des propos est imprécis.

[84]    La juge du procès considère que l’impossibilité de démontrer si la pente du radier a changé en l’absence de calculs ne démontre pas que la structure n’a pas été modifiée. Au surplus et surtout, l’expert affirme que la stabilité, la géométrie et la capacité d’évacuation du barrage ont été modifiées par les travaux[83]. Il s’agit d’éléments corroborés par des photos et, de plus, les deux experts reconnaissent que la stabilité hydraulique du barrage a été affectée.

[85]    Le raisonnement de la juge de paix magistrat Larocque est motivé et cohérent. Il se tient, bien que la juge de la Cour supérieure ne soit pas du même avis, principalement en raison de la faible ampleur des travaux (qui consistaient à déplacer une dizaine de roches) et de leur faible coût. Selon elle, le raisonnement de la juge du procès s’écarte du « gros bon sens ». Or, de l’avis de la Cour, contrairement à ce qu’affirme la Cour supérieure, la juge de paix magistrat Larocque ne commet pas pour autant une erreur manifeste et déterminante en concluant comme elle le fait à la lumière des témoignages entendus.

[86]    Considérant cette preuve, si l’on accepte que des travaux sur le parement sont des travaux sur la structure en l’espèce, dans la mesure où ils modifient la manière dont les parties du barrage sont arrangées entre elles, l’absence de calculs n’empêche pas de conclure à des modifications au parement affectant l’écoulement des eaux, et donc à la structure.

[87]    En substituant son appréciation de la preuve à celle de la juge du procès, notamment en ce qui concerne les témoignages d’experts, sans démontrer une quelconque erreur manifeste et déterminante, la juge de la Cour supérieure erre en droit.

[88]    De plus, la juge de la Cour supérieure commet une erreur lorsqu’elle évalue la crédibilité de l’expert à la lumière de son témoignage dans l’affaire Marchaudon. En effet, il est « interdit d’importer des éléments de preuve présentés devant d’autres juges lors d’autres procès »[84]. L’intimée plaide que l’affaire Marchaudon n’a pas été présentée pour diminuer la crédibilité du témoin, mais bien pour assurer une application cohérente de l’article 5 LSB. Or, cette idée est indissociable de l’évaluation de la crédibilité et de la fiabilité du témoignage de l’expert Martel qui affirme que, malgré leur faible ampleur, les travaux sur le parement ont modifié la structure du barrage. Prétendre qu’il y a une application incohérente de la LSB revient à dire que l’affirmation de l’expert Martel est erronée et que les travaux relèveraient plutôt du simple entretien.

3.    La juge de la Cour supérieure a-t-elle erré en affirmant que la juge du procès commet une erreur en concluant que l’infraction est prouvée hors de tout doute raisonnable?

[89]    L’appelant s’appuie sur l’article 201 C.p.p.[85] pour affirmer que la juge en erré en droit en exigeant d’emblée un mode de preuve particulier, soit des calculs et des éléments scientifiques relevant de l’ingénierie, plutôt que d’en apprécier la nécessité à la lumière de l’ensemble de la preuve.

[90]    L’appelant s’appuie à cet égard sur les commentaires de la Cour suprême dans l’arrêt Mohan[86] pour affirmer que la juge erre lorsqu’elle reproche à la juge du procès de se fier au témoignage de son expert en l’absence de corroboration, alors que c’est justement le rôle de l’expert que d’éclairer le tribunal.

[91]    L’appelant souligne à bon droit que l’article 201 C.p.p. lui permet de mener sa preuve comme il l’entend pour remplir son fardeau. Or, la juge de la Cour supérieure érige en règle absolue la nécessité de produire des calculs pour démontrer une modification de structure.

[92]    En l’espèce, la juge du procès retient la conclusion de l’expert Martel, corroborée par la preuve matérielle, plutôt que celle de l’expert Landriault qui insistait sur la nécessité des calculs pour soutenir la démonstration de l’infraction. Elle pouvait conclure de la sorte sans pour autant commettre d’erreur et son verdict n’est pas déraisonnable pour autant[87].

