Ruel c. Lucna |
2021 QCTAL 26829 |
TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT |
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Bureau dE Montréal |
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No dossier : |
582980 31 20210810 G |
No demande : |
3315466 |
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Date : |
20 octobre 2021 |
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Devant la juge administrative : |
Rachel Tupula |
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Jean Ruel |
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Locateur - Partie demanderesse |
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c. |
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Exama Lucna |
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Locataire - Partie défenderesse |
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D É C I S I O N
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[1] Par une demande introduite le 10 août 2021, le locateur réclame le recouvrement du loyer dû au moment du départ de la locataire (860 $), l’équivalent des loyers perdus (2 340 $), les frais d’énergie (145,18 $), des dommages-intérêts pour dommages causés au logement (2 804,27 $), les frais de dépistage (333,20 $), l’indemnité additionnelle prévue au Code civil du Québec (C.c.Q.) et les frais judiciaires.
[2] Les parties étaient liées par un bail qui a commencé en juillet 2014 et a été reconduit année après année au loyer mensuel de 780 $.
[3] Le logement concerné est un 5 ½.
[4] La preuve démontre que la locataire a quitté le logement le 30 juin 2019 et devait un solde de 80 $ pour le mois de mai 2019 et de 780 $ pour le mois de juin 2019.
[5] La locataire admet devoir cette somme, mais allègue avoir eu des problèmes avec son ex-conjoint à titre de justification.
[6] Au départ de la locataire, le locateur affirme que le logement n’a pas été remis dans l’état où elle l’avait reçu tel que démontré par certaines photographies.
[7] Il explique qu’il y avait des trous dans les murs ainsi que des dessins d’enfants, que la porte de la toilette a été défoncée, que le comptoir de la cuisine a été brûlé, le lavabo de la salle de bain endommagé, le siège de la toilette retiré, l’évier de la cuisine bloqué par des aliments, la céramique du plancher de la cuisine brisée et que de nombreux biens ont été abandonnés pêle-mêle ou dans des sacs à l’intérieur du logement.
[8] En résumé, il dit avoir dû réparer l’ensemble de ces choses et remplacer également le plancher au grand complet étant donné que le modèle de céramique brisée par la locataire n’était plus disponible sur le marché.
[9] De plus, la locataire s’était engagée à conserver les murs du logement peints en blanc, dit le locateur.
[10] En les peignant en brun chocolat, trois couches de peinture ont été nécessaires à la remise du logement comme avant, conformément à ce qui était convenu au bail.
[11] Le locateur ventile ainsi la somme réclamée à titre de dommages matériels : peinture (693,75 $), évier et robinet (490,66 $), comptoir et plancher de cuisine (1 953,03 $), amendant ainsi le montant de sa réclamation à 3 137,44 $, ce que le Tribunal autorise.
[12] Comme le locateur se dit à la retraite, c’est en exécutant lui-même lesdits travaux nécessaires à la remise en état du logement qu’il choisit de minimiser ses dommages.
[13] S’il avait fait exécuter les travaux par un entrepreneur spécialisé, il estime que les coûts réclamés auraient été le triple.
[14] Les travaux se terminent en février 2020, soit huit mois après le départ de la locataire.
[15] Le logement n’a pas été reloué avant le 1er avril 2020.
[16] Le locateur réclame cependant à la locataire uniquement trois mois de loyers perdus, estimant ce délai juste et réclame les frais d’énergie en conséquence (146,18 $).
[17] Enfin, il dit que la locataire a quitté au beau milieu de la nuit sans lui laisser sa bonne adresse selon le retour du courrier qu’il lui a envoyé au sujet des sommes dues pour les loyers impayés.
[18] Il a tenté à plusieurs reprises de lui téléphoner et de lui laisser des messages, mais la locataire n’a jamais rappelé.
[19] Ainsi, il réclame des frais de dépistage de 333,20 $.
[20] Au niveau des dommages causés au logement, la locataire ne nie pas avoir peint les murs en brun en dépit de ce qui était convenu au bail, mais dit que c’est son ex-conjoint qui l’a fait.
[21] Elle admet avoir abandonné des biens au logement, mais dit les avoir laissés dans une seule pièce, contrairement à ce que les photographies du locateur démontrent.
