1. Les plaintes et les procédures.......................................................................... 3
1.1 La plainte numéro 487............................................................................................... 3
1.2 La plainte numéro 624............................................................................................... 4
1.3 La plainte numéro 640............................................................................................... 5
1.4 La plainte numéro 675............................................................................................... 6
2. La plainte et les décisions afférentes au dossier disciplinaire numéro 640 9
2.1 Les chefs de plainte.................................................................................................. 9
2.2 La décision du Conseil de discipline du 26 février 2010 sur la culpabilité 10
2.3 La décision du Conseil de discipline du 30 mars 2011 sur la sanction...... 11
2.4 Le jugement du Tribunal des professions du 21 septembre 2012.............. 13
2.5 Le jugement de la Cour supérieure du 24 mai 2013 sur la requête en révision judiciaire 15
3. L’analyse............................................................................................................................ 16
3.1 La norme de contrôle............................................................................................. 17
3.2 La responsabilité de la transcription de l’audience devant le Conseil de discipline 17
3.3 Le défaut de l’appelant de produire toute la preuve pertinente au soutien de son appel au Tribunal des professions.............................................................................. 20
3.4 Les manquements invoqués à l’équité procédurale....................................... 21
3.5 Le refus du Tribunal des professions d’autoriser l’appelant à produire une preuve nouvelle en appel............................................................................................ 22
3.6 L’entente du 20 février 2008 dans le dossier disciplinaire numéro 675... 26
3.7 La liberté d’expression........................................................................................... 27
3.8 Les intentions de l’appelant.................................................................................. 28
3.9 La poursuite discriminatoire et malicieuse........................................................ 29
3.10 La sanction.............................................................................................................. 30
3.10.1 La limitation de pratique.............................................................................. 30
3.10.2 La radiation temporaire de deux ans.......................................................... 33
3.10.3 Les amendes.............................................................................................. 36
3.11 La requête en arrêt des procédures.............................................................. 36
[1] Avec l’autorisation de la Cour[1], l’appelant se pourvoit contre un jugement rendu le 24 mai 2013 par la Cour supérieure du district de Trois-Rivières (l’honorable Denis Jacques)[2], qui a rejeté sa requête en révision judiciaire d’un jugement du Tribunal des professions du 21 septembre 2012[3].
[2] Par cette dernière décision du 21 septembre 2012, le Tribunal des professions rejetait l’appel de deux décisions du Conseil de discipline du Collège des médecins du Québec [le Conseil][4]. La décision du 26 février 2010 déclarait l’appelant coupable de plusieurs infractions disciplinaires[5] et celle du 30 mars 2011 lui imposait notamment une radiation de deux ans sur plusieurs chefs à être purgée de façon concurrente, des amendes totalisant 33 000 $ sur d’autres chefs[6] ainsi qu’une limitation de son droit d’exercer ses activités professionnelles.
[3] Pour saisir les enjeux de cet appel, il est nécessaire de brosser un tableau sommaire des plaintes disciplinaires qui ont été portées contre l’appelant et de leur situation actuelle. En effet, comme on le verra, trois des quatre dossiers de plainte sont encore actifs devant les tribunaux.
[4] La première plainte a été portée le 11 juin 1999 dans le dossier disciplinaire numéro 24-99-00487 [ci-après : 487]. Elle comporte dix chefs qui concernent tous des propos que l’appelant aurait tenus sur les ondes d’une station de radio montréalaise.
[5] Le 18 décembre 2001, un Conseil de discipline déclare l’appelant coupable sur cinq des dix chefs de plainte et l’acquitte sur cinq autres[7]. À la suite de la nomination à la magistrature du président du Conseil, un autre Conseil doit se réunir. Cinq des dix chefs sont retirés et l’appelant reconnaît sa culpabilité sur cinq autres. Il est condamné à des amendes totalisant 10 000 $ et à une radiation temporaire de sept jours[8].
[6] Par un jugement du 8 septembre 2003, le Tribunal des professions rejette le pourvoi de l’appelant[9]. Il n’y a pas eu d’autre procédure dans ce dossier numéro 487.
[7] Une deuxième plainte disciplinaire est portée contre l’appelant le 24 octobre 2006 dans le dossier numéro 24-06-00624 [ci-après : 624]. Les cinq chefs d’infraction reprochés à l’appelant concernent des propos offensants à l’égard de minorités tenus lors d’émissions de télévision ainsi que des remarques dénigrantes à l’égard d’une psychologue contenues dans un rapport d’expertise psychiatrique.
[8] Le 9 septembre 2009, un Conseil de discipline prononce un verdict de culpabilité sur chacun des cinq chefs, mais décrète un arrêt conditionnel des procédures sur les chefs 1 à 4[10].
[9] Par décision du 16 octobre 2012, le Conseil de discipline refuse de suivre la recommandation du syndic qui propose une radiation temporaire de trois mois ainsi que 20 000 $ en amendes. Le Conseil prononce plutôt une radiation temporaire de cinq ans sur chacun des cinq chefs de plainte à être purgée de façon concurrente[11].
[10] Après avoir rejeté le 24 mars 2014 une requête de l’appelant pour suspension des procédures[12], le 19 septembre 2014, le Tribunal des professions rejette l’appel sur la culpabilité, mais accueille l’appel sur la sanction. Il impose à l’appelant le paiement de 20 000 $ en amendes ainsi qu’une radiation temporaire de trois mois[13].
[11] L’appelant a demandé la révision judiciaire du jugement du Tribunal des professions du 19 septembre 2014 et, par jugement de la Cour supérieure du 14 novembre 2014[14], il a obtenu un sursis d’exécution de cette décision.
[12] Le 9 juin 2015, le juge St-Pierre de la Cour supérieure accueille la requête en révision judiciaire de l’appelant, annule le jugement du Tribunal des professions du 19 septembre 2014 et retourne le dossier à ce dernier pour qu’il se prononce à nouveau sur l’appel[15].
[13] Le 6 août 2015, un juge de la Cour accorde à l’intimé l’autorisation de faire appel du jugement de la Cour supérieure du 9 juin 2015[16]. Un avis d’appel incident est ensuite produit par l’appelant.
[14] Le 5 décembre 2006, alors que la plainte numéro 624 n’a pas encore été entendue, le syndic du Collège des médecins dépose une troisième plainte sous le numéro 24-06-00640 [ci-après : 640]. Cette plainte est visée par le présent appel. La plainte comporte douze chefs. Les chefs un à cinq reprochent à l’appelant d’avoir prescrit des doses excessives de neuroleptiques, d’avoir fait une évaluation inadéquate de la condition psychiatrique d’un patient et d’avoir prescrit des combinaisons de neuroleptiques. Pour leur part, les chefs six à douze concernent le fait d’avoir tenu des propos indignes d’un médecin sur les ondes radio, d’avoir dénigré un membre d’un autre ordre professionnel et d’avoir fait défaut de maintenir adéquatement le dossier d’un patient, entravant ainsi le travail du syndic.
[15] En même temps qu’il dépose la plainte contre l’appelant, le syndic demande au Conseil de discipline de prononcer la radiation provisoire de l’appelant. Le Conseil de discipline prononce une ordonnance en ce sens le 23 janvier 2007[17]. Cette radiation provisoire est suspendue pendant l’appel par le Tribunal des professions le 4 avril 2007[18] et le sursis de cette dernière décision demandé par le syndic est refusé par la Cour supérieure le 30 avril 2007[19]. Le 18 janvier 2008, le Tribunal des professions accueille l’appel de la décision du Conseil de discipline du 23 janvier 2007, infirme la décision du Conseil et rejette la demande de radiation provisoire[20].
[16] Le 26 février 2010, le Conseil de discipline déclare l’appelant coupable des douze chefs de plainte dans le dossier numéro 640, mais prononce une suspension conditionnelle des procédures en ce qui concerne certaines infractions afférentes aux chefs 1 et 2 et 5 à 12[21].
[17] Le Conseil de discipline prononce la sanction le 30 mars 2011[22]. Il condamne l’appelant à une radiation temporaire de deux ans ainsi qu’à un total de 33 000 $ en amendes. Il délivre de plus une ordonnance limitant le droit de l’appelant de prescrire des neuroleptiques dépassant les doses maximales recommandées par les fabricants ainsi que le droit de prescrire de façon concomitante plusieurs neuroleptiques à la fois, et ce, « […] tant et aussi longtemps que le Collège des médecins ne recommandera pas le recours à la prescription de mégadoses de neuroleptiques […] aux adultes dans le traitement de la schizophrénie ». Le Conseil ordonne enfin l’exécution provisoire de sa décision malgré l’appel.
[18] L’appelant fait appel au Tribunal des professions tant de la décision du Conseil de discipline sur la culpabilité que de celle sur la sanction. Le 18 mai 2011, un juge de ce Tribunal ordonne le sursis de l’exécution provisoire en ce qui concerne la radiation temporaire de deux ans[23].
[19] Le 21 septembre 2012, le Tribunal des professions rejette l’appel tant de la décision du Conseil de discipline du 26 février 2010 sur la culpabilité que de celle du 30 mars 2011 sur la sanction[24]. L’appelant demande la révision judiciaire de ce jugement et, le 16 novembre 2012, il obtient d’un juge de la Cour supérieure la suspension de l’exécution de sa radiation temporaire de deux ans jusqu’à jugement sur sa requête en révision judiciaire. Le juge refuse toutefois de suspendre l’ordonnance d’interdiction de prescription de neuroleptiques à fortes doses et d’interdiction de prescrire de façon concomitante plusieurs neuroleptiques[25].
[20] Le 24 mai 2013, la Cour supérieure rejette la requête en révision judiciaire de l’appelant[26]. C’est ce jugement qui fait l’objet du présent appel puisque, le 5 août 2013, une formation de la Cour a autorisé l’appelant à faire appel hors délai[27]. Par le même arrêt, la Cour a suspendu l’exécution des sanctions de radiation temporaire et de paiement d’amendes imposées à l’appelant par la décision du Conseil de discipline du 30 mars 2011[28], et ce, jusqu’à décision sur l’appel. Elle a cependant reconduit la limitation de prescription de neuroleptiques.
[21] Le 7 février 2008, le syndic porte une quatrième plainte disciplinaire contre l’appelant dans le dossier numéro 24-08-00675 [ci-après : 675]. À cette date, les plaintes numéros 624 et 640 n’ont pas encore été entendues par le Conseil de discipline, mais, moins d’un mois plus tôt, le 18 janvier 2008, le Tribunal des professions a infirmé l’ordonnance de radiation provisoire prononcée contre l’appelant par le Conseil de discipline le 23 janvier 2007 dans le dossier numéro 640[29].
[22] La plainte numéro 675 comporte 14 chefs. Est notamment reproché à l’appelant d’avoir posé des diagnostics intempestifs de troubles psychotiques, schizophrénie infantile et psychose infantile chez des enfants et de leur avoir prescrit des neuroleptiques à fortes doses ou de façon concomitante (chefs 1 à 10), d’avoir posé des gestes similaires à l’égard de patients adultes (chefs 11,12 et 14) et d’avoir réclamé des honoraires professionnels pour des services dont le coût devait être payé par un tiers (chefs 13 et 14).
[23]
Le dépôt de la plainte numéro 675 s’accompagne d’une demande du syndic
pour obtenir une limitation provisoire immédiate de l’exercice de la
psychiatrie par l’appelant « […] à l’égard de toutes activités
professionnelles reliées à l’exercice de la psychiatrie chez les enfants et les
adolescents ». Une demande similaire de limitation provisoire
immédiate est formulée par le syndic « […] à l’égard de toutes activités professionnelles
reliées aux prescriptions, chez ses patients adultes, de neuroleptiques à des
doses supérieures à celles recommandées par les fabricants, notamment en
l’obligeant d’obtenir préalablement une consultation et l’aval d’un autre
psychiatre pratiquant dans un établissement de santé ».
[25] Il convient de citer la teneur de cette entente :
ENTENTE
Chez tous les patients adultes qui, selon lui, devraient être soumis à des dosages de neuroleptiques supérieurs aux doses recommandées par les fabricants, il devra obtenir une consultation dans les meilleurs délais auprès d’un collègue psychiatre pratiquant dans un établissement de santé préalablement identifié par le Collège des médecins.
