Décision

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Gabarit EDJ

Normandeau c. Cogeco Média inc.

2016 QCCS 2890

 

JO 0267

 
 COUR SUPÉRIEURE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

QUÉBEC

 

N° :

200-17-024122-160

 

 

DATE :

22 juin 2016

______________________________________________________________________

 

L’HONORABLE SUZANNE OUELLET, j.c.s.

______________________________________________________________________

 

NATHALIE NORMANDEAU

 

Demanderesse

 

c.

 

COGECO MÉDIA INC.

 

Défenderesse

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

(sur demande d’ordonnance de sauvegarde)

______________________________________________________________________

 

1.         Contexte

[1]          Le 9 mai 2016, la demanderesse Nathalie Normandeau notifie à la défenderesse Cogeco Média inc. (Cogeco) une demande introductive d’instance par laquelle elle conteste son congédiement du 5 avril 2016. Elle réclame la rémunération convenue au contrat de travail à durée déterminée jusqu’au 25 août 2019 (572 000 $)[1] de même que des dommages moraux (100 000 $) et punitifs (50 000 $)[2].

[2]          Cette demande est assortie d’une demande d’ordonnance de sauvegarde. La conclusion recherchée est la suivante :

« ORDONNER à la défenderesse de maintenir, rétroactivement au 4 avril 2016, la rémunération payable à la demanderesse en vertu du contrat P-3 jusqu’au jugement final à être rendu dans la présente affaire; »

[3]          Elle justifie comme suit cette demande d’ordonnance de sauvegarde :

« 61. Au chapitre du préjudice irréparable et de l’urgence nécessitant une intervention immédiate de la présente Cour, qu’il suffise de souligner que l’absence de rémunération de la demanderesse engendre des conséquences particulièrement graves notamment au regard des coûts qu’elle doit supporter dans le cadre des procédures judiciaires dont elle est l’objet et, par conséquent, de son droit à une défense pleine et entière en ce qui a trait aux accusations criminelles portées contre elle;

62. Le congédiement illégal imposé par la défenderesse équivaut à une condamnation de la demanderesse sur la place publique, alors que cette dernière demeure en attente de subir un procès au cours des prochains mois, afin qu’un tribunal indépendant et impartial tranche les accusations criminelles dont elle est l’objet;

63. Ajoutons que cette condamnation sur la place publique a nécessairement pour effet de rendre la demanderesse inemployable sur le marché du travail, et ce, tant que le jugement ne sera pas rendu à l’égard des accusations criminelles; »[3]

2.         Analyse et décision

[4]          Ce jugement ne se prononce en aucune façon sur la culpabilité de Mme Normandeau.

[5]          Elle doit être présumée innocente[4].

[6]          Il s’agit uniquement de trancher une demande de sauvegarde dans le cadre d’un litige civil.

            2.1       Les principes applicables

[7]          L’ordonnance de sauvegarde obéit aux principes suivants :

1.     Il s’agit d’une mesure judiciaire discrétionnaire[5];

2.     Elle est de nature exceptionnelle puisqu’elle n’est accordée qu’en cas d’urgence : sans urgence, pas d’ordonnance[6];

3.     Elle est émise pour des fins conservatoires et vise essentiellement à préserver les droits des parties au litige[7];

4.     L’ordonnance de sauvegarde commande un contrôle préalable sérieux[8];

5.     Elle doit être pour une durée limitée[9];

6.     Elle constitue une mesure temporaire émise en l’absence de présentation d’une preuve complète[10];

7.     Le but de l’ordonnance de sauvegarde est de maintenir le statu quo et/ou de rétablir l’équilibre;

8.     Les tribunaux doivent utiliser le pouvoir exceptionnel de l’ordonnance de sauvegarde avec prudence et retenue[11];

9.     Il faut éviter de sceller le sort du litige ou de préjuger du fond;

10.  L’ordonnance de sauvegarde ne doit pas créer un état de fait prolongé qui puisse servir à cristalliser une situation avant que les parties n’aient pu soumettre tous leurs moyens : le recours au fond doit conserver son utilité;

11.  L’ordonnance de sauvegarde n’est pas le recours approprié pour obtenir le paiement d’une créance, sauf cas exceptionnels[12].

