Cheung c. Pesta |
2021 QCTAL 7014 |
TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT |
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Bureau dE Laval |
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Nos dossiers : |
540616 36 20201013 G 540616 36 20201013 T |
Nos demandes : |
3087321 3174666 |
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Date : |
16 mars 2021 |
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Devant la juge administrative : |
Isabelle Normand |
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Lap Chung Cheung |
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Locateur - Partie demanderesse (540616 36 20201013 G) Partie défenderesse (540616 36 20201013 T) |
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c. |
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Monique Pesta |
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Locataire - Partie défenderesse (540616 36 20201013 G) Partie demanderesse (540616 36 20201013 T) |
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D É C I S I O N
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[1] Le locateur demande l'accès au logement pour l’inspecter, entre autres l’exécution de la décision malgré l’appel et la condamnation au paiement des frais.
[2] Les parties sont liées par un bail, du 1er juillet 2020 au 1er septembre 2020, au loyer mensuel de 1 840 $, reconduit jusqu’au 1er avril 2021 au même loyer mensuel.
[3] Le locateur explique à l’audience qu’il a communiqué à la locataire par l’entremise de plusieurs moyens : courriel, texto et lettres depuis le mois de septembre 2020, afin de pouvoir effectuer des visites du logement concerné. Malgré plusieurs de ses demandes, il n’a pas reçu de réponse de la locataire.
[4] Le 12 octobre suivant, il intente la demande d’accès au logement. Le 8 décembre suivant, le Tribunal ordonne[1] à la locataire de donner accès au logement au locateur ou à l’un de ses mandataires notamment pour le faire visiter par un acquéreur éventuel ou en constater l’état. Il est précisé au paragraphe 15 de cette décision :
« [15] Ainsi, la locataire doit permettre au locateur ou un mandataire qu'il désigne la visite du logement et celle-ci peut avoir lieu entre 9 heures et 21 heures tous les jours. Si la locataire ne peut être présente au logement lors des visites, elle devra se trouver un mandataire. »
[5] Le 4 février 2021, le Tribunal rejette[2] la demande de rétractation de la locataire qui allégeait qu’elle n’avait pu se présenter à l’audience en raison du fait qu’elle « était en attente pour résultat négatif covid-19 ».
[6] À nouveau, la locataire intente une autre demande de rétractation, le 6 janvier 2021, par l’entremise de son avocate d’alors, alléguant cette fois, comme motif entre autres, « que le locateur refuse de lui donner la clé de la boite aux lettres ». De plus, aucun moyen sommaire de défense n’est mentionné à sa demande de rétractation.
[7] À l’audience de sa deuxième demande de rétractation, la locataire explique qu’elle reconnait ne pas avoir donné accès au logement au locateur.
Analyse et décision
[8] En raison de la pandémie qui sévit actuellement et particulièrement au Québec, nous nous devons de nous adapter à l'évolution de la situation, en tenant compte des droits et obligations de chacun, dont primordialement l'exercice de ses droits dans le respect de la bonne foi[3].
[9] Cependant, tel que mentionné précédemment, les parties doivent en tout temps et particulièrement dans les circonstances particulières reliées à la pandémie s'adapter à la situation et tenter d'exercer leurs droits de façon raisonnable et de bonne foi.
[10] Le locateur fonde son
recours sur les dispositions des articles
« 1863. L'inexécution d'une obligation par l'une des parties confère à l'autre le droit de demander, outre des dommages-intérêts, l'exécution en nature, dans les cas qui le permettent. Si l'inexécution lui cause à elle-même ou, s'agissant d'un bail immobilier, aux autres occupants, un préjudice sérieux, elle peut demander la résiliation du bail.
L'inexécution confère, en outre, au locataire le droit de demander une diminution de loyer; lorsque le tribunal accorde une telle diminution de loyer, le locateur qui remédie au défaut a néanmoins le droit au rétablissement du loyer pour l'avenir. »
« 1934. Aucune serrure ou autre mécanisme restreignant l'accès à un logement ne peut être posé ou changé sans le consentement du locateur et du locataire.
