Décision

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Talmaci c. Fort Parababire

2022 QCTAL 10853

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Longueuil

 

No dossier :

554396 37 20210127 T

No demande :

3481609

 

 

Date :

13 avril 2022

Devant le juge administratif :

Robin-Martial Guay

 

Lilian Talmaci

 

Locateur - Partie demanderesse

c.

Anabelle Fort Parababire

 

Locataire - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]         Le locateur demande la rétractation d'une décision rendue le 15 février 2022 à la suite d’une audience tenue le 3 février 2022 à laquelle le locateur et la locataire étaient tous deux présents.

[2]         La demande de rétractation du locateur a été déposée le 8 mars 2022.

[3]         Dans sa demande, le locateur allègue avoir pris connaissance de la décision en date du 1er mars 2022 et avoir déposé sa demande en date du 8 mars 2022, soit dans le délai prévu par la loi.

[4]         La décision attaquée accueille partiellement la demande de la locataire, soit pour un montant de 833 $.

[5]         Invité à faire connaitre ses motifs de rétractation, le locateur affirme essentiellement que la locataire a quitté le logement le 14 juin et non pas le 25 juin comme elle l’a déclaré au juge qui présidait l’audience le 3 février 2022. « Elle a menti au juge selon ce que révèle des messages textes » qu’il a en sa possession; messages qu’ils ont échangés à une époque pertinente au litige.

[6]         Ce mensonge a impacté sur la décision du juge que de clamer le locateur.

[7]         Le locateur estime que le juge ayant présidé l’audience du 3 février 2022 a fait une mauvaise lecture et interprétation du témoignage de la locataire et ignoré ses prétentions, dont les messages texte; encore qu’il déclare ne pas se souvenir s’il a déposé en preuve ceuxci lors de l’audience du 3 février 2022.

[8]         Somme toute, le locateur est en désaccord avec l’administration et l’appréciation de la preuve faite par le juge signataire de la décision du 15 février 2022 puisqu’il s’appuie sur un mensonge de la locataire quant à la date de son départ du logement.

Discussion

[9]         La demande du locateur se fonde sur l’article 89 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement qui édicte ce qui suit :


« 89. Si une décision a été rendue contre une partie qui a été empêchée de se présenter ou de fournir une preuve, par surprise, fraude ou autre cause jugée suffisante, cette partie peut en demander la rétractation.

Une partie peut également demander la rétractation d’une décision lorsque le Tribunal a omis de statuer sur une partie de la demande ou s’est prononcé au-delà de la demande.

La demande de rétractation doit être faite par écrit dans les dix jours de la connaissance de la décision ou, selon le cas, du moment où cesse l’empêchement.

La demande de rétractation suspend l’exécution de la décision et interrompt le délai d’appel ou de révision jusqu’à ce que les parties aient été avisées de la décision.

Une partie qui fait défaut d’aviser de son changement d’adresse conformément à l’article 60.1 ne peut demander la rétractation d’une décision rendue contre elle en invoquant le fait qu’elle n’a pas reçu l’avis de convocation si cet avis a été transmis à son ancienne adresse. »

[10]     À l’audience, le locateur s’est exprimé sur son désaccord avec l’analyse de la preuve par le juge Forest et le dispositif de la décision du 15 février 2022.

[11]     Qu’il suffise d’examiner le témoignage du locateur pour comprendre et conclure que celuici exprime son insatisfaction relativement à l’appréciation de la preuve faite par le Tribunal dans la décision du 15 février 2022.

[12]     Dans l’opinion du Tribunal, le locateur souhaite, par sa demande de rétractation, faire apprécier de nouveau la preuve par un panel différent dans l’espoir que cette fois la conclusion qu’il recherche à l’encontre de la locataire lui sera favorable.

[13]     Il résulte du témoignage et des arguments du locateur que ce qu’il demande au Tribunal c'est de se voir accorder une nouvelle occasion de resoumettre ses éléments de preuve qui, selon lui, n’ont pas tous été pris en considération par le juge administratif qui a présidé l’audience du 3 février 2022 ou l’ont été incorrectement, sinon erronément si tant est qu’il a bel et bien produit les messages texte en question; rien de moins certain.

[14]     Or, il est bien établi qu’il n’est pas de la compétence du juge administratif siégeant en rétractation d’une décision de juger du bienfondé de la décision d’un collègue qui, au mérite, a décidé, après avoir entendu la preuve testimoniale et examiné la preuve documentaire, d’accueillir ou de rejeter une demande.

[15]     L’insatisfaction d'une partie face à une décision rendue ne constitue pas un motif de rétractation, mais plutôt un motif d'appel.

[16]     À ce sujet, madame Thérèse RousseauHoule et Me Martine de Billy écrivent dans leur traité sur le bail d'un logement :

« L'article 89 ne peut être utilisé à titre d'appel déguisé. Si une partie n'est pas satisfaite de la décision rendue, elle ne peut pas en demander la rétractation afin de présenter une meilleure preuve.

On ne peut en effet demander à la Régie du logement d'accorder la rétractation pour ce motif, car ce serait confier au régisseur siégeant en rétractation une fonction qui va au-delà de sa compétence : celle de juger de la justesse de la décision d'un collègue, une tâche réservée tant à la Cour provinciale siégeant en appel dans les cas prévus à l'article 91 de la Loi sur la Régie du logement siégeant en révision des décisions portant sur une demande dont le seul objet est la fixation, la révision ou le réajustement de loyer. »[1]

[17]     En l'instance, le Tribunal conclut que le locateur n'a pas établi, par preuve prépondérante, un motif de rétractation selon l’article 89 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement.

[18]     Le motif présenté par le locateur relève de l’appel.

[19]     Or, l’article 89 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement ne peut servir de procédure d'appel et ne couvre pas la situation soulevée par le locateur.  

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[20]     REJETTE la demande en rétractation du locateur qui en assume les frais;


[21]     MAINTIENT la décision rendue le 15 février 2022.

 

 

 

 

 

 

 

 

Robin-Martial Guay

 

Présence(s) :

le locateur

Date de l’audience : 

11 avril 2022

 

 

 


 


[1]  RousseauHoule, Thérèse et Martine de Billy, Le bail du logement, Montréal, 1989, Wilson et Lafleur, p. 310.

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