En cas de différend d’opinion sur le traitement du patient, le consultant aura tout le loisir de prendre en charge le patient.
Il devra soumettre au Collège des médecins du Québec, à demande, un rapport sur chacun des dossiers des patients qui auront été soumis à de tels dosages dits de mégadoses de neuroleptiques.
[26] Au terme de son audience et après délibéré, le 17 avril 2008, le Conseil de discipline accepte l’entente intervenue entre les parties le 20 février précédent et ordonne à l’appelant de s’y conformer. Faisant droit à la requête du syndic, le Conseil « […] ordonne la limitation provisoire à l’intimé d’exercer la psychiatrie auprès des enfants et des adolescents jusqu’à la signification à ce dernier de la décision du Conseil rejetant la plainte ou imposant une sanction »[30].
[27] Le 15 juillet 2008, un juge du Tribunal des professions rejette la requête de l’appelant visant à obtenir la suspension de l’ordonnance de limitation provisoire délivrée le 17 avril précédent par le Conseil de discipline[31].
[28] Le 10 juillet 2009, le Tribunal des professions rejette l’appel déposé contre l’ordonnance du Conseil de discipline limitant provisoirement le droit de l’appelant d’exercer la psychiatrie auprès des enfants et des adolescents[32].
[29] Le 5 novembre 2009, le Conseil de discipline déclare l’appelant coupable au regard de 13 des 14 chefs de plainte et l’acquitte sur le chef 2[33].
[30] Alors que le Conseil de discipline a entendu la preuve sur la sanction et l’a mise en délibéré, l’appelant tente sans succès d’obtenir une réouverture des débats pour produire une preuve nouvelle indispensable devant le Conseil[34].
[31] Le 3 février 2012, le Conseil de discipline prononce la sanction relative à la plainte numéro 675[35]. Il décrète plusieurs radiations temporaires d’un an à être purgées de façon concurrente ainsi que des amendes totalisant 6 000 $. Il prolonge de façon permanente la limitation d’exercice de la psychiatrie à l’égard des enfants et des adolescents. Il impose de plus à l’appelant une limitation permanente pour la prescription de neuroleptiques aux adultes qu’il formule en ces termes :
- IMPOSE à l’intimé une limitation permanente pour les prescriptions de neuroleptiques typiques et atypiques aux adultes, soit qu’il soit interdit à l’intimé de dépasser les doses maximales recommandées par les fabricants, telles qu’approuvées par Santé Canada et répertoriées dans le compendium des produits et spécialités pharmaceutiques (CPS) et interdit de prescrire de façon concomitante plusieurs neuroleptiques à la fois chez le même patient;
[32] Le Conseil ordonne de plus que ces deux limitations permanentes d’exercice et de prescription soient exécutoires malgré l’appel et recommande au Collège des médecins d’imposer à l’appelant un stage de perfectionnement sur l’élaboration de diagnostics psychiatriques avec un volet en psychopharmacologie.
[33] Le 29 avril 2013, le Tribunal des professions rejette, avec une dissidence, l’appel formé par l’appelant tant contre la décision du Conseil de discipline du 5 novembre 2009 sur le verdict que celle du 3 février 2012 portant sur la sanction[36].
[34] Tout comme il l’a fait dans le dossier de la plainte numéro 640, l’appelant demande la révision judiciaire du jugement du Tribunal des professions du 29 avril 2013 dans le dossier de la plainte numéro 675. Le 19 juin 2013, la Cour supérieure refuse de lui accorder un sursis d’exécution de la radiation temporaire de douze mois prononcée contre lui[37]. Une requête de l’appelant pour être autorisé à faire appel hors délai de ce jugement du 19 juin 2013 est rejetée par notre Cour le 9 septembre 2013[38].
[35] Le 5 février 2014, une seconde requête de l’appelant demandant le sursis d’exécution de la sanction de radiation temporaire d’un an prononcée contre lui est rejetée par la Cour supérieure[39].
[36] Le 15 avril 2014, la Cour supérieure rejette la requête en révision judiciaire de l’appelant contre le jugement du Tribunal des professions du 29 avril 2013[40].
[37] Le 24 juillet 2014, la juge Bélanger de la Cour autorise l’appelant à se pourvoir contre le jugement de la Cour supérieure du 15 avril 2014 rejetant sa requête en révision judiciaire[41]. Le 24 novembre 2014, l’appel est déclaré déserté, mais il est remis en état par un arrêt du 9 février 2015[42].
[38] Étant donné que l’appelant n’a pas réussi à obtenir un sursis d’exécution de la sanction prononcée par le Conseil de discipline le 3 février 2012[43], et confirmée par le Tribunal des professions le 29 avril 2013[44], il a maintenant purgé en entier les radiations temporaires concurrentes d’un an qui lui ont alors été imposées dans le dossier de la plainte numéro 675[45].
[39] La plainte dans le dossier numéro 640 est portée contre l’appelant le 5 décembre 2006 par le syndic adjoint du Collège des médecins. Elle contient 12 chefs d’infraction.
[40] Les chefs 1 à 5 reprochent à l’appelant d’avoir rédigé des ordonnances de doses excessives de neuroleptiques, d’avoir procédé à une évaluation inadéquate de la condition psychiatrique d’un patient et d’avoir combiné de fortes doses d’antipsychotiques. Les chefs 6 à 9 ainsi que les chefs 11 et 12 reprochent à l’appelant d’avoir tenu des propos inappropriés sur les ondes radiophoniques. Le chef 10 lui impute le défaut de conservation de certains documents et son manque de collaboration avec le bureau du syndic.
[41] À l’audience sur le fond[46] devant le Conseil de discipline, l’intimé fait entendre quatre médecins experts. L’appelant produit trois témoins ainsi qu’un témoin expert, le docteur Morissette, dont l’expertise est préparée et produite à la demande de l’intimé qui a décidé de ne pas le faire entendre. C’est finalement l’appelant qui le fait témoigner. Chaque partie produit également une preuve documentaire[47]. L’audience dure neuf jours.
[42] En défense, l’appelant demande au Conseil de ne pas accorder de force probante aux expertises de l’intimé en ce qui concerne les chefs 1 à 5. Il allègue la partialité des experts et le fait qu’ils n’ont jamais rencontré les patients mentionnés dans les plaintes. Les griefs sont rejetés par le Conseil[48].
[43] Le Conseil retient que les experts ont reconnu l’existence du recours, dans certains cas, à des doses de médicaments supérieures au dosage maximum prescrit. La prescription de mégadoses dans le traitement de la schizophrénie réfractaire n’est utilisé que de façon exceptionnelle et le moyen actuellement recommandé est plutôt la Clozapine. Le Conseil rejette la prétention de l’appelant voulant qu’il existe deux écoles de pensée dans le traitement de cette maladie, la seconde étant l’utilisation d’antipsychotiques à haut dosage[49].
[44] Le Conseil déclare l’appelant coupable des chefs 1 à 5, lui reprochant la prescription, sans justification, d’antipsychotiques à des dosages plus élevés que les doses maximales recommandées par les autorités médicales, le défaut de voir à ce que soit élaboré un diagnostic avec la plus grande attention et la prescription de combinaisons d’antipsychotiques à des doses manifestement déraisonnables[50]. Cette conduite contrevient aux articles 44, 46, 47, 50, 55 du Code de déontologie des médecins[51].
[45]
Le Conseil détermine que l’appelant a contrevenu à l’article 59.2 du Code
des professions[52]
et aux articles
[46] Le Conseil conclut également à la culpabilité quant au chef 10 de la plainte, qui reproche à l’appelant d’avoir omis de conserver la possession du dossier médical d’un patient en contravention à l’article 4 du Règlement sur la tenue des dossiers, des cabinets ou bureaux de médecins ainsi que des autres effets, ainsi que d’avoir omis de s’enquérir auprès du patient de la possibilité de récupérer son dossier médical et de ne pas avoir collaboré avec le syndic pour lui permettre d’avoir accès à ce dossier, contrevenant ainsi à l’article 114 du Code des professions[54].
[47] Le chef 11 reproche à l’appelant d’avoir véhiculé sur les ondes d’une station de radio le message que les jeunes femmes atteintes de « mongolisme » n’ont pas la même valeur qu’une « belle jeune femme universitaire ». Le Conseil le déclare coupable d’avoir posé un geste de nature à affecter la santé mentale des personnes atteintes de trisomie 21 et à amener une partie de la population à considérer ces personnes comme de moindre valeur, ce qui est contraire à l’article 3 du Code de déontologie des médecins[55].
[48] Le Conseil conclut en outre que l’appelant a commis l’infraction reprochée au chef 12 en dénigrant sur les ondes radiophoniques une autre professionnelle, une psychologue, ce qui constitue une faute déontologique selon l’article 110 du Code de déontologie des médecins[56]. En finale, l’appelant est donc reconnu coupable par le Conseil de discipline des 12 chefs de la plainte disciplinaire portée contre lui.
[49] Le Conseil de discipline se réunit à nouveau pour déterminer la sanction applicable. L’audience sur la sanction s’étend sur quatre jours en octobre 2010. L’affaire est mise en délibéré le 18 octobre 2010, mais le Conseil doit siéger encore le 9 février 2011 pour procéder à entendre une requête en réouverture de débats et preuve nouvelle de l’appelant. Cette demande est rejetée et le Conseil de discipline rend sa décision le 30 mars 2011[57].
[50] Le Conseil retient, à titre de facteur atténuant, la grande disponibilité de l’appelant auprès de ses patients, telle que rapportée par le témoignage du propriétaire d’une résidence pour personnes souffrant de schizophrénie à Louiseville. Il en est de même de la déclaration de l’appelant selon laquelle il aime sa profession et veut continuer à l’exercer. Le Conseil précise toutefois qu’il s’agit des deux seuls éléments en sa faveur[58].
[51] Au regard des chefs 6 à 9 et 11, qui concernent les propos tenus par l’appelant sur les ondes radiophoniques, le Conseil retient que ce dernier minimise ses écarts de langage, que les propos tenus lui ont permis de percevoir des revenus très intéressants, qu’il a un antécédent disciplinaire en semblable matière et qu’il n’a manifesté aucun remords ni repentir[59].
[52] Le Conseil condamne donc l’appelant à une amende de 5 000 $ pour les chefs 6 à 9 et 11. Il impose la même sanction quant au chef 12 concernant les propos dénigrants tenus par ce dernier à l’endroit d’un membre d’un autre ordre professionnel[60].
[53] Quant au chef 10 concernant le fait de ne pas avoir constitué et conservé le dossier médical d’un patient et d’avoir entravé le travail du syndic en refusant de collaborer avec lui, le Conseil souligne l’absence totale de respect et de considération de l’appelant à l’égard du syndic adjoint au Collège des médecins du Québec ainsi que le risque très élevé de récidive. Il le condamne au paiement d’une amende de 3 000 $[61]. Le Conseil se dit conscient que le montant total des amendes, soit 33 000 $, est élevé, mais le considère justifié en raison d’une condamnation antérieure pour des infractions de semblable nature[62], pour lesquelles il s’était vu imposer des amendes totalisant 10 000 $ et une période de radiation de sept jours[63].
[54] Relativement aux chefs 1 à 5, le Conseil souligne la gravité des infractions, qui se situent au cœur de la profession des médecins et de leur relation avec les patients. Il constate qu’avant le dépôt de la plainte, plusieurs mises en garde avaient été faites à l’appelant au sujet de ses prescriptions de mégadoses. Il retient à titre de facteur aggravant le fait qu’en plus d’administrer des mégadoses, l’appelant fait l’usage combiné de plus d’un antipsychotique à doses excessives à un même patient, et qu’il continue ces pratiques même après le prononcé de la décision du Conseil sur la culpabilité[64].
[55] Le Conseil remarque que l’appelant n’éprouve aucun repentir, ne remet pas en question ses façons de procéder et présente un risque probable de récidive. Il conclut par conséquent qu’une radiation de deux ans satisfait à la fois la nécessité d’assurer la protection du public et le droit de l’appelant de pouvoir à nouveau gagner sa vie en exerçant la profession qu’il a choisie[65].
