Feguens c. Hossain | 2024 QCTAL 40456 |
TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT |
Bureau dE Montréal |
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No dossier : | 761871 31 20240130 T | No demande : | 4484032 |
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Date : | 12 décembre 2024 |
Devant la juge administrative : | Rachel Tupula |
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Jean Baptiste Feguens Joseph Dieucibon | |
Locataires - Partie demanderesse |
c. |
Anwar Hossain | |
Locateur - Partie défenderesse |
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D É C I S I O N
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- Le 8 octobre 2024, les locataires demandent la rétractation de la décision rendue le 23 août 2024, à la suite d’une audience tenue le 17 juillet 2024, à laquelle l’un des deux locataires, monsieur Feguens, était présent.
- Monsieur Dieucibon explique que sa conjointe était malade la journée de l’audience, mais, quoi qu’il en soit, le motif de la demande de rétractation ne repose pas sur son absence à l’audience.
- Cette décision les condamne à payer une somme de 5 610 $ à titre de loyer dû et résilie leur bail si cette somme n’est pas payée conformément à l’article 1883 du C.c.Q.
- En fait, les locataires disent plutôt vouloir contester la décision, car ils ont payé l’entièreté de la somme, mais après la date de la décision.
- Ils ignoraient qu’ils devaient payer la somme due avant la date de la signature de la décision.
- De plus, les locataires témoignent avoir eu connaissance de la décision le 10 septembre 2024, mais n’avoir fait la demande de rétractation qu’après la réception, le 20 septembre 2024, d’un avis d’exécution de la décision de l’huissier.
- Tel qu’expliqué en audience, les locataires sont hors délai, car la loi prévoit un délai de 10 jours pour déposer une demande de rétractation à partir de la date de la connaissance de la décision.
- Le recours des locataires est fondé sur l’article 89 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement[1] :
« 89. Si une décision a été rendue contre une partie qui a été empêchée de se présenter ou de fournir une preuve, par surprise, fraude ou autre cause jugée suffisante, cette partie peut en demander la rétractation.
Une partie peut également demander la rétractation d’une décision lorsque le Tribunal a omis de statuer sur une partie de la demande ou s’est prononcé au-delà de la demande.
La demande de rétractation doit être faite par écrit dans les dix jours de la connaissance de la décision ou, selon le cas, du moment où cesse l’empêchement.
La demande de rétractation suspend l’exécution de la décision et interrompt le délai d’appel ou de révision jusqu’à ce que les parties aient été avisées de la décision.
Une partie qui fait défaut d’aviser de son changement d’adresse conformément à l’article 60.1 ne peut demander la rétractation d’une décision rendue contre elle en invoquant le fait qu’elle n’a pas reçu l’avis de convocation si cet avis a été transmis à son ancienne adresse. »
- À maintes reprises, les tribunaux ont déterminé que la rétractation est un moyen procédural exceptionnel, car le principe de l’irrévocabilité des jugements est important. Ce principe a été réitéré par la Cour d’appel du Québec :
« Le principe de l’irrévocabilité des jugements est nécessaire à une saine administration de la justice, d’où le sérieux que doivent avoir les motifs de rétractation. La procédure doit contribuer à la protection des droits des deux parties et la remise en question des décisions doit demeurer l’exception et ne pas devenir la règle. »[2]
- En matière de rétractation de jugement, il faut trouver un juste équilibre entre deux principes qui s’affrontent : la stabilité des jugements et la règle fondamentale audi alteram partem qui veut que toute personne ait le droit de se faire entendre devant les tribunaux.
- Dans un premier temps, les locataires sont hors délai, car ils n’ont pas contesté la décision dans les dix jours de la connaissance de la décision.
- Il n’y a pas lieu de les relever de ce défaut en vertu de l’article 59 de la loi, car leur contestation est liée aux démarches d’exécution de l’huissier et non parce qu’ils ont été dans l’impossibilité d’agir ou tout autre motif raisonnable.
« 59. Le Tribunal peut, pour un motif raisonnable et aux conditions appropriées, prolonger un délai ou relever une partie des conséquences de son défaut de le respecter, si l’autre partie n’en subit aucun préjudice grave. »
- La demande de rétractation sera donc rejetée pour ce motif.
- Mais, il y a plus.
- Les locataires contestent l’exécution de la décision rendue par le Tribunal administratif du logement, soit la validité de l’avis d’expulsion délivré par la Cour du Québec à la suite de la décision rendue, disant avoir payé intégralement les sommes auxquelles ils ont été condamnés, mais après la décision rendue le 23 août 2024.
- Or, tel qu’expliqué aux locataires lors de l’audience, même si la demande de rétractation des locataires avait été déposée dans les délais, le présent Tribunal n’a pas compétence en ce qui concerne l’exécution des décisions rendues. Le Tribunal compétent est la Cour du Québec.
- Le recours en rétractation prévu à l’article 89 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement ne vise pas les difficultés ou les problématiques qui surviennent dans le cadre de l’exécution d’une décision rendue par le Tribunal administratif du logement.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
- REJETTE la demande de rétractation;
- MAINTIENT la décision rendue le 23 août 2024.
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| Rachel Tupula |
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Présence(s) : | les locataires le locateur |
Date de l’audience : | 7 novembre 2024 |
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