Décision

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Parallèle de l'habitation sociale inc. c. Petit

2021 QCTAL 32684

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Sherbrooke

 

No dossier :

571886 26 20210519 G

No demande :

3253102

 

 

Date :

13 décembre 2021

Devant le juge administratif :

Marc Landry

 

Le Parallèle de l'habitation sociale Inc.

 

Locateur - Partie demanderesse

c.

Carol Petit

 

Locataire - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]         Le 19 mai 2021, le locateur demande la résiliation du bail, l’expulsion du locataire et de tous les occupants du logement, l’émission d’une ordonnance de ne pas donner accès au logement[1], plus l’exécution provisoire malgré l’appel et les frais.

[2]         Il allègue les comportements du locataire et de ses visiteurs ou des personnes à qui il donne accès au logement ou à l’immeuble (comportements qui troublent la jouissance paisible et normale des lieux et qui constituent une menace à la sécurité pour les autres locataires et les employés du locateur), les avertissements donnés, la persistance des troubles, le préjudice sérieux subi.

[3]         La demande est signifiée par huissier le 20 mai 2021.

[4]         Il s’agit d’un bail reconduit du 1er juillet 2020 au 30 juin 2021 au loyer mensuel de 501 $, reconduit à nouveau jusqu’au 30 juin 2022 au loyer mensuel de 506 $.

[5]         Le logement est situé dans un immeuble à logements multiples.

[6]         Le Tribunal entend deux employées du locateur[2].

[7]         Le locateur fait amplement la preuve de ses allégations par témoignages et bandes vidéo captées par les caméras de surveillance.

[8]         Le locataire donne accès à l’immeuble et/ou à son logement à plusieurs personnes itinérantes[3]. Le va-et-vient est important et problématique. Ces personnes perturbent la jouissance normale et paisible des lieux.

[9]         Ces personnes apportent des biens (carcasses de vélo, matelas, couvertures, valises, sacs, bières, etc.). Divers objets trainent ainsi dans les escaliers, les couloirs, près des entrées ou des issues de secours. Ces objets gênent la circulation.


[10]     Plusieurs de ces personnes utilisent les espaces communs (principalement les escaliers intérieurs, parfois la salle de lavage) pour dormir, boire, manger, fumer ou faire du lavage. Elles cognent ou sonnent aux portes des locataires voisins. Elles sont parfois assez bruyantes. Quelques-unes de ces personnes ont même déjà été expulsées de leur logement par le locateur à la suite de décisions rendues (les employées du locateur les reconnaissent sur les bandes vidéo).

[11]     D’autres personnes vont plutôt dormir au logement. Elles y amènent divers biens. Le locateur a dû intervenir pour une infestation de punaises de lit dans le logement. Une de ces personnes a été filmée sortant du logement du locataire avec une tige de fer dans une main et un grand couteau dans l’autre. Un message s’adressant au locataire a été écrit au crayon feutre et un graffiti par peinture aérosol a été dessiné sur l’une des deux portes d’entrée du logement. À l’occasion, des biens sont laissés à côté des portes du logement.

[12]     Le locataire fume dans les espaces communs. Les mégots et les cendres trainent à terre dans le logement. L’encombrement du logement par des biens divers est manifeste selon les photographies exhibées, ce qui augmente la charge combustible. L’état du logement constitue une aggravation prévisible de la situation en cas de sinistre ou d'accident, une menace sérieuse pour la sécurité des occupants de l’immeuble.

[13]     Le locataire a aussi arraché le détecteur de fumée du logement relié au système de prévention des incendies, ce qui a provoqué une fausse alarme.

[14]     Les voisins se plaignent au locateur des divers dérangements. Ils sont excédés.

[15]     Les troubles excessifs persistent depuis deux années malgré le soutien communautaire offert, l’aide apportée[4], les rencontres de sensibilisation, les avertissements donnés, les mises en demeure transmises.

[16]     Rien n’y fait. Le locataire ne collabore pas.

[17]     Sur un message laissé dans la boîte vocale du locateur, il exprime le fond de sa pensée : « Je m’en câlisse des HLM ».

[18]     Une des intervenantes a peur du locataire. Sur un ton enragé, afin qu'elle quitte les lieux lors d’une intervention, il lui intime : « Décâlisse ! ».

[19]     Le locataire ne respecte pas ses obligations.

[20]     Il n’use pas des lieux loués avec la prudence et la diligence requises (article 1855 du Code civil du Québec).

[21]     Il ne se conduit pas de manière à ne pas troubler la jouissance normale et paisible des autres locataires (article 1860 Code civil du Québec). Cette obligation vise autant le locataire que les occupants du logement et les visiteurs, soit toutes les personnes à qui le locataire permet l'usage du logement et l'accès à celui-ci.

[22]     Le locateur a quant à lui l’obligation de fournir la jouissance paisible des lieux à tous ses locataires pendant toute la durée des baux (article 1854 Code civil du Québec).

[23]     Le locateur peut demander la résiliation du bail en cas de violation par le locataire de ses obligations (articles 1860 et 1863 Code civil du Québec).

[24]     Vu le préjudice sérieux subi, le bail doit être résilié.

[25]     Il apparaît inutile de surseoir à la résiliation du bail afin de rendre une ordonnance de la dernière chance en vertu de l’article 1973 du Code civil du Québec.

[26]     L’exécution provisoire n’est pas accordée.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[27]     RÉSILIE le bail et ORDONNE l’expulsion du locataire et de tous les occupants du logement;


[28]     CONDAMNE le locataire à payer au locateur les frais de justice de 102 $;

[29]     REJETTE la demande quant aux autres conclusions.

 

 

 

 

 

 

 

 

Marc Landry

 

Présence(s) :

la mandataire du locateur

Date de l’audience : 

1er décembre 2021

 

 

 


 


[1] À l’audience, le locateur se désiste de l’ordonnance demandée.

[2] Le locataire s’est présenté le jour de l’audition, mais il est demeuré dans le corridor adjacent à la salle d’audience. On l’entendait distinctement sacrer près de la porte. Il est reparti assez rapidement, sans entrer dans la salle.

[3] Le locataire a admis la chose au locateur lors d’une rencontre. Il a expliqué être incapable de dire non aux personnes itinérantes qui lui demandent un accès à l’immeuble et/ou au logement.

[4] Interventions du CLSC, du locateur, du Curateur public.

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