Décision

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Gabarit de jugement pour la cour d'appel

Motard c. Procureur général du Canada

2019 QCCA 1826

COUR D’APPEL

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

GREFFE DE

 

QUÉBEC

N° :

200-09-009233-161

(200-17-018455-139)

 

DATE :

 28 OCTOBRE 2019

 

 

CORAM :

LES HONORABLES

NICHOLAS KASIRER, J.C.A.

CLAUDE C. GAGNON, J.C.A.

JOCELYN F. RANCOURT, J.C.A.

 

 

GENEVIÈVE MOTARD

PATRICK TAILLON

APPELANTS - Demandeurs

c.

 

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

INTIMÉ - Défendeur

et

PROCUREURE GÉNÉRALE DU QUÉBEC

CANADIAN ROYAL HERITAGE TRUST

L’HONORABLE SERGE JOYAL

MIS EN CAUSE - Intervenants

 

 

ARRÊT

 

 

[1]           Les appelants se pourvoient contre un jugement rendu le 16 février 2016 par la Cour supérieure, district de Québec (l’honorable Claude Bouchard), qui rejette leur demande en jugement déclaratoire[1].

[2]           Pour les motifs du juge Rancourt, auxquels souscrivent les juges Kasirer et Gagnon, LA COUR :

[3]           REJETTE l’appel avec les frais de justice.

 

 

 

 

NICHOLAS KASIRER, J.C.A.

 

 

 

 

 

CLAUDE C. GAGNON, J.C.A.

 

 

 

 

 

JOCELYN F. RANCOURT, J.C.A.

 

Me André Joli-Coeur

Joli-Coeur, Lacasse

Pour les appelants

 

Me Julien Fournier

Avocat-conseil pour les appelants

 

Me David Lucas

Me Warren Newman

Ministère de la Justice Canada

Pour l’intimé

 

Me Dominique Rousseau

Me Marie-Catherine Bolduc

Lavoie, Rousseau (Justice - Québec)

Pour la mise en cause, procureure générale du Québec

 

Me Michel Boulianne

Pour le mis en cause, Canadian Royal Heritage Trust

 

Me Catherine Mathieu

Woods, s.e.n.c.r.l.

Avocate-conseil pour le mis en cause, Canadian Royal Heritage Trust

 

Honorable Serge Joyal

Mis en cause

 

Date d’audience :

19 février 2018


 

 

MOTIFS DU JUGE RANCOURT

 

 

1.           Le contexte

[4]           Réunis à Perth en Australie en octobre 2011, les 16 chefs d’État du Commonwealth s’entendent pour proposer des modifications aux règles de la succession au trône britannique.

[5]           L’Accord de Perth, signé le 28 octobre 2011, prévoit l’abrogation de la règle de primogéniture masculine. Cette règle accorde au fils légitime le plus âgé du souverain la priorité successorale au trône. En d’autres termes, le fils le plus âgé du souverain est premier dans l’ordre de succession même si l’aînée de la famille est une fille. Avec l’Accord de Perth, cette règle est abrogée, de sorte que désormais l’enfant le plus âgé du souverain, sans égard au sexe, est premier dans l’ordre de succession.

[6]           Il prévoit également l’abrogation de la règle selon laquelle une personne ne peut accéder au trône royal si son conjoint ou sa conjointe est de confession catholique romaine.

[7]           Dans cette perspective, le gouvernement du Royaume-Uni dépose au Parlement britannique un Projet de loi intitulé « Succession to the Crown Bill » le 13 décembre 2012, prévoyant nommément un ordre de succession à la Couronne déterminé indépendamment du sexe et la fin de l’incapacité de régner résultant du mariage de la personne succédant à la Couronne avec une personne de foi catholique romaine.

[8]           Avant d’adopter ce projet de loi, le Parlement du Royaume-Uni respecte la convention constitutionnelle décrite dans le préambule du Statut de Westminster[2] promulgué en 1931. Il requiert, comme le prévoit la convention, l’assentiment du Canada aux modifications des règles de succession au trône.

[9]           C’est dans cet esprit que le gouvernement du Canada dépose, le 31 janvier 2013, le Projet de loi C-53 intitulé « Loi d’assentiment aux modifications apportées à la Loi concernant la succession au trône »[3] (« Loi canadienne d’assentiment de 2013 »).

[10]        Le Projet de loi franchit toutes les étapes des deux Chambres et reçoit la sanction royale le 27 mars 2013.

[11]        Le texte de loi est court et prévoit à l’article 2 :

2. Assentiment est donné aux modifications apportées à la loi concernant la succession au trône, énoncées dans le projet de loi déposé devant le Parlement du Royaume-Uni et intitulé A Bill to Make succession to the Crown not depend on gender; to make provision about Royal Marriages, and for connected purposes.

2. The alteration in the law touching the Succession to the Throne set out in the bill laid before the Parliament of the United Kingdom and entitled A Bill to Make succession to the Crown not depend on gender; to make provision about Royal Marriages, and for connected purposes is assented to.

[12]        Le Parlement britannique adopte la loi intitulée « Succession to the Crown Act »[4] (« Loi britannique de 2013 ») qui reçoit la sanction royale le 25 avril 2013.

[13]        La Loi britannique de 2013 et la Loi canadienne d’assentiment de 2013 entrent en vigueur le 26 mars 2015[5].

2.           La contestation initiée par les appelants

[14]        Les appelants introduisent une requête en jugement déclaratoire le 6 juin 2013.

[15]        Ils demandent à la Cour supérieure de déclarer inconstitutionnelle la Loi canadienne d’assentiment de 2013. Ils estiment que cette loi n’a pas été adoptée conformément à la procédure de modification prévue au paragraphe 41a) de la Loi constitutionnelle de 1982[6].

[16]        Le paragraphe 41a) de la Loi constitutionnelle de 1982 prévoit qu’une modification à la « charge de Reine » doit être préalablement autorisée par des résolutions du Sénat, de la Chambre des communes et de chacune des assemblées législatives de chaque province.

[17]        Ils soutiennent que la Loi canadienne d’assentiment de 2013 change les règles de désignation du chef de l’État fédéral et provincial et, de ce fait, modifie la charge de la Reine. Dès lors, avant d’adopter cette loi, le Parlement canadien devait impérativement suivre les prescriptions du paragraphe 41a), ce qu’il n’a pas fait, d’où la demande de déclaration d’inconstitutionnalité.

[18]        Les appelants exposent également deux moyens subsidiaires.

[19]        Ils invoquent en premier lieu que si la Loi canadienne d’assentiment de 2013 pouvait être adoptée sans suivre la procédure du paragraphe 41a), elle contrevient aux articles 2 et 15 de la Charte canadienne des droits et libertés[7] (Charte canadienne).

[20]        À ce titre, ils renvoient à la Loi britannique de 2013 qui maintient l’exigence faite à la Reine ou au Roi du Royaume-Uni (donc la Reine du Canada) de se joindre à l’Église anglicane. Cela signifie qu’une personne non croyante ou membre de toute autre religion ne peut devenir la Reine du Canada.

[21]        Selon les appelants, cette exigence est discriminatoire et contrevient à la liberté de conscience et de religion de même qu’au droit à l’égalité, respectivement consacrés aux articles 2 et 15 de la Charte canadienne.

[22]        En second lieu, ils avancent que la Loi canadienne d’assentiment de 2013 donne son assentiment à une loi britannique rédigée en anglais uniquement. La Loi britannique de 2013 n’offrant aucune version française, il y a ici contravention à l’article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867[8] selon lequel les lois doivent être adoptées dans les deux langues officielles.