[8]          Toutes ces caractéristiques propres à l’ordonnance de sauvegarde expliquent pourquoi sa délivrance s’apparente à celle d’une injonction provisoire et répond aux mêmes critères[13].

[9]          C’est donc à la lumière des critères suivants que la demande d’ordonnance de sauvegarde de la demanderesse sera traitée :

- L’urgence;

- L’apparence de droit;

- Le préjudice irréparable;

- En l’absence d’apparence de droit : la balance des inconvénients.

2.2        L’urgence

[10]       La notion d’urgence doit être analysée à la lumière des circonstances propres à chaque affaire[14].

[11]       Par contre, l’urgence est un critère essentiel à l’ordonnance de sauvegarde. Il doit être apprécié de façon stricte et rigoureuse.

[12]       Les étapes importantes du litige criminel (enquête préliminaire et procès) ne sont pas immédiates[15]. Madame Normandeau n’a pas encore eu à acquitter d’honoraires dans le cadre du litige criminel.

[13]       Considérant également les motifs de ce jugement exposés au chapitre du préjudice irréparable, il n’y a pas d’urgence, « dans le sens que l’intervention immédiate du Tribunal est nécessaire »[16].

[14]       Enfin, si le dossier est mis en état avec célérité, l’instruction du litige civil pourrait se tenir à la fin de l’automne 2016 ou au début de l’année 2017.

[15]       Bien que le premier critère nécessaire à l’émission de l’ordonnance de sauvegarde ne soit pas satisfait, le contexte de l’affaire justifie la poursuite de l’analyse.

2.3       L’apparence de droit

[16]       Cogeco exploite plusieurs stations radio dont la station FM93 à Québec[17].

[17]       La demanderesse a fait carrière en politique pendant plusieurs années :

-        ministre déléguée au Développement régional et au tourisme;

-        ministre responsable de la région de la Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine;

-        ministre des Affaires municipales et des régions;

-        vice-première ministre du Québec;

-        ministre des Ressources naturelles et de la faune[18].

[18]       Elle a quitté le monde politique en 2011.

[19]       Le 18 novembre 2014, Cogeco embauche Mme Normandeau pour coanimer l’émission d’affaires publiques intitulée « Normandeau-Duhaime, le midi ». Son emploi débute le 8 décembre 2014[19].

[20]       En vertu de son contrat de travail, les fonctions de Mme Normandeau s’étendent également à la préparation de l’émission (clause 2.1 b)), la représentation, la contribution lors d’événements spéciaux (clause 2.1 d)) et le suivi des courriels ou toute autre communication (clause 2.1 h)).

[21]       Le contrat de Mme Normandeau fut renouvelé le 19 octobre 2015 jusqu’au 25 août 2019[20].

[22]       Pierre Martineau est le supérieur immédiat de Mme Normandeau. Il est le directeur général des programmes au FM93[21].

[23]       Patrick Bégin est directeur adjoint à la programmation[22].

[24]       Michel Lorrain est vice-président, programmation et information des stations parlées chez Cogeco[23].

[25]       La demanderesse a témoigné à la Commission Charbonneau. Pierre Martineau reconnaît avoir suivi son témoignage.

[26]       Le 2 décembre 2014, la demanderesse reçoit un préavis de blâme émanant de la Commission Charbonneau[24].

[27]       Ce préavis de blâme est à la connaissance de M. Martineau à l’époque du début de l’emploi[25]. Il en a même été question lors de l’émission du 12 janvier 2015[26]. Il admet aussi être au courant de la nature des allégations de corruption qui planent sur Mme Normandeau à la même période[27].