[56] Considérant les circonstances et l’attitude de l’appelant, le Conseil prononce une ordonnance lui interdisant de dépasser les doses maximales recommandées par les fabricants, telles qu’approuvées par Santé Canada et répertoriées dans le CPS, dans ses prescriptions de neuroleptiques typiques et atypiques et lui interdisant de prescrire de façon concomitante plusieurs neuroleptiques à la fois chez un même patient. Cette limitation doit demeurer en vigueur tant que le Collège des médecins ne recommandera pas le recours à l’administration de mégadoses de neuroleptiques typiques et atypiques[66].
[57] Le Conseil de discipline ordonne l’exécution provisoire de sa décision malgré l’appel[67].
[58] Dans son jugement du 21 septembre 2012[68], le Tribunal des professions relate que, devant lui, l’appelant a soumis deux requêtes pour preuve nouvelle. La première a été présentée lors de l’audience du 19 mars 2012 et a été rejetée séance tenante avec motifs à suivre et la seconde, alors que l’affaire était en délibéré, le 14 juin 2012. Cette seconde requête a été mise en délibéré[69].
[59] Selon le Tribunal, la première requête a été rejetée en raison de son absence de pertinence. La preuve nouvelle que l’appelant voulait alors produire était constituée de 5 lettres postérieures au 4 juillet 2011, après la décision du Conseil sur la sanction, ainsi que d’un cahier de 62 onglets concernant des patients de l’appelant autres que ceux mentionnés aux chefs de plainte 1 à 5[70].
[60] Pour des motifs identiques, le Tribunal rejette la seconde requête pour preuve nouvelle du 14 juin 2012 qu’il avait mise en délibéré. Cette fois, il s’agissait d’un rapport d’évaluation psychiatrique portant la date du 5 décembre 2011 et concernant un seul patient de l’appelant[71].
[61] Après avoir résumé les prétentions de l’appelant, le Tribunal souligne que ce dernier n’a produit aucun élément de preuve au soutien des reproches qu’il adresse au Conseil de discipline[72]. Le Tribunal précise que les questions en litige, tant sur l’appel de la décision sur la culpabilité que sur l’appel de la sanction, sont des questions mixtes de fait et droit. Si le droit a été correctement déterminé, le Tribunal des professions siégeant en appel n’interviendra qu’en présence d’une erreur manifeste et dominante sur les questions de fait et les questions de fait et de droit[73].
[62] En débutant l’étude de l’appel sur la culpabilité, le Tribunal des professions rappelle qu’il ne dispose d’aucune transcription du témoignage des experts devant le Conseil de discipline pour évaluer l’argument de l’appelant qui soulève la partialité de ces experts[74]. Le Tribunal signale qu’il ne dispose pas davantage de la preuve nécessaire afin d’intervenir sur les chefs de plainte 1 à 5 puisque l’appelant n’a pas non plus produit les rapports de ces experts. Il n’a produit qu’une quinzaine de pièces émanant pour la plupart de tiers non reconnus comme experts par le Conseil de discipline ou d’entreprises pharmaceutiques et portant sur l’utilisation de neuroleptiques[75].
[63] Au sujet des chefs 6 à 9, 11 et 12, le Tribunal constate que, ne disposant pas de la transcription ou des enregistrements reproduisant les propos tenus par l’appelant et dont a pu bénéficier le Conseil, il peut difficilement déterminer si le Conseil a commis une erreur manifeste et dominante en déclarant l’appelant coupable d’avoir tenu des propos indignes et dérogatoires[76].
[64] Le Tribunal reproche au Conseil d’avoir appliqué la règle prohibant les condamnations multiples[77] sans avoir au préalable déclaré l’appelant coupable au regard des infractions à l’égard desquelles le Conseil a ordonné une suspension conditionnelle des procédures. Toutefois, comme le Conseil de discipline s’est prononcé sur les infractions les plus graves et que le Tribunal ne peut intervenir en l’absence d’erreur manifeste et dominante, que ce soit sur la culpabilité ou à l’égard de la sanction, le Tribunal des professions, tout en soulignant cette erreur de droit, considère qu’il serait fastidieux de retourner le dossier devant le Conseil[78].
[65] Quant au chef 10 de la plainte, sous lequel l’appelant a été trouvé coupable d’avoir enfreint le Règlement sur la tenue des dossiers, des cabinets ou bureaux des médecins ainsi que des autres effets[79], le Tribunal estime que la décision du Conseil est motivée, prend appui sur la preuve présentée et n’est entachée d’aucune erreur justifiant une intervention en appel[80].
[66] Examinant ensuite l’appel sur la sanction prononcée par le Conseil de discipline le 30 mars 2011, le Tribunal des professions est d’avis que la décision du Conseil est suffisamment motivée, judicieuse et exempte d’une erreur manifeste et dominante[81]. Même s’il admet que les sanctions sont à première vue sévères, le Tribunal estime cependant qu’elles ne sont pas déraisonnables[82].
[67] En conséquence, le Tribunal des professions rejette les deux requêtes de l’appelant en réouverture des débats aux fins de production d’une preuve nouvelle et rejette l’appel des décisions du Conseil de discipline tant sur la culpabilité que sur la sanction.
[68] Après un rappel des 12 chefs de plainte et un résumé des décisions du Conseil de discipline sur la culpabilité et la sanction ainsi que du jugement du Tribunal des professions en appel[83], le juge de la Cour supérieure commence l’analyse du dossier par la décision du Tribunal refusant la réouverture des débats et la production de la preuve nouvelle. Il rappelle que le Tribunal a refusé d’admettre comme preuve nouvelle le cahier contenant 62 rapports psychiatriques relatifs à des patients autres que ceux mentionnés aux chefs de plainte 1 à 5 au motif d’absence de pertinence[84].
[69] En appliquant le critère de la décision raisonnable, le juge de la Cour supérieure considère raisonnable et justifié en fait et en droit le refus du Tribunal des professions d’admettre la preuve nouvelle, d’autant que la preuve déposée devant le Tribunal était incomplète[85].
[70] Le juge se penche ensuite sur la question de savoir si le Tribunal des professions a erré en droit quant aux chefs 6 à 12 de la plainte disciplinaire, en refusant de reconnaître le droit à la liberté d’expression de l’appelant. Le juge conclut que les propos tenus par l’appelant sont, à leur face même, inacceptables et dérogatoires en vertu des articles 59.2 et 152 du Code des professions[86].
[71] Il ajoute que l’omission de déposer les cassettes audio ou la transcription des propos tenus établissant le contexte dans lequel les paroles ont été prononcées empêche, en l’absence d’une erreur de droit, de conclure au caractère déraisonnable du verdict du Conseil de discipline[87].
[72] Le juge estime que ni la norme de la décision raisonnable ni celle de la décision correcte ne justifient d’intervenir à l’encontre du verdict, le Tribunal des professions ayant à bon droit décidé que l’appelant a tenu des propos inacceptables alors qu’il se présentait comme médecin[88].
[73] Le juge de première instance examine en dernier lieu les sanctions prononcées par le Conseil de discipline. Soulignant que le Tribunal des professions jouit d’un large pouvoir d’intervention en cette matière, il précise que l’appelant devait tout de même démontrer en quoi la décision sur sanction est déraisonnable en produisant notamment la transcription des témoignages et des expertises produites, ce qu’il a omis de faire[89].
[74] La Cour indique que son pouvoir d’intervention sur l’appréciation des faits par un tribunal soumis à son pouvoir de surveillance et de contrôle est fort limité, surtout lorsque le demandeur ne dépose pas la preuve pertinente sur laquelle le tribunal inférieur s’est prononcé. Il mentionne que l’appelant n’a fourni aucune justification pour que la Cour exerce son pouvoir de révision[90].
[75] Le juge ajoute que l’appelant a clairement admis qu’en reprenant son droit de pratique, il continuerait à agir de la même façon, et ce, malgré les directives du Collège des médecins. Par conséquent, il estime que l’ordonnance rendue par le Conseil de discipline est nécessaire pour rassurer le public sur le fait que l’appelant se soumettra aux lignes directrices de son ordre professionnel[91].
[76] Le juge de la Cour supérieure refuse donc d’intervenir et rejette la requête en révision judiciaire[92].
[77] Dans son mémoire, l’appelant soulève pas moins d’une dizaine de motifs d’appel dont certains pour la toute première fois. Comme on le verra, il en a d’ailleurs rajouté à l’audience. De plus, il a produit une requête pour preuve nouvelle en appel qui a été débattue en début d’audience. Sur arrêt de la Cour rendu séance tenante, cette requête n’a été accueillie que pour partie et seul un échange de lettres d’avril 2014 entre l’appelant et le secrétaire adjoint du Collège des médecins a été admis comme preuve nouvelle[93]. Nous y reviendrons. Il y a lieu de regrouper les moyens invoqués par l’appelant au soutien de son appel.
[78] Selon l’appelant, le juge de la Cour supérieure a erré en appliquant la norme d’intervention de la décision raisonnable. Selon lui, l’appel au Tribunal des professions portait sur l’équité procédurale et les règles de justice naturelle, de telle sorte que c’est la norme de la décision correcte qui doit s’appliquer. Au soutien de ce moyen, il invoque l’arrêt Parizeau c. Barreau du Québec[94].
[79] Cet argument est sans valeur dans la mesure où le débat devant le Tribunal des professions n’a porté que sur l’appréciation de la preuve par le Conseil de discipline et non sur des questions d’équité procédurale[95]. C’est ce qui appert de la lecture du jugement du Tribunal du 21 septembre 2012, puisque l’appelant n’a pas produit la transcription des débats devant le Conseil de discipline ni devant le Tribunal.
[80] Comme déjà indiqué, tant le Tribunal des professions que la Cour supérieure ont noté la difficulté à laquelle faisait face l’appelant dans son appel au Tribunal des professions, notamment en ce qui concernait les motifs d’appel s’attaquant à l’évaluation de la preuve par le Conseil de discipline, du fait qu’il n’avait pas produit la transcription des débats devant le Conseil de discipline.
[81] À l’audience d’appel, l’appelant a soumis un nouvel argument sur cette question qu’il n’avait pas fait valoir ni devant le Tribunal des professions ni devant la Cour supérieure. Selon l’appelant, on ne peut lui faire le reproche de ne pas avoir fait transcrire l’audience devant le Conseil de discipline puisque cette responsabilité n’était pas la sienne mais plutôt celle de la poursuite ou du Conseil de discipline.
[82] L’argument se fonde sur le cinquième alinéa de l’ancien article 164 du C. Pr. avant qu’il ne soit modifié par l’article 118(2) de la Loi modifiant le Code des professions et d’autres dispositions législatives[96]. L’article 164 est celui qui accorde le droit d’appel au Tribunal des professions des décisions d’un conseil de discipline et prévoit la procédure pour exercer le droit d’appel. Selon le quatrième alinéa, une fois l’appel formé, le secrétaire du conseil de discipline transmet l’original et trois exemplaires du dossier au greffier de la Cour du Québec et un exemplaire à chacune des parties.
[83] Voici quelle était la facture du cinquième alinéa avant qu’il ne soit remplacé par la Loi modificatrice de 2008 :
Le dossier comprend la plainte, les procédures subséquentes, les pièces produites, la transcription de l’audience si elle a été enregistrée, le procès-verbal de l’instruction, la décision du comité et la requête.
[soulignement ajouté]
[84]
L’article
Le dossier comprend la plainte, les procédures subséquentes, le procès-verbal de l’instruction, la décision du conseil et la requête. Il comprend aussi les pièces produites et la transcription de l’audience, si elle a été enregistrée, lorsque le plaignant en première instance est une personne qui a porté plainte en vertu du deuxième alinéa de l’article 128.
[soulignement ajouté]
[85] L’article 128 C. Pr. vise le cas où la plainte est portée par toute personne autre que le syndic. Cette disposition ne s’appliquant pas en l’espèce, l’effet de la modification est de rendre la personne qui exerce le droit d’appel responsable de fournir la transcription de l’audience devant le conseil de discipline.
[86] La Loi modificatrice de 2008 n’entrait en vigueur qu’aux dates fixées par le gouvernement[97]. D’abord prévue pour le 31 janvier 2009[98], l’entrée en vigueur de l’article 118(2) a été reportée[99] et a finalement eu lieu le 1er avril 2010[100].
