Habitations communautaires NDG c. Kanyambo

2024 QCTAL 40097

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Montréal

 

No dossier :

820112 31 20240911 G

No demande :

4461668

 

 

Date :

15 novembre 2024

Devant la juge administrative :

Vanessa O’Connell-Chrétien

 

Les Habitations Communautaires NDG

 

Locatrice - Partie demanderesse

c.

Deborah Kanyambo

 

Gedeon Mbarimbanyi

 

Locataires - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

  1.          La locatrice demande au Tribunal de prononcer la résiliation du bail au motif que les locataires n’auraient pas acquitté leur loyer depuis plus de trois semaines et au motif que les retards fréquents dans le paiement du loyer lui causeraient un préjudice sérieux.
  2.          Elle recherche la condamnation pour les arrérages de loyers toujours impayés au jour de l’audience, lesquels s’élèveraient à la somme de 2 974,50 $.
  3.          La locatrice réclame également que le Tribunal accorde l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec[1] aux condamnations à être prononcées, ainsi que les intérêts et les frais liés à la présente demande et prononce l’exécution provisoire de la décision.
  4.          La preuve est à l’effet que les parties sont liées par un bail de logement initial visant la période du 1er mai 2021 au 30 avril 2022. Le bail a été reconduit et le loyer exigible pour la période du 1er mai 2024 au 30 avril 2025 s’élève à 758 $ par mois.
  5.          Les locataires habitent toujours le logement en date de l’audience et les loyers impayés s’élèveraient à la somme de 2 974,50 $. De la preuve faite, force est de constater que les locataires laissent s’accumuler des arrérages de loyer depuis au moins mars 2024. Suivant les règles d’imputation des paiements, les loyers d’août à octobre sont toujours exigibles, de même qu’un solde de 700 $ sur le loyer du mois de juillet 2024.
  6.          Ce faisant, il y aura condamnation pour la somme exigible. Également, le Tribunal prononcera la résiliation du bail pour le motif que des loyers n’ont pas été payés depuis 3 semaines.
  7.          Les locataires s’étant engagés explicitement de manière solidaire aux obligations du bail, chacun d’eux est responsable pour la totalité des sommes dues[2].

  1.          Quant à la demande de résiliation au motif des retards fréquents dans le paiement du loyer entraînant un préjudice sérieux pour la locatrice, il y a également lieu d’y faire droit. La preuve est telle que les locataires ont fait des paiements aux dates suivantes en lieu et place d’un paiement de son loyer exigible le 1er jour de chaque mois :

 

Date

Somme reçue

11 avril 2024

360,50 $

8 mai 2024

379 $

6 juin 2024

379 $

11 juillet 2024

379 $

25 juillet 2024

88 $

7 août 2024

379 $

7 août 2024

379 $

1er septembre 2024

379 $

10 octobre 2024

379 $

 

  1.          Sur le préjudice subi par la locatrice qu’entraînent ces retards fréquents dans le paiement du loyer, la preuve est à l’effet que la locatrice est une entité œuvrant dans le milieu du logement communautaire. La récurrence dans les retards de loyers l’empêche notamment de financer d’autres projets communautaires; les sommes disponibles à la locatrice étant déjà limitées, ces retards limitent ses activités en cours et le développement de celles-ci. Le Tribunal est satisfait de la preuve fournie par la locatrice.
  2.      En ce qui a trait aux frais du dossier qui sont réclamés par la locatrice, il faut savoir que ces frais sont encadrés par la Loi sur le Tribunal administratif du logement[3] et son article 79.1 :

« 79.1. Lors de la décision, le membre peut adjuger sur les frais prévus par règlement. »

  1.      Les frais ne naissent qu’une fois accordés par le Tribunal ayant la compétence de les accorder et c’est ce qui explique que les intérêts ne seront dus qu’à compter de leur prononcé[4].
  2.      À la lumière du règlement applicable, seuls les frais de signification de 26,25 $ engagés pour chacun des deux locataires et les frais de 87 $ engagés pour le dépôt de la demande peuvent être accordés[5].
  3.      En ce qui a trait à l’exécution provisoire, aucun élément ne justifie d’accorder une telle conclusion dans le présent dossier. La locatrice recherche l’exécution provisoire de la présente décision. La loi prévoit que l’exécution d’une décision par le présent Tribunal est acquise à l’expiration des délais d’appels[6].
  4.      C’est que règle générale, notre droit civil est basé sur la conception que l’appel suspend l’exécution de la décision dont il est fait appel[7]. L’encadrement législatif en matière d’appel des décisions du Tribunal administratif du logement ne fait pas exception à ce principe.
  5.      Par sa demande d’exécution provisoire, la locatrice cherche à éviter de devoir attendre l’expiration des délais ordinaires pour pouvoir exécuter sa décision.

  1.      L’article 82.1 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement[8] encadre les demandes d’exécution provisoire :

« Le membre peut, s’il le juge à propos, ordonner l’exécution provisoire, nonobstant la révision ou l’appel, de la totalité ou d’une partie de la décision, s’il s’agit:

 de réparations majeures;

 d’expulsion des lieux, lorsque le bail est expiré, résilié ou annulé;

 d’un cas d’urgence exceptionnelle. »

  1.      L’utilisation des termes « s’il le juge à propos » témoigne d’une volonté du législateur de consacrer une discrétion au décideur dans l’octroi de l’exécution provisoire d’une partie ou de la totalité de sa décision.
  2.      Il en va de même en matière judiciaire lorsque l’exécution provisoire n’est pas octroyée de plein droit[9]. En l’absence d’une preuve d’une situation justifiant d’exercer cette discrétion pour accorder l’exécution provisoire, celle-ci ne sera pas prononcée.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

  1.      RÉSILIE le bail et ORDONNE l’expulsion des locataires et de tous les occupants du logement;
  2.      CONDAMNE solidairement les locataires à payer à la locatrice la somme de 574 $, plus les intérêts au taux légal et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1617 du Code civil du Québec, à compter du 19 septembre 2024, date de signification de la demande;
  3.      CONDAMNE  DEBORAH KANYAMBO à payer à la locatrice les frais de 69,75 $, plus les intérêts au taux légal, à compter de la date de la signature de la présente décision;
  4.      CONDAMNE GEDEON MBARIMBANYI à payer à la locatrice les frais de 69,75 $, plus les intérêts au taux légal, à compter de la date de la signature de la présente décision.

 

 

 

 

 

 

 

 

Vanessa O’Connell-Chrétien

 

Présence(s) :

le mandataire de la locatrice

Date de l’audience : 

31 octobre 2024

 

 

 


 


[1] Code civil du Québec, RLRQ c. CCQ-1991. (« C.c.Q. »)

[2] C.c.Q., art. 1525.

[3] RLRQ c. T-15.01.

[4] Code de procédure civile, RLRQ c. C-25.0, art. 343.

[5] Tarif des frais exigibles par le Tribunal administratif du logement, chapitre T-15.01, r. 6, art. 7.

[6] Loi sur le Tribunal administratif du logement, RLRQ, c. T-15.01, Art 82.

[7] Mouvement laïque québécois c.. English Montreal School Board, 2021 QCCA 1675, par. 2.

[8] Loi sur le Tribunal administratif du logement, RLRQ, c. T-15.01, Art 82.1.

[9] Mouvement laïque québécois c. English Montreal School Board, 2021 QCCA 1675, par. 2. Code de procédure civile, RLRQ c. C-25.01, art. 660-661.

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