Décision

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Beaupré c. Immeubles A. Côté

2024 QCTAL 35191

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Saint-Hyacinthe

 

No dossier :

739631 23 20231011 T

No demande :

4411470

 

 

Date :

29 octobre 2024

Devant le juge administratif :

Serge Adam

 

Gabrielle Beaupré

 

Locataire - Partie demanderesse

c.

Les Immeubles A. Côté

 

Locateur - Partie défenderesse

et

Bruno Loiselle

 

Partie intéressée

 

 

D É C I S I O N

 

 

[1]         La locataire demande la rétractation de la décision rendue le 18 juin 2024 suivant une audience tenue le 10 mai 2024 condamnant cette dernière à la somme de 1 800 $, plus les intérêts et les frais judiciaires.

[2]         La locataire déclare qu'elle est insatisfaite de la décision rendue le 18 juin 2024. Elle reproche à ma collègue d'avoir mal apprécié la preuve soumise en défense et avoir été surprise de certaines preuves du locateur. Elle n’a donc pas pu se défendre adéquatement et également, elle n’était pas complètement apte lors de l’audience vu sa situation médicale. Le locateur, pour sa part, s'oppose à la rétractation de la décision rendue qu'il considère bien fondée en faits et en droit.

[3]         Le recours de la locataire se fonde sur l'article 89 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement qui se lit comme suit :

« 89. Si une décision a été rendue contre une partie qui a été empêchée de se présenter ou de fournir une preuve, par surprise, fraude ou autre cause jugée suffisante, cette partie peut en demander la rétractation.

Une partie peut également demander la rétractation d'une décision lorsque la Régie a omis de statuer sur une partie de la demande ou s'est prononcée au-delà de la demande.

La demande de rétractation doit être faite par écrit dans les dix jours de la connaissance de la décision ou, selon le cas, du moment où cesse l'empêchement.


La demande de rétractation suspend l'exécution de la décision et interrompt le délai d'appel ou de révision jusqu'à ce que les parties aient été avisées de la décision. »

[4]         Ce que demande la locataire, c'est d'apprécier la justesse de la décision de la première juge de na pas avoir cru la locataire ainsi que l'analyse de la preuve faite par cette dernière et elle fut surprise de certaines preuves du locateur.

[5]         Or, l'appréciation de la preuve relève de l'entière discrétion du juge qui préside le procès.

[6]         À ce sujet, l'honorable juge Desjarlais, dans la cause Fairway House Enr. c. Wolofsky, mentionne[1]:

« L'empêchement de présenter une preuve qui origine du refus d'un juge d'entendre un témoignage qu'il ne juge pas pertinent ne peut faire l'objet d'une demande de rétractation, mais plutôt d'une demande d'appel. On ne peut en effet demander à la Régie du logement d'accorder la rétractation pour ce motif, car ce serait confier au régisseur siégeant en rétractation une fonction qui va au-delà de sa compétence : celle de juger de la justesse de la décision d'un collègue, une tâche réservée tant à la Cour provinciale siégeant en appel dans les cas prévus à l'article 91 de la Loi sur la Régie du logement qu'à la Régie du logement siégeant en révision des décisions portant sur une demande dont le seul objet est la fixation, la révision ou le réajustement de loyer.

Dans cette cause, on a demandé à un régisseur de la Régie du logement de prononcer la rétractation d'une décision d'un autre régisseur qui a refusé d'entendre la preuve d'un témoin qu'il jugeait inutile.

Ce n'était pas de la compétence du régisseur siégeant en rétractation de juger du bien-fondé de la décision de son collègue qui, au mérite, a décidé de ne pas entendre un témoin, mais plutôt au palier supérieur en l'instance, le tribunal de révision, puisqu'il s'agit de réajustement de loyer, suivant la Loi sur la fiscalité municipale, à décider s'il doit entendre ce témoin et à s'exécuter, s'il y avait lieu. »

[7]         Considérant que le motif invoqué par la locataire ne donne pas ouverture à la rétractation, sa demande doit être rejetée. De plus, l'insatisfaction d'une partie face à une décision rendue ne constitue pas un motif de rétractation, mais plutôt un motif d'appel.

[8]         À ce sujet, madame Thérèse Rousseau-Houle et Me Martine de Billy écrivent dans leur traité sur le bail d'un logement :

« L'article 89 ne peut être utilisé à titre d'appel déguisé. Si une partie n'est pas satisfaite de la décision rendue, elle ne peut pas en demander la rétractation afin de présenter une meilleure preuve.

On ne peut en effet demander à la Régie du logement d'accorder la rétractation pour ce motif, car ce serait confier au régisseur siégeant en rétractation une fonction qui va au-delà de sa compétence : celle de juger de la justesse de la décision d'un collègue, une tâche réservée tant à la Cour provinciale siégeant en appel dans les cas prévus à l'article 91 de la Loi sur la Régie du logement siégeant en révision des décisions portant sur une demande dont le seul objet est la fixation, la révision ou le réajustement de loyer[2]. »

[9]         Si la locataire fut réellement surprise de certaines preuves du locateur ou encore qu’elle ne se sentait pas apte à se défendre lors de la journée d’audience, elle aurait pu demander une remise ou un ajournement afin de se préparer adéquatement, ce qu’elle n’a pas fait.

[10]     Voyant qu’elle fut condamnée, elle veut obtenir une seconde chance de se défendre, ce qui ne peut être accordé sauf par une demande en appel.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[11]     REJETTE la demande de rétractation.


[12]     MAINTIENT la décision rendue le 18 juin 2024.

 

 

 

 

 

 

 

 

Serge Adam

 

Présence(s) :

la locataire

le mandataire du locateur

Date de l’audience : 

10 octobre 2024

 

 

 


 


[1] C.Q., 500-02-018264-841.

[2] Rousseau-Houle, Thérèse et Martine de Billy, Le bail du logement, Montréal, 1989, Wilson et Lafleur, p.310.

AVIS :
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