[87] L’appelant fait valoir que puisque la plainte dans le dossier disciplinaire 640 a été portée le 5 décembre 2006, soit bien avant l’entrée en vigueur de la Loi modificatrice de 2008, il jouit de droits acquis quant à l’obligation de produire la transcription de la preuve, de telle sorte que ce n’était pas sa responsabilité de faire transcrire l’audience devant le Conseil de discipline. On ne peut donc lui faire reproche de ne pas avoir obtenu la transcription des débats devant le Conseil de discipline.
[88]
L’intimé répond que la règle modifiée par l’article
[89] L’intimé n’a pas tort, mais il faut noter que la règle de l’application immédiate des lois de procédure n’est pas absolue; il s’agit seulement d’un guide qui a pour but d’aider à découvrir la véritable intention du législateur. Il s’agit au mieux d’une présomption qui doit céder le pas à l’intention contraire exprimée par le législateur[102]. Il faut alors considérer l’effet de la nouvelle disposition en tenant compte de l’ensemble des circonstances[103]. En l’espèce, même si la disposition porte sur les modalités de l’exercice du droit d’appel, elle a des conséquences onéreuses pour l’appelant. Il est des cas où un changement dans la procédure peut compromettre l’exercice d’un droit[104].
[90] Il est toutefois possible de trancher ce moyen d’appel par une simple application des critères retenus par la Cour suprême pour déterminer les conditions de reconnaissance des droits acquis. Dans son arrêt Dikranian c. Québec (Procureur général)[105], la Cour suprême a établi que pour se voir reconnaître des droits acquis à l’encontre d’une modification législative, un justiciable doit démontrer qu’il satisfait à deux critères : sa situation juridique est individualisée et concrète, et non générale et abstraite, et, de plus, sa situation juridique était constituée au moment de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi[106].
[91]
En l’espèce, même si la plainte contre l’appelant a été portée en 2006,
il ne peut justifier de droits acquis à un régime d’appel qui lui évite de
supporter les coûts de transcription de l’audience devant le Conseil de
discipline qu’à compter du moment où il a entrepris l’appel devant le Tribunal
des professions. Sa situation juridique vis-à-vis du nouveau régime d’appel
prévu à l’article
[92]
La nouvelle version du cinquième alinéa de l’article 164 du C. Pr.
est entrée en vigueur le 1er avril 2010. Le dossier n’indique pas à
quel moment l’appelant a formulé sa requête en appel devant le Tribunal des
professions, mais cette date se situe au plus tôt entre le 30 mars 2011, date
de la décision du Conseil de discipline sur la sanction, et le 18 mai 2011,
date à laquelle un juge du Tribunal des professions a ordonné la suspension de
l’exécution provisoire relativement à la radiation de deux années prononcée par
le Conseil de discipline. Selon les prescriptions de l’article 164 du C.
Pr., le délai d’appel est de trente jours à compter de la date de la
signification de la décision sur la sanction. Par conséquent, l’appel au
Tribunal des professions ne peut être antérieur au mois d’avril 2011, soit au
moins un an après l’entrée en vigueur de l’article
[93] L’appelant s’attaque aux déterminations du Tribunal des professions et du juge de la Cour supérieure qui ont exigé de lui, au soutien de son appel, qu’il produise la preuve administrée devant le Conseil de discipline.
[94] Dans son appel au Tribunal des professions, l’appelant n’a pas produit la transcription des notes sténographiques des témoignages rendus lors des audiences du Conseil de discipline. Il n’a pas produit non plus les rapports des médecins qui avaient été reconnus comme experts par le Conseil[108] ni les rapports médicaux et les autres pièces pertinentes relatives aux patients visés par la plainte ni même la transcription des propos qu’il a tenus sur les ondes radiophoniques et qui ont fait l’objet des chefs de plainte 6 à 9 et 11 et 12.
[95] Dans son mémoire, l’appelant invoque l’article 167 du C. Pr. et les dispositions du Règlement du Tribunal des professions[109] pour en conclure que doivent être produits dans le mémoire « […] les seules pièces et les seuls extraits de la preuve nécessaires à la détermination des questions en litige conformément aux règles du Tribunal des professions[110] ».
[96] Il soutient qu’il n’avait pas l’obligation de produire les éléments omis parce que son appel devant le Tribunal et son recours en révision judiciaire ne visaient que « […] l’équité du processus décisionnel administratif, et non le caractère raisonnable des inférences de fond dans le contenu de la preuve […] »[111].
[97] Cette affirmation n’est pas exacte et ne correspond ni de près ni de loin à la réalité des motifs invoqués par l’appelant. Il suffit de voir les questions en litige identifiées tant devant le Tribunal des professions[112] que devant la Cour supérieure[113] pour constater que l’appelant s’est bel et bien attaqué aux inférences tirées de la preuve par le Conseil de discipline d’abord et le Tribunal des professions ensuite.
[98] Compte tenu des motifs d’appel invoqués par l’appelant devant le Tribunal des professions, il lui appartenait de produire tous les éléments de preuve requis, y compris la transcription des témoignages entendus. Ne l’ayant pas fait, il ne peut faire reproche au Tribunal d’avoir invoqué l’arrêt de notre Cour dans Pateras c. M.B.[114] puisqu’en l’absence de toute la preuve pertinente, le Tribunal n’était pas en mesure de vérifier si le Conseil de discipline avait commis une erreur et donc d’intervenir. Cette obligation de produire la preuve au soutien de l’appel s’applique même lorsque le justiciable n’est pas représenté par avocat[115]. De plus, la règle n’en reçoit pas moins application parce que l’appelant se déclare financièrement incapable de faire transcrire les treize jours d’audience devant le Conseil de discipline[116]. Ce moyen d’appel ne peut être retenu.
[99] Dans son mémoire, l’appelant soulève ce qu’il appelle des « manquements » à l’obligation d’équité procédurale qui s’impose aux tribunaux administratifs. Il souligne notamment la non-reconnaissance par les instances de l’obligation du Collège des médecins d’établir en temps opportun un protocole encadrant la prescription des mégadoses de neuroleptiques, l’absence de compétence du syndic pour soutenir que la prescription de mégadoses est contraire aux données actuelles de la science médicale, le fait que le syndic ne se soit pas inquiété que d’autres psychiatres aient continué à prescrire de telles doses chez les patients de l’appelant qu’ils ont eu à évaluer. Il soutient également que le prononcé d’une ordonnance de radiation par le Conseil de discipline cumulée avec une limitation de prescription de mégadoses constitue un autre manquement à l’équité procédurale.
[100] Ce moyen est sans valeur. Les soi-disant manquements à l’équité procédurale invoqués par l’appelant ne concernent en réalité que l’appréciation de la preuve. Comme le rappelle Me Denis Lemieux, le droit d’être entendu « […] ne se rapporte qu’au processus décisionnel et non au fond de la décision qui sera éventuellement rendue »[117].
[101] Rien n’indique que le Conseil de discipline aurait manqué à son obligation d’agir de façon équitable. D’une part, l’appelant ne formule aucun reproche au Conseil et, même s’il le faisait, l’absence de transcription de l’audience rendrait difficile la démonstration d’un manquement de cette nature. D’autre part, l’audience devant le Conseil a duré treize jours au cours desquels l’appelant a témoigné, a fait entendre des témoins, a eu l’occasion de contre-interroger les témoins et les témoins experts de l’intimé, a produit une preuve documentaire et a été entendu sur sa requête pour être autorisé à produire une preuve nouvelle. En conséquence, ce moyen ne peut être retenu.
[102] Selon l’appelant, le juge de première instance a erré quand il a avalisé la décision du Tribunal des professions qui lui a refusé l’autorisation de produire des preuves nouvelles en appel. En réalité, ce moyen d’appel ne concerne que la première requête pour preuve nouvelle rejetée séance tenante par le Tribunal le 19 mars 2012[118] et, plus particulièrement, les 62 onglets relatifs à des rapports d’évaluations psychiatriques de patients autres que ceux visés par les chefs de plainte 1 à 5. En effet, l’appelant a lui - même abandonné sa seconde requête pour preuve nouvelle lors de l’audience sur sa requête en révision judiciaire[119].
[103] Voici ce que le juge de première instance a conclu au sujet de la première requête et des 62 autres rapports d’évaluations psychiatriques que l’appelant voulait produire lors de son appel au Tribunal des professions :
[57] La preuve nouvelle que veut introduire le demandeur vise à démontrer que dans le cas d’autres patients qu’il a traités, des mégadoses de médicaments ont pu être avalisées par d’autres médecins ou psychiatres.
[58] Le Tribunal des professions a décidé que bien qu’elle soit nouvelle, cette preuve ne rencontre pas les critères exigés pour l’admettre, notamment son caractère indispensable :
[33] En l’espèce, et bien qu’elle soit nouvelle, cette preuve ne rencontre pas certains des critères exigés, notamment son caractère indispensable. Il y a ici non seulement absence totale de pertinence en lien avec les cinq (5) premiers chefs de la plainte disciplinaire, mais de plus, cette preuve ne saurait aucunement influer sur la décision du Conseil par laquelle l’appelant a été déclaré coupable ou même sur celle lui imposant les sanctions précitées.
(Nos soulignements)
[59] À l’audience, le demandeur a déposé le cahier contenant sous 62 onglets les passages choisis de dossiers médicaux de patients qui n’ont pas de lien avec ceux visés par les chefs de la plainte portée contre lui.
[60] Si le Tribunal des professions avait admis une telle preuve, il aurait imposé au syndic adjoint de faire une preuve complète, dans chacun de ces dossiers, de la condition médicale de 62 patients qui, en bout de ligne, n’auraient pas eu d’incidence sur la preuve complète faite à l’égard des quatre patients visés dans les chefs 1 à 5 portés contre le demandeur Mailloux.
[…]
[63] Dans les circonstances, le Tribunal estime que la décision rendue par le Tribunal des professions de refuser la preuve nouvelle est raisonnable et se justifie au regard des faits et du droit.
[64] Elle l’est d’autant plus que le Tribunal des professions n’avait en mains, rappelons-le, ni la transcription des témoignages ni les dossiers d’experts et l’ensemble de la preuve ayant donné lieu aux conclusions auxquelles est parvenu le Conseil de discipline.
[65] Dans ce contexte, la preuve nouvelle, en l’absence de la preuve antérieure n’aurait rien changé à l’analyse que le Tribunal devait faire de la situation.[120]
[104] Devant la Cour, l’appelant prétend que le refus du Tribunal des professions d’autoriser cette preuve nouvelle en présumant des résultats de ce qui aurait pu être révélé par l’audition de cette preuve, constitue également un manquement aux règles de justice naturelle. Comme les preuves nouvelles révélées par les 62 rapports d’évaluations psychiatriques avalisent le « traitement Mailloux » quant aux mégadoses de neuroleptiques, un arrêt des procédures s’imposerait même.
[105] De l’avis de la Cour, plusieurs motifs justifiaient le Tribunal des professions de refuser la production de cette preuve nouvelle. En premier lieu, l’appelant voulait utiliser cette preuve pour démontrer que les psychiatres qui ont vu ses 62 patients ont avalisé sa thèse sur les bienfaits de l’utilisation de mégadoses et sur sa pratique en ce sens.
[106] Lorsque le Tribunal des professions autorise la production d’une preuve nouvelle, il doit procéder au réexamen de l’ensemble de la preuve[121]. En l’espèce, cette tâche s’avérait impossible devant le Tribunal des professions puisque l’appelant n’a pas produit les témoignages des experts devant le Conseil de discipline, ni les rapports des experts ni la littérature scientifique sur laquelle se fondaient les experts.
[107] De plus, les 62 onglets que l’appelant reproche au Tribunal des professions de ne pas avoir acceptés au titre de preuve ne contiennent que des extraits du dossier médical de chacun des patients visés.
[108] Enfin, il existe un autre motif pour lequel cette preuve nouvelle n’était pas indispensable ni susceptible d’entraîner un résultat différent si elle avait été connue avant. En effet, cette preuve nouvelle, postérieure à la décision du Conseil de discipline du 26 février 2010 sur la culpabilité et celle du 30 mars 2011 sur la sanction, a été constituée dans des conditions particulières qui en réduisent considérablement la portée.