[28]       Pour Cogeco, ces seuls éléments n’affectent pas la crédibilité et la légitimité de Mme Normandeau[28].

[29]       Le rapport de la Commission Charbonneau est déposé le 24 novembre 2015, après le renouvellement du contrat de travail de Mme Normandeau[29].

[30]       Jusqu’au 17 mars 2016, aucun litige n’existe entre les parties. Les relations sont très harmonieuses. Le contrat de Mme Normandeau est renouvelé depuis octobre 2015. L’émission qu’elle coanime jouit d’une popularité et d’une cote d’écoute remarquables[30]. Elle est une animatrice vedette[31].

[31]       Le 17 mars 2016, tout bascule.

[32]       Madame Normandeau est arrêtée par l’Unité permanente anticorruption (UPAC). Elle fait l’objet de plusieurs chefs d’accusation : complot, fraude, abus de confiance, corruption de fonctionnaires et utilisation de la charge publique pour obtenir des faveurs. Les gestes auraient été prétendument commis entre le 1er janvier 2000 et le 31 décembre 2012, alors qu’elle occupait des fonctions de députée ou de ministre au sein du caucus du parti libéral du Québec et du Gouvernement du Québec[32].

[33]       Les événements se précipitent.

[34]       Vers 6 h 45 le matin, Mme Normandeau informe Patrick Bégin de son arrestation par l’UPAC.

[35]       Vers 7 h 42 le matin, la nouvelle sort sur certains médias[33].

[36]       Rapidement, les événements font l’objet d’une importante couverture médiatique[34] et notamment par une des stations Cogeco[35].

[37]       Le 17 mars 2016 au matin, dans le cadre de l’émission « Bouchard en parle », l’animateur annonce qu’un de ses collègues a déjà traité, sur Twitter, des accusations portées contre Mme Normandeau[36].

[38]       Promptement, Cogeco décide de retirer des ondes Mme Normandeau pour l’émission de 11 h. À cet effet, M. Martineau déclare :

« 27. Ainsi, peu avant 9 h le 17 mars 2016, j’ai considéré, après discussion avec mes supérieurs, que les faits connus à ce moment étaient de nature à jeter un doute suffisamment sérieux sur l’image et la crédibilité de Mme Normandeau pour obliger Cogeco Média à agir rapidement afin de préserver la réputation, l’image et la crédibilité du FM93 et de l’entreprise. »[37]

[39]       Pour sa part, Michel Lorrain déclare ce qui suit :

« 14. Ainsi, peu avant 9 h, le 17 mars 2016, il a été officiellement décidé que les faits connus à ce moment étaient de nature à jeter un doute suffisamment sérieux sur l’image et la crédibilité de madame Normandeau pour obliger Cogeco Média à agir rapidement afin de préserver la réputation, l’image et la crédibilité de la station et de l’entreprise.

15. Suite à ces discussions, j’ai donc téléphoné à madame Christine Dicaire, directrice des communications, de la promotion et du marketing de Cogeco Média, afin de lui demander de préparer un communiqué de presse annonçant que suite à l’arrestation de madame Normandeau, celle-ci était suspendue sans solde de ses fonctions d’animatrice de l’émission Normandeau-Duhaime, le midi jusqu’à ce que plus d’informations soient connues quant à cet évènement et son développement. »

[40]       Un communiqué de presse[38] est signé par Christine Dicaire. Il est émis à 10 h 27 : une demi-heure avant l’émission, dans un contexte d’urgence et de gestion de crise. Il se lit comme suit :

« Montréal- 17 mars 2016. Suite à l’arrestation ce matin par l’UPAC de l’animatrice du FM93, Nathalie Normandeau, la direction de Cogeco Média annonce qu’elle suspend Madame Normandeau, sans solde et en accord avec les normes et pratiques de l’entreprise, et ce jusqu’au dénouement des procédures.

Aucun autre commentaire ne sera émis pour l’instant par respect pour le processus judiciaire en cours.