Le tribunal peut ordonner à la partie qui ne se conforme pas à cette obligation de permettre à l'autre l'accès au logement. »
[11] De plus, les articles
« 1931. Le locateur est tenu, à moins d'une urgence, de donner au locataire un préavis de 24 heures de son intention de vérifier l'état du logement, d'y effectuer des travaux ou de le faire visiter par un acquéreur éventuel. »
« 1932. Le locataire peut, à moins d'une urgence, refuser que le logement soit visité par un locataire ou un acquéreur éventuel, si la visite doit avoir lieu avant 9 heures et après 21 heures; il en est de même dans le cas où le locateur désire en vérifier l'état.
Il peut, dans tous les cas, refuser la visite si le locateur ne peut être présent. »
[12] Il appert de la preuve que la locataire refuse systématiquement de donner l'accès au logement concerné.
[13] À l’audience, elle n'a pas apporté de preuve déterminante et convaincante qui milite dans le sens de ses refus.
[14] D'ailleurs, la loi indique qu'elle ne peut s'opposer à la visite du logement par un acquéreur éventuel, par le locateur qui désire l’inspecter ou par l’inspecteur en bâtiment, sauf lorsque les visites ont lieu à des heures qui ne sont pas mentionnées à la loi ou lorsque le locateur exerce de façon déraisonnable, en contravention du respect de sa vie privée, de la jouissance paisible de ses biens et de l'inviolabilité de sa demeure[4].
[15] Et cette limitation des droits de la locataire à son droit du respect de sa vie privée est justifiée par la Charte des droits et libertés de la personne[5], qui doit s'exercer dans le respect des valeurs démocratiques, de l'ordre public et du bien-être général des citoyens du Québec.
[16] Dans le cas actuel, le locateur demande dans un premier temps un droit d'accès au logement concerné pour l'inspecter et aussi pour faire procéder à des visites par d’acquéreurs éventuels.
[17] Le locateur a démontré que ces accès sont requis et que ce n'est pas un caprice : sans ceux-ci, il se peut fort bien que des droits ne seront pas respectifs, dont possiblement des visites et des transactions immobilières, et ce, en raison des refus systématiques de la locataire de respecter déjà une décision du Tribunal.
[18] Considérant ce qui précède, le Tribunal rend le présent jugement qui accorde au locateur le droit d’inspecter le logement concerné, le 10 mars 2021, de 10h00 à 15h00, date qui a été communiquée à la locataire séance tenante, à tout autre moment communiqué par texto du locateur à la locataire au numéro de téléphone divulgué à l’audience par la locataire.
[19] De plus, en raison des deux demandes de rétractations produites par la locataire qui ont empêché jusqu’à ce jour l’exécution de la décision ordonnant l’accès au locateur au logement concerné, la locataire est déclarée forclose de produire toute demande de rétractation relative à ce dossier[6].
[20] Le Tribunal considère que l'exécution provisoire de la décision doit être prononcée comme le prévoit l'article 82.1 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[21] ACCUEILLE la demande du locateur;
[22] ORDONNE à la locataire de donner accès au logement au locateur le 10 mars 2021, de 10h00 à 15h00, date qui a été communiquée à la locataire séance tenante, à tout autre moment communiqué par texto du locateur à la locataire au numéro de téléphone divulgué à l’audience par la locataire;
[23] ORDONNE l'exécution provisoire, malgré l'appel, de cette ordonnance;
[24] DÉCLARE la locataire forclose de produire toute nouvelle demande dans le présent dossier, à moins d'autorisation préalable du président du Tribunal administratif du logement.
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Isabelle Normand |
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Présence(s) : |
le locateur la locataire |
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Date de l’audience : |
8 mars 2021 |
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[1] Selon la décision du 8 décembre, dossier 540616 36 20201013 G, demande 3087321.
[2] Selon la décision du 4 février 2021, dossier 540616 36 20201013 G, demande 3143027.
[3] Selon les
articles
[4] Selon les
articles 5, 6, 7, 8, de la Charte québécoise et les articles
[5] Selon l'article 9.1 qui édicte : « 9.1. Les libertés et droits fondamentaux s'exercent dans le respect des valeurs démocratiques, de l'ordre public et du bien-être général des citoyens du Québec. La loi peut, à cet égard, en fixer la portée et en aménager l'exercice. »
[6] En vertu des dispositions de l’article 63.2 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement.
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