3.           Le jugement entrepris

[23]        Dans un jugement approfondi[9], le juge identifie la première question posée par le litige qui est de déterminer si la Loi canadienne d’assentiment de 2013 devait être adoptée en suivant la procédure prévue à l’article 41 de la Loi constitutionnelle de 1982[10]. Pour répondre à cette question, le juge précise qu’il doit décider si les règles britanniques de succession au trône font partie du droit constitutionnel canadien. Si elles en font partie, il doit ensuite déterminer si leur modification est assujettie à la procédure de modification de l’article 41 de la Loi constitutionnelle de 1982[11].

[24]        Il doit ensuite décider si la Loi canadienne d’assentiment de 2013 enfreint la liberté de religion et si elle contrevient à l’obligation de l’article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867[12].

[25]        À la première question, le juge est d’avis que ces règles de succession au trône ne font pas partie du droit constitutionnel canadien. Selon lui, les lois britanniques traitant de ces règles, nommément le Bill of Rights et l’Act of Settlement, n’ont pas été intégrées ex proprio vigore (de leur propre chef) dans la constitution canadienne.

[26]        Il étaye son raisonnement de la façon suivante :

[141]    En résumé, le Canada étant une monarchie constitutionnelle, le Roi ou la Reine du Royaume-Uni est le Roi ou la Reine du Canada, ce principe découlant de l'article 9 de la Loi de 1867, à la lumière du préambule qui prévoit que le Canada est «sous la Couronne du Royaume-Uni, avec une Constitution reposant sur les mêmes principes que celle du Royaume-Uni».

[142]    Ce principe n'a pas été modifié par l'adoption du Statut de Westminster en 1931, le Parlement du Royaume-Uni conservant le pouvoir de légiférer et de modifier les règles de succession au trône, sous réserve toutefois qu'en vertu du préambule de ce statut, il doit, par convention constitutionnelle, obtenir l'assentiment des autres pays membres du Commonwealth.

[143]    À cet égard, il appartient à chacun de ces pays de donner son assentiment ou non à une modification aux règles de succession au trône, selon la procédure qui lui est propre. Ici, le Parlement du Canada a compétence, en vertu de son pouvoir résiduaire énoncé au paragraphe introductif de l'article 91 de la Loi de 1867, d'adopter une loi d'assentiment aux modifications apportées au droit britannique concernant la succession au trône.

[144]    En 1936, lors de l'abdication du Roi Édouard VIII et de l'accession d'un nouveau Roi, le Canada a d'abord requis et consenti à ces changements en se prévalant de la procédure de l'article 4 du Statut de Westminster, laquelle prévoit qu'il doit demander et consentir à l'application de la loi britannique pour qu'elle puisse s'appliquer. Par la suite, il a donné son assentiment à une modification aux règles de succession au trône par l'adoption d'une loi à cet effet.

[145]    À ce propos, le tribunal estime que le recours à la procédure prévue à l'article 4 du Statut de Westminster (1931), si tant est qu'il était nécessaire de s'en prévaloir, ne visait que la partie de la loi britannique relative à l'abdication du Roi et à l'accession d'un nouveau Roi et s'inscrivait dans un contexte particulier, notamment par son caractère exceptionnel au regard du principe de la succession héréditaire déterminée par le Royaume-Uni, lequel fait partie de la toile de fond de la Constitution du Canada. 

[146]    Par ailleurs, le Canada n'avait pas à modifier ses lois ni sa Constitution pour que les règles de succession royale britanniques puissent être modifiées et effectives; l'assentiment à celles-ci suffisait selon le préambule du Statut de Westminster et la convention qui s'y trouve. Au demeurant, la règle de la symétrie faisait en sorte que la personne désignée Roi ou Reine du Royaume-Uni l'était aussi pour le Canada.

[147]    Dans le même ordre d'idées, tant l'arrêté en conseil adopté le 10 décembre 1936 que la Loi sur la modification de la Loi sur la succession au trône de 1937 n'ont eu pour effet de modifier la Constitution canadienne.

[148]    Dans cette veine, les lois britanniques et plus particulièrement les articles relatifs à la succession royale contenus dans le Bill of Rights et l'Act of Settlement ne faisant pas partie de la Constitution canadienne, elles n'avaient donc pas à être modifiées pour s'adapter aux changements britanniques dans l'ordre de succession.

[149]    Le Statut de Westminster fait encore partie de la Constitution canadienne, telle que rapatriée en 1982, et son préambule prévoit l'assentiment du Canada en cas de modification aux règles de succession royale. La différence toutefois dans la Loi de 1982 se situe au chapitre de la formule d'amendement de la Constitution canadienne, où il est expressément prévu qu'une modification à celle-ci portant sur la «charge de Reine» requiert le consentement unanime du Sénat, de la Chambre des communes et de l'assemblée législative de chaque province.

[150]    En l'espèce, le tribunal est d'opinion qu'une modification aux règles de succession royale au Royaume-Uni ne constitue pas une modification de la Constitution du Canada portant sur la «charge de Reine», une distinction devant être faite avec des modifications portant sur les pouvoirs, le statut et le rôle constitutionnel de la Couronne.

[27]        Le juge répond ensuite à la question de savoir si la Loi canadienne d’assentiment de 2013 enfreint les dispositions de la Charte canadienne prohibant la discrimination fondée sur la liberté de religion. À ce titre, il rappelle que la Loi britannique de 2013 n’est pas assujettie à la Charte canadienne[13]. Il précise que le principe identifiant la Reine du Royaume-Uni comme étant la Reine du Canada dans le préambule de la Loi constitutionnelle de 1867 est un principe constitutionnel structurel. Partant, de poursuivre le juge, la Charte canadienne « ne peut invalider un principe constitutionnel structurel de la sorte, la première ne pouvant prétendre à une supériorité hiérarchique sur le second »[14].

[28]        Enfin, quant à la contravention à l’article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867 relative au bilinguisme législatif, le juge est d’avis que la Loi canadienne d’assentiment de 2013 « n’a pas donné force de loi à la Loi britannique de 2013 ni étendu son application au Canada que ce soit directement ou par incorporation par renvoi »[15]. Il n’y a donc aucune contravention à l’article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867 selon lui.

4.           Les questions en litige

[29]        Le litige appelle la résolution des questions suivantes :

1)         Le juge a-t-il erré en concluant que les règles britanniques de la succession royale ne font pas partie de la Constitution du Canada?

2)         Le juge a-t-il erré en concluant que les règles britanniques de la succession royale ne font pas partie de la « charge de Reine » du Canada?

3)         La Loi canadienne d’assentiment de 2013 enfreint-elle la liberté de conscience et de religion consacrée au paragraphe 2a) de la Charte canadienne?

4)         La Loi canadienne d’assentiment de 2013 enfreint-elle l’article 133 de la Loi de 1867 et l’article 18 de la Loi constitutionnelle de 1982 portant sur l’obligation d’adopter les lois dans les deux langues officielles du Canada?

5.           L’analyse

5.1         Le juge a-t-il erré en concluant que les règles britanniques de la succession royale ne font pas partie de la Constitution du Canada?

5.1.1     Les règles britanniques de succession au trône

[30]        Les règles britanniques de succession au trône prennent leur source dans les textes législatifs que sont le Bill of Rights[16] de 1689 et l’Act of Settlement[17] de 1701.

[31]        En 1685, James II, un catholique romain, succède à son frère et devient Roi d’Angleterre. Son règne est marqué par des mesures impopulaires et par ses velléités de garantir une succession royale de foi catholique romaine. Les Anglais s’inquiètent et William, marié à Mary, fille de James II, gagne l’Angleterre depuis la Hollande avec une armée pour combattre le règne de James II.