Christine Dicaire

Directrice, Marketing et communications

Cogeco Média inc. »[39]

[41]       Dans sa déclaration sous serment du 13 mai 2016, Mme Dicaire déclare :

« 5. Ma compréhension des choses était que la décision prise par Cogeco Média était de suspendre Mme Normandeau sans solde jusqu’à ce que plus d’information soit connue quant à cet événement et son développement, et que la situation serait évaluée au fur et à la mesure.

6. J’ai rédigé le communiqué de presse, pièce P-4, en ce sens.

[…]

8. Par l’emploi de l’expression « jusqu’au dénouement des procédures », je référais aux procédures policières qui étaient en cours à ce moment-là.

9. Je n’ai jamais voulu véhiculer l’idée que la décision de suspendre Mme Normandeau en était une qui était définitive et qui allait nécessairement s’appliquer jusqu’à l’issue des procédures judiciaires et, d’ailleurs, ce n’était pas les instructions que j’avais reçues. »[40]

[42]       Malgré les termes du communiqué, M. Martineau soumet également que la suspension imposée s’avérait temporaire puisque « l’ensemble des faits pertinents n’étaient pas encore connus à ce moment »[41], notamment sur la nature des accusations et des autres faits entourant ces événements. Il déclare de plus que le communiqué de presse[42] a été publié avant les accusations :

« 32. Au contraire, aucune accusation n’ayant encore été déposées [sic] à ce moment, notre intention était alors de suspendre madame Normandeau jusqu’à nouvel ordre, de manière à prendre connaissance de l’ensemble des faits et pouvoir prendre les décisions qui s’imposeraient en temps opportun et en fonction de la façon dont évolueraient les événements au cours des prochaines heures, jours et semaines.

33. Ainsi, il s’agissait à ce moment-là d’une mesure administrative et provisoire prise dans un contexte de gestion de crise afin de réagir à un évènement imprévu, soudain et toujours en cours de développement. Il m’est apparu alors évident qu’une personne arrêtée par l’UPAC et contre qui on allait vraisemblablement déposer des accusations en lien avec son rôle de politicienne, n’avait plus la crédibilité et la légitimité nécessaire [sic] animer une émission d’affaires publiques traitant majoritairement de questions politiques.

34. Au cours de la journée du 17 mars 2016, j’ai d’ailleurs, à quelques reprises, publiquement déclaré que la suspension de Mme Normandeau était décrétée « jusqu’à nouvel ordre », le tout tel qu’il appert d’un Article de Kathryne Lamontagne daté du 18 mars 2016, Pièce PM-2. »[43]

[43]       Monsieur Martineau admettra à l’interrogatoire qu’il avait eu effectivement écho de la nature des accusations au moment de la publication du communiqué de presse du 17 mars 2016[44]. Une certaine incertitude régnait tout de même tant que l’UPAC n’avait pas tenu sa conférence de presse prévue pour 11 h le matin.

[44]       Monsieur Martineau déclare à cet effet :

« 23. Peu après [après 6 h 45], la nouvelle de l’arrestation de madame Normandeau a été rendue publique et a commencé à s’ébruiter dans les autres médias.

24. À ce moment, les accusations qui allaient être portées contre elle et la suite des événements demeuraient incertains, mais l’UPAC annonçait qu’elle tiendrait une conférence de presse sur le sujet à 11 h le matin même. »[45]

[45]       Madame Normandeau demande alors un avis juridique portant sur la légalité de sa suspension. Elle le communique à M. Martineau le 29 mars 2016.

[46]       Cet avis juridique conclut que la suspension administrative de Mme Normandeau devait être avec solde[46].

