Ma c. Kai |
2013 QCRDL 39179 |
RÉGIE DU LOGEMENT |
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Bureau dE Montréal |
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No dossier: |
31-091203-028 31 20091203 T 31-100610-110 31 20100610 T |
No demande: |
1354972 1354972 |
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Date : |
29 novembre 2013 |
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Régisseur : |
Robin-Martial Guay, juge administratif |
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XIAO HONG MA
ZHENG XU |
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Locataires - Partie demanderesse |
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c. |
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JINCHENG KAI
SONG XIN |
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Locateurs - Partie défenderesse |
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D É C I S I O N
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[1] Le 5 novembre 2013, la locataire a produit devant le Tribunal de la Régie du logement, une demande de rétractation de la décision rendue le 15 octobre 2013 par la juge administratif, Anne Mailfait.
[2] La
locataire invoque l'article
« 89. Si une décision a été rendue contre une partie qui a été empêchée de se présenter ou de fournir une preuve, par surprise, fraude ou autre cause jugée suffisante, cette partie peut en demander la rétractation.
Une partie peut également demander la rétractation d'une décision lorsque la Régie a omis de statuer sur une partie de la demande ou s'est prononcée au-delà de la demande.
La demande de rétractation doit être faite par écrit dans les dix jours de la connaissance de la décision ou, selon le cas, du moment où cesse l'empêchement.
La demande de rétractation suspend l'exécution de la décision et interrompt le délai d'appel ou de révision jusqu'à ce que les parties aient été avisées de la décision.»
[3] La demande de rétractation doit être faite par écrit dans les dix jours de la connaissance de la décision ou, selon le cas, du moment où cesse l'empêchement.
[4] En l’espèce, la locataire a pris connaissance de la décision le 28 octobre 2013 et sa demande de rétractation a été déposée le 5 novembre 2013, c’est donc dire dans le délai prévu par la loi.
[5] Au soutien de sa demande, la locataire allègue ce qui suit :
« My representative was 10 minutes late in the day of hearing on Sept. 24 2014 due to unexpected heavy traffic. He was not given any chance to present my statement of defense. »
[6] Présent à l’audience portant sur la demande de rétractation, le représentant de la locataire souligne qu’il est celui qui a représenté la locataire lors de l’audience originaire du 24 septembre 2013.
[7] Bien qu’il soit arrivé en retard à l’audience du 24 septembre 2013, il appert que cela n’a eu aucun impact négatif sur la présentation de sa preuve. Celui-ci a été entendu par la juge saisie de l’affaire et il a pu soumettre sa preuve et sa défense sans empêchement.
[8] Qu’il suffise d’ailleurs de lire la décision du 15 octobre 2013 pour s’en convaincre, plus particulièrement lorsque la juge administratif qui a entendu la demande originaire souligne dans sa décision ce qui suit :
« Quant à la défense de la locataire, celle-ci est à la fois incomplète et non pertinente. Incomplète, car son mandataire ne possède qu’une connaissance partielle de faits allégués et non pertinente, car la défense se résume à alléguer un défaut de fonctionnement de certains appareils électroménagers, sans avis écrit ni mise en demeure et sans aucune preuve probante que ce dysfonctionnement autorisait l’abandon du logement. »
[9] Incidemment, la locataire a donc pu exercer pleinement son droit à administrer une défense à la demande des locateurs et celui de faire sa preuve.
[10] Questionnée par le Tribunal, à propos des raisons pour lesquelles elle n’a pas pu fournir les preuves qu’elle souhaite maintenant introduire devant le tribunal ainsi que la raison pour laquelle elle n’a pas produit ce témoin lors des audiences du 29 mars 2012 et du 24 septembre 2013 devant le juge administratif, Anne Mailfait, la locataire est sans réponse.
[11] En réalité, le représentant de la locataire veut, à toute fins pratiques, refaire sa preuve et compléter celle-ci devant un nouveau juge administratif.
[12] Que le représentant de la locataire utilise la procédure de rétractation pour revenir à la charge en prétextant qu’il n’a pas pu présenter de preuves alors qu’en réalité, il veut soumettre au tribunal des éléments de preuve qu’il n’a pas soumis lors des audiences portant sur la demande des locateurs et aussi faire entendre un témoin ne saurait être autorisé par le tribunal saisi d’une demande de rétractation.