4.    La juge de la Cour supérieure a-t-elle erré en affirmant que la juge du procès commet une erreur en permettant la contre-preuve?

[93]    S’appuyant sur l’article 202 C.p.p.[88], lu conjointement avec les articles 64 C.p.p. et 211 C.p.p., l’appelant plaide que la décision de produire une contre-preuve relève uniquement de la discrétion de la poursuite et n’a pas un caractère exceptionnel, sous réserve de démontrer qu’elle vise à répondre à un fait nouveau ou imprévisible plutôt qu’à bonifier une preuve insuffisante. Aussi, la juge de la Cour supérieure se serait méprise sur les principes applicables dans son analyse puisqu’elle réfère à l’article 210 C.p.p. et à l’idée d’une réouverture de la preuve, plutôt qu’aux termes clairs de 202 C.p.p. Elle donne aussi un caractère exceptionnel à la contre-preuve qui n’a pas lieu d’être.

[94]    Suivant la jurisprudence, la contre-preuve est généralement admissible lorsqu’elle porte sur un élément essentiel du litige et que la poursuite ne pouvait prévoir qu’une telle preuve serait nécessaire[89]. La Cour suprême affirme dans l’arrêt R. c. Aalders[90] :

En conséquence, lorsqu’un témoin fait, au cours de son témoignage au procès, une déclaration qui entre en conflit avec d’autres éléments de preuve portant sur une question essentielle, la contre-preuve sera autorisée pour résoudre ce conflit.

[95]    L’affirmation de l’expert Landriault selon laquelle il est impossible de démontrer une modification à la structure du barrage en l’absence de calculs vient contredire le témoignage de l’expert Martel sur un point qui ne pouvait être raisonnablement prévu par la poursuite. Par cette contre-preuve, l’appelant cherchait à répondre à cette question ciblée. De l’avis de la Cour, la juge de paix magistrat Larocque n’a pas erré en permettant cette contre-preuve.

5.    La juge de la Cour supérieure a-t-elle erré en octroyant les frais à l’appelant, tant en appel qu’en première instance?

[96]    S’appuyant sur le texte des articles 223 et 289 C.p.p.[91], l’appelant plaide que la juge ne pouvait condamner que l’intimée (en appel devant elle) en cas du rejet de son appel. Au surplus, selon lui, le poursuivant ne peut être condamné aux frais que si sa poursuite est abusive ou manifestement mal fondée, c’est-à-dire seulement dans des cas exceptionnels[92].

[97]    Considérant la conclusion à laquelle en vient la Cour sur le sort du pourvoi, à savoir qu’il y a lieu d’infirmer le jugement de la Cour supérieure et de rétablir celui de la Cour du Québec, la conclusion de la juge de la Cour supérieure sur les frais est devenue théorique.

[98]    Néanmoins, il paraît utile de signaler que, suivant l’approche libérale mise de l’avant dans l’arrêt Cameron c. Stornoway[93], la Cour supérieure a pleine compétence pour statuer sur l’octroi des frais lorsque l’appel est accueilli, de sorte que la prétention de l’appelant selon laquelle il ne peut pas être condamné aux frais en appel devant la Cour supérieure et en première instance est mal fondée.

POUR CES MOTIFS, LA COUR :

[99]       ACCUEILLE l’appel, avec les frais de justice;

[100]    INFIRME le jugement de la Cour supérieure et procédant à rendre la décision qui aurait dû être rendue :

REJETTE l’appel formé par 3095-2899 Québec inc., avec les frais de justice.

 

 

 

 

JACQUES CHAMBERLAND, J.C.A.

 

 

 

 

 

GENEVIÈVE MARCOTTE, J.C.A.

 

 

 

 

 

GUY COURNOYER, J.C.A.