[47]       Après réception de l’avis juridique et consultation auprès de ses avocats[47], Cogeco se ravise et paie le salaire de Mme Normandeau jusqu’à la veille du jour de son congédiement (5 avril 2016). Pierre Martineau déclare à cet effet :

« 70. Lors de la rencontre du 5 avril 2016, j’ai aussi verbalement informé Mme Normandeau que Cogeco Média avait pris la décision de lui payer les journées où elle avait été suspendue, soit du 17 mars au 4 avril 2016, ce qui fut effectivement fait dans les meilleurs délais par la suite. »

[48]       Cogeco pouvait suspendre Mme Normandeau dans la mesure où elle souhaitait protéger ses intérêts légitimes.

[49]       Le pouvoir de suspension « se rattache à l’exercice de la fonction de direction de l’entreprise et trouve sa justification dans la nécessité de préserver l’intérêt de celle-ci »[48].

[50]       Le retrait de Mme Normandeau des ondes du FM93, bien que légitime, ne pouvait cependant faire l’objet d’une suspension sans traitement, selon les principes établis par la Cour suprême dans l’arrêt Cabiakman c. Industrielle Alliance[49].

[51]       Le 5 avril 2016, Cogeco congédie Mme Normandeau, considérant que l’ensemble des événements était de nature à affecter de manière importante l’image ou la crédibilité de Mme Normandeau, de Cogeco et de la station radio FM93[50].

[52]       Monsieur Lorrain déclare à cet effet :

« 32. Notre processus de prise de connaissance des faits, d’analyse du dossier et de discussions ayant mené à la rupture du lien d’emploi de madame Normandeau a duré jusqu’au 5 avril 2016. »

[53]       Monsieur Pierre Martineau écrit :

« Le 5 avril 2016                                               Personnel et confidentiel

Remis de main à main

Madame Nathalie Normandeau

[…] Québec (Québec) […]

 

Madame,

 

La présente fait suite à votre suspension, sans solde, qui vous a été imposée suite à votre arrestation et au dépôt d’accusations criminelles.

 

Durant cette période, nous avons revu votre dossier et nous avons conclu que les récents événements vous impliquant, affectaient votre image et/ou votre crédibilité, et qu’en conséquence, nous ne pouvions, dans le cadre de l’émission que vous animiez, vous laisser en ondes.

 

Nous avons donc décidé de résilier votre contrat de travail et de mettre fin à votre emploi, pour motifs sérieux, en vertu de l’article 5.2 de celui-ci et ce, à compter du 5 avril 2016.

 

De plus, et sans préjudice à ce que ci-dessus dit, même sans cet article 5.2 du contrat de travail, nous aurions quand même résilié votre contrat de travail pour motifs sérieux puisque ces événements vous ont fait perdre la légitimité, l’image et la crédibilité, tous nécessaires pour animer une telle émission et pour lesquelles nous avons contracté avec vous.

 

Nous vous remercions de votre contribution au sein du FM93 et vous souhaitons bonne chance dans vos démarches à venir.

 

(s) Pierre Martineau

Pierre Martineau

Directeur général des programmes

FM93

 

c.c. Dossier personnel; Direction générale Stations Cogeco Média - Québec »[51]

[54]       Messieurs Martineau et Lorrain admettent que les accusations portées contre Mme Normandeau reposent sur des faits qui ne sont pas en lien avec son emploi[52].

[55]       C’est plus précisément en se fondant sur la clause 5.2 c)(iii) que Cogeco met fin au contrat de travail de Mme Normandeau. Nous sommes ici en matière de congédiement et non de suspension. En cela, la présente affaire se distingue de l’arrêt Cabiakman c. Industrielle Alliance, compagnie d’assurance sur la vie[53].

