Décision

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Tawile c. Gosselin

2024 QCTAL 35793

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Montréal

 

No dossier :

794358 31 20240516 G

No demande :

4327511

 

 

Date :

07 novembre 2024

Devant la juge administrative :

Amélie Dion

 

Joseph Tawile

 

Locateur - Partie demanderesse

c.

Diane Gosselin

 

Locataire - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]         Le locateur demande la résiliation du bail, le recouvrement des loyers à la suite du départ de la locataire, le tout avec les intérêts et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q., l'exécution provisoire malgré l'appel et les frais judiciaires.

[2]         Subsidiairement, le locateur demande de constater que la locataire ou les personnes à qui elle a permis l’accès au logement occupent illégalement le logement.

LE CONTEXTE

[3]         Il s’agit d’un bail reconduit du 1er novembre 2023 au 31 octobre 2024 au loyer mensuel de 1 000 $. Le bail n’est pas solidaire et le locateur a choisi de poursuivre que la locataire.

[4]         En juillet 2024, la locataire a avisé le locateur qu’elle ne pourrait retourner dans son logement pour des raisons médicales. Ainsi, elle demande la résiliation du bail.

[5]         Le locateur reçoit vers le 8 juillet 2024, une lettre de la travailleuse sociale de la locataire, provenant du centre intégré de santé et de service sociaux du centre sud de l’Île de Montréal. Cette lettre indique que pour des raisons médicales, la locataire est dans l’impossibilité de réintégrer son logement.

[6]         Ainsi, depuis cette date, la locataire a définitivement quitté son logement avec ses effets personnels. Il ne s’agit pas d’un déguerpissement.

LES QUESTIONS EN LITIGE

[7]         Le bail de la locataire est-il résilié à la suite de l’envoi d’un avis conformément à l’article 1974 C.c.Q. ?

[8]         Dans l’affirmative, combien doit la locataire en loyers impayés ?


[9]         Alternativement, le locateur a-t-il droit à une demande en expulsion des occupants sans droit du logement ?

[10]     Subsidiairement le bail doit-il être résilié, car la locataire est en retard de plus de trois semaines dans le paiement du loyer ?

L’ANALYSE

[11]     L’article 1855 du Code civil du Québec (C.c.Q.) établit qu’un locataire est tenu de payer le loyer convenu pendant la durée du bail. Toutefois, l’article 1974 C.c.Q. est une des exceptions à cette règle :

« 1974. Un locataire peut résilier le bail en cours, s'il lui est attribué un logement à loyer modique ou si, en raison d'une décision du tribunal, il est relogé dans un logement équivalent qui correspond à ses besoins; il peut aussi le résilier s'il ne peut plus occuper son logement en raison d'un handicap ou, s'il s'agit d'une personne âgée, s'il est admis de façon permanente dans un centre d'hébergement et de soins de longue durée, dans une ressource intermédiaire, dans une résidence privée pour aînés où lui sont offerts les soins infirmiers ou les services d'assistance personnelle que nécessite son état de santé ou dans tout autre lieu d'hébergement, quelle qu'en soit l'appellation, où lui sont offerts de tels soins ou services, qu'il réside ou non dans un tel endroit au moment de son admission.

La résiliation prend effet deux mois après l'envoi d'un avis au locateur ou un mois après l'envoi d'un tel avis lorsque le bail est à durée indéterminée ou de moins de 12 mois. Elle prend toutefois effet avant l'expiration de ce délai si les parties en conviennent ou lorsque le logement, étant libéré par le locataire, est reloué par le locateur pendant ce même délai. L'avis doit être accompagné d'une attestation de l'autorité concernée, à laquelle est joint, dans le cas d'un aîné, le certificat d'une personne autorisée certifiant que les conditions nécessitant l'admission sont remplies.