 

Me Juliette Ménard-Reid

DIRECTEUR DES POURSUITES

CRIMINELLES ET PÉNALES

Pour l’appelant

 

Me Andrée-Ann Robert

Me François Joubert

GASCO GOODHUE ST-GERMAIN

Pour l’intimée

 

Date d’audience :

11 juin 2021

 



[1]     Directeur des poursuites criminelles et pénales c. 3095-2899 Québec inc., C.S. Québec, 27 novembre 2020, 455-36-000117-192, C. Dallaire, j.c.s., E.A., vol. 1, p. 18 [Jugement du 27 novembre 2020].

[2]     3095-2899 Québec inc. c. Directeur des poursuites criminelles et pénales, 2020 QCCS 4829 [Transcription révisée].

[3]     Directeur des poursuites criminelles et pénales c. 3095-2899 Québec inc., 2019 QCCQ 3756 [Jugement de première instance].

[4]     Loi sur la sécurité des barrages, RLRQ, c. S-3.1.01.

[5]     Jugement du 27 novembre 2020, supra, note 1.

[6]     Curieusement, l’entrée au plumitif est datée du 1er février 2021.

[7]     Directeur des poursuites criminelles et pénales c. 3095-2899 Québec inc., 2021 QCCA 341 (J. unique].

[8]     Kellogg's Co. of Canada c. P.G. du Québec, [1978] C.A. 258, p. 260.

[9]     Roy c. Patenaude, [1994] R.J.Q. 2503 QC CA, 1994 CanLII 6107, p. 10.

[10]    Code de procédure pénale, RLRQ, c. C-25.1, art. 225 :          

225. Une fois rendu, un jugement est final et il ne peut être confirmé, infirmé ou modifié que conformément au présent code.

225. Once rendered, every judgment is final and cannot be upheld, quashed or amended except in accordance with this Code.

 

[11]    Kellogg's Co. of Canada c. P.G. du Québec, supra, note 8, p. 260.

[12]    R. c. Teskey, 2007 CSC 25, paragr. 16-17.

[13]    Id., paragr. 23.

[14]    R. v. Wang, 2010 ONCA 435.

[15]    Id., paragr. 9-10.

[16]    R. c. Teskey, supra, note 12, paragr. 18 et 20.

[17]    R. v. Thompson, 2010 ONCA 463, paragr. 21-22.

[18]    Id., paragr. 23-24.

[19]    Dufour c. R., 2017 QCCA 1159, paragr. 22-34.

[20]    Id., paragr. 30-34.

[21]    Béton Brunet ltée c. Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier (SCEP), section locale 700, 2015 QCCA 188, paragr. 28-30.

[22]    Dans Lafarge Canada inc. c. Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier (SCEP), section locale 700, 2013 QCCA 2093, paragr. 17-1, au moment d’accorder la permission de faire appel de la décision, le juge Dalphond distinguait cette situation de celle de la transcription du jugement rendu oralement.

[23]    R. c. Teskey, supra, note 12; R. v. Wang, supra, note 14; R. v. Thompson, supra, note 17; Dufour c. R., supra, note 19.

[24]    Dufour c. R., supra, note 19; Thompson, supra, note 17.

[25]    R. v. Krouglov, 2017 ONCA 197, paragr. 61-62; R. v. Sadikov, 2018 ONCA 609, paragr. 10. À noter que l’article 338 C.p.c. (anciennement l’article 475 a.C.p.c.) prévoit le droit à la rectification pour une erreur d’écriture, de calcul ou autre erreur matérielle résultant d’une inadvertance manifeste, par exemple. Par ailleurs, l’article 334 C.p.c.[25] (qui a remplacé l’article 471 a.C.p.c.) traite plus particulièrement du jugement rendu à l’audience aux alinéas 2 et 3 :

 

334. Le jugement daté et signé par celui qui l’a rendu est un acte authentique. Il est déposé au greffe et inscrit sans délai dans les registres, sous la date qu’il porte. Il est conservé dans les archives du tribunal.