[56]       La clause 5.2 du contrat de travail[54] prévoit ce qui suit :

« 5.2 Dans l’éventualité où l’une des situations ci-après décrites survenait, situations que l’Employé contractuel reconnait constituer un motif sérieux pour mettre fin au présent contrat, la Compagnie peut à son choix mettre fin au présent contrat sans que l’Employé contractuel n’ait droit à des dommages, indemnités ou autres montants, le tout effectif immédiatement, sans autre avis, ni délai :

[…]

c) Pour tout motif sérieux et notamment, sans limiter la généralité de ce qui précède :

(iii)       Un événement et/ou une déclaration affectant la crédibilité et/ou l’image de l’Employé contractuel et/ou affectant la crédibilité et/ou l’image de la Compagnie et/ou de la Station; »

[57]       Les termes de la clause 5.2 ne souffrent d’aucune ambigüité. Par contre, sa légalité et l’application qu’en a fait Cogeco feront l’objet d’une analyse plus poussée au mérite après une présentation complète de la preuve.

[58]       Ainsi, la validité de la résiliation du contrat d’emploi est une question de fond et ne peut être analysée dans le cadre de l’ordonnance de sauvegarde[55].

[59]       Cogeco a considéré que son image et sa crédibilité, celle de la demanderesse et de la station se trouvaient affectées par les accusations criminelles formelles déposées contre Mme Normandeau[56].

[60]       Contrairement à ce que plaide cette dernière, Cogeco ne présume pas de sa culpabilité aux accusations portées contre elle et n’épouse pas la thèse de l’UPAC. Dans sa déclaration sous serment, Pierre Martineau déclare :

« 68. Contrairement à ce que prétend Mme Normandeau au paragraphe 33 de sa demande, ce n’est pas en raison des accusations criminelles portées contre elle que la décision de résilier son contrat de travail a été prise, mais plutôt à cause du fait que les événements entourant son arrestation et le dépôt de ces accusations entachent sérieusement sa crédibilité et son image et par conséquent, celles du FM93 et de Cogeco Média, ce qui, selon son contrat de travail, constitue un motif sérieux pour lequel l’employeur est en droit de mettre fin à son emploi, le tout tel qu’il appert de la pièce P-8.

69. Bien que les accusations portées contre Mme Normandeau concernent des faits antérieurs à la période au cours de laquelle elle a débuté son emploi chez Cogeco Média et que ces faits ne sont pas en lien avec l’emploi qu’elle occupait au sein de notre entreprise, il n’en demeure pas moins que ces événements lui ont fait perdre la légitimité, l’image et la crédibilité qui sont nécessaires afin d’animer une émission d’affaires publiques et d’occuper toute autre fonction connexe. »[57]

[61]       Certes, Cogeco était déjà au courant des soupçons qui pesaient sur Mme Normandeau et du préavis de blâme émis par la Commission Charbonneau. Par contre, l’arrestation et le dépôt d’accusations criminelles en cours de contrat ont un impact plus important et vont au-delà d’un simple préavis de blâme et de simples soupçons.

[62]       Pierre Martineau précise à ce sujet :

« 26. Or, l’image, la crédibilité et l’irréprochabilité des animateurs sont des facteurs extrêmement importants dans le succès d’une station de radio parlée, et ce, particulièrement dans le cas d’une émission d’affaires publiques qui traite de politique et de ses différents acteurs, telle que Normandeau-Duhaime, le midi. »[58]

[63]       Cette déclaration n’est pas contredite et après le 17 mars 2016, Mme Normandeau reconnaît l’ampleur et la gravité des événements de même que l’impact qu’ils peuvent avoir sur son employeur. Elle est navrée de ce qui arrive[59].

[64]       À ce sujet, Patrick Bégin déclare ce qui suit :

« 5. Lors de cette conversation [17 mars 2016], madame Normandeau a répété, à maintes reprises, qu’elle était désolée, car elle savait qu’elle mettait Cogeco Média, ainsi que Pierre Martineau, le directeur général des programmes au FM93, et moi-même, dans l’embarras. »

[65]       Cette décision de mettre fin au lien d’emploi de Mme Normandeau, bien que contestée, a un effet immédiat. Il relève du pouvoir de direction, tout comme celui de suspendre un employé. À ce titre, la Cour d’appel écrit :

« [22] La règle usuelle en matière de sanctions disciplinaires en contexte d’emploi est la suivante : la sanction disciplinaire, dont l’imposition découle du pouvoir de direction de l’employeur, a un effet immédiat, que le salarié (ou un observateur externe) l’estime bien ou mal fondée (et que l’on soit en contexte syndiqué ou, comme en l’espèce, non syndiqué). Cela est vrai peu importe la nature de la mesure contestée (réprimande, coupure de salaire, suspension ou même congédiement).