[22] Elle admet l’absence de siège de toilette, mais témoigne ne pas avoir les moyens financiers de réparer les dommages allégués par le locateur.
[23] Elle dit que si elle ne rappelle pas le locateur, c’est parce qu’elle a perdu son numéro de téléphone en raison de la perte de son cellulaire.
Analyse
[24] Le recours du locateur est fondé sur les articles suivants du C.c.Q.:
« 1862. Le locataire est tenu de réparer le préjudice subi par le locateur en raison des pertes survenues au bien loué, à moins qu’il ne prouve que ces pertes ne sont pas dues à sa faute ou à celle des personnes à qui il permet l’usage du bien ou l’accès à celui-ci.
Néanmoins, lorsque le bien loué est un immeuble, le locataire n’est tenu des dommages-intérêts résultant d’un incendie que s’il est prouvé que celui-ci est dû à sa faute ou à celle des personnes à qui il a permis l’accès à l’immeuble. »
« 1890. Le locataire est tenu, à la fin du bail, de remettre le bien dans l’état où il l’a reçu, mais il n’est pas tenu des changements résultant de la vétusté, de l’usure normale du bien ou d’une force majeure.
L’état du bien peut être constaté par la description ou les photographies qu’en ont faites les parties ; à défaut de constatation, le locataire est présumé avoir reçu le bien en bon état au début du bail. »
[Nos soulignements]
[25] L’article
[26] L'article
[27] Par ailleurs, les
articles
[28] L’évaluation des dommages relève de l’appréciation de la preuve et de l’ensemble des faits.
[29] Le Tribunal retient le témoignage crédible et sincère du locateur.
[30] La preuve prépondérante démontre que les dommages causés au logement dépassent un usage normal et que la locataire a manifestement manqué à son obligation de remettre le logement en bon état à son départ. Elle sera donc tenue responsable financièrement de la réparation de ces dommages, ayant peu ou à peu près pas d’explication à l’égard de ceux-ci.
[31] Toutefois, l’évaluation des dommages vise à replacer le locateur dans la même position où il était n’eussent été les dommages causés par la locataire. Seul le remboursement des dommages immédiats, directs et prévisibles peut être octroyé. Ainsi, il y a lieu d’appliquer un facteur de dépréciation pour tenir compte de l’achat de matériaux neufs et du degré d’usure des biens remplacés.
[32] Le Tribunal a noté que l’immeuble a été construit en 1960 et a été rafraîchi et rénové entre chaque occupation par le locateur.
[33] Dans les circonstances, le Tribunal fera droit au montant intégral réclamé pour la peinture (693,75 $), mais appliquera une dépréciation équivalente à 35 % (855,29 $) en ce qui a trait à la somme restante (2 443,69 $) en ce qui a trait aux dommages causés au lavabo de la salle de bain, à l’évier de la cuisine et au plancher.
[34] Le Tribunal fera donc droit à une somme de 1 588,40 $ auquel s’ajoutent les frais de peinture 693,75 $ pour un montant total de 2 282,15 $ à titre de dommages-intérêts matériels.
[35] En ce qui concerne les sommes réclamées à titre de perte de loyer, considérant l’état du logement et les travaux à effectuer, le Tribunal estime suffisante et raisonnable une somme de 1 560 $ équivalant à deux mois de loyer à laquelle s’ajoutent les frais d’énergie (79,59 $) correspondant à cette période et les loyers dus au moment du départ de la locataire (860 $).
[36] Enfin, la facture des frais de dépistage s’élève à 57,49 $ et non à 333, 20 $, le locateur ayant inclus les frais de notification dans le montant spécifié à sa demande.
[37] Le Tribunal fera droit à 57,49 $ à titre de frais de dépistage, les autres sommes étant soumises à l’article 7 du Tarif des frais exigibles par le Tribunal administratif du logement.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[38] CONDAMNE la locataire à payer au locateur la somme de
4 839,23 $, avec intérêts au taux légal et l’indemnité additionnelle
prévue à l’article
[39] REJETTE la demande du locateur quant au surplus.
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Rachel Tupula |
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Présence(s) : |
le locateur la locataire |
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Date de l’audience : |
15 octobre 2021 |
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