Décision

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Barth c. Ethier

2024 QCTAL 34631

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Trois-Rivières

 

No dossier :

808571 15 20240717 G

No demande :

4401081

 

 

Date :

31 octobre 2024

Devant la juge administrative :

Anjuly Hamel

 

Emma Barth

 

Locatrice - Partie demanderesse

c.

Jean Ethier

 

Locataire - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]             Par un recours introduit le 17 juillet 2024, la locatrice demande la résiliation du bail, le recouvrement du loyer (1 640 $) ainsi que le loyer dû au moment de l’audience plus les intérêts au taux légal et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec (C.c.Q.), l'exécution provisoire de la décision malgré l'appel et le paiement des frais de justice.

[2]             La locatrice requiert de plus la résiliation du bail au motif que le locataire paie fréquemment son loyer en retard.

[3]             La locatrice indique avoir acquis l’immeuble en 2019.

[4]             Elle explique qu’un bail verbal a été conclu entre l’ancien locateur et le locataire.

[5]             Il s’agit d’un bail de 12 mois ayant été reconduit jusqu’au 30 juin 2025 au loyer mensuel de 800 $, payable le 1er jour de chaque mois.

[6]             La locatrice affirme que le locataire doit 2 350 $, soit le loyer des mois de juin (750 $), juillet et août 2024, plus 9,75 $ représentant les frais de notification de la demande.

[7]             Le locataire n’admet pas devoir cette somme.

[8]             Il aurait envoyé des chèques par courrier recommandé à la locatrice, mais n’a aucune preuve de leur réception.

[9]             La locatrice nie les avoir reçus.

[10]         Le locataire indique également ne pas être en accord avec le montant des loyers réclamés.

[11]         Il explique avoir refusé par écrit l’augmentation proposée dans l’avis d’augmentation reçu le 26 janvier 2024.

[12]         Il affirme avoir fait parvenir son refus par courrier recommandé à la locatrice, mais précise que la locatrice n’a pas été cherchée ce courrier recommandé.


[13]         Il répond au Tribunal ne pas avoir fait d’autre tentative pour transmettre son refus à la locatrice.

[14]         La locatrice répond ne pas être au courant du refus d’augmentation du locataire.

[15]         La locatrice démontre que 3 mois ont été payés en retard. Elle explique que sa gestion est alourdie et qu’elle doit utiliser sa marge de crédit pour faire face à ses propres obligations financières.

[16]         Elle dépose en preuve un relevé de compte afin de démontrer l’utilisation de sa marge de crédit.

Décision :

[17]         Les articles 2803, 2804 et 2845 du Code civil du Québec prévoient que celui qui veut faire valoir ses droits doit démontrer les faits au soutien de ses prétentions, et ce, de façon prépondérante, la force probante du témoignage étant laissée à l'appréciation du tribunal.

[18]         La locatrice invoque comme second motif de résiliation les retards fréquents du locataire à payer son loyer.

[19]         Pour obtenir cette conclusion, la locatrice doit faire la preuve que les retards sont fréquents, qu'elle en subit un préjudice et que ce préjudice est sérieux

[20]         Le Tribunal estime que la preuve soumise par la locatrice est insuffisante pour démontrer, par prépondérance de preuve, que les retards du locataire lui ont causé un préjudice pouvant être qualifié de sérieux.

[21]         En employant le terme sérieux, le législateur a imposé une preuve exigeante à la locatrice. La perception tardive d'un loyer crée en soi un préjudice. Cependant, pour justifier la résiliation d'un bail, il faut que ce préjudice soit plus grand que les simples inconvénients occasionnés par tout retard.

[22]         La locatrice n’a établi que trois mois payés en retard dans la dernière année. Ces trois retards, à eux seuls, ne peuvent permettre d’établir un préjudice objectivement sérieux, au sens de la Loi.

[23]         L’article 1945 Code civil du Québec prévoit le délai pour répondre à un avis de modification du bail et les conséquences de ne pas le faire dans ce délai.

[24]         L’article 1947 Code civil du Québec prévoit d’autre part le délai dans lequel un locateur doit faire une demande de fixation de loyer à la suite du refus du locataire et les conséquences de ne pas le faire dans ce délai.

[25]         Ces dispositions se lisent comme suit :

« 1945. Le locataire qui refuse la modification proposée par le locateur est tenu, dans le mois de la réception de l'avis de modification du bail, d'aviser le locateur de son refus ou de l'aviser qu'il quitte le logement; s'il omet de le faire, il est réputé avoir accepté la reconduction du bail aux conditions proposées par le locateur.

Toutefois, lorsque le bail porte sur un logement visé à l'article 1955, le locataire qui refuse la modification proposée doit quitter le logement à la fin du bail. »

« 1947. Le locateur peut, lorsque le locataire refuse la modification proposée, s'adresser au tribunal dans le mois de la réception de l'avis de refus, pour faire fixer le loyer ou, suivant le cas, faire statuer sur toute autre modification du bail; s'il omet de le faire, le bail est reconduit de plein droit aux conditions antérieures. »

[26]         Le locataire avait donc un mois à compter du 26 janvier 2024 pour refuser, par écrit, la modification.

[27]         Le fait pour un locataire de ne pas répondre à un avis de modification de bail dans le mois de sa réception emporte la reconduction du bail avec les modifications demandées par la locatrice.

[28]         Il incombe au locataire de prouver la réception de son avis de refus si la locatrice conteste l’avoir reçu[1], ce qui est le cas en l’espèce.

[29]         Le locataire n’est pas en mesure d’en prouver la réception par la locatrice.


[30]         Par conséquent, tel que le prévoit l’article 1945 précité, le locataire est réputé avoir accepté la reconduction du bail aux conditions proposées par la locatrice et lui doit l’entièreté de la somme réclamée.

[31]         Le locataire n'a présenté aucune preuve documentaire au Tribunal permettant d'établir les paiements des loyers qu'il affirme avoir effectués. Or, il lui appartenait de prouver ses paiements.

[32]         Selon la preuve administrée par la locatrice, le locataire doit la somme de 2 350 $ en loyer correspondant à solde du mois de juin (750 $) plus les mois de juillet et août 2024.

[33]         La résiliation du bail est ainsi justifiée en application de l'article 1971 du Code civil du Québec.

[34]         Le bail n'est toutefois pas résilié si le loyer dû, les intérêts et les frais sont payés avant jugement, conformément aux dispositions de l'article 1883 du Code civil du Québec.

[35]         Le préjudice causé au locateur ne justifie pas l'exécution provisoire de l'ordonnance d'expulsion, comme il est prévu à l'article 82.1 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement.

[36]         Puisque la demande de la locatrice est partiellement fondée, les frais applicables sont adjugés contre la partie défenderesse selon le Tarif des frais exigibles par le Tribunal administratif du logement.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[37]         RÉSILIE le bail et ORDONNE l'expulsion du locataire et de tous les occupants du logement;

[38]         CONDAMNE le locataire à payer à la locatrice la somme de 2 350 $, plus les intérêts au taux légal et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec, à compter du 17 juillet 2024 sur la somme de 1 640 $, et sur le solde à compter de l'échéance de chaque loyer, plus les frais au montant de 96,75 $;

[39]         REJETTE quant au surplus.

 

 

 

 

 

 

 

 

Anjuly Hamel

 

Présence(s) :

le locateur

le locataire

Date de l’audience : 

26 août 2024

 

 

 


 


[1] Bon Apparte c. Brousseau, 2003 CanLII 36382 (QC CQ).

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