[23] Que la sanction ait un effet immédiat n’empêche évidemment pas le salarié de la contester et si, par la suite, un tribunal annule la sanction, il rendra les ordonnances nécessaires pour assurer au mieux la compensation du préjudice subi par suite de l’imposition d’une mesure qui se révèle injustifiée, conformément au principe usuel de la réparation intégrale. Cela dit, pendant l’instance, la sanction conservera tout son effet et, règle générale, il n’y a pas lieu d’y surseoir. Cela est normal, considère-t-on, puisque la sanction disciplinaire découle du pouvoir de contrôle et de direction (pouvoir unilatéral) de l’employeur, le salarié étant tenu de s’y soumettre en raison du lien de subordination qui l’unit à celui-ci (devoir d’obéissance). »[60]

(soulignement ajouté)

[66]       Un employeur est justifié de résilier le contrat de travail d’un employé afin de protéger ou de rétablir l’image ou la réputation de son entreprise, après que celle-ci ait été ternie par les accusations déposées contre cet employé, même si celui-ci est plus tard acquitté de ces accusations. Ce droit ne fait d’ailleurs pas de doute lorsque les parties en ont convenu ainsi dans le contrat de travail (clause 5.2 c)(iii))[61].

[67]       Certes, Mme Normandeau bénéficie de la présomption d’innocence mais le contrat de travail prévoit nommément un motif de résiliation pour « (iii) un événement […] affectant la crédibilité et/ou l’image de l’Employé contractuel et/ou la crédibilité et/ou l’image de la Compagnie et/ou de la Station. »[62]

[68]       En l’espèce, la nature des accusations portées est grave.

[69]       À cela s’ajoutent le caractère public de la fonction de Mme Normandeau et son haut niveau de visibilité.

[70]       Ordonner le maintien du traitement de la demanderesse pendant l’instance sur le congédiement va, à prime abord, à l’encontre du droit de direction de l’employeur de résilier un contrat de travail en application d’une clause du contrat de travail, même si, au final, sa décision de congédier pourrait être jugée mal fondée.

[71]       La clause 5.2 c)(iii) du contrat de travail renouvelé en octobre 2015 et le pouvoir de direction de l’employeur créent plutôt une apparence de droit du côté de la défenderesse. En cela, le droit de la demanderesse n’est pas apparent.

            2.4       Le préjudice sérieux et irréparable

[72]       Le terme « irréparable » a trait à la nature du préjudice subi plutôt qu’à son étendue. C’est un préjudice qui ne peut être quantifié du point de vue monétaire ou un préjudice auquel il ne peut être remédié, en général, parce qu’une partie ne peut être dédommagée par l’autre[63].

[73]       La privation de rémunération pendant un certain temps ne constitue pas un préjudice irréparable puisqu’elle sera, le cas échéant, compensée suite à un jugement final qui invaliderait le congédiement[64].

[74]       Paraphrasant ainsi la Cour d’appel, même si l’on reconnaît les sentiments de vexation et d’embarras que peut ressentir Mme Normandeau du fait d’un congédiement qu’elle estime mal fondé, injuste et immérité, et les conséquences directes de la privation de rémunération dans le contexte de son litige criminel, « cela ne constitue pas un préjudice tel, qu’il puisse justifier » l’ordonnance de sauvegarde demandée.

[75]       « Sa situation à cet égard est typique de celle de tout salarié subissant »[65] un congédiement suite à l’application d’une clause du contrat de travail qui traite notamment d’atteinte à la crédibilité et à l’image comme cause de résiliation.