Le jugement rendu à l’audience, qu’il s’agisse d’un jugement au fond ou rendu en cours d’instance, est constaté par l’inscription de la décision et de ses principaux considérants au procès-verbal attesté par celui qui l’a rendu. Sur demande d’une partie, ce jugement peut aussi être constaté par la transcription de l’enregistrement et par la signature de celui qui l’a rendu. S’il y a transcription, le dispositif du jugement ne peut être modifié, mais le juge peut en corriger la forme.

En cas de divergence entre le jugement original et les entrées des registres, le premier prévaut et le juge peut ordonner les corrections nécessaires aux registres, sans formalités.

 

334. A judgment dated and signed by the person who rendered it is an authentic act. It is deposited at the court office and entered without delay in the registers under the date appearing on it. It is kept in the court records.

A judgment rendered at the hearing, whether a judgment on the merits or a judgment in the course of a proceeding, is evidenced by entry of the decision and its main whereas clauses in the minutes, attested by the person who rendered the judgment. On a party’s request, the judgment may also be evidenced by the transcript of the recording, signed by the person who rendered the judgment. The operative part of the judgment cannot be modified in such a transcript but the judge may correct its form.

If there is a discrepancy between the original judgment and the entries in the court registers, the former prevails, and the judge may without formality order that the necessary corrections be made in the court registers.

 

[26]    Cojocaru c. British Columbia Women’s Hospital and Health Centre, 2013 CSC 30, paragr. 16 [Cojocaru]; R. c. Teskey, supra, note 12, paragr. 19.

[27]    Cojocaru, supra, note 26, paragr. 27; R. c. Teskey, supra, note 12, paragr. 21.

[28]    R. c. Teskey, supra, note 12, paragr. 21.

[29]    Cojocaru, supra, note 26, paragr. 29.

[30]    R. v. Cunningham, 2011 ONCA 543, paragr. 37 (25 mois) [Cunningham]; R. v. Arnaout, 2015 ONCA 655, paragr. 50 (17 mois) [Arnaout]; R. c. Teskey, supra, note 12, paragr. 2 (11 mois). Au contraire, dans R. v. Giesbrecht, 2019 MBCA 35, paragr. 140, la Cour d’appel du Manitoba estime que le jugement rendu à l’intérieur d’un délai de 3 mois a été rendu in a timely fashion.

[31]    R. c. Teskey, supra, note 12, paragr. 22; Cunningham, supra, note 30, paragr. 47.

[32]    Arnaout, supra, note 30.

[33]    Cunningham, supra, note 30, paragr. 38.

[34]    Contrairement à Arnaout, supra, note 30, paragr. 38-42; R. v. Desmond, 2020 NSCA 1, paragr. 15-24, bien que présentant des similarités avec ce dernier cas.

[35]    Jugement du 27 novembre 2020, supra, note 1, E.A., vol. 1, p. 21, l. 14-15; p. 22, l. 1-16.

[36]    Transcription révisée, supra, note 2, paragr. 20-48.

[37]    Id., paragr. 73-76, 98-99,124-132 et 139-153.

[38]    Id., Paragr. 79-97.

[39]    Id., paragr. 100-105.

[40]    Id., paragr. 120-123.

[41]    Id., paragr. 165-169.

[42]    R. v. Wang, supra, note 14, paragr. 11-12.

[43]    J.L. c. R., 2017 QCCA 398, paragr. 65-67 :

[65]   Le jugement rendu séance tenante ne peut avoir le même niveau de précision que celui rendu après l’exigeant exercice de l’écriture. Sans aucun doute, le jugement doit être analysé avec ce principe à l’esprit : R. c. L. (J.), 2011 QCCA 1848, par. 25. Il faut, bien sûr, tenir compte des contraintes de temps et du volume des cours criminelles de première instance : R. c. R.E.M., [2008] 3 R.C.S. 3, par. 13; R. c. Sheppard, [2002] 1 R.C.S. 869, par. 55.

