Décision

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Plan A c. Saint-Pierre

2023 QCTAL 35368

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau de Montréal

 

No dossier:

684233 31 20230224 F

No demande:

3817320

RN :

 

3827270

 

Date :

16 novembre 2023

Devant la greffière spéciale : 

Me Julie Langlois

 

Plan A

Locatrice - Partie demanderesse

c.

François Saint-Pierre

Locataire - Partie défenderesse

 

DÉCISION

 

 

[1]         La locatrice a produit une demande de fixation de loyer conformément aux dispositions de l’article 1947 du Code civil du Québec[1] (ci-après : « Code civil »). Elle demande également le remboursement des frais.

[2]         Le Tribunal, lorsque saisi d'une demande de fixation de loyer, détermine le montant du loyer selon les critères prévus au Règlement sur les critères de fixation de loyer[2] (ci-après « le Règlement »).

[3]         Suivant ce Règlement, l'ajustement du loyer est calculé à partir du loyer payé au terme du bail, en tenant compte de la part attribuable du logement et en fonction de certaines dépenses précises encourues par la locatrice durant l'année de référence. Ces dépenses comprennent notamment la variation des taxes municipales, des taxes scolaires et des assurances, le coût encouru pour les frais d'énergie, les frais d'entretien, ainsi que des dépenses pour les réparations majeures.

[4]         En tant que demanderesse, la locatrice assume le fardeau de prouver, lors de l'audience, les montants inscrits au Formulaire de renseignements nécessaires à la fixation du loyer (ci-après : « le Formulaire »).

[5]         Plusieurs dossiers de fixation de loyer visant des logements du même immeuble ou du même ensemble immobilier et concernant la même période de référence ont été entendus en même temps, conformément à l’article 57 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement[3].

[6]         Pour les fins de la fixation, chacun des immeubles sera traité individuellement. Ainsi, même si la locatrice n’a soumis qu’un seul Formulaire, le Tribunal a rempli un formulaire d’ajustement et de correction pour chaque immeuble, soit un pour le [adresse 1] et un pour le [adresse 2].

[7]         Les parties sont liées par un bail du 1er juillet 2022 au 30 juin 2023, à un loyer mensuel de 703,00 $, comprenant le coût de l’espace de stationnement.

[8]         Selon le Règlement, le loyer considéré est celui payé au terme du bail et inclut tous les services et les accessoires prévus au bail et ceux qui font partie d’un bail distinct, cela inclut notamment l’espace de stationnement, et ce, même s’il fait l’objet d’un contrat distinct[4].

[9]         À l’audience, les parties sont présentes et font valoir leur point de vue sur le dossier.

[10]     Le Tribunal comprend des commentaires et explications des locataires présents qu’ils se montrent insatisfaits de plusieurs aspects de leur logement, d’un manque d’entretien, de même que de travaux qu’ils souhaiteraient voir être réalisés sur l’immeuble ou dans leur appartement.

[11]     Le Tribunal a bien entendu les demandes, mais a pu préciser séance tenante aux locataires présents, à plusieurs reprises et de différentes façons, que la demande de fixation de loyer dont il est saisi n’est pas le bon forum pour faire valoir les plaintes et insatisfactions au sujet de l’état de l’immeuble et du logement.

[12]     Le Tribunal encourage les parties à communiquer afin de trouver des solutions avant de saisir le Tribunal. Advenant divergence malgré les échanges et communications, d’autres recours sont alors possibles.

[13]     La locatrice a produit le Formulaire ainsi que les pièces justificatives et les factures au soutien de ces renseignements.

[14]     Une correction a été appliquée dans la section des loyers de l’immeuble en fonction de la preuve prépondérante déposée lors de l’audience.

[15]     En effet, afin de ne pas pénaliser un immeuble, le loyer mensuel du concierge a été divisé en deux afin que chaque immeuble se voie imputer une partie des revenus estimés de la locatrice pour ce logement.

[16]     Tel qu’il appert de la preuve, le concierge, bien qu’habitant un seul immeuble ([adresse 2]), il a la charge de s’occuper des deux immeubles ([adresse 1] et [adresse 2]). C’est donc une question d’équité pour les locataires de chaque immeuble. Il en sera de même pour le loyer du local non résidentiel.

[17]     Les revenus de buanderie sont aussi divisés à parts égales pour chaque immeuble.

[18]     Pour les dépenses de la locatrice liées aux taxes, aux assurances et aux frais d’énergie, chaque immeuble a ses propres documents, elles sont donc traitées de façon distincte en fonction des documents déposés.

[19]     Quant aux assurances, la taxe de 9,00 % a été ajoutée, tel que le permet le Règlement.

[20]     Concernant les frais d’entretien, certaines dépenses sont communes aux deux immeubles, c’est notamment le cas des salaires et avantages des employés affectés à l’entretien des immeubles. Ce type de dépenses totalisant 114 362,14 $ a donc été divisé par deux, affectant la somme de 57 181,07 $ à chaque immeuble.

[21]     Pour ce qui est des dépenses liées aux « contrats et matériaux », le Tribunal a été en mesure de séparer la très grande majorité des dépenses pour chaque immeuble[5], le tout en conformité avec les factures soumises par la locatrice.

[22]     Or, pour certaines factures, les dépenses étaient associées aux deux immeubles[6]. Ces dépenses totalisant 22 707,48 $ ont donc été divisées par deux, affectant la somme de 11 353,74 $ à chaque immeuble.

[23]     Pour les dépenses « en stock », certains items doivent être retranchés puisqu'il est impossible de savoir si le matériel a servi à l'entretien ou à des améliorations majeures dans un logement spécifique pour la période de référence. Il est notamment question de chauffe-eaux, de bains, de toilettes, de céramique, etc.