[13] Les tribunaux supérieurs ont établi que la rétractation de jugement est une mesure d’exception au principe de l’irrévocabilité des jugements. Ainsi peut-on lire ce qui suit à ce propos :
«Il ne faut pas confondre formalisme et procédure : celle-ci est essentielle à la marche ordonnée des instances. Le principe de l'irrévocabilité des jugements est nécessaire à une saine administration de la justice, d'où le sérieux que doivent avoir les motifs de rétractation. La procédure doit contribuer à la protection des droits des deux parties et la remise en question des décisions doit demeurer l'exception et ne pas devenir la règle.»([1])
[14] Pour obtenir une rétractation, il faut de plus que le demandeur n'ait pas été négligent dans l'exercice de ses droits. Le tribunal fait siens les propos de l'honorable Juge Louis Rochette de la Cour supérieure dans l'affaire Mondex Import Inc. c. Victorian Bottle inc. :
« Par ailleurs, en ce qui a trait à la partie elle-même, il n'y a pas d'ambiguïté, elle ne doit pas adopter un comportement négligent dans la défense de ses droits, sans quoi le principe de l'irrévocabilité des jugements pourra lui être opposé. Cela n'est que logique et en conséquence, une partie ne peut laisser cheminer une affaire judiciaire qui la concerne directement sans s'en préoccuper. Elle doit être empressée de faire valoir sa prétention et de préserver ses droits. Les règles de procédure ne peuvent être modulées pour tenir compte du laxisme d'une partie. »([2])
[16] Le tribunal juge qu'il ne peut, dans le cadre du présent recours, recevoir les éléments de preuve que le demandeur n’a pas jugé bon de soumettre lors de l’audience sur la demande originaire alors qu’il a eu cette opportunité lors des audiences portant sur la demande des locateurs.
[17] Une demande en rétractation n’est assurément pas une procédure destinée à fournir, à l’une des parties, l’occasion de soumettre ou de compléter une preuve non plus que de faire une contre-preuve alors qu’elle a eu cette opportunité lors de l’audience portant sur la demande originaire.
[18] En l’espèce, le demandeur demande au tribunal de lui permettre, aujourd’hui, de faire ce qu’il n’a pas fait lorsqu’il en a eu l’occasion lors de l’audience originaire, soit de soumettre des éléments de preuve, de compléter celle-ci, voire même de faire une contre-preuve ce qui, ultimement, conduirait le tribunal à rouvrir l’enquête, puis à reconsidérer et réviser la décision rendue le 15 octobre 2013 par la juge administratif, Anne Mailfait, après enquête et audition de la demande originaire des locateurs.
[19] En l'espèce, il est sans équivoque que la cause première du recours en rétractation repose sur le rejet des prétentions de la locataire par le juge qui a rendu la décision du 15 octobre 2013.
[20] Or, les motifs de rétractation ne doivent pas être confondus avec l'appel de la décision. À cet effet, le tribunal fait siens les propos de Me Francine Jodoin, régisseure, dans la cause O'Callagan c. Fattal :
« (...) la demande en rétraction ne doit pas constituer un appel déguisé de la décision rendue. Le Tribunal n'a pas à juger de la justesse de celle-ci ni s'interroger sur les erreurs de faits ou de droit commises puisqu'il ne s'agit pas d'un appel de la décision rendue. Il s'agit plutôt de s'interroger sur l'application de l'article 89, précité, et chercher à déterminer si la partie qui en fait la demande a pu démontrer un des motifs prévus à cette disposition.
De la même façon, la demande en rétraction ne doit pas servir de prétexte à une partie pour recommencer une audition soit parce qu'elle est insatisfaite de la décision ou parce qu'elle est insatisfaite de la façon dont la preuve a été présentée. En somme, les motifs invoqués au soutien de la rétractation ne doivent pas découler de la négligence d'une partie. »([3])
[21] À la lumière de ces principes, le tribunal est d'avis que le demandeur n'a pas établi, par preuve prépondérante, un motif sérieux de rétractation.
[22] Le rôle du Tribunal saisi d’une demande de rétractation n'est pas de substituer sa décision à celle du juge administratif ayant rendu la décision dont il est demandé à ce qu’elle soit rétractée.
[23] Il n'appartient pas à un tribunal de même niveau de se prononcer sur le bien-fondé ou la justesse d'une décision non plus que de questionner l’exercice de la discrétion judiciaire consacré par une décision.
[24] Ainsi, sans avoir à
analyser les moyens sommaires de défense de la locataire, le tribunal conclut
que le recours de la locataire est mal fondé en droit étant entendu que son
recours relève de l'appel et non pas de la rétractation en vertu
de l’article
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[25] REJETTE la demande de rétractation du locateur qui en assume les frais.
[26] MAINTIENT la décision rendue le 15 octobre 2013.
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Robin-Martial Guay |
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Présence(s) : |
les locateurs l’avocat des locateurs |
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Date de l’audience : |
21 novembre 2013 |
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AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
appel; la consultation
du plumitif s'avère une précaution utile.