[66]   En retour, en plus de permettre d’organiser la pensée, l’écriture impose un moment de recul, par opposition à une certaine précipitation à élaborer une décision, et cela oblige à prendre une distance avec la forte impression que laissent parfois les faits. Dans l’arrêt R. c. R.E.M., [2008] 3 R.C.S. 3, la Cour suprême écrit, par. 12 :

          … la tâche d’énoncer les motifs attire l’attention du juge sur les points saillants et diminue le risque qu’il laisse de côté des questions de fait ou de droit importantes ou ne leur accorde pas l’importance qu’elles méritent. Un juge a déjà dit : [traduction] « Souvent, la forte impression que les faits sont clairs, selon la preuve, s’estompe lorsque vient le temps d’exprimer cette impression sur papier » (United States c. Forness, 125 F.2d 928 (2d Cir. 1942), p. 942). …

[67]   Ou encore comme l’écrivait le juge Laskin de la Cour d’appel de l’Ontario dans l’arrêt R. c. Maharaj (2004), 186 C.C.C. (3d) 247 (C.A.O.):

          [22] To these rationales I add that giving reasoned reasons is an important self-discipline for a judge. The well-known phrase “sometimes it just won’t write” signals that occasionally a judge’s instincts about a case do not stand up to reasoned analysis. The process of putting pen to paper — of articulating the “path” to one’s conclusion — may disclose a flaw in one’s reasoning. As L’Heureux Dubé J. sensibly observed in Baker v. Canada (Minister of Citizenship and Immigration), [1999] 2 S.C.R. 817, at para. 39: “The process of writing reasons for decision by itself may be a guarantee of a better decision.

 

[44]    R. v. Teskey, supra, note 12.

[45]    Dufour c. R., supra, note 19.

[46]    Voir paragr. 3 à 8 reproduits au paragr. [4] du présent arrêt.

[47]    Jugement de première instance, supra, note 3, paragr. 9; Loi sur la sécurité des barrages, supra, note 4, art. 5 al. 1.

[48]    Jugement de première instance, supra, note 3, paragr. 10. Selon le Dictionnaire Larousse en ligne : « transformer quelque chose, le faire évoluer vers quelque chose d’autre, changer quelque chose, lui donner un autre aspect, y apporter des rectifications, des ajustements ».

[49]    Jugement du 27 novembre 2020, supra, note 1, E.A, vol. 1, p. 24, l. 3-5.

[50]    Id., p. 32, l. 19 à p. 35, l. 7.

[51]    Jugement du 27 novembre 2020, supra, note 1, E.A, vol. 1, p. 35, l. 8-25.

[52]    Id., p. 36-37.

[53]    Id., p. 39.

[54]    Id., p. 37, l. 19-25 et p. 38, l. 1-13.

[55]    Id., p. 38-39.

[56]    Id., p. 40.

[57]    Jugement du 27 novembre 2020, supra, note 1, E.A, vol. 1, p. 40, l. 15-25.

[58]    Id., p. 41, l. 1-19.

[59]    Citant notamment Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), 1998 CanLII 837 (CSC), paragr. 35 :

      « Malgré les nombreuses lacunes de la preuve des débats parlementaires, notre Cour a reconnu qu’elle peut jouer un rôle limité en matière d’interprétation législative »; À l’audience, l’appelant réfère de plus aux propos de la majorité de la Cour suprême dans l’arrêt récent MédiaQMI inc. c. Kamel, 2021 CSC 23, paragr. 36-39.

[60]    Agence du revenu du Québec c. Corriveau, 2013 QCCA 1156, paragr. 29-35; Pierre-André Côté avec la collaboration de Stéphane Beaulac et Mathieu Devinat, Interprétation des lois, 4e éd., Yvon Blais, Cowansville, 2009, paragr. 1042 [P.-A. Côté].