[32]        James II fuit l’Angleterre et se réfugie en France. Le Parlement britannique proclame alors l’abdication du Roi James II et confie le trône conjointement à William et Mary qui s’appelleront désormais William III et Mary II. En contrepartie, au cours d’une convention, William III et Mary II s’engagent à défendre le Bill of Rights.

[33]        Le Bill of Rights est une pièce législative majeure adoptée par le Parlement d’Angleterre. Il limite les pouvoirs du monarque en introduisant le principe de la monarchie parlementaire. Il accorde aux citoyens du royaume plusieurs droits fondamentaux. Il établit les règles de la succession royale suivant lesquelles le trône sera dévolu en premier à la descendance de Mary II et William III, puis à sa sœur Anne.

[34]        Le Parlement anglais se réunit en 1700 pour adopter de nouvelles règles de succession royale puisque Mary II est décédée en 1694 sans laisser d’héritier, que William III ne se remarie pas et que le seul enfant survivant d’Anne décède en 1700.

[35]        Craignant la possibilité qu’il n’y ait aucun héritier protestant, le Parlement anglais adopte l’Act of Settlement qui contient également des dispositions consacrant le principe de la souveraineté parlementaire. L’Act of Settlement réitère la règle selon laquelle seule une personne de confession protestante peut accéder au trône. Elle exclut également l’accession au trône d’une personne mariée à un catholique romain.

[36]        Puisque William III et Anne n’ont aucun descendant, le Parlement prévoit de garantir la succession royale aux membres de la famille protestante de Hanovre. Ainsi, la Couronne échoira, après Anne, qui deviendra Reine à la suite du décès de William III en mars 1702, à la Princesse Sophia de Hanovre et à sa descendance protestante.

[37]        Sophia de Hanovre décède en 1714, six semaines avant Anne qui n’a aucune descendance. La Couronne échoit au fils de Sophia de Hanovre, George I, qui devient en 1714 le Roi d’Angleterre. George I est le premier de la lignée royale que l’on connaît aujourd’hui dont la Reine Elizabeth II est la descendante.

5.1.2     Les règles britanniques de la succession au trône et la Constitution du Canada

[38]        Les appelants estiment que le juge commet une erreur en reconnaissant l’existence d’une règle de succession royale déterminée par le Royaume-Uni dans notre droit constitutionnel canadien.

[39]        Ils remettent en question le principe de symétrie retenu par le juge en vertu duquel le Roi ou la Reine du Royaume-Uni est également le Roi ou la Reine du Canada. Ce principe est incompatible avec le texte de la Constitution du Canada. Ils affirment que les dispositions du Bill of Rights et de l’Act of Settlement portant sur la succession royale ont été imposées ex proprio vigore aux colonies et font partie intégrante de la Constitution du Canada. Pour justifier l’intégration des règles britanniques de la succession royale au droit constitutionnel canadien, ils s’appuient sur le précédent créé par l’abdication du Roi Edward VIII en 1936. Enfin, ils sont d’avis que les règles de succession royale font partie de l’expression « charge de la Reine » protégée par l’alinéa 41a) de la Loi constitutionnelle de 1982, de sorte que la Loi canadienne d’assentiment de 2013 devait être adoptée en respectant les exigences de cette disposition.

[40]        Qu’en est-il?

5.1.2.1    Le principe de la symétrie et la Constitution

[41]        Le juge détermine que certains principes sous-jacents aux règles de la succession au trône font partie de la Constitution du Canada. À ce titre, il identifie le principe de la reconnaissance selon laquelle le Roi ou la Reine du Royaume-Uni est le Roi ou la Reine du Canada, de même que le principe d’une succession héréditaire établie par le Royaume-Uni[18].

[42]        Ce principe de symétrie entre la Reine du Royaume-Uni et la Reine du Canada, à la différence de ce que les appelants avancent, est bien ancré dans la Constitution du Canada.

[43]        Pour s’en convaincre, il vaut de retourner à la Loi constitutionnelle de 1867, le texte fondateur du Canada.

[44]        Le préambule de la Loi constitutionnelle de 1867 affirme clairement que les provinces fondatrices du Canada s’unissent en fédération pour former un seul dominion sous la Couronne du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande. Il est ainsi rédigé :

CONSIDÉRANT que les provinces du Canada, de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick ont exprimé le désir de s’unir en fédération pour former un seul et même dominion sous la Couronne du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande, avec une constitution semblable dans son principe à celle du Royaume-Uni.

[Soulignements ajoutés]

[45]        L’article 9 de la Loi constitutionnelle de 1867 prévoit en outre que le gouvernement et le pouvoir exécutif du Canada continueront d’être et sont attribués à la Reine. L’article 17 de la Loi constitutionnelle de 1867 établit que le Parlement est composé de la Reine, d’une chambre haute, le Sénat, et de la Chambre des communes. L’article 91 de la Loi constitutionnelle de 1867 confère à la Reine, sur l’avis du Sénat et de la Chambre des communes, le pouvoir de faire des lois pour la paix, l’ordre et le bon gouvernement du Canada. Enfin, le serment d’allégeance que doivent prêter et signer les membres du Sénat ou de la Chambre des communes, conformément à l’article 128 et à la cinquième annexe de la Loi constitutionnelle de 1867, s’adresse nommément à Sa Majesté, la reine Victoria.

[46]        La Reine dont il est question dans la Loi constitutionnelle de 1867 ne peut donc être que celle du Royaume-Uni.

[47]        Les experts en droit constitutionnel canadien Mark D. Walters[19], Benoît Pelletier[20] et Peter W. Hogg sont d’avis que le principe de la symétrie, découlant de l’harmonisation des volontés politiques de partager le même monarque, fait partie de notre droit constitutionnel canadien.

[48]        Le professeur Hogg écrit que le Canada n’a jamais eu de règles canadiennes de succession au trône, mais bien une règle de reconnaissance selon laquelle le monarque du Royaume-Uni est également le monarque du Canada. Il s’exprime ainsi :

What Canada has is a rule of recognition: Canada automatically takes as its monarch whoever is the monarch of the U.K.[21]

[49]        Dans O’Donohue v. Canada, le juge Rouleau de la Cour supérieure de l’Ontario écrit à propos du principe de symétrie :

[] it is axiomatic that the rules of succession for the monarchy must be shared and be in symmetry with those of the United Kingdom and other Commonwealth countries. One cannot accept the monarch but reject the legitimacy or legality of the rules by which this monarch is selected.[22]

[50]        Il est donc erroné de soutenir que le principe de la symétrie est dépourvu de toute assise juridique et qu’il est incompatible avec la Constitution du Canada.

[51]        Les appelants avancent également que cette règle de la symétrie monarchique heurte les principes constitutionnels de la primauté du droit et du fédéralisme.

[52]        Avec égards, rien dans le dossier ne permet d’établir comment cette règle de la symétrie contrevient au principe de la primauté du droit, un principe qui « assure aux citoyens et résidents une société stable, prévisible et ordonnée où mener leurs activités », comme le souligne la Cour suprême dans le Renvoi relatif à la sécession du Québec[23]. On ne voit pas davantage comment ce principe de symétrie heurte celui du fédéralisme incarné par la « reconnaissance de la diversité des composantes de la Confédération et de l’autonomie dont les gouvernements disposent pour assurer le développement de leur société dans leurs propres sphères de compétence »[24].

[53]        Le raisonnement du juge sur la reconnaissance d’un principe de symétrie monarchique compatible avec le texte de la Constitution est en l’espèce à l’abri de tout reproche.

