Décision

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Montagné c. Desjardins assurances générales inc.

2022 QCTAL 10535

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Montréal

 

No dossier :

355680 31 20170913 T

No demande :

3487904

 

 

Date :

06 avril 2022

Devant la juge administrative :

Lucie Béliveau

 

Nicolas Christopher Montagné

 

Locataire - Partie demanderesse

c.

Desjardins Ass. gén. Inc., subrogée dans les droits de Gestion immobilière Matam ltée.

 

Locatrice - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]         Le locataire requiert la rétractation de la décision rendue le 21 juin 2021, suite à une audience tenue le 31 mai 2021, à laquelle il était absent.

APERÇU

[2]         Le locataire soutient qu’il a pris connaissance de cette décision le 5 mars 2022 et il a déposé sa demande auprès du Tribunal administratif du logement le 14 mars 2022, tel qu’en fait foi le dépôt de sa demande.

[3]         Il explique ne pas avoir reçu l’avis d’audition et qu’il a été empêché de se présenter car il n’a tout simplement pas pensé à faire son changement d’adresse auprès du Tribunal administratif du logement.

[4]         Comme moyens sommaires de défense à la demande originaire, le locataire déclare et explique qu’il a signé une entente de résiliation de bail qui le dégageait de toute responsabilité.

[5]         La compagnie d’assurance subrogée dans les droits de la locatrice soutient que le locataire n’était pas présent à l’audience en raison de sa propre turpitude et que la demande devrait être rejetée en vertu de l’article 89 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement puisqu’il a fait défaut de faire son changement d’adresse.

[6]         De plus, l’entente de résiliation de bail signée entre les parties est invalide puisque la compagnie d’assurance était déjà subrogée dans les droits de la locatrice.

QUESTIONS EN LITIGE

-       Le locataire a-t-il établi des motifs justifiant la rétractation et présente-t-il des moyens de défense sommaires à la demande originaire ?


ANALYSE ET DÉCISION

Preuve

[7]         D'entrée de jeu, il est pertinent de rappeler que celui qui veut faire valoir un droit doit faire la preuve des faits au soutien de sa prétention, et ce, de façon prépondérante, la force probante du témoignage et des éléments de preuve étant laissée à l'appréciation du Tribunal[1].

Le principe sur lequel se fonde une demande de rétractation

[8]         Afin de rendre sa décision, le Tribunal doit tenir compte de la jurisprudence. À maintes reprises, les tribunaux ont déterminé que la rétractation est un moyen procédural exceptionnel, car le principe de l'irrévocabilité des jugements est important. Ce principe a été réitéré par la Cour d'appel du Québec 

« Le principe de l'irrévocabilité constitue un élément important de notre système juridique. En effet, une jurisprudence constante affirme que la stabilité des décisions judiciaires est essentielle à une saine administration de la justice. Ce principe se comprend facilement car il est évident que le justiciable, qui est partie à une action, s'attend à ce que le jugement en résultant mette fin au litige de façon définitive, sous réserve, bien sûr, de porter le jugement en appel. ... »[2]

Motifs

[9]         Dans le cas qui nous concerne, la demande de rétractation, pour réussir, doit établir que la partie a été empêchée de se présenter ou de fournir une preuve, par surprise, fraude ou autre cause jugée suffisante[3]. De plus, le locataire doit fournir au Tribunal les moyens sommaires de défense qu’il entend faire valoir à l’encontre du recours[4].

[10]     Pour qu’un motif soit retenu par le Tribunal, il faut que le locataire n'ait pas été négligent dans l'exercice de ses droits. Le Tribunal s’exprime ainsi dans un jugement de la Cour supérieure :

« Par ailleurs, en ce qui a trait à la partie elle-même, il n'y a pas d'ambiguïté. Elle ne doit pas adopter un comportement négligent dans la défense de ses droits, sans quoi le principe de l'irrévocabilité des jugements pourra lui être opposé. Cela n'est que logique et conséquent. Une partie ne peut laisser cheminer une affaire judiciaire qui la concerne directement sans s'en préoccuper. Elle doit être empressée de faire valoir sa prétention et de préserver ses droits. Les règles de procédure ne peuvent être modulées pour tenir compte du laxisme d'une partie. »[5]

[11]     Par ailleurs, une nouvelle disposition de la Loi sur le Tribunal administratif du logement adoptée en août 2020 stipule ce qui suit à l’article 89 alinéa 4 de son article :

« 89. (…).

Une partie qui fait défaut d’aviser de son changement d’adresse conformément à l’article 60.1 ne peut demander la rétractation d’une décision rendue contre elle en invoquant le fait qu’elle n’a pas reçu l’avis de convocation si cet avis a été transmis à son ancienne adresse. »

[12]     Le Tribunal a constaté que le locataire a eu signification de la demande originaire en mains propres et qu’il n’a pas fait son changement d’adresse par la suite, tel que requis.

Moyens sommaires de défense

[13]     Le locataire n’a pas établi un motif valable pour justifier son absence à l’audience tenue le 31 mai 2021 et il ne soumet pas non plus de moyen sommaire de défense sérieux,

[14]     En effet, une clause ajoutée à la main sur l’entente de résiliation de bail, sans être paraphée par les parties, qui dégage le locataire de toute responsabilité semble pour le moins improbable.

[15]     Ainsi la demande de rétractation est refusée pour plusieurs motifs : il n’y a pas de cause suffisante justifiant l’absence du locataire puisqu’il n’a pas fait son changement d’adresse, tel que requis et les moyens sommaires de défense ne sont pas suffisants.


POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[16]  REJETTE la demande en rétractation du locataire qui en assume les frais;

[17]  MAINTIENT la décision rendue le 21 juin 2021 par le juge administratif du Tribunal administratif du logement.

 

 

 

 

 

 

 

 

Lucie Béliveau

 

Présence(s) :

le locataire

la mandataire de la compagnie d’assurance subrogée dans les droits de la locatrice

Date de l’audience : 

30 mars 2022

 

 

 


 


[1]  Articles 2803, 2804 et 2845 du Code civil du Québec, CCQ-1991.

[2]  Lavallée c. Banque Nationale du Canada, C.A., 1998-08-28, SOQUIJ AZ-98011689, J.E. 98-1823, [1998] R.J.Q. 2289.

[3]  Article 89 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement.

[4]  Article 44 du Règlement sur la procédure devant le tribunal administratif du logement.

[5]  Mondex Import Inc. c. Victorian Bottle Inc., C.S., 1999-04-22, SOQUIJ AZ-99026305, B.E. 99BE-640.

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