[61]    P.-A. Côté, supra, note 60, p. 295-395, paragr. 1047.

[62]    Rappelons à cet égard l’extrait suivant du Journal des débats de la Commission des transports et de l’environnement, 16 mai 2000, volume 36, no 52, page 11 :

      M. Bégin : C’est ça. Mais ça, ça a été ajouté, parce que ça n’était pas dans l’avant-projet de loi, ces mots-là, "susceptible d’avoir des conséquences sur la sécurité de l’ouvrage". Donc, si ce que vous faites est banal, insignifiant, n’a pas d’influence sur la sécurité de l’ouvrage, on passe ; mais, inversement, on calcule que ça va avoir une importance considérable, et c’est là qu’on dit que ça va être soumis à l’autorisation du ministre. Donc, il y a une certaine part de jugement qui est portée par l’analyse, mais je crois bien que ça doit être techniquement possible de dire : Par cet ouvrage-là, tu affectes ou tu n’affectes pas la sécurité du barrage existant, il me semble.

      M. Gosselin (Yvon) : Oui. Il faut comprendre ici que c’est toute modification qui affecte la structure. Par exemple, si vous faites une réparation du parement aval du barrage, on n’affecte pas la structure, on fait seulement un entretien, je dirais, peut-être qui peut être majeur mais qui n’a pas d’effet sur la sécurité ou la stabilité de l’ouvrage comme tel. On ne considère pas ça comme étant susceptible d’avoir des conséquences sur la sécurité de l’ouvrage. [Soulignements ajoutés]

[63]    Jugement du 27 novembre 2020, supra, note 1, E.A., vol. 1, p. 40, l. 3-14.

[64]    Voir Isabelle Jeuge-Maynart (dir.) et al., Larousse.fr, Paris, Larousse, « structure », en ligne : https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/structure/74918 (page consultée le 21 juillet 2021).

      Transcription révisée, supra, note 2, paragr. 82, à la note de bas de page 45.

[65]     Transcription révisée, supra, note 2, paragr. 12, à la note de bas de page 5.

[66]    P.-A. Côté, supra, note 60, p. 295-395, paragr. 995-996. La définition courante dans le Larousse est la suivante : « manière dont les parties d’un tout sont arrangées entre elles », Larousse, supra, note 64. Voir aussi la définition dans le dictionnaire Usito : Hélène Cajolet-Laganière, Pierre Martel et Chantal-Édith Masson (avec le concours de Louis Mercier comme conseiller éditorial), Dictionnaire Usito, Sherbrooke, Université de Sherbrooke, « structure », en ligne :

      https://usito.usherbrooke.ca/définitions/structure (page consultée le 21 juillet 2021) et dans le dictionnaire Le Robert : Catherine Lucet (dir.) et al., Le Robert : Dico en ligne, Paris, Le Robert, « structure », en ligne : https://dictionnaire.lerobert.com/definition/structure (page consultée le 21 juillet 2021).

[67]    Ruth Sullivan, Sullivan on the Construction of Statutes, 6 éd., Markham, Lexis Nexis, 2014, p. 58, paragr. 4.7 [R. Sullivan].

[68]    Id., p. 63, paragr. 4.16.

[69]    Pièce D-3 : Guide d’interprétation de la fiche technique d’un barrage.

[70]    Ruth Sullivan explique que le sens technique n’est habituellement pas de connaissance judiciaire, mais doit être prouvé par témoignage d’expert. Voir R. Sullivan, supra, note 67, p. 64, paragr. 4.17.

[71]    R. c. McRae, 2013 CSC 68, [2013] 3 R.C.S. 931, paragr. 10 et 13; R. c. Mabior, 2012 CSC 47, [2012] 2 R.C.S. 584, paragr. 82.