[109] Dans sa décision du 30 mars 2011, le Conseil a ordonné l’exécution provisoire de la sanction prononcée, soit une radiation de deux ans, une amende et une limitation du droit de l’appelant de prescrire des mégadoses de neuroleptiques et des combinaisons de ces substances[122]. L’exécution provisoire ainsi prononcée a été suspendue en partie pendant l’appel déposé au Tribunal des professions par un jugement du juge Hébert de ce Tribunal prononcé le 18 mai 2011[123].
[110] Le juge Hébert a suspendu l’ordonnance de radiation temporaire de deux ans ainsi que celle relative au paiement des amendes. Pour assurer la protection du public, il n’a cependant pas suspendu l’exécution provisoire de l’ordonnance du Conseil de discipline portant interdiction de prescriptions de neuroleptiques à fortes doses et en combinaison.
[111] Cette ordonnance empêchait dès lors les pharmaciens d’honorer les renouvellements des ordonnances des patients de l’appelant dont la posologie dépassait les doses maximales prévues aux documents mentionnés à l’ordonnance[124]. L’ordonnance a également obligé d’autres psychiatres ou d’autres médecins de famille à prendre en charge les patients de l’appelant à qui il avait prescrit des mégadoses ou des combinaisons de neuroleptiques.
[112] Les médecins et psychiatres concernés ont manifesté des inquiétudes face à cette situation et aux obligations qu’ils devaient alors assumer. Ils ont exprimé leurs préoccupations à ce sujet au bureau du syndic du Collège des médecins, notamment au sujet de la nécessité d’un sevrage graduel pour les patients sous mégadoses et du malaise des psychiatres à prescrire des dosages pour lesquels l’appelant avait fait l’objet d’une radiation[125].
[113] La réponse leur a été donnée au début juillet 2011 dans une lettre de l’intimé dont il convient de citer un extrait :
Ceci étant, nous sommes conscients que les nombreux patients concernés par cette limitation imposée au docteur Mailloux devront être évalués et probablement pris en charge par des collègues psychiatres ou des médecins de famille déjà fortement sollicités. Nous croyons, néanmoins, que la sévérité ou la complexité des pathologies ou des traitements de ces patients méritent une attention diligente. Ils devront sans doute être soumis soit à un sevrage progressif des doses élevées de neuroleptiques qui leur sont actuellement prescrites, soit à une réévaluation de l’approche thérapeutique. Il est clair que nous supporterons les médecins (psychiatres ou médecins de famille) qui assumeront cette responsabilité au cours des mois à venir dans la mesure où leur intervention sera orientée vers le développement d’un plan de soins et de prise en charge individualisé pour chacun de ces patients et conforme aux normes de pratiques applicables.[126]
[114] Les rapports psychiatriques que l’appelant voulait produire au Tribunal des professions au titre d’une preuve nouvelle reflètent cette situation particulière. Les psychiatres et médecins de famille qui ont pris en charge les patients de l’appelant pour le renouvellement de leurs prescriptions ont, dans la plupart des cas, été obligés de continuer à prescrire des doses de neuroleptiques excédant les recommandations prescrites afin de procéder à un sevrage progressif des patients. Dans certains cas, ils ont même reconduit les dosages prescrits par l’appelant.
[115] Dans un premier temps, les rapports psychiatriques individuels que l’appelant a voulu mettre en preuve au titre d’une preuve nouvelle devant le Tribunal des professions ne peuvent pas être comparés aux fins d’expertise aux dossiers que l’intimé avait produits devant le Conseil de discipline pour fonder les chefs de plainte 1 à 5. En effet, comme déjà vu, la preuve d’expert afférente aux dossiers visés par les chefs de plainte 1 à 5 qui a été administrée devant le Conseil de discipline n’a pas été produite devant le Tribunal des professions.
[116] En deuxième lieu, compte tenu de la situation toute particulière ayant conduit à la confection et à la préparation de ces rapports individuels par les psychiatres et les autres médecins qui ont dû prendre en charge les clients de l’appelant, ce dernier n’a pas établi, autrement que par sa seule affirmation faite à l’audience et non étayée d’une preuve quelconque, que les patients qui prenaient les neuroleptiques prescrits à fortes doses par lui n’avaient pas besoin d’un sevrage quelconque avant d’en réduire le dosage.
[117] Ainsi, l’appelant n’a pas établi non plus que la production de cette preuve nouvelle aurait été susceptible de conduire à un résultat différent. Par conséquent, le juge de la Cour supérieure a eu raison de conclure que la décision du Tribunal des professions de ne pas autoriser cette preuve n’était pas déraisonnable et ce moyen d’appel doit être rejeté.
[118] L’appelant reproche au juge de première instance d’avoir éludé l’entente intervenue le 20 février 2008 entre lui et l’intimé concernant la prescription de neuroleptiques à fortes doses. Il plaide que cette entente est une transaction contractuelle ayant l’effet d’un jugement du Conseil de discipline rendu le 17 avril 2008 dans le dossier numéro 675 qui l’entérinait et ordonnait aux parties de s’y conformer. Elle a été produite devant le Conseil de discipline dans le présent dossier numéro 640 lors de l’audience sur la sanction. L’appelant en a également discuté devant le juge de la Cour supérieure dans le présent dossier et a fait valoir que cette entente était un élément pertinent au regard des chefs de plainte 1 à 5. Or, le juge n’en a pas soufflé mot dans son jugement rejetant la requête en révision judiciaire.
[119] Les circonstances de la signature de cette entente ont déjà été expliquées en première partie[127].
[120] Dans sa décision du 17 avril 2008[128] entérinant cette entente sur la limitation de pratique de l’appelant quant à la prescription de neuroleptiques aux patients adultes et maintenant la limitation provisoire du droit de l’appelant de pratiquer la psychiatrie auprès des enfants et des adolescents, le Conseil de discipline prévoit que cette seconde limitation provisoire de pratiquer la psychiatrie auprès des enfants et des adolescents demeure en vigueur « […] jusqu’à la signification [à l’appelant] de la décision du Comité rejetant la plainte ou imposant une sanction ».
[121] La même limitation temporelle n’est cependant pas prévue dans cette décision en ce qui concerne l’entente passée entre le syndic et l’appelant quant à la limitation de prescription de neuroleptiques aux adultes. Le Code des professions supplée cependant à ce défaut. En effet, l’entente entérinée le 17 avril 2008 par le Conseil de discipline équivaut à une ordonnance de ce Conseil. En vertu de l’article 133, alinéa 4 du Code, une ordonnance de radiation provisoire ou de limitation provisoire du droit d’exercer des activités professionnelles « […] demeure en vigueur jusqu’à la signification de la décision du conseil rejetant la plainte ou imposant la sanction, selon le cas, à moins que le conseil n’en décide autrement […] ».
[122] Par conséquent, l’entente intervenue entre le syndic et l’appelant n’a pas la portée que lui prête ce dernier. Elle équivalait à une ordonnance provisoire de limitation du droit d’exercer dans le seul dossier disciplinaire numéro 675. De plus, elle ne s’est appliquée qu’entre le 17 avril 2008 et le 3 février 2012, date de la décision du Conseil de discipline sur la sanction qui a prolongé de façon permanente la limitation d’exercice concernant les enfants et les adolescents pour les chefs 1 à 10 de cette plainte dans le dossier 675 ainsi qu’une limitation permanente de pratique relativement à la prescription de neuroleptiques aux adultes[129]. Ce moyen d’appel est sans valeur.
[123] L’appelant reproche au juge de la Cour supérieure d’avoir porté atteinte à sa liberté d’expression protégée par les Chartes lorsqu’il a déterminé que les propos tenus par l’appelant dans le cadre d’émissions radiophoniques étaient dérogatoires à leur face même[130]. Ce moyen d’appel est en lien avec les chefs de plainte 6 à 9 et 11 et 12.
[124] L’intimé réplique qu’il s’agit d’un moyen complètement nouveau qui n’a fait l’objet d’aucune décision ni d’aucun grief de l’appelant jusqu’à ce jour et qui n’est pas recevable.
[125] En l’absence de toute transcription, il n’est pas possible de vérifier si l’appelant a formulé ce moyen devant le Conseil de discipline ou même devant le Tribunal des professions. Il n’en est fait aucune mention dans les deux décisions du Conseil ni dans le jugement du Tribunal des professions. L’argument du droit protégé à la liberté d’expression a été expressément plaidé en Cour supérieure lors de l’audience sur la requête en révision judiciaire et, comme déjà indiqué, le juge de la Cour supérieure l’a rejeté[131].
[126] L’arrêt de principe sur l’exercice du droit à la liberté d’expression par un professionnel assujetti à un régime disciplinaire est celui de la Cour supérieure dans Doré c. Barreau du Québec[132]. Dans cet arrêt, la Cour a décidé que lorsqu’un décideur administratif comme un conseil de discipline rend une décision qui restreint la liberté d’expression d’une personne, il faut déterminer si ce décideur a attenté de façon proportionnée ou disproportionnée au droit en cause par rapport aux buts et objectifs de la loi plutôt que de recourir au test de l’arrêt Oakes[133]. Si la décision administrative porte atteinte à la garantie constitutionnelle de manière disproportionnée, elle est déraisonnable, mais si elle établit un juste équilibre entre le mandat et la protection offerte par la Charte, elle est raisonnable. La norme de contrôle est celle du caractère raisonnable de la décision et non celle de la décision correcte.
[127] Dans l’arrêt Doré, il s’agissait d’un avocat qui avait écrit à un juge pour le critiquer. Le fait d’envoyer cette lettre constituait l’exercice d’une activité expressive protégée par la liberté d’expression. La décision du Conseil de discipline du Barreau de réprimander l’avocat reposait sur un geste équilibré entre le droit de l’avocat à la liberté d’expression et l’objectif de la loi qui consiste à garantir que les avocats agissent avec objectivité, modération et dignité. Si le mécontentement de l’avocat à l’égard du juge était légitime, la teneur de la lettre ne l’était pas, notamment à cause du degré excessif de vitupération dans son contenu et de son ton.
[128] En l’espèce, l’appelant n’a pas fourni la transcription ou l’enregistrement des propos qu’il a tenus à la radio ni la transcription des débats devant le Conseil qui auraient peut-être permis d’évaluer le contexte. Il est alors difficile de faire la démarche de mise en balance des valeurs protégées par la Charte et des obligations professionnelles prévues à la loi régissant la profession. Selon la Cour suprême, comme pour toutes les décisions disciplinaires, « […] cette mise en balance dépend des faits et suppose l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire »[134].
[129] La lecture des chefs de plainte et de la décision du Conseil de discipline sur le verdict de culpabilité[135] donne toutefois un aperçu des propos de l’appelant qui ont mené à la déclaration de sa culpabilité sur les chefs 6 à 9 et 11 et 12.
[130] Cet aperçu permet de constater que l’appelant tient alors un micro radiophonique en affichant sa qualité de psychiatre et qu’il fait des commentaires diagnostiques tranchés sur des personnes qu’il n’a jamais vues. La virulence et la vulgarité de ses propos ainsi que leur caractère irrespectueux et abusif ne permettent pas de conclure, comme le voudrait l’appelant au caractère déraisonnable de la conclusion du Conseil de discipline selon laquelle sa conduite contrevenait à l’honneur et à la dignité de la profession.
[131] Selon l’appelant, le juge de la Cour supérieure a commis une erreur manifeste et déterminante en lui prêtant des propos contraires à ceux qu’il a tenus à l’audience. Le juge a conclu que l’appelant a déclaré qu’en reprenant son droit de pratique après sa suspension de deux ans, il continuera à agir de la même façon en ce qui concerne la prescription de neuroleptiques, et ce, malgré les directives du Collège des médecins[136].
[132] L’appelant plaide que la transcription des débats du 24 mars 2013 lors de l’audition de sa requête en révision judiciaire démontre plutôt qu’il a fait cette déclaration en ajoutant : « […] si je suis autorisé ».
