Décision

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Terre bleue c. Dumey

2023 QCTAL 22329

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Montréal

 

No dossier :

719373 31 20230703 G

No demande :

3956140

 

 

Date :

19 juillet 2023

Devant la juge administrative :

Manon Talbot

 

Terre Bleue SOCIÉTÉ EN NOM COLLECTIF représentée par Julien Filiatrault

 

Locatrice - Partie demanderesse

c.

Gertrude Dumey

 

Locataire - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]         Suivant un recours introduit le 3 juillet 2023, le Tribunal est saisi d'une demande de la locatrice Terre Bleue S.E.N.C qui demande l’expulsion de la locataire. 

[2]         Le recours de la locatrice est fondé sur l’article 1889 du Code civil du Québec qui prévoit :

« 1889. Le locateur d'un immeuble peut obtenir l'expulsion du locataire qui continue d'occuper les lieux loués après la fin du bail ou après la date convenue au cours du bail pour la remise des lieux; le locateur d'un meuble peut, dans les mêmes circonstances, obtenir la remise du bien. »

[3]         Au soutien de sa demande, la locatrice allègue que le logement est toujours occupé, malgré la fin du bail ou la date convenue entre les parties. Le logement devait être libéré pour le 30 juin 2023.

CONTEXTE

[4]         Depuis le 3 août 2022, la locatrice est propriétaire de l'immeuble de huit unités d’habitation.

[5]         La locataire habite le logement depuis plus de sept ans. Elle paie un loyer de 685 $ par mois pour la période du 1er juillet 2022 au 30 juin 2023.

[6]         Selon les représentants de la locatrice, l’état de l’immeuble requiert des travaux importants. Pour faciliter leur exécution, les locataires de l’immeuble sont invités à signer une entente de résiliation de bail.

[7]         Luca Bodo, l’un des représentants de la locatrice, rencontre la locataire pour lui présenter une entente de résiliation de bail. La locataire demande un temps de réflexion pour s’informer de ses droits, même si elle mentionne vouloir déménager.

[8]         Monsieur Bodo lui laisse le formulaire d’entente de résiliation de bail et n’en conserve pas d’exemplaire. Il ne se souvient pas de la date de cette rencontre.


[9]         Lors d’une autre rencontre, la locataire accepte de résilier le bail, mais elle refuse de signer un long document contenant plusieurs clauses, témoigne Julien Filiatrault, un autre représentant de la locatrice. C’est pourquoi, le 22 octobre 2022, il griffonne sur une feuille le texte suivant : Je, Gertrude Domey, locataire de l’appartement 6 du 8760 St-Michel, vous quitter l’appartement au 30 juin 2022.

[10]     Le document est signé par la locataire, mais il n’est pas daté ni signé par monsieur Filiatrault. L’original est laissé à la locataire après qu’il eut numérisé le document sur son téléphone.

[11]     Il n’est pas contesté que la date de fin de bail est le 30 juin 2023 et non le 30 juin 2022. Il s’agit d’une erreur.

[12]     La locataire ne conteste pas avoir signé le document selon lequel elle s’engage à quitter le logement et elle ne remet pas en question sa décision. Elle souhaite toutefois obtenir un délai supplémentaire de deux mois pour se trouver un autre logement.

[13]     Elle explique les circonstances l’ayant amenée à signer le document sur lequel est fondée la demande de la locatrice.

[14]     Elle dépose le document présenté par Luca Bodo portant la date du 19 août 2022. Il s’agit d’un formulaire déjà rempli contenant le nom de la locataire, son adresse et la date de la résiliation de bail en date du 30 juin 2023. La clause indiquant que le propriétaire accepte de payer un montant forfaitaire à la locataire comporte un trait dans l’espace prévu pour inscrire le montant.

[15]     La locataire confirme avoir demandé un temps de réflexion avant de signer. Selon les informations obtenues, il lui a été suggéré de ne pas signer d’entente de résiliation de bail.

[16]     Monsieur Bodo s’est présenté plusieurs fois par la suite pour obtenir sa signature à l’entente de résiliation de bail. Après insistance, elle a accepté de partir et elle a signé le document écrit pas monsieur Filiatrault.

[17]     La locataire produit aussi le document sur lequel elle s’engage à quitter le logement. Il comporte le texte ajouté suivant :  Accepté par Julien Filiatrault, représentant de Terre Bleue SENC.

[18]     La signature de Julien Filiatrault et Luca Bodo y apparaît avec la date du 7 février 2023.

[19]     À l’audience, les représentants de la locatrice se rappelleront finalement avoir signé le document lorsqu’ils se sont présentés chez la locataire pour collecter le loyer.

[20]     Or, malgré ses recherches, la locataire n’a toujours pas trouvé de logement pour se loger avec son fils qui subit des traitements de dialyse.

[21]     La locataire s’est donc retournée vers l’Office municipal d’habitation de Montréal (OMHM) pour obtenir de l’aide dans ses recherches d’un logement.

[22]     Monsieur Bodo lui a apporté des boîtes le 28 juin 2023 et les préparatifs de son déménagement sont en cours.

[23]     À ce jour, elle n’a toujours pas trouvé de logement. Cependant, elle croit pouvoir compter sur l’OMHM pour un logement temporaire, mais elle attend toujours une confirmation de leur part.

[24]     Monsieur Filiatrault ajoute qu’ils ont des échanges avec les représentants de l’OMHM qui exigent les traitements d’extermination des blattes avant le déménagement de la locataire, ce qui est sur le point d’être finalisé.

[25]     Les deux représentants de la locatrice ne contestent pas avoir demandé à la locataire à quelques reprises de signer l’entente. Elle a finalement accepté de résilier le bail sans avoir été contrainte de le faire. 

[26]     Concernant la demande de la locataire de lui accorder un délai supplémentaire pour trouver un logement convenable et abordable, la réponse de monsieur Filiatrault est catégorique. La locataire a accepté de résilier le bail il y a plusieurs mois et elle est, depuis le 1er juillet 2023, une occupante sans droit. La locatrice subira un préjudice sérieux si la locataire refuse de quitter, car des ouvriers sont prévus la semaine suivante pour exécuter les travaux de rénovation comme ceux déjà été effectués dans les autres logements.

[27]     Malgré toute la sympathie du Tribunal devant la situation difficile que vit la locataire, le Tribunal se doit de rendre justice selon les règles de droit. En l’espèce, le Tribunal constate que la locataire occupe les lieux sans droit depuis le 1er juillet 2023.

[28]    
Toutefois, en raison des circonstances de la présente affaire et considérant que le logement n’est pas reloué, le Tribunal juge que le préjudice allégué par la locatrice ne justifie pas l'exécution provisoire de la décision.

[29]     Il y a lieu de permettre à la locataire de déménager dignement et sans le souci de transporter des blattes ou autres vermines dans le prochain logement.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[30]     CONSTATE la résiliation du bail;

[31]     ORDONNE l'expulsion de la locataire et tous les occupants du logement;

[32]     CONDAMNE la locataire à payer à la locatrice les frais judiciaires de 107 $.

 

 

 

 

 

 

 

 

Manon Talbot

 

Présence(s) :

le mandataire de la locatrice

la locataire

Date de l’audience : 

11 juillet 2023

 

 

 


 

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