[72]    (1893), 6 R. 67. Dans l’arrêt R. c. Lyttle, [2004] 1 R.C.S. 193, 2004 CSC 5, la Cour suprême explique que « [l]a règle établie dans Browne c. Dunn oblige l’avocat à prévenir les témoins dont il entend mettre en doute la crédibilité ultérieurement » (paragr. 64) et que cette règle « vise à faire en sorte que les témoins et les parties soient traités équitablement » (paragr. 65).     

[73]    2012 QCCQ 2231.

[74]    R. c. Gagnon, 2006 CSC 17, paragr. 20. Voir aussi R. c. G.F., 2021 CSC 20, paragr. 81.

[75]    Turk c. R., 2014 QCCA 2074, paragr. 11-14; P.L. c. Benchetrit, 2010 QCCA 1505, paragr. 28-29.

[76]    R. c. Lavallee, 1990 CanLII 95 (CSC), [1990] 1 RCS 852.

[77]    Témoignage de Éric Martel, interrogé par Me Hamel, le 30 novembre 2018, E.A., vol. 2, p. 544, l. 12-25; p. 545, l. 1-3.

[78]    Témoignage de Éric Martel, interrogé par Me Hamel, le 25 février 2019, E.A., vol. 3, p. 698, l. 9-19.

[79]    Témoignage de Richard Landriault, contre-interrogé par Me Hamel, le 25 février 2019, E.A., vol. 3, p. 675, l. 1-20.

[80]    Témoignage de Richard Landriault, contre-interrogé par Me Hamel, le 25 février 2019, E.A., vol. 3, supra, note 79, p. 664, l. 22-25; p. 665, l. 1-8.

[81]    Journal des débats de la Commission des transports et de l’environnement, 16 mai 2000, volume 36, no 52, page 11.

[82]    MédiaQMI inc. c. Kamel, supra, note 59, paragr. 37-38.

[83]    Jugement de première instance, supra, note 3, paragr. 13 et 19.

[84]    Massoud c. R., 2021 QCCA 21, paragr. 46. Voir au même effet : R. c. Gubbins, 2018 CSC 44, [2018] 3 R.C.S. 35, paragr. 49; R. c. Daley, 2007 CSC 53, [2007] 3 R.C.S. 523, paragr. 86; Fort Théagène c. R., 2021 QCCA 637, paragr. 27 et 44.

[85]    Code de procédure pénale, RLRQ, c. C-25.1. L’article 201 C.p.p. prévoit :

201. Le poursuivant a, dans les limites prévues par la loi, pleine liberté dans la conduite de la poursuite et le défendeur a droit à une défense pleine et entière.

201. The prosecutor has complete freedom within the limits prescribed by law in the conduct of the proceedings and the defendant has a right to a full and complete defence.

 

[86]    R. c. Mohan, [1994] 2 R.C.S. 9, p. 23, citant R. c. Abbey, [1982] 2 R.C.S. 24.

[87]    Code criminel, L.R.C., (1985), ch. C-46, art. 686(1)a)i); R. c. R.P., [2012] 1 RCS 746, paragr. 5 et 9; Pardi c. R., 2014 QCCA 320, paragr. 25.

[88]    L’article 202 C.p.p. prévoit :  

202. Le poursuivant présente tout d’abord la preuve de la perpétration de l’infraction, puis le défendeur, s’il choisit de le faire, produit sa défense. Le poursuivant peut ensuite présenter une contre-preuve.

1.     202. The prosecutor shall first present the evidence of the commission of the offence; the defendant may then, if he elects to do so, produce his defence and, finally, the prosecutor may adduce evidence in rebuttal.

[Soulignement ajouté]

 

[89]    R. c. Aalders, 1993 CanLII 99 (CSC), [1993] 2 RCS 482 [Aalders]; R. c. Lavoie, 1992 CanLII 3960 (QC CA).

[90]    Aalders, supra, note 89.