5.1.2.2    Les règles britanniques de la succession au trône et la Constitution du Canada

[54]        Selon les appelants, les dispositions portant sur les règles britanniques de la succession royale contenues dans le Bill of Rights et dans l’Act of Settlement sont intégrées ex proprio vigore dans le droit constitutionnel canadien. Ainsi, le Canada posséderait ses propres règles de succession au trône. Leur intégration dans la Constitution du Canada signifie que toute modification auxdites règles exige le respect de la procédure de modification prévue dans la Loi constitutionnelle de 1982, une procédure non suivie en l’espèce.

[55]        Le juge est d’avis que ce ne sont pas les dispositions de ces lois britanniques traitant des règles de la succession au trône qui font partie de la Constitution du Canada, mais bien les principes sous-jacents à celles-ci[25].

[56]        Il a raison.

[57]        Le préambule de la Loi constitutionnelle de 1867 prévoit une Constitution canadienne semblable dans son principe à la Constitution britannique. Le professeur Benoît Pelletier écrit que le constituant de 1867 parle de « principe » et non de lois britanniques entières. Il s’exprime ainsi :

Notons ici que le constituant de 1867 parle de principes et non pas nécessairement de lois britanniques entières. Cette distinction n’est pas anodine, puisque les principes en question ne découlent pas toujours de lois, et puisque, comme nous venons de le dire, ce ne sont pas tant ces dernières qui sont introduites en droit canadien que les principes qu’elles contiennent.[26]

[58]        Dans la même veine, la Cour suprême du Canada s’est toujours gardée de transplanter dans le droit interne canadien des dispositions précises des lois fondamentales britanniques que sont le Bill of Rights et l’Act of Settlement. Ce sont les principes sous-jacents de ces actes législatifs qui font partie de l’architecture constitutionnelle canadienne et non ses dispositions spécifiques.

[59]        Dans New-Brunswick Broadcasting Co. c. Nouvelle-Écosse (Président de l’Assemblée législative)[27], la Cour suprême devait déterminer si la Charte canadienne s’appliquait aux privilèges parlementaires d’une Assemblée législative qui avait décidé d’interdire les caméras dans son enceinte.

[60]        À l’argument selon lequel le préambule de la Loi constitutionnelle de 1867 incorpore l’article 9 du Bill of Rights portant sur les privilèges législatifs, le juge Lamer offre la réponse suivante :

Le deuxième argument invoqué par l'appelant et par les intervenants en sa faveur est le suivant. Ils soutiennent que le préambule de la Loi constitutionnelle de 1867, en faisant référence à «une constitution semblable dans son principe à celle du Royaume-Uni» incorpore l'art. 9 du Bill of Rights anglais de 1689 et, de ce fait, les privilèges des corps législatifs. Je ne crois pas que le préambule de la Loi constitutionnelle de 1867 puisse être considéré comme se reportant à un article aussi précis de la Constitution du Royaume-Uni. Bien que la Constitution du Canada repose sans aucun doute, dans une large mesure, sur les mêmes grands principes que la Constitution du Royaume-Uni, les deux sont loin d'être identiques. L’article 9 ne peut pas être transplanté directement sans mention précise.[28]

[Soulignements ajoutés]

[61]        La juge McLachlin partage le même point de vue. Elle écrit :

En ce qui concerne le deuxième argument, il est évident qu’en l’absence d’un renvoi spécifique, le préambule ne devrait pas être interprété comme renvoyant à un article précis du Bill of Rights anglais. Cela ne veut pas dire que les principes qui sous-tendent l’art. 9 du Bill of Rights anglais de 1689 ne font pas partie de notre droit et ne nous éclairent pas quant aux relations qui doivent exister entre les tribunaux et les organismes législatifs au Canada : Résolution pour modifier la Constitution, [1981] 1 R.C.S. 753, à la p. 785.[29]

[62]        La valeur de quatre principes constitutionnels sous-jacents (le fédéralisme, la démocratie, le constitutionnalisme et la primauté du droit, et le respect des droits des minorités) est également analysée par la Cour suprême dans le Renvoi relatif à la sécession du Québec[30] :

51.       Bien que ces principes sous-jacents ne soient pas expressément inclus dans la Constitution, en vertu d'une disposition écrite, sauf pour certains par une allusion indirecte dans le préambule de la Loi constitutionnelle de 1867, il serait impossible de concevoir notre structure constitutionnelle sans eux. Ces principes ont dicté des aspects majeurs de l'architecture même de la Constitution et en sont la force vitale.

52.       Ces principes guident l'interprétation du texte et la définition des sphères de compétence, la portée des droits et obligations ainsi que le rôle de nos institutions politiques. Fait tout aussi important, le respect de ces principes est indispensable au processus permanent d'évolution et de développement de notre Constitution, cet [TRADUCTION] «arbre vivant» selon la célèbre description de l'arrêt Edwards c. Attorney-General for Canada, [1930] A.C. 124 (C.P.), à la p. 136. Notre Cour a indiqué dans New-Brunswick Broadcasting Co. c. Nouvelle-Écosse (Président de l'Assemblée législative), [1993] 1 R.C.S. 319, que les Canadiens reconnaissent depuis longtemps l'existence et l'importance des principes constitutionnels non écrits de notre système de gouvernement.[31]

[63]        Dans le Renvoi relatif à la rémunération des juges de la cour provinciale (Î.-P.-É.)[32], la Cour suprême écrit à propos du principe constitutionnel de l’indépendance judiciaire dont les origines remontent à l’Act of Settlement de 1701 :

83.       Malgré la présence de l’al. 11d) de la Charte et des art. 96 à 100 de la Loi constitutionnelle de 1867, je suis d’avis que l’indépendance de la magistrature est à l’origine un principe constitutionnel non écrit, en ce sens qu’il est extérieur aux articles particuliers des Lois constitutionnelles. L’existence de ce principe, dont les origines remontent à l’Act of Settlement de 1701, est reconnue et confirmée par le préambule de la Loi constitutionnelle de 1867.[33]

[64]        La prétention des appelants voulant que les lois britanniques relatives à la succession du trône soient intégrées dans la Constitution du Canada n’est pas soucieuse de l’approche adoptée par la Cour suprême qui consiste plutôt à identifier des principes constitutionnels sous-jacents plutôt que de reconnaître l’intégration des dispositions spécifiques de lois britanniques.

[65]        On ne peut également passer sous silence le fait que le Parlement canadien n’a pas jugé bon d’inclure ces lois britanniques dans la liste des lois comprises dans la définition de la Constitution du Canada au paragraphe 52(2) de la Loi constitutionnelle de 1982.

[66]        En somme, le juge d’instance ne commet aucune erreur révisable en concluant que les règles britanniques de succession ne sont pas intégrées ex proprio vigore au Canada. En conséquence, le recours à la procédure de modification de la partie V de la Loi constitutionnelle de 1982 pour donner suite aux modifications des règles britanniques de succession adoptées dans la Loi britannique de 2013 n’était pas requis. Seule suffisait l’adoption par le Parlement canadien d’une loi d’assentiment comme celle adoptée en 2013.

5.1.2.3    Le Statut de Westminster de 1931 et le précédent causé par l’abdication du Roi Edward VIII

[67]        En 1931, le Parlement impérial adopte le Statut de Westminster. Le Canada acquiert son indépendance. Cette loi consacre également l’existence d’une Couronne du Canada distincte de la Couronne britannique même si les deux États désignent la même personne physique.

[68]        Les articles pertinents du Statut de Westminster sont les suivants[34] :

Attendu :

 

[]

 

qu'il convient, puisque la couronne est le symbole de la libre association de tous les membres du Commonwealth britannique et qu'ils sont unis par une commune allégeance à celle-ci, de déclarer en préambule que serait conforme à leur situation constitutionnelle l'obligation d'assujettir désormais toute modification des règles de succession au trône et de présentation des titres royaux à l'assentiment des parlements des dominions comme à celui du Parlement du Royaume-Uni;

 

 

 

 

[]

 

 

2. Validité des lois d’un dominion 28-29 Vict., ch. 63

 

(1) La loi de 1865 sur la validité des lois coloniales, intitulée Colonial Laws Validity Act, 1865, ne s'applique pas aux lois adoptées par le parlement d'un dominion après l'entrée en vigueur de la présente loi.