[133] Il est utile de reproduire l’extrait des notes sténographiques auquel l’appelant fait allusion :
Dr Pierre Mailloux :
[…]
[…] Bien oui, je l’admets. Pas besoin de faire venir trois (3) psychiatres pour dire que mon traitement est hors normes, c’est moi qui le dis. Je le fais depuis mil neuf cent quatre-vingt-douze (1992) et même avant. Mais le Collège ne voulait pas que je le fasse et, oui, il y a de l’entêtement de ma part, depuis mil neuf cent quatre-vingt-douze (1992) je le fais, je continue à le faire puis je vais continuer à le faire si je suis autorisé. À cause des résultats, Monsieur le Juge.
À cause des résultats, et les résultats, vous l’avez ici. Alors là, après la radiation de deux (2) ans, on va faire quoi? Moi, je vais reprendre les mêmes traitements, je vous le dis tout de suite, ça fonctionne. Et tous ces cas-là, je les suis encore. La médication est represcrite par le médecin de famille qui, lui, a le droit de donner des mégadoses, mais pas moi. Ça a été autorisé par ces psychiatres-là.
[134] D’une part, ce passage n’est pas aussi limpide que le prétend l’appelant quant à ses intentions futures en matière de prescription de neuroleptiques.
[135] D’autre part, tant le Conseil de discipline dans sa décision sur la sanction[137] que le Tribunal des professions dans son jugement sur l’appel[138] ont rapporté que l’appelant avait affirmé vouloir continuer à agir de la même façon, malgré les directives du Collège des médecins. Il s’agit d’une constatation de fait et, en l’absence de toute transcription de la preuve et des débats devant ces instances, l’appelant est présumé avoir accepté les conclusions de fait du Conseil et du Tribunal[139]. Ce moyen ne peut donc être retenu.
[136] Ce moyen de l’appelant serait rejeté de façon sommaire si ce n’était de son argument selon lequel le syndic aurait « trafiqué » des preuves d’experts en psychiatrie en ce que ces experts n’ont pas daigné examiner les quatre patients visés par les chefs de plainte 1 à 5.
[137] Cet argument ne vaut pas. Au premier chef, l’appelant n’a pas produit les dossiers médicaux des quatre patients concernés. Il n’a pas davantage produit les rapports d’expertise des médecins experts ni la transcription de leurs témoignages devant le Comité de discipline. Il n’est donc pas possible en l’absence de ces éléments de preuve de tirer quelque conclusion que ce soit sur la démarche suivie par les experts de l’intimé, notamment en ce qui concerne la validité des conclusions auxquelles ils sont arrivés quant aux effets des pratiques de l’appelant en matière de prescription de neuroleptiques.
[138] En deuxième lieu, dans sa décision sur la culpabilité, le Conseil de discipline a clairement expliqué pourquoi le fait que les experts n’avaient pas rencontré les quatre patients visés par les chefs de plainte 1 à 5 n’enlevait rien à la valeur probante de leurs expertises[140]. Leur mandat n’était pas de faire un diagnostic de la condition des patients, mais plutôt d’évaluer les pratiques de l’appelant en matière de prescription de mégadoses de neuroleptiques et de combinaison de ces médicaments au regard des données actuelles de la science médicale dans le traitement de la schizophrénie réfractaire.
[139] L’appelant, qui n’a lui-même produit aucune expertise et a fait témoigner un des experts qui avait été mandaté par l’intimé, n’a nullement démontré en quoi la conclusion de culpabilité du Conseil de discipline était déraisonnable au regard des expertises produites et des témoignages des experts.
[140] Le dernier moyen d’appel de l’appelant invoquant la « partialité institutionnelle » du Collège des médecins apparaît pour la première fois en appel. Il ne mérite pas qu’on s’y attarde davantage n’étant fondé sur aucun élément concret.
[141] En conséquence, tous les moyens d’appel par lesquels l’appelant s’est attaqué à la décision du Conseil de discipline du 26 février 2010[141] sur la culpabilité doivent être rejetés.
[142] L’appelant plaide que le juge de la Cour supérieure n’a pas considéré le principe de la proportionnalité des sanctions et fait valoir le caractère erratique des sanctions imposées dans les dossiers disciplinaires numéros 675, 640 et 624.
[143] La Cour suprême énonce que la norme de contrôle applicable à une décision d’un conseil de discipline prononçant une sanction est celle de la décision raisonnable[142].
[144] La question des sanctions prononcées contre l’appelant par le Conseil de discipline et entérinées tant par le Tribunal des professions que par la Cour supérieure a été abondamment discutée au cours de l’audience d’appel. Vu la nature diverse des différentes sanctions prononcées, il est opportun de les considérer tant de façon individuelle que dans le contexte du critère de la proportionnalité et de celui de la globalité.
[145] En matière
de discipline professionnelle, l’objectif primordial dans l’attribution d’une
sanction est celui de la protection du public[143].
Par ailleurs, en vertu du paragraphe g) du premier alinéa de l’article
[146] En l’espèce, le Conseil de discipline a imposé à l’appelant une limitation à son droit de prescrire des neuroleptiques à fortes doses ou en combinaison. Cette limitation lui a été imposée pour prendre effet au terme de la radiation temporaire de deux ans qui a été prononcée contre lui pour sanctionner les chefs 1 à 5 de la plainte au motif qu’il était plus que probable qu’au terme de sa radiation, l’appelant reprendrait l’exercice de sa profession telle qu’il l’avait jusque-là pratiquée, soit en prescrivant des neuroleptiques à fortes doses ou en combinaison[145]. Il importe de citer la teneur précise de cette ordonnance :
- ÉMET une ordonnance interdisant à l’intimé de dépasser, dans ses prescriptions de neuroleptiques typiques et atypiques, les doses maximales recommandées par les fabricants telles qu’approuvées par Santé Canada et répertoriées par le Compendium des produits et spécialités pharmaceutiques (CPS) et de prescrire de façon concomitante plusieurs neuroleptiques à la fois chez un même patient;
- DÉCLARE que la limitation imposée à l’intimé, au paragraphe précédent, demeurera valide tant et aussi longtemps que le Collège des médecins ne recommandera pas le recours à la prescription de mégadoses de neuroleptiques typiques et atypiques aux adultes dans le traitement de la schizophrénie;
[147] Comme on le voit, cette limitation du droit de prescrire est temporaire puisqu’elle doit expirer au moment où le Collège des médecins fera ses recommandations. Or, la preuve révèle que le Collège des médecins n’a nullement l’intention de faire de telles recommandations. C’est ce qui appert notamment de la correspondance échangée entre l’appelant et le Collège des médecins qui a été acceptée et produite au titre de la preuve nouvelle[146]. Elle révèle que la limitation du droit de l’appelant de prescrire des neuroleptiques que le Conseil de discipline voulait temporaire est en réalité devenue permanente contrairement à sa volonté exprimée, ce qui justifie l’intervention judiciaire.
[148] Moins d’un an après la décision du Conseil ordonnant cette limitation du droit de l’appelant de prescrire des neuroleptiques, le Conseil de discipline imposait à l’appelant une limitation de même nature, mais cette fois de façon permanente dans le dossier disciplinaire numéro 675[147]. Au surplus, pendant l’instance sur la plainte afférente au dossier disciplinaire numéro 675, l’appelant et l’intimé ont conclu une entente de limitation de prescription de neuroleptiques qui repose sur un mécanisme différent : la prescription de mégadoses ou d’une combinaison de neuroleptiques doit cette fois faire l’objet d’une consultation préalable avec un autre psychiatre[148].
[149] Il en résulte qu’à compter du 17 avril 2008, date à laquelle le Conseil de discipline entérine l’entente intervenue le 20 février 2008 dans le dossier numéro 675 entre le syndic et l’appelant, ce dernier est sous le coup d’une limitation de son droit de prescrire des neuroleptiques à des adultes, sauf avec l’accord d’un autre psychiatre. À partir du 30 mars 2011, date de l’imposition de la sanction dans le dossier disciplinaire numéro 640, l’appelant devient assujetti à une limitation supplémentaire de même nature devant cette fois prendre fin lorsque le Collège des médecins aura fait ses recommandations. De plus, à compter du 3 février 2012, date de la décision sur la sanction dans le dossier 675, l’appelant devient assujetti à une limitation permanente de son droit de prescrire des neuroleptiques, laquelle ne prévoit aucune exception. La superposition de limitations aussi différentes est clairement déficiente au plan de la cohérence.
[150] À l’audience, l’intimé concède que la facture actuelle de l’ordonnance de limitation d’exercice prononcée le 30 mars 2011 pose problème. Tant l’intimé que l’appelant semblent favoriser une limitation de prescription du même type que celle ayant fait l’objet de l’entente intervenue dans le contexte de la plainte afférente au dossier disciplinaire numéro 675 et qui a posé certains problèmes dans son application.
[151] La Cour est d’avis que l’appelant n’a pas démontré que l’imposition d’une limitation d’exercice de sa pratique en ce qui concerne la prescription de neuroleptiques aux patients adultes était déraisonnable. Après avoir entendu les parties, la Cour estime toutefois qu’il y a lieu de substituer à l’ordonnance prononcée par le Conseil de discipline le 30 mars 2011 une ordonnance de limitation de prescription de neuroleptiques à des adultes fondée sur un mécanisme différent.
[152] Cette ordonnance interdira à l’appelant de prescrire à ses patients adultes[149] des neuroleptiques typiques et atypiques qui dépassent les doses maximales recommandées par les fabricants telles qu’approuvées par Santé Canada et répertoriées dans le Compendium des produits et spécialités pharmaceutiques (CPS) et de prescrire plusieurs neuroleptiques à la fois chez un même patient adulte, sauf si l’appelant a obtenu au préalable un avis écrit (incluant par courrier électronique) d’un psychiatre recommandant ou approuvant ce traitement pour un patient donné. Dans un cas d’urgence, dont la preuve incombe à l’appelant, l’autorisation pourra être donnée verbalement.
[153] Il reste à trancher la question de la durée de cette limitation d’exercice relativement à la prescription de neuroleptiques. À l’audience, l’intimé a demandé à ce qu’elle soit permanente. La Cour note cependant que celle prononcée par le Conseil de discipline dans sa décision sur sanction du 30 mars 2011 prévoyait qu’elle prendrait fin à la date des recommandations du Collège des médecins sur le recours aux mégadoses et aux doses combinées de neuroleptiques. De plus, compte tenu de l’âge de l’appelant, de l’évolution des connaissances sur la pharmacologie et du fait que l’appelant est déjà assujetti à une telle limitation depuis le 17 avril 2008, date à laquelle le Conseil de discipline a entériné l’entente du 20 février 2008 dans le dossier disciplinaire 675[150], la Cour estime que cette limitation d’exercice portant sur la prescription de neuroleptiques aux adultes devrait être temporaire et valoir jusqu’au 17 avril 2018 inclusivement puisque cela fera alors dix années que l’appelant aura été assujetti à une limitation de cette nature.
[154] Le Conseil de discipline a accepté la recommandation que lui a faite l’intimé d’imposer à l’appelant une radiation temporaire de deux ans pour chacun des chefs de plainte 1 à 5 à être purgés concurremment. Il a notamment souligné la gravité des infractions[151] ainsi que le fait que l’appelant avait fait fi de plusieurs mises en garde au sujet des mégadoses de neuroleptiques que lui avait faites le Collège des médecins dans les années 1990[152].
[155] Le Conseil a également considéré comme facteur aggravant le fait d’administrer aux patients des doses combinées de neuroleptiques[153]. Étant convaincu qu’il y aurait récidive probable de la part de l’appelant, le Conseil a estimé nécessaire d’imposer cette radiation temporaire de deux ans parce que les pratiques de prescription de neuroleptiques de l’appelant représentaient un danger pour la protection du public qui constitue la mission première du Conseil[154].
[156] Lors de l’audience d’appel, la Cour a interrogé l’intimé sur le critère de la gradation des sanctions. En l’espèce, à la date de l’imposition de la sanction dans le dossier numéro 640, l’appelant avait déjà purgé une sanction de radiation temporaire de sept jours prononcée le 17 septembre 2002 dans le dossier disciplinaire numéro 487 qui ne concernait que des propos tenus dans le cadre d’une émission radiophonique[155]. Par ailleurs, après l’imposition, le 30 mars 2011, d’une radiation de deux ans dans le présent dossier numéro 640, l’appelant s’est vu imposer, le 3 février 2012, une radiation d’une année dans le dossier disciplinaire numéro 675 qui comprend pas moins de 14 chefs de plainte reliés à des prescriptions intempestives.