[91]    Code de procédure pénale, RLRQ, c. C -25.1, art. 223 et 289 :

223. Lorsqu’il rend jugement, le juge peut ordonner :

1°  au défendeur de payer les frais fixés par règlement lorsqu’il le déclare coupable d’une infraction et lui impose une amende ;

2°  au poursuivant de payer au défendeur les frais fixés par règlement s’il considère que la poursuite est abusive ou manifestement mal fondée ;

3°  au défendeur ou au poursuivant, selon le cas, de payer les frais fixés par règlement lorsqu’il a été décidé que ceux-ci seraient déterminés lors du jugement sur la poursuite.

[…]

223. When rendering judgment, the judge may

(1)  order the defendant to pay the costs fixed by regulation where he convicts him of an offence and imposes a fine on him;

(2)  order the prosecutor to pay to the defendant the costs fixed by regulation if he considers the proceedings to be an abuse or clearly unfounded;

(3)  order the defendant or the prosecutor, as the case may be, to pay the costs fixed by regulation where it has been decided that they would be determined upon judgment on the proceedings.

[…]

289. S’il rejette l’appel sur dossier, le juge peut, conformément à l’article 223, condamner l’appelant aux frais fixés par règlement pour la première instance et l’appel.

289. If the judge dismisses the appeal on the record, he may, in accordance with article 223, award the costs fixed by regulation for the trial in first instance and the appeal against the appellant.

[Soulignements ajoutés]

     

[92]    Longueuil (Ville de) c. Burke, 2006 QCCS 1249, paragr. 28.

[93]    Cameron c. Stornoway (Municipalité de), 2013 QCCA 881, paragr. 59 et 62-63 :

[59]  La rédaction particulière de cette disposition peut donner lieu à diverses interprétations. En effet, si l’appel est rejeté, cette disposition confère une discrétion au juge d’accorder ou non des frais (peut/may), et ce, dans les limites prévues par le règlement. Par contre, lorsque l’appel est accueilli, qu’en est-il? Dans l’affaire Delangis c. Joliette (Ville de), 1997 CanLII 9049 (QC CS), [1997] R.J.Q. 1296, paragr. 71-74 (C.S.), appel accueilli sur une autre question : [1999] R.J.Q. 2836 (C.A.), le juge Béliveau de la Cour supérieure conclut que les règles habituelles en matière de frais s’appliquent; en d’autres mots, la Cour supérieure a pleine compétence pour statuer sur l’octroi de frais. Voir aussi : Lauzon c. La Plaine (Ville de), B.E. 2000BE-552 (C.S.).

[…]

[62]   Somme toute, l’interprétation des dispositions du Code de procédure pénale en matière de frais d’appel doit se faire dans le respect des principes généraux, comme la nécessité de réparation en cas de violation des droits fondamentaux, le pouvoir inhérent des cours supérieures d’accorder des frais et l’importance de placer le poursuivant et l’accusé sur un pied d’égalité au point de vue des frais en appel. Conclure que la partie poursuivante ne peut se voir condamner aux frais de l’appel qu’en cas de poursuite abusive ou manifestement mal fondée dissuaderait les accusés injustement poursuivis de se prévaloir de leur droit d’appel en leur indiquant qu’ils ne feront que s’exposer à des frais additionnels sans pouvoir eux-mêmes en obtenir s’ils ont gain de cause. Enfin, l’interprétation retenue incite les autorités investies du pouvoir de poursuite à exercer leur discrétion et à consentir au besoin plutôt que de contester automatiquement tout appel par une personne accusée.

[63]  Il s’ensuit que la Cour a le pouvoir d’accorder des frais à l’appelante, tant en Cour supérieure qu’en Cour d’appel (art. 223, 289, 313 C.p.p.). Leur étendue est cependant limitée puisque le législateur les a restreints à ceux prévus au Tarif judiciaire en matière pénale, précité (Terrasses St-Sulpice, précité, 589). [Soulignements ajoutés]

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