 

(2) Les lois ou dispositions législatives adoptées par le parlement d'un dominion après l'entrée en vigueur de la présente loi ne sont pas invalides ni inopérantes du fait de leur incompatibilité soit avec le droit de l'Angleterre, soit avec les lois existantes ou ultérieures du Parlement du Royaume-Uni ou leurs textes d'application, le parlement du dominion ayant parmi ses pouvoirs celui d'abroger ou de modifier ces lois ou textes dans la mesure où ils font partie du droit du dominion.

 

 

[]

 

4. Application des lois britanniques aux dominions

 

 

Les lois adoptées par le Parlement du Royaume-Uni après l'entrée en vigueur de la présente loi ne font partie du droit d'un dominion que s'il est expressément déclaré dans ces lois que le dominion a demandé leur édiction et y a consenti.

 

 

 

[]

 

7. Restriction : Canada

 

 

 

(1) La présente loi ne s'applique pas à l'abrogation ni à la modification des Lois de 1867 à 1930 sur l'Amérique du Nord britannique ou de leurs textes d'application.

 

(2) L'article 2 s'applique aux lois des provinces du Canada et aux pouvoirs de leurs législatures.

 

 

 

(3) Les pouvoirs conférés par la présente loi au Parlement du Canada et aux législatures des provinces se limitent à l'édiction de lois dont l'objet relève de leurs compétences respectives.

[]

 

 

 

And whereas it is meet and proper to set out by way of preamble to this Act that, inasmuch as the Crown is the symbol of the free association of the members of the British Commonwealth of Nations , and as they are united by a common allegiance to the Crown, it would be in accord with the established constitutional position of all the members of the Commonwealth in relation to one another that any alteration in the law touching the Succession to the Throne or the Royal Style and Titles shall hereafter require the assent as well of the Parliaments of all the Dominions as of the Parliament of the United Kingdom:

 

[]

 

 

2. Validity of laws made by Parliament of a Dominion. 28 & 29 Vict. c. 63.

 

(1) The Colonial Laws Validity Act, 1865, shall not apply to any law made after the commencement of this Act by the Parliament of a Dominion.

 

 

 

(2) No law and no provision of any law made after the commencement of this Act by the Parliament of a Dominion shall be void or inoperative on the ground that it is repugnant to the law of England, or to the provisions of any existing or future Act of Parliament of the United Kingdom, or to any order, rule or regulation made under any such Act, and the powers of the Parliament of a Dominion shall include the power to repeal or amend any such Act, order, rule or regulation in so far as the same is part of the law of the Dominion.

 

[]

 

4. Parliament of United Kingdom not to legislate for Dominion except by consent.

 

No Act of Parliament of the United Kingdom passed after the commencement of this Act shall extend, or be deemed to extend, to a Dominion as part of the law of that Dominion, unless it is expressly declared in that Act that that Dominion has requested, and consented to the enactment thereof.

 

[]

 

7. Saving for British North America Acts and application of the Act to Canada.

 

(1) Nothing in this Act shall be deemed to apply to the repeal, amendment or alteration of the British North America Acts, 1867 to 1930, or any order, rule or regulation made thereunder.

 

(2) The provisions of section two of this Act shall extend to laws made by any of the Provinces of Canada and to the powers of the legislatures of such Provinces.

 

(3) The powers conferred by this Act upon the Parliament of Canada or upon the legislatures of the Provinces shall be restricted to the enactment of laws in relation to matters within the competence of the Parliament of Canada or of any of the legislatures of the Provinces respectively.

[Soulignements ajoutés]

[69]        Le paragraphe 2(1) du Statut de Westminster rend inapplicable pour l’avenir la Loi de 1865 sur la validité des lois coloniales (Colonial Laws Validity Act, 1865)[35] qui prévoyait entre autres la nullité des lois adoptées par une colonie entrant en conflit avec celles du Parlement impérial. Le pouvoir d’abroger ou de modifier ces lois est décrit au paragraphe 2(2) du Statut de Westminster. L’article 4 énonce que les lois adoptées par le Parlement britannique après l’entrée en vigueur du Statut de Westminster ne font pas partie du droit du dominion. Une exception : elles pourront en faire partie s’il est expressément déclaré dans ces lois britanniques que le dominion a demandé leur édiction et y a consenti. Le paragraphe 7(1) comporte des restrictions pour le Canada, dont celle voulant que le Statut de Westminster « ne s’applique pas à l’abrogation ni à la modification des Lois de 1867 à 1930 sur l’Amérique du Nord britannique ou de leurs textes d’application »[36].

[70]        Le préambule du Statut de Westminster contient une particularité visant spécifiquement la modification des règles britanniques de succession au trône royal. Le Parlement du Royaume-Uni s’engage au moyen d’une convention constitutionnelle à assujettir toute modification de ces règles à l’assentiment des dominions.

[71]        Selon les appelants, le précédent causé par l’abdication du Roi Edward VIII en décembre 1936 et l’adoption par les Parlements du Royaume-Uni et du Canada de textes législatifs pour y donner suite confirment l’existence de règles canadiennes de succession au trône.

[72]        Un très bref rappel de l’histoire s’impose ici. En janvier 1936, le Roi Edward VIII accède au trône à la suite du décès de son père, George V. Quelques mois plus tard, il provoque une crise constitutionnelle en demandant en mariage Wallis Simpson, une américaine divorcée d’un premier époux et en instance de divorce de son second époux. En proie à l’hostilité de l’Église d’Angleterre et des autorités politiques qui n’acceptent pas l’idée de cette union, et demeurant ferme dans son dessein de mariage, Edward VIII abdique la Couronne le 10 décembre 1936.

[73]        Le Parlement britannique prépare alors avec célérité un projet de loi portant sur la déclaration d’abdication de Sa Majesté.

[74]        Le contexte est, il va sans dire, unique et la situation revêt un caractère d’urgence.

[75]        Le Parlement canadien ne siège pas au moment de l’abdication. Le Comité du Conseil privé tient toutefois une réunion le 10 décembre 1936 et adopte un arrêté en conseil aux termes duquel il recommande : 1) d’approuver l’adoption du projet de loi britannique; 2) que la loi que l’on se propose d’adopter doit être aussi conforme que possible au projet de loi; et 3) qu’une fois adoptée, la loi britannique sera présentée au Parlement du Canada afin de permettre à celui-ci de prendre les mesures nécessaires en conformité des dispositions du Statut de Westminster[37]. En introduction de ce Décret, le Comité renvoie tant au préambule qu’à l’article 4 du Statut de Westminster pour justifier sa démarche.

[76]        La Loi sur la déclaration d’abdication de Sa Majesté (An Act to give effect to his Majesty’s declaration of abdication), est adoptée par le Parlement britannique le 11 décembre 1936. Elle contient un préambule et deux articles qu’il importe de reproduire :

Whereas His Majesty by His Royal Message of the tenth day of December in this present year has been pleased to declare that He is irrevocably determined to renounce the Throne for Himself and His descendants, and has for that purpose executed the Instrument of Abdication set out in the Schedule to this Act, and has signified His desire that effect thereto should be given immediately:

And whereas, following upon the communication to His Dominions of His Majesty’s said declaration and desire, the Dominion of Canada pursuant to the provisions of section four of the Statute of Westminster 1931 has requested and consented to the enactment of this Act, and the Commonwealth of Australia, the Dominion of New Zealand, and the Union of South Africa have assented thereto:

1.         Effect of His Majesty’s declaration of abdication.

(1)        Immediately upon the Royal Assent being signified to this Act the Instrument of Abdication executed by His present Majesty on the tenth day of December, nineteen hundred and thirty-six, set out in the Schedule to this Act, shall have effect, and thereupon His Majesty shall cease to be King and there shall be a demise of the Crown, and accordingly the member of the Royal Family then next in succession to the Throne shall succeed thereto and to all the rights, privileges, and dignities thereunto belonging.