[157] Pourtant, le Tribunal des professions qui a entendu l’appel en juin 2012, alors que la sanction dans le dossier disciplinaire numéro 675 était déjà prononcée depuis plus de quatre mois, n’en a pas soufflé mot.
[158] À l’audience d’appel, l’intimé rappelle que si le facteur de la gradation des peines est pertinent en matière disciplinaire, il ne peut être préféré à celui de la protection du public[156]. Cela est exact, mais, en l’espèce, la protection du public est déjà assurée par la limitation du droit de l’appelant de prescrire des neuroleptiques à fortes doses et de façon combinée imposée en même temps que la radiation de deux ans. Qui plus est, au moment où le Conseil de discipline se réunit en octobre 2010 pour l’audition des observations des parties sur la sanction à être imposée dans le présent dossier disciplinaire numéro 640, l’intimé ne peut ignorer que l’appelant est déjà sous le coup d’une interdiction totale de pratiquer la psychiatrie auprès des enfants et des adolescents, et ce, depuis la décision du Comité de discipline du 17 avril 2008 dans le dossier numéro 675[157].
[159] Par ailleurs, l’intimé reconnaît à l’audience que, suivant les données de la science médicale des années 1990, on ne pouvait pas dire que les pratiques de prescription de neuroleptiques par l’appelant en faisaient à cette époque un médecin délinquant. Par conséquent, le reproche que lui a fait le Conseil de discipline quant à son refus de respecter les mises en garde qui lui étaient alors adressées par le Collège des médecins perd de sa force pour justifier une sanction de deux années de radiation temporaire.
[160] La Cour estime que tant le Conseil de discipline que le Tribunal des professions et la Cour supérieure ont omis de tenir compte de la gradation des peines et du principe de globalité[158] considérant que l’appelant avait écopé d’une radiation de sept jours en 2002 dans le dossier disciplinaire numéro 487, d’une radiation de deux ans le 30 mars 2011 dans le présent dossier numéro 640 et, moins d’un an plus tard, d’une radiation d’un an pour des infractions de même nature mais en plus grand nombre dans le dossier numéro 675. Ils ont également omis de tenir compte de l’impact des limitations de l’exercice de la profession de l’appelant sur la sécurité du public et la sévérité de la sanction. Enfin, ils ont accordé une trop grande portée aux avertissements donnés à l’appelant dans les années 1990.
[161] Dans l’arrêt Pigeon c. Daigneault[159], le juge Fish, alors à notre Cour, a énoncé les éléments susceptibles de rendre une sanction déraisonnable en matière disciplinaire :
[90] It remains proper to intervene, however, where the sanction imposed by the Disciplinary Committee, considered in the light of all the relevant factors and circumstances, is shown to be too lenient, too severe, or otherwise fatally flawed because of an error in principle, a mistake of law or a material and significant misapprehension of fact.
[91] In my view, a sanction that suffers from any of these defects cannot be said to be "reasonable".[160]
[162] Pour les motifs déjà exprimés, la Cour est d’avis que la sanction d’une radiation temporaire de deux ans est déraisonnable en l’espèce. Le Comité de discipline et, après lui, le Tribunal des professions de même que la Cour supérieure ont commis une erreur de principe qui les a conduits à imposer une sanction trop sévère dans sa durée.
[163] La sévérité de la sanction a encore été aggravée par le refus du Tribunal des professions de rejeter sans motif la demande de l’appelant de déduire de la période de radiation temporaire de deux ans prononcée contre lui celle écoulée pendant sa radiation provisoire[161]. En principe, et l’intimé le reconnaît lui-même à l’audience d’appel, la période de radiation provisoire doit être soustraite de la durée de la sanction[162]. En l’espèce, le Tribunal des professions n’a nullement motivé ce refus d’y pourvoir. Il s’agit d’une erreur de principe.
[164] Il faut donc déterminer les périodes pendant lesquelles l’appelant a été suspendu provisoirement aux fins du calcul du crédit qui doit lui être accordé pour la période de radiation temporaire imposée comme sanction :
- le Conseil de discipline a prononcé la radiation provisoire de l’appelant par une décision du 23 janvier 2007[163] signifiée le 25 janvier 2007. La radiation provisoire ainsi prononcée a été suspendue le 4 avril 2007 par le Tribunal des professions pendant l’appel déposé par l’appelant[164]. L’appelant a donc été radié du 25 janvier au 4 avril 2007, soit 70 jours;
- la décision du Conseil de discipline du 30 mars 2011 prononçant la sanction de radiation temporaire de deux ans[165] a été exécutée du 30 mars 2011 jusqu’au 18 mai 2011, alors que son exécution a été suspendue par un juge du Tribunal des professions pendant l’appel[166], soit 50 jours;
- la sanction de radiation temporaire a ensuite été exécutée du 21 septembre 2012, date du jugement du Tribunal des professions rejetant l’appel des décisions du Conseil de discipline sur la culpabilité et sur la sanction[167], et ce, jusqu’au 16 novembre 2012, alors qu’un juge de la Cour supérieure a prononcé un sursis d’exécution jusqu’au jugement de cette Cour sur la requête en révision judiciaire de l’appelant[168], soit 57 jours;
- la radiation temporaire de deux ans prononcée par le Conseil de discipline a enfin été exécutée du 24 mai 2013, date du jugement de la Cour supérieure rejetant la requête en révision judiciaire de l’appelant[169], jusqu’au 5 août 2013, date de l’arrêt de notre Cour autorisant l’appel hors délai et suspendant l’exécution de la radiation pendant l’appel[170], soit 74 jours.
[165] En finale, la Cour fixe à neuf mois la période de radiation temporaire qui aurait dû être imposée à l’appelant en tenant compte de tous les facteurs pertinents. De cette période de radiation, il y a lieu de soustraire 251 jours pour tenir compte de la radiation temporaire déjà purgée au titre de la radiation provisoire et de l’exécution de la sanction de radiation temporaire prononcée par le Comité de discipline le 30 mars 2011.
[166] Le Conseil de discipline a imposé à l’appelant un total de 33 000 $ en amendes pour les chefs de plainte 6 à 12. L’appelant n’a soulevé aucun motif pour lequel l’imposition de ces amendes serait déraisonnable, d’autant qu’il avait déjà des antécédents disciplinaires en semblable matière pour lesquels il avait été condamné à des amendes totalisant 10 000 $ dans le dossier disciplinaire numéro 487[171].
[167] Alors que l’appel était en délibéré, l’appelant a produit une requête en arrêt des procédures. Aucun des motifs invoqués à la requête, pris individuellement ou collectivement, ne justifie le prononcé d’un arrêt des procédures tel que le voudrait l’appelant.
[168] À l’audience, l’appelant rectifie le tir. Pour justifier sa demande d’arrêt des procédures, il fait maintenant appel à l’obligation continue de divulgation de la preuve qui, en matière disciplinaire, s’applique au syndic. Ce motif n’était pas allégué dans sa requête.
[169] L’exigence de divulgation de la preuve issue du droit pénal s’applique en matière disciplinaire[172] encore qu’il faille tenir compte de la différence entre le droit criminel et le droit professionnel dans son application[173].
[170] L’arrêt des procédures en matière de divulgation de la preuve constitue un remède ultime et exceptionnel qui ne sera accordé que dans les cas les plus manifestes lorsqu’aucune autre réparation n’est possible[174].
[171] En l’espèce, aucun des documents que l’appelant reproche à l’intimé de ne pas lui avoir divulgués n’a porté atteinte à son droit à une défense pleine et entière. L’appelant n’a pas démontré qu’il y avait une possibilité raisonnable que la non-divulgation ait influé sur l’issue ou l’équité globale des procédures disciplinaires[175]. Plusieurs de ces documents émanaient de tiers et n’étaient pas nécessairement en possession de l’intimé. Enfin, tout préjudice qui aurait pu être causé à l’appelant par suite de ce défaut allégué de divulgation a été réparé par sa requête pour autorisation de preuve nouvelle. Le seul élément de preuve qui a été jugé pertinent pour le recours de l’appelant consistait en un échange de lettres entre l’appelant et le secrétaire adjoint du Collège des médecins qui a été entrepris par l’appelant lui-même[176]. N’étant pas fondée, la requête en arrêt des procédures doit donc être rejetée.
POUR CES MOTIFS, LA COUR :
[172] REJETTE la requête en arrêt des procédures, sans frais;
[173] ACCUEILLE l’appel pour partie, sans frais vu le résultat mitigé;
[174] INFIRME le jugement de la Cour supérieure du 24 mai 2013 et ACCUEILLE la requête en révision judiciaire, sans frais;
[175] INFIRME le jugement du Tribunal des professions du 21 septembre 2012 et ACCUEILLE l’appel, mais seulement en ce qui concerne la décision sur la sanction et la condamnation aux débours qui est annulée, sans frais;
[176] INFIRME la décision du 30 mars 2011 du Conseil de discipline du Collège des médecins du Québec portant sur la sanction aux seules fins :
1. de substituer une radiation d’une période de 9 mois à celle d’une période de 2 années prononcée par le Conseil de discipline pour les chefs de plainte numéros 1 à 5, toutes ces périodes devant être purgées concurremment, à distraire cependant 251 jours de radiation déjà purgés par l’intimé;
2. de remplacer les deux paragraphes des conclusions portant sur l’ordonnance de limitation du droit d’exercer des activités professionnelles par les paragraphes suivants :
IMPOSE à l’intimé une limitation temporaire du droit d’exercer les activités professionnelles suivantes :
- il est interdit à l’intimé de prescrire à ses patients adultes des neuroleptiques typiques et atypiques qui dépassent les doses maximales recommandées par les fabricants telles qu’approuvées par Santé Canada et répertoriées dans le Compendium des produits et spécialités pharmaceutiques (CPS) et de prescrire plusieurs neuroleptiques à la fois chez un même patient adulte, sauf si l’intimé a obtenu au préalable un avis écrit, y inclus par courrier électronique, d’un psychiatre recommandant ou approuvant un tel traitement pour un patient donné;
- en cas d’urgence, dont la preuve incombe à l’intimé, l’autorisation peut être donnée verbalement et confirmée par écrit, y inclus par courrier électronique, dans les 7 jours de l’autorisation verbale;
IMPOSE cette limitation jusqu’au 17 avril 2018 inclusivement;
3. de
limiter les condamnations de l’intimé au paiement des débours prévus à
l’article
[1] 2013 QCCA 1329.
[2]
Mailloux c. Deschênes,
[3]
Mailloux c. Médecins (Ordre professionnel),
[4]
À partir du 15 octobre 2008, date d’entrée en vigueur des articles 1 et
[5]
Médecins (Ordre professionnel) c. Mailloux, Conseil de
discipline, Médecins, 26 février 2010, AZ-50615346,
[6]
Médecins (Ordre professionnel) c. Mailloux, Conseil de
discipline, Médecins, 30 mars 2011, AZ-50615346,
[7]
Médecins (Ordre professionnel) c. Mailloux, Comité de
discipline, Médecins numéro 24-99-00487, 18 décembre 2001,
[8]
Médecins (Ordre professionnel) c. Mailloux, Comité de
discipline, Médecins numéro 24-99-00487, 17 septembre 2002,
[9]
Mailloux c. Médecins (Ordre professionnel),
[10]
Médecins (Ordre professionnel) c. Mailloux, Conseil de discipline,
Médecins, numéro 24-06-00624, 9 septembre 2009,
[11] Médecins (Ordre professionnel) c. Mailloux, Conseil de discipline, Médecins, numéro 24-06-00624, 16 octobre 2012, 2012 CanLII 61510 (QC CDCM).
[12]
Mailloux c. Médecins (Ordre professionnel),
[13]
Mailloux c. Médecins (Ordre professionnel),
[14]
Mailloux c. Deschênes,
[15]
Mailloux c. Deschênes,
[16] 2015 QCCA 1369.
[17]
Médecins (Ordre professionnel) c. Mailloux, Comité de discipline,
Médecins, numéro 24-06-00640, le 23 janvier 2007,
[18]
Mailloux c. Médecins (Ordre professionnel),
[19]
Deschênes c. Provost,
[20]
Mailloux c. Médecins (Ordre professionnel),
[21] Médecins (Ordre professionnel) c. Mailloux, précitée, note 5.