[24]     Ainsi, les seules dépenses retenues aux fins du calcul pour le « stock » totalisent 6 757,57 $ et doivent être divisées à parts égales pour chaque immeuble.

[25]     Pour le [adresse 1], le Tribunal retient un montant total de 82 137,56 $ pour les frais d’entretien.

[26]     Pour le [adresse 2], le Tribunal retient un montant total de 82 029,56 $ pour les frais d’entretien.

[27]     Ensuite, certaines dépenses ont été retirées de la section 9 et déplacées à la section 12 du Formulaire ne constituant pas des frais récurrents d’entretien. C’est le cas notamment des rénovations dans des logements spécifiques non concernés par les demandes, le changement de laveuse-sécheuse pour le [adresse 2] et la réparation de l’asphalte du stationnement pour le [adresse 1].

[28]     Toutefois, en ce que qui a trait aux rénovations spécifiques aux logements, elles sont rayées, puisqu’elles n’ont pas bénéficié à aucun logement concerné par les demandes de fixation[7].

[29]     Les dépenses liées au [adresse 2] sont rayées pour les dossiers du [adresse 1] pour les mêmes motifs.

[30]     Idem pour les dépenses liées au [adresse 1] pour les dossiers du [adresse 2].

[31]     Finalement, certaines factures sont retirées faute de preuve probante.

[32]     Ces autres dépenses peuvent se retrouver dans un État des résultats au niveau fiscal pour l'immeuble, mais ne seront pas retenues dans le présent calcul[8].

[33]     Il est à noter que certains locataires se questionnent sur les factures soumises par la locatrice. Or, il appartient à celui qui conteste les factures d’en établir la preuve probante.

[34]     Pour reprendre les termes de la greffière spéciale Me Shuang Shuang[9] :

« [10] Le document en question indique le nom de la compagnie, A.C. Toitures, le numéro de la facture, la date de la facturation, une description détaillée des travaux effectués, le coût des travaux, ainsi que les numéros de TPS et TVQ de l'entreprise.

[11] Le Tribunal ne retient pas la prétention du locataire puisque le document soumis en preuve contient les principaux éléments d'un acte juridique. Rien ne permet au Tribunal de conclure qu'il ne s'agit pas d'une facture en bonne et due forme.

[12] Selon l'article 2831 du Code civil du Québec, l'écrit non signé, émanant d'une entreprise, telle une facture, fait preuve de son contenu :

« 2831. L'écrit non signé, habituellement utilisé dans le cours des activités d'une entreprise pour constater un acte juridique, fait preuve de son contenu. »

[13] Ce dernier peut être contredit par tous moyens(2), sous réserve de l'appréciation de la preuve probante.

[14] En l'espèce, le Tribunal ne donne aucune valeur probante à la simple affirmation du locataire selon laquelle le montant paraît trop élevé et que les travaux faits ne justifient pas un tel montant.

[15] Le coût des travaux de réfection de la toiture peut varier selon le choix des matériaux, le coût de la main-d'œuvre et la grandeur de la surface affectée par les travaux. La locatrice a une entière discrétion pour faire affaire avec la compagnie ou l'entrepreneur de son choix.

[16] De simples doutes ou affirmations sans aucune assise factuelle ne suffisent pas pour repousser la présomption prévue à l'article 2831 du Code civil du Québec.

[17] Pour les motifs mentionnés précédemment, le Tribunal considère que la dépense de 57 717,45 $ pour les travaux de réfection de la toiture est appuyée par la preuve présentée ».

(Références omises)

[35]     Après calcul, l’ajustement du loyer permis en vertu du Règlement sur les critères de fixation de loyer[10] est de 21,94 $ par mois, s’établissant comme suit :

Taxes municipales et scolaires

1,60 $

Assurances

 4,09 $

Gaz

 0,00 $

Électricité

 0,12 $

Mazout

 0,00 $

Frais d’entretien

6,38 $

Frais de services

0,00 $

Frais de gestion

 1,23 $

Réparations majeures, améliorations majeures,

mise en place d’un nouveau service

 

 0,00 $

Ajustement du revenu net

 8,52 $

 

 

TOTAL

 

 21,94 $

[36]     Séance tenante, la locatrice renonce aux frais quant à tous les dossiers.

[37]     CONSIDÉRANT l'ensemble de la preuve faite à l'audience;

[38]     CONSIDÉRANT la jurisprudence unanime à l’effet que le loyer fixé par règlement peut être supérieur ou inférieur à celui mentionné dans l’avis de modification de la locatrice;

[39]     CONSIDÉRANT qu’un ajustement mensuel de 21,94 $ est justifié;


POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[40]     FIXE le loyer, après arrondissement au dollar le plus près, à 725,00 $ par mois du 1er juillet 2023 au 30 juin 2024, comprenant le coût de l’espace de stationnement.

[41]     Les autres conditions du bail demeurent inchangées.

[42]     La locatrice assume les frais de la demande.

 

 

 

 

 

 

 

 

Me Julie Langlois, greffière spéciale

 

Présence(s) :

le mandataire de la locatrice

le locataire

Date de l’audience : 

7 septembre 2023

 

 

 


 


[1] Chapitre CCQ-1991.

[2] RLRQ, c. T-15.01, r. 2.

[5] 10 223,96 $ pour le [adresse 1] et 10 116,37 $ pour le [adresse 2].

[6] Par exemple pour le déneigement, l’aménagement paysager, etc.

[7] Art. 5, Règlement sur les critères de fixation de loyer, RLRQ, c. T-15.01, r. 2.

[8] Rili c. Djeridane, 2021 QCTAL 15766 (CanLII).

[9] 9459-3308 Québec inc. c. Henry, 2022 QCTAL 35466 (CanLII).

[10] RLRQ, c. T-15.01, r. 2.

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