(2)        His Majesty’s abdication have any right, title or interest in or to the succession to the Throne, and section one of the Act of Settlement shall be construed accordingly.

(3)        The Royal Marriages Act 1772 shall not apply to His Majesty after His abdication nor to the issue, if any, of His Majesty or the descendants of that issue.[38]

2.         Short title.

This Act may be cited as His Majesty’s Declaration of Abdication Act 1936.

[77]        Quelques mois plus tard, le Parlement canadien adopte la Loi sur la modification de la loi sur la succession au trône de 1937 (« Loi canadienne de 1937 »). Il donne alors son assentiment à la loi britannique sur la déclaration d’abdication d’Edward VIII. Le préambule de la loi canadienne fait référence à la fois à l’article 4 du Statut de Westminster et à la convention constitutionnelle qui y est incluse. Nous reproduisons le texte du préambule et le seul article de cette loi adoptée par le Parlement canadien[39] :

CONSIDÉRANT qu'il a plu à Sa ci-devant Majesté le roi Edouard VIII, par Son message royal du dixième jour de décembre mil neuf cent trente-six, d'affirmer Sa détermination irrévocable de renoncer au trône pour Elle-même et ses descendants et qu'Elle a souscrit à cette fin l'acte d'abdication énoncé dans la première annexe de la présente loi, en exprimant le désir qu'il prît immédiatement effet;

 

 

 

 

CONSIDÉRANT que, sur communication de ces affirmation et désir de Sa ci-devant Majesté, faite au Gouvernement de Sa Majesté au Canada, la demande et le consentement du Canada, conformément aux dispositions de l'article quatre du Statut de Westminster (1931.), pour ce qui concerne l'adoption de la Loi sur la déclaration d'abdication de Sa Majesté (1936), énoncée dans la seconde annexe de la présente loi, ont été transmis au Gouvernement de Sa Majesté dans le Royaume-Uni;

 

 

 

CONSIDÉRANT que l’exposé de motif suivant est énoncé dans le préambule du Statut de Westminster (1931):

 

«CONSIDÉRANT qu'il est utile et opportun, puisque la Couronne est le symbole de la libre association des membres de la Communauté des nations britanniques et qu'elles se trouvent unies par une allégeance commune à la Couronne, d'exposer, sous forme de préambule à la présente loi, qu'il serait conforme au statut constitutionnel consacré de tous les membres de la Communauté, dans leurs rapports réciproques, de déclarer que toute modification de la loi sur la succession au trône ou sur la dignité royale et les titres royaux doit recevoir désormais l'assentiment des Parlements de tous les Dominions aussi bien que celui du Parlement du Royaume-Uni)»;

 

 

 

et qu'il devient nécessaire, en conséquence, de déclarer l'assentiment du Parlement du Canada à la modification apportée à la loi concernant la succession au trône, contenue dans la Loi sur la déclaration d'abdication de Sa Majesté (1936).

 

A CES CAUSES, Sa Majesté, sur l'avis et du consentement du Sénat et de la Chambre des communes du Canada, décrète:

 

 

1.   Est par les présentes approuvée la modification apportée à la loi concernant la succession au trône, énoncée dans la loi du Parlement du Royaume-Uni intitulée: Loi sur la déclaration d'abdication de Sa Majesté (1936).

WHEREAS his former Majesty, King Edward VIII, by His Royal Message of the tenth day of December, in the year of Our Lord one thousand nine hundred and thirty-six, was pleased to declare that He was irrevocably determine to renounce the Throne for Himself and His descendants, and that He had for that purpose executed the Instrument of Abdication, which is set out in Schedule One to this Act, and signified his desire that effect thereto should be given immediately:

 

AND WHEREAS, following upon communication to His Majesty's Government in Canada of his former Majesty's said declaration and desire, the request and consent of Canada, pursuant to the provisions of section four of the Statute of Westminster, 1931, to the enactment of His Majesty's Declaration of Abdication Act, 1936, which is set out in Schedule Two to this Act, was communicated to His Majesty's Government in the United Kingdom:

 

 

AND WHEREAS the following recital is·set forth in the preamble to the Statute of Westminster, 1931:

 

"AND WHEREAS it is meet and proper to set out by way of preamble to this Act that, inasmuch as the Crown is the symbol of the free association of the members of the British Commonwealth of Nations, and as they are united by a common allegiance to the Crown, it would be in accord with the established constitutional position of all the members of the Commonwealth in relation to one another that any alteration in the law touching the Succession to the Throne or the Royal Style and Titles shall hereafter require the assent as well of the Parliaments of all the Dominions as of the Parliament of the United Kingdom";

 

 

and accordingly it becomes necessary to declare the Assent of the Parliament of Canada to the alteration in the law touching the Succession to the Throne set forth in His Majesty's Declaration of Abdication Act, 1936.

 

Now, therefore, His Majesty by and with the advice and consent of the Senate and House of Commons of Canada, enacts as follows:

 

1.   The alteration in the law touching the Succession to the Throne set forth in the Act of the Parliament of the United Kingdom intituled "His Majesty's Declaration of Abdication Act, 1936” is hereby assented to.

[78]        Pour les appelants, la référence dans cette loi canadienne à la disposition de l’article 4 du Statut de Westminster emporte la conséquence suivante : le Canada a intégré dans son droit interne les règles britanniques de succession au trône. Il ne saurait en être autrement selon eux puisque le Canada a demandé que la Loi sur la déclaration d’abdication de Sa Majesté soit édictée et y a consenti, conditions qui mènent inéluctablement à son intégration dans notre droit. Ainsi intégrées dans le droit constitutionnel canadien, toute modification subséquente aux règles britanniques de succession au trône, comme celle précisément de la Loi britannique de 2013, nécessite le respect de la procédure de modification prévue à l’article 41 de la Loi constitutionnelle de 1982.

[79]        Le juge ne partage pas cet avis. Il s’en explique de la façon suivante.

[80]        Il retient que le Canada a procédé en deux temps. Dans un premier temps, le Conseil privé a adopté en décembre 1936, dans un contexte d’urgence, un Décret visant l’abdication et l’accession au trône d’un nouveau monarque. Pour le juge, le recours à la procédure de l’article 4 du Statut de Westminster confirmait l’acceptation par le Canada de ce changement d’application immédiate et respectait le principe de la symétrie monarchique.

[81]        Dans un second temps, le juge fait référence à l’adoption, quelques mois plus tard, de la Loi canadienne de 1937. Cette loi a comme seul objet de donner l’assentiment du Canada à la modification apportée à la loi britannique concernant la succession au trône contenue dans la Loi sur la déclaration d’abdication de Sa Majesté de 1936. Même si la Loi canadienne de 1937 renvoie également à la procédure de l’article 4 du Statut de Westminster, le juge n’y voit pas là la signature d’une modification constitutionnelle. Il retient à ce titre l’opinion du professeur Benoît Pelletier selon qui une modification à la Constitution du Canada aurait exigé une demande formelle au Parlement du Royaume-Uni. Le juge est également d’avis qu’il n’était pas nécessaire de recourir à cette disposition, un simple assentiment étant suffisant.