Le locataire n'est tenu, le cas échéant, au paiement de la partie du loyer afférente au coût des services qui se rattachent à sa personne même qu'à l'égard des services qui lui ont été fournis avant qu'il quitte le logement. Il en est de même du coût de tels services lorsqu'ils sont offerts par le locateur en vertu d'un contrat distinct du bail. »

[12]     Dans l’affaire 9146-6573 Québec inc. (Résidence Murray) c. Ruel Lapointe[1], la juge Madeleine Aubé, j.c.q, mentionne :

« [53] La question relative à un professionnel qualifié a fait l'objet d'un long débat à l'Assemblée nationale lors de l'adoption de cette disposition (32). Il est clair que la seule admission dans une nouvelle résidence ne suffit pas. Selon l'intention du législateur, une personne qualifiée doit attester de la nécessité du relogement en lien à la condition de la personne âgée.

[54] En l'espèce, l'attestation signée par une travailleuse sociale (33) démontre que le changement de résidence en cours de bail a été dicté par l'obtention de services que nécessitaient l'état de santé et les besoins de la locataire, après une évaluation médicale et psychosociale. »

[Références omises]

[13]     Sur le fardeau de la preuve, elle explique ce qui suit :

« [62] Une fois la suffisance de l'attestation du certificat prima facie reconnue par le régisseur, il appartient à Résidence Murray de démontrer que le certificat et l'attestation sont non conformes. Il lui appartient alors de faire la démonstration du bien-fondé de ses prétentions sur l'insuffisance de l'avis, selon la norme de la prépondérance de la preuve en matière civile. »

Le recouvrement des loyers

[14]     Le locateur réclame la résiliation du bail et tous les loyers dus. Le Tribunal retranche les montants dus par la succession de feu Raymond Forget. Le Tribunal constate que le bail est résilié depuis le 8 septembre 2024, soit deux mois après l’avis de la travailleuse sociale.

[15]     La preuve démontre que la locataire doit 2 000 $, soit 500 $ pour le mois de mars 2024, 500 $ pour le mois de juillet 2024, 500 $ pour août et 500 $ pour septembre 2024.

[16]     La locataire croit avoir payé tous ses loyers, mais admet que c’est son ami décédé le 11 février 2024 qui payait le loyer. À la suite de son décès, elle ne peut être certaine que la succession de son ami a payé le loyer.


[17]     Le Tribunal conclut que la locataire n'a pas payé tous les loyers dus au locateur et n'a pas de preuve des paiements pour lesquels le locateur demande le recouvrement.

La résiliation du bail

[18]     Étant donné que le bail est déjà résilié en vertu de l’article 1974 C.c.Q, il n’y a pas lieu de se prononcer sur la résiliation du bail pour non-paiement de loyer. Cette demande est devenue sans objet.

L’occupation sans droit

[19]     Alternativement le locateur demande l’expulsion des occupants sans droits. La demande d’expulsion est fondée sur l’article 1889 du Code civil du Québec, lequel prévoit ce qui suit :

« 1889. Le locateur d'un immeuble peut obtenir l'expulsion du locataire qui continue d'occuper les lieux loués après la fin du bail ou après la date convenue au cours du bail pour la remise des lieux; le locateur d'un meuble peut, dans les mêmes circonstances, obtenir la remise du bien. »

[20]     La preuve démontre que la locataire a laissé tous ses biens meubles au logement. Elle est partie avec ses vêtements et ses effets personnels. Elle croit que des personnes occupent son logement, peut-être des anciens colocataires qui utilisent ses meubles et son lit sans payer.

[21]     CONSIDÉRANT la fin du bail le 8 septembre 2024, le Tribunal conclut que la demande en expulsion est bien fondée;

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[22]     CONSTATE la résiliation du bail, le 8 septembre 2024;

[23]     CONDAMNE la locataire à payer au locateur la somme de 2 000 $, avec les intérêts au taux légal et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec, à compter du 16 mai 2024 sur 500 $, et sur le solde à compter de l’échéance de chaque loyer;

[24]     ORDONNE l'expulsion des occupants du logement concerné;

[25]     ORDONNE l'exécution provisoire et immédiate de la décision malgré l’appel.

 

 

 

 

 

 

 

 

Amélie Dion

 

Présence(s) :

le locateur

la locataire

Date de l’audience :

23 août 2024

Présences(s) :

le locateur

Me Siham Shaya, avocate du locateur

la locataire

Date de l’audience : 

1er novembre 2024

 

 

 


 


[1] 9146-6573 Québec inc. (Résidence Murray) c. Ruel Lapointe, 2015 QCCQ 7260.

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