Lemieux c. El Farssi |
2018 QCRDL 23838 |
RÉGIE DU LOGEMENT |
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Bureau dE Longueuil |
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No dossier : |
316219 37 20170124 T |
No demande : |
2516080 |
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Date : |
16 juillet 2018 |
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Régisseur : |
Marc Landry, juge administratif |
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Gérard Lemieux |
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Locateur - Partie demanderesse |
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c. |
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Abdelhadi El Farssi |
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Locataire - Partie défenderesse |
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D É C I S I O N
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[1] Le 1er juin 2018, le locateur demande la rétractation de la décision rendue le 22 mai 2018, laquelle a rejeté sa demande en dommages-intérêts.
[2] L'article
« 89. Si une décision a été rendue contre une partie qui a été empêchée de se présenter ou de fournir une preuve, par surprise, fraude ou autre cause jugée suffisante, cette partie peut en demander la rétractation.
Une partie peut également demander la rétractation d'une décision lorsque la Régie a omis de statuer sur une partie de la demande ou s'est prononcée au-delà de la demande.
La demande de rétractation doit être faite par écrit dans les dix jours de la connaissance de la décision ou, selon le cas, du moment où cesse l'empêchement.
La demande de rétractation suspend l'exécution de la décision et interrompt le délai d'appel ou de révision jusqu'à ce que les parties aient été avisées de la décision.»
[3] La
demande de rétractation respecte à sa face même le délai de dix jours prévu
pour sa production conformément à l’article
[4] Le locateur allègue qu’il ne s’est pas présenté à l’audition du 8 mai 2018 puisqu’il s’est trompé dans les dates pour deux dossiers différents.
[5] À l’audience, la version se module. Le locateur soumet s’être présenté le 8 mai 2018, mais pas à la bonne heure.
[6] Quoi qu’il en soit de l’heure et de la date, la preuve révèle que le locateur a été négligent dans la gestion de son agenda, dans la vérification de la date d’audience. La demande de rétractation doit donc être rejetée selon la jurisprudence et la doctrine[1].
[7] Dans leur analyse sur la jurisprudence en matière de louage résidentiel, Thérèse Rousseau-Houle et Martine De Billy indiquent au sujet de l’absence d'une partie à une audience :
« Le seul fait qu'une partie soit absente à l'audition ne lui donnera pas automatiquement droit à une demande de rétractation. En vertu de l'article 89, la partie doit motiver son absence par une cause jugée suffisante.» [2]
[8] Le Tribunal fait siens les propos de la juge administrative Francine Jodoin dans la cause Aguilar c. True North[3] qui considère que l’empêchement auquel réfère l’article 89 ne peut résulter de la négligence d’une partie à assurer sa présence à l’audience :
« [11] La simple absence à l'audience est insuffisante pour justifier la rétractation d'une décision.
[12] Cet empêchement ne peut résulter de la négligence d'une partie à assurer sa présence à l'audience.
[13] Lorsque le motif de rétractation repose sur le fait qu'une partie n'a pas reçu l'avis d'audience, cela ne permet pas d'accueillir d'emblée la demande sans autre vérification. Il faut quand même s'assurer de la véracité d'une telle affirmation et vérifier que la négligence n'est pas en cause dans l'absence de la partie.
[14] En effet, le droit d'être entendu n'est pas absolu et est balisé par l'obligation d'une partie de prendre les moyens nécessaires pour être présent à la date de l’audience.
[15] Dans la décision Lettrage Graphico-Tech inc. c. Quden inc.[4], le juge François Marchand de la Cour du Québec énonce ce qui suit :
« En matière de rétractation de jugement, il faut trouver un juste équilibre entre deux principes qui s'affrontent, soit celui de la stabilité des jugements rendus et celui du droit à une défense pleine et entière. Il est donc essentiel de déterminer si la négligence de la partie défenderesse de protéger adéquatement ses droits est excusable ou non. La jurisprudence la considère excusable lorsqu'elle a été en quelque sorte causée par des circonstances extérieures à la partie elle-même, soit parce qu'elle a été induite en erreur ou surprise par la partie adverse ou par des tiers dont elle ne répond pas. La situation est fort différente, lorsque la partie défenderesse a fait preuve d'un manque de sérieux flagrant dans la conduite de ses affaires, en ne faisant pas un suivi adéquat de son dossier. » [Notre soulignement]
[16] Comme le souligne également, le juge administratif Marc Landry dans l’affaire Rouleau-Lamadeleine c. Bibeau[5] :
« [12] La preuve d'une négligence simple ou d'un comportement insouciant est suffisante pour rejeter une demande de rétractation. Il n'est pas nécessaire d'être en présence ou de démontrer une « négligence grossière », selon la Cour d’appel.[6] » »
[9] Le locateur n’ayant pas justifié son empêchement et son absence par la surprise, la fraude ou une autre cause jugée suffisante, sa demande de rétractation ne peut être accueillie.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[10] REJETTE la demande de rétractation;
[11] MAINTIENT le jugement rendu le 22 mai 2018.
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Marc Landry |
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Présence(s) : |
le locateur le locataire |
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Date de l’audience : |
10 juillet 2018 |
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[1]
Bernier c. Ledoux, 26-070618-001T-081002, 1er novembre
2008, Marc Landry j. adm.; Anderson c. Mohebbinia,
[2] Thérèse Rousseau-Houle et Martine de Billy, Le bail du logement; Analyse de la jurisprudence, 1989, Collection Wilson et Lafleur, page 307.
[3]
[4]
[5]
[6]
9125-3575 Québec inc. c. Investissements Garantis inc.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
appel; la consultation
du plumitif s'avère une précaution utile.