[82]        Ces conclusions ne renferment aucune erreur révisable. Elles s’appuient sur une analyse fouillée des nombreux échanges épistolaires entre les principaux acteurs politiques de l’époque, sur une étude poussée des débats parlementaires contemporains aux décisions prises et sur un examen des écrits doctrinaux concomitants. Le juge a également eu l’avantage de scruter attentivement les rapports d’expertise et d’entendre les experts qui ont témoigné de leur compréhension des événements.

[83]        Jamais le Parlement canadien n’a-t-il eu l’intention à cette occasion d’intégrer à même son droit interne les règles britanniques de la succession au trône.

[84]        En adoptant l’arrêté en conseil du 10 décembre 1936, l’intention était de répondre de façon urgente à la situation exceptionnelle créée par l’abdication du Roi Edward VIII et l’accession au trône de son frère, George VI. Il ne peut être inféré de cette réponse que le Canada a exprimé sa volonté d’adopter les règles britanniques de succession et encore moins de modifier sa Constitution.

[85]        Quant à la Loi canadienne de 1937, elle contient un seul article par lequel le Parlement donne son assentiment à la Loi sur la déclaration d’abdication de Sa Majesté. Elle ne contient aucune référence au fait que le droit britannique de la succession royale est incorporé dans la Constitution du Canada.

[86]        De plus, en utilisant la convention constitutionnelle prévue dans le préambule du Statut Westminster et en recourant à la modalité prévue à son article 4, il est permis de croire que le Canada a alors fait preuve d’une très grande circonspection, car il est loin d’être acquis que l’abdication d’Edward VIII et l’accession de George VI au trône ont entraîné une modification aux règles britanniques de la succession. Pourquoi donc?

[87]        La Loi sur la déclaration d’abdication de Sa Majesté prévoit au paragraphe 1(1) que dès la réception de la sanction royale de l’instrument d’abdication signé par Edward VIII, celui-ci cesse d’être le Roi, ce qui entraîne la transmission de la Couronne (« demise of the Crown »). Le texte traite ensuite du successeur qui est « accordingly the member of the Royal Family then next in succession to the Throne shall succeed thereto and to all the rights, privileges, and dignities thereunto belonging »[40]. Le paragraphe 1(2) empêche le Roi Edward VIII et sa descendance de succéder au trône et précise que : « and section one of the Act of Settlement shall be construed accordingly »[41].

[88]        Rien n’indique que cette loi modifie les règles de succession décrites dans l’Act of Settlement. D’abord, en abdiquant et en transmettant sa Couronne (demise of the Crown), le Roi Edward VIII est déchu et il va de soi que ses descendants ne peuvent accéder au trône. Ensuite, la Loi sur la déclaration d’abdication de Sa Majesté indique que le successeur d’Edward VIII, en l’occurrence son jeune frère George VI, est le prochain dans la lignée successorale. Cela, en tout état de cause, est déjà prévu dans l’Act of Settlement. L’ordre de succession est simplement respecté et on ne peut soutenir valablement que les règles successorales sont ainsi modifiées. Comme le souligne le professeur Mark D. Walters :

Whether section 1(2) was legally necessary is doubtful (a point as we shall see, made by the Leader of the Opposition in Canada). Once the statute provided for a “demise” of the Crown and the accession of the person next in line to the throne, any future children of Edward (there would be none) would have been excluded automatically. It is arguable, then, that the Abdication Act did not alter the law of succession to the throne at all but merely advanced the Crown one step through the existing line of succession before it would otherwise have done so.[42]

[89]        Le moyen des appelants reposant sur le précédent de l’abdication du Roi Edward VIII est infondé. Le contexte particulier de cette abdication et l’absence d’intention de la part du Parlement du Canada d’intégrer les règles britanniques de la succession royale dans son droit interne suffisent pour établir que la posture intellectuelle du juge d’instance est exempte d’erreur révisable. En outre, la démarche utilisée par le Parlement canadien pouvait revêtir un caractère superfétatoire compte tenu de l’absence formelle de modification, par le Parlement impérial, de ses propres règles successorales.

5.2         Le juge a-t-il erré en concluant que les règles britanniques de la succession royale ne font pas partie de la « charge de Reine » du Canada?

[90]        Les appelants arguent que les règles britanniques de la succession royale font partie de la « charge de Reine » protégée à l’alinéa 41a) de la Loi constitutionnelle de 1982. La charge comprend selon eux les règles de désignation du chef de l’État, le statut, le rôle du monarque et certains de ses pouvoirs, incluant le principe d’une succession royale héréditaire protestante à primogéniture masculine.

[91]        S’appuyant sur l’opinion des professeurs Benoît Pelletier et Andrew Heard, le juge détermine que la « charge de Reine » vise les pouvoirs, le statut et le rôle constitutionnel du monarque dans la Constitution canadienne. Il distingue ce concept des règles de succession qui « s’adressent à la personne qui occupe la fonction de Reine ou de Roi au Royaume-Uni »[43]. Il est d’avis que la protection constitutionnelle du paragraphe 1 de l’article 41 de la Loi constitutionnelle de 1982 vise à protéger les pouvoirs, le statut et le rôle conférés au monarque et que la modification aux règles britanniques de succession n’a aucune incidence sur ces attributs[44].

[92]        La Cour est d’accord avec cet énoncé du juge d’instance. Simplement dit, le paragraphe a) de l’article 41 de la Loi constitutionnelle de 1982 protège l’institution monarchique et non les règles procédurales qui permettent à une personne d’accéder au trône. Les modifications apportées par le Parlement britannique aux règles de la succession royale n’ont aucune incidence sur la « charge de Reine » au Canada. La Loi canadienne d’assentiment de 2013 n’apporte aucun changement aux pouvoirs, au statut et au rôle constitutionnel dévolu à la Reine. Il ne vise donc pas la « charge de Reine ».

5.3         La Loi canadienne d’assentiment de 2013 enfreint-elle la liberté de conscience et de religion consacrée au paragraphe 2a) de la Charte canadienne des droits et libertés?

[93]        Les appelants plaident de façon subsidiaire que l’interdiction pour les catholiques d’occuper la charge de la Reine est discriminatoire et porte atteinte à la liberté de religion et au devoir de neutralité religieuse de l’État.

[94]        Les articles pertinents de la Charte canadienne sont rédigés ainsi :

2. Chacun a les libertés fondamentales suivantes :

 

a) liberté de conscience et de religion;

[…]

 

 

15. (1) La loi ne fait acception de personne et s’applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l’âge ou les déficiences mentales ou physiques.

2. Everyone has the following fundamental freedoms:

 

(a) freedom of conscience and religion;

[…]

 

15. (1) Every individual is equal before and under the law and has the right to the equal protection and equal benefit of the law without discrimination and, in particular, without discrimination based on race, national or ethnic origin, colour, religion, sex, age or mental or physical disability.

[95]        Le juge ne commet aucune erreur à propos de la discrimination religieuse. Il a conclu que le Canada ne possédait pas de règles de succession au trône hormis les principes constitutionnels non écrits de symétrie et d’une succession héréditaire déterminée par le Royaume-Uni. La règle de la symétrie n’ayant pas pour effet d’incorporer la Loi britannique de 2013 en droit canadien, la Charte canadienne ne peut donc s’y appliquer.

5.4         La Loi canadienne d’assentiment de 2013 enfreint-elle l’article 133 de la Loi de 1867 et l’article 18 de la Loi constitutionnelle de 1982 portant sur l’obligation d’adopter les lois dans les deux langues officielles du Canada?