[22] Médecins (Ordre professionnel) c. Mailloux, précitée, note 6.
[23]
Mailloux c. Médecins (Ordre professionnel),
[24] Mailloux c. Médecins (Ordre professionnel), précité, note 3.
[25]
Mailloux c. Deschênes,
[26] Mailloux c. Deschênes, jugement précité, note 2.
[27] Arrêt précité, note 1.
[28] Précité, note 6.
[29] Jugement précité, note 20.
[30]
Médecins (Ordre professionnel) c. Mailloux, Comité de
discipline, Médecins, dossier numéro 24-08-00675, le 17 avril 2008,
[31]
Mailloux c. Médecins (Ordre professionnel),
[32]
Mailloux c. Médecins (Ordre professionnel),
[33]
Médecins (Ordre professionnel) c. Mailloux, Conseil de
discipline, Médecins, numéro 24-08-00675, le 5 novembre 2009,
[34]
Médecins (Ordre professionnel) c. Mailloux, Conseil de
discipline, Médecins, numéro 24-08-00675, le 26 octobre 2011,
[35] Médecins (Ordre professionnel) c. Mailloux, Conseil de discipline, Médecins, numéro 24-08-00675, le 3 février 2012, 2012 CanLII 5172 (QC CDCM).
[36]
Mailloux c. Médecins (Ordre professionnel),
[37]
Mailloux c. Fortin,
[38]
Mailloux c. Fortin,
[39]
Mailloux c. Fortin,
[40]
Mailloux c. Fortin,
[41]
Mailloux c. Fortin,
[42]
Mailloux c. Fortin,
[43] Supra, note 35.
[44] Supra, note 36.
[45]
En vertu du premier alinéa de l’article
[46] Les nombreuses décisions interlocutoires rendues dans cette affaire sont recensées, supra, aux paragr. [14] à [20].
[47] C.D. (culpabilité), précitée, note 5, paragr. 4 et 5.
[48] Ibid., paragr. 11-39.
[49] Ibid., paragr. 40-73.
[50] Ibid., paragr. 74-207.
[51] Code de déontologie des médecins, RLRQ, c. M-9, r. 17.
[52] Code des professions, RLRQ, c. C-26 [ci-après cité : C. Pr.].
[53] C.D. (culpabilité), précitée, note 5, paragr. 208-250.
[54] Ibid., paragr. 251-265.
[55] Ibid., paragr. 266-284.
[56] Ibid., paragr. 285-310.
[57] C.D. (sanction), précitée, note 6.
[58] Ibid., paragr. 38-41, 84 et 85.
[59] Ibid., paragr. 87-100.
[60] Ibid., paragr. 101-105.
[61] Ibid., paragr. 106-118.
[62] Voir supra, paragr. [5] et note 8.
[63] C.D. (sanction), précitée, note 6, paragr. 106-121.
[64] Ibid., paragr. 122-144, 162.
[65] Ibid., paragr. 145-156.
[66] Ibid., paragr. 166-168.
[67] Ibid., paragr. 174-175. L’exécution provisoire sera ultérieurement suspendue en partie en ce qui concerne la radiation et les amendes. Voir supra, paragr. [18] à [20].
[68] Jugement du T.P., précité, note 3.
[69] Ibid., paragr. 22 et 23.
[70] Ibid., paragr. 24-34.
[71] Ibid., paragr. 35-42.
[72] Ibid., paragr. 62.
[73] Ibid., paragr. 65-69.
[74] Ibid., paragr. 74.
[75] Ibid., paragr. 77-93.
[76] Ibid., paragr. 94-125.
[77]
Kienapple c. La Reine,
[78] Jugement du T.P., précité, note 3, paragr. 106-121.
[79] Règlement sur la tenue des dossiers, des cabinets ou bureaux des médecins ainsi que des autres effets, RLRQ, c. M-9, r. 28, art. 4, devenu le Règlement sur les dossiers, les lieux d’exercice et la cessation d’exercice d’un médecin, RLRQ, c. M-9, r. 20.3.
[80] Jugement du T.P., précité, note 3, paragr. 126-131.
[81] Ibid., paragr. 133-152.
[82] Ibid., paragr. 153 et 154.
[83] Jugement de la Cour supérieure, précité, note 2, paragr. 3-49.
[84] Ibid., paragr. 50-60.
[85] Ibid., paragr. 61-65.
[86] Ibid., paragr. 66-74.
[87] Ibid., paragr. 75.
[88] Ibid., paragr. 76-78.
[89] Ibid., paragr. 79-88.
[90] Ibid., paragr. 89-93.
[91] Ibid., paragr. 95-100.
[92] Ibid., paragr. 101-103.
[93] 2015 QCCA 404.
[94]
Parizeau c. Barreau du Québec,
[95] Pour s’en rendre compte, il suffit notamment de voir la formulation des questions soulevées par l’appelant devant le Tribunal des professions telles qu’énoncées par le Tribunal : Jugement du T.P., précité, note 3, paragr. 61-64.
[96] Loi modifiant le Code des professions et d’autres dispositions législatives, précitée, note 4 [ci-après citée : Loi modificatrice de 2008].
[97] Ibid., art. 227.
[98] D. 938-2008 du 1er octobre 2008 : (2008) 140 G.O.Q., ptie 2, p. 5493.
[99] D. 75-2009 du 28 janvier 2009 : (2009) 141 G.O.Q., ptie 2, p. 129A.
[100] D. 175-2010 du 10 mars 2010 : (2010) 142 G.O.Q., ptie 2, p. 1104.
[101]
Demande fondée sur l’art.
[102] Ibid., paragr. 63, p. 280; R. c. Ali,
[103] D. Greenberg, ed., Craies on Legislation, 9th Ed., London, Sweet & Maxwell, 2008, paragr. 10.3.9, p. 437.
[104] P.-A. Côté, S. Beaulac et M. Devinat, Interpétation des lois, 4e éd., Montréal, Éditions Thémis, 2009, no 695, p. 208.
[105]
Dikranian c. Québec (Procureur général),
[106] Ibid., paragr. 37-40, p. 548 et 549.
[107]
R. c. Puskas,
[108] Supra, paragr. [41].
[109] Règlement du Tribunal des professions, RLRQ, c. C-26, r. 10, art. 20 à 23.
[110] C. Pr., art. 167, al. 2.
[111] Mémoire de l’appelant, paragr. 58.
[112] [64] Conséquemment, le Tribunal formule comme suit les questions en litige :
· Dans la décision sur la culpabilité, le Conseil a-t-il erré dans l’appréciation de la preuve?
· Dans la détermination des sanctions imposées à l’appelant, le Conseil a-t-il commis des erreurs manifestes et dominantes?
Jugement du T.P., précité, note 3, paragr. 64.
[113] [50] Au soutien de sa requête en révision judiciaire, le demandeur soumet à l’audience les trois motifs suivants :
1) Le Tribunal des professions a erré en refusant la réouverture des débats et la preuve nouvelle;
2) Le Conseil de discipline et le Tribunal des professions ont erré en droit quant aux chefs 6 à 12;
3) Les sanctions imposées sont déraisonnables et justifient l’intervention de la Cour.
Jugement de la Cour supérieure, précité, note 2, paragr. 50.
[114] Pateras
c. M.B.,
[115]
Girard c. Syndicat de l’enseignement de Portneuf,
[116]
Sinotte c. Gagnon,
[117] D. Lemieux, « La nature et la portée du contrôle judiciaire » dans Droit public et administratif, Collection de droit 2015-2016, vol. 7, Cowansville, Éditions Yvon Blais, École du Barreau, 2015, p. 226.
[118] Sur les décisions du Tribunal des professions à ce sujet, voir supra, paragr. [58] à [60].
[119] Transcription de l’audience sur la requête en révision judiciaire le 27 mars 2013, p. 146 et 147. Il appert que cette renonciation de l’appelant a également été notée au procès-verbal de l’audience qui n’a cependant pas été produit en appel.
[120] Jugement de la Cour supérieure, précité, note 2, paragr. 57-60 et 63-65.
[121]
Barreau du Québec c. Tribunal des professions,
[122] Supra, paragr. [17]
[123] Supra, paragr. [18].
[124] Lettre du 29 juin 2011 du Directeur des services professionnels par intérim du CSSS de Maskinongé aux médecins traitants des patients de l’appelant.
[125] Lettre du 28 juin 2011 du directeur des services de santé et des affaires médicales de l’Agence de la santé et des services sociaux de la Mauricie et du Centre-du-Québec au directeur des enquêtes du Bureau du syndic du Collège des médecins.
[126] Lettre du 4 juillet 2011 du syndic du Collège des médecins au directeur des affaires médicales de l’Agence de la santé et des services sociaux de la Mauricie et du Centre-du-Québec.
[127] Supra, paragr. [23] à [28].
[128] Décision précitée, note 30.
[129] Décision précitée, note 35.
[130] Jugement de la Cour supérieure, précité, note 2, paragr. 66-78.
[131] Ibid.
[132]
Doré c. Barreau du Québec,
[133] R. c. Oakes,
[134] Doré c. Barreau du Québec, arrêt précité, note 132, paragr. 66, p. 429. Voir aussi le paragr. 54, p. 425.
[135] C.D. (culpabilité), précitée, note 5, paragr. 208-250.
[136] Jugement de la Cour supérieure, précité, note 2, paragr. 97.
[137] C.D. (sanction), précitée, note 6, paragr. 113, 143, 145, 146 et 162.
[138] Jugement du T.P., précité, note 3, paragr. 145.
[139] Pateras c. M.B., arrêt précité, note 114.
[140] C.D. (culpabilité), précitée, note 5, paragr. 30 à 48.
[141] Ibid.
[142]
Barreau du Nouveau-Brunswick c. Ryan,
[143]
Paquette, c. Comité de discipline de la Corporation professionnelle
des médecins du Québec,
[144] C.D. (sanction), précitée, note 6, paragr. 123 à 125.
[145] Ibid., paragr. 157-168.
[146] Voir supra, paragr. [77] et la note 93.
[147] Supra, paragr. [31] et note 35.
[148] Supra, paragr. [24] et [25].
[149] Rappelons que depuis le 17 avril 2008, l’appelant est sous le coup d’une interdiction de pratiquer la psychiatrie auprès des enfants et des adolescents prononcée par le Conseil de discipline dans le dossier disciplinaire numéro 675 : voir supra, paragr. [26] et [120] et note 30.
[150] Supra, paragr. [24] à [26] et note 30.
[151] C.D. (sanction), précitée, note 6, paragr. 127.
[152] Ibid., paragr. 127-132.
[153] Ibid., paragr. 142.
[154] Ibid., paragr. 43, 44 et 143-148.
[155] Supra, paragr. [4] et [5].
[156] Paquette c. Comité de discipline de la Corporation professionnelle des médecins du Québec, précité, note 143, p. 306.
[157] Supra, paragr. [26] et note 30.
[158]
P. Bernard, « La sanction en droit disciplinaire : quelques
réflexions », dans Développements récents en déontologie, droit
professionnel et disciplinaire, Formation permanente, Barreau du Québec,
vol. 206, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2004, p. 71, aux p. 123 et
124. L’auteur cite le jugement du Tribunal des professions dans Kenny c.
Dentistes (Corporation professionnelle),
[159] Arrêt précité, note 143.
[160] Ibid., paragr. 90 et 91, p. 1103.
[161] Jugement du T.P., précité, note 3, paragr. 155.
[162] P. Bernard, article précité, note 158, aux p. 124-126.
[163] Décision précitée, note 17.
[164] Décision précitée, note 18.
[165] C.D. (sanction), précitée, note 6.
[166] Décision précitée, note 23.
[167] Jugement du T.P., précité, note 3.
[168] Jugement précité, note 25.
[169] Jugement de la Cour supérieure, précité, note 2.
[170] Arrêt précité, note 1.
[171] Décision du Comité de discipline du 17 septembre 2002, précitée, note 8.
[172]
Notaires (Corporation professionnelle) c. Delorme,
[173]
Latulippe c. Tribunal des professions,
[174]
R. c. O’Connor,
[175]
R. c. Dixon,
[176] Voir supra, paragr. [77].
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