[96]        Selon les appelants, la mise en œuvre de l’Accord de Perth a pour objet et effet d’incorporer en droit canadien la Loi britannique de 2013, sans qu’une version française officielle ait été adoptée. Ceci serait contraire à l’obligation de bilinguisme prévue par l’effet combiné des articles 18 de la Loi constitutionnelle de 1982 et 133 de la Loi constitutionnelle de1867[45].

[97]        L’article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867 est rédigé ainsi :

133. Dans les chambres du parlement du Canada et les chambres de la législature de Québec, l’usage de la langue française ou de la langue anglaise, dans les débats, sera facultatif; mais dans la rédaction des archives, procès-verbaux et journaux respectifs de ces chambres, l’usage de ces deux langues sera obligatoire; et dans toute plaidoirie ou pièce de procédure par-devant les tribunaux ou émanant des tribunaux du Canada qui seront établis sous l’autorité de la présente loi, et par-devant tous les tribunaux ou émanant des tribunaux de Québec, il pourra être fait également usage, à faculté, de l’une ou de l’autre de ces langues.

 

Les lois du parlement du Canada et de la législature de Québec devront être imprimées et publiées dans ces deux langues.

133. Either the English or the French Language may be used by any Person in the Debates of the Houses of the Parliament of Canada and of the Houses of the Legislature of Quebec; and both those Languages shall be used in the respective Records and Journals of those Houses; and either of those Languages may be used by any Person or in any Pleading or Process in or issuing from any Court of Canada established under this Act, and in or from all or any of the Courts of Quebec.

 

 

 

 

 

The Acts of the Parliament of Canada and of the Legislature of Quebec shall be printed and published in both those Languages.

[98]        De plus, l’article 18 de la Loi constitutionnelle de 1982 prévoit que :

18. (1) Les lois, les archives, les comptes rendus et les procès-verbaux du Parlement sont imprimés et publiés en français et en anglais, les deux versions des lois ayant également force de loi et celles des autres documents ayant même valeur.

 

[…]

18. (1) The statutes, records and journals of Parliament shall be printed and published in English and French and both language versions are equally authoritative.

 

 

 

[…]

[99]        Le juge de première instance ne commet aucune erreur au chapitre de l’obligation de bilinguisme puisque, suivant son raisonnement, la Loi britannique de 2013 n’était pas incorporée en droit canadien. La présentation d’une version française officielle de cette loi n’était donc pas nécessaire. D’ailleurs, comme le juge l’a souligné, la Loi canadienne d’assentiment de 2013 a été adoptée en français et en anglais. De plus, lors de la présentation du projet de loi, une version française du projet de la Loi britannique de 2013, établie par le ministère de la Justice du Canada, avait été déposée à la Chambre des communes[46]. Cela témoigne du souci évident du Canada de respecter ses obligations en matière de bilinguisme.

[100]     Cela étant dit, je propose de rejeter l’appel des appelants, avec les frais de justice.

 

 

 

JOCELYN F. RANCOURT, J.C.A.

 



[1]     Motard c. Canada (Procureure générale), 2016 QCCS 588 [Jugement entrepris].

[2]     Statut de Westminster, 1931 (R.-U.), 22 & 23 Geo. V, c. 4.

[3]     Loi de 2013 sur la succession au trône, L.C. 2013, ch. 6.

[4]     Succession to the Crown Act 2013 (R.-U.), c. 20.

[5]     La Loi britannique de 2013 entre en vigueur le 26 mars 2015 en vertu d’une ordonnance : The Succession to the Crown Act 2013 (Commencement) Order 2015 (R.-U.), 2015 No. 894 (C. 56). En ligne : http://www.legislation.gov.uk/uksi/2015/894/made. La Loi canadienne d’assentiment entre en vigueur le 26 mars 2015 en vertu de son article 3 et du Décret fixant au 26 mars 2015 la date d’entrée en vigueur de la loi T.R./2015-25.

[6]     Loi constitutionnelle de 1982, constituant l’annexe B de la Loi de 1982 sur la Canada (R.-U.), 1982, c. 11.

[7]     Charte canadienne des droits et libertés, partie 1 de la Loi constitutionnelle de 1982, constituant l’annexe B de la Loi de 1982 sur la Canada (R.-U.), 1982, c. 11.

[8]     Loi constitutionnelle de 1867 (R.-U.), 30 & 31 Vict., c. 3, reproduite dans L.R.C. 1985, annexe II, no 5.

[9]     Jugement entrepris, supra, note 1.

[10]    Id., paragr. 14.

[11]    Id., paragr. 15.

[12]    Id., paragr. 16.

[13]    Id., paragr. 151.

[14]    Id., paragr. 154.

[15]    Id., paragr. 157.

[16]    Bill of Rights, 1689 (R.-U.), 1 Will. III & Mary II, c. 2.

[17]    Act of Settlement, 1701 (R.-U.), 12 & 13 Will. III, c. 2.

[18]    Jugement entrepris, supra, note 1, paragr. 53.

[19]    Mark D. Walters, « Succession to the Throne and the Architecture of the Constitution of Canada », dans Michel Bédard et Philippe Lagassé (dir.), La Couronne et le Parlement, Cowansville, Yvon Blais, 2014, 263.

[20]    Voir pièce PGC-58, « Délibérations du comité sénatorial permanent des Affaires juridiques et constitutionnelles, Fascicule 32, « C-53, Loi d’assentiment aux modifications apportées à la loi concernant la succession au trône », 20 mars 2013, p. 32:11.

[21]    Peter W. Hogg, « Succession to the Throne », (2014) 33 (1) N.J.C.L. 83, p. 86.

[22]    O’Donohue v. Canada, [2003] O.J. No. 2764, 2003 CanLII 41404, paragr. 27 (C.S. Ont.).

[23]    Renvoi relatif à la sécession du Québec, [1998] 2 R.C.S. 217, paragr. 70.

[24]    Id., paragr. 58.

[25]    Jugement entrepris, supra, note 1, paragr. 53.

[26]    Benoît Pelletier, « La validité de la Loi de 2013 sur la succession au trône », (2018) 49 Ottawa L. Rev. 331, p. 349.

[27]    New-Brunswick Broadcasting Co. c. Nouvelle-Écosse (Président de l’Assemblée législative), [1993] 1 R.C.S. 319.

[28]    Id., p. 353.

[29]    Id., p. 374.

[30]    Renvoi relatif à la sécession du Québec, [1998] 2 R.C.S. 217.

[31]    Id., paragr. 51-52.

[32]    Renvoi relatif à la rémunération des juges de la cour provinciale (Î. P. É.), [1997] 3 R.C.S. 3.

[33]    Id., paragr. 83.

[34]    Statut de Westminster (1931), 22 Geo. V, ch. 4 (R.-U.).

[35]    Colonial Laws Validity Act, 1865 (R.-U.), 28 & 29 Vict., c. 3.

[36]    Statut de Westminster (1931), 22 Geo. V, ch. 4 (R.-U.).

[37]    Pièce PGC-32, p. 41-42.

[38]    His Majesty’s Declaration of Abdication Act, 1936 (R.-U.) 1 Edw. VIII & Geo. VI, c. 3.

[39]    Loi sur la modification de la loi concernant la succession au trône, 1937 (Can.), 1 Geo. VI, c. 16.

[40]    His Majesty’s Declaration of Abdication Act, 1936 (R.-U.) 1 Edw. VIII & Geo. VI, c. 3.

[41]    Ibid.

[42]    Mark D. Walters, « Succession to the Throne and the Architecture of the Constitution of Canada », dans Michel Bédard et Philippe Lagassé (dir.), La Couronne et le Parlement, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2015, p. 278.

[43]    Jugement entrepris, supra, note 1, paragr. 139.

[44]    Id., paragr. 140.

[45]    Id., paragr. 60-62.

[46]    Id, paragr. 157.

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