[76]       La décision de congédier est ultime et comporte sans conteste des inconvénients et un préjudice. Ce sont « les inconvénients inhérents »[66] à celle-ci.

[77]       Rappelons aussi que les tribunaux refusent généralement d’accorder des ordonnances de sauvegarde lorsque la conclusion recherchée est le paiement d’une créance[67].

[78]       Les difficultés financières éprouvées suite à la fin du lien d’emploi, de même que les préjudices moraux qui en résultent peuvent être compensés en dommages à l’issue du processus judiciaire.

[79]       Rappelons que l’ordonnance de sauvegarde est une mesure qui vise à rétablir ou conserver un certain équilibre entre les parties pendant l’instance. Le préjudice irréparable allégué doit nécessairement découler du manque d’équilibre entre les parties.

[80]       Certes, Mme Normandeau a droit à une défense pleine et entière dans le cadre de son procès criminel. Par contre, le procès criminel est complètement distinct du présent litige.

[81]       Bien qu’empathique à la situation de Mme Normandeau, le Tribunal rappelle que l’insécurité financière est le lot de bien des justiciables qui font face à la justice. Bon gré mal gré, les honoraires et les frais de justice pèsent sur tous les justiciables qui entreprennent un recours judiciaire ou qui y font face.

[82]       Ordonner le maintien de la rémunération de la demanderesse jusqu’à jugement final sur le présent litige annihilerait l’utilité du recours au fond et aurait pour conséquence d’accorder immédiatement, sur la foi d’un dossier incomplet et d’une analyse sommaire, le paiement anticipé d’une créance litigieuse. Là n’est pas l’objectif de l’ordonnance de sauvegarde qui se veut une mesure temporaire :

« L’on ne peut court-circuiter le déroulement normal d’une instance en tentant d’obtenir une ordonnance de sauvegarde qui équivaudrait à l’obtention prématurée d’un jugement de fond. »[68]

[83]       Enfin, Mme Normandeau n’est pas sans ressources ni actifs[69].

[84]       L’écueil du préjudice irréparable n’est pas surmonté.

            2.5       La balance des inconvénients

[85]       Au stade de la sauvegarde, il ne faut pas créer une situation irréversible.

[86]       Dans l’éventualité d’un jugement final favorable à Mme Normandeau, Michel Lorrain déclare qu’il « n’existe aucune raison de croire que Cogeco Média ne serait pas en mesure, au moment opportun, »[70] de verser les montants auxquels elle serait condamnée.

[87]       Pour sa part, Mme Normandeau estime qu’elle ne sera « vraisemblablement pas en mesure de rembourser Cogeco dans l’hypothèse où la Cour supérieure » l’ordonnerait[71].

[88]       Enfin, la demanderesse demande que sa rémunération soit maintenue jusqu’au jugement final à être rendu. Cette demande dépasse largement le critère de la durée limitée propre à l’ordonnance de sauvegarde.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[89]        REJETTE la demande d’ordonnance de sauvegarde de la demanderesse;

[90]        Frais à suivre.

 

 

__________________________________

SUZANNE OUELLET, j.c.s.

 

Me Sophie Cloutier

Me Geneviève Baillargeon-Bouchard

Poudrier Bradet

70, rue Dalhousie, bureau 100

Québec (Québec)  G1K 4B2

 

Me Michel Towner
Dentons Canada LLP

1, Place Ville-Marie, 39e étage

Montréal (Québec)  H3B 4M7

 

Dates d’audience :

 

31 mai et 9 juin 2016

 

 



[1]     Pièce P-3.

[2]     La demanderesse réclame également les intérêts et l’indemnité additionnelle sur toutes ces sommes.

[3]     Demande introductive d’instance et ordonnance de sauvegarde modifiée, par. 61, 62, 63.

[4]     Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, [annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, c. 11 (R.-U.)], art. 11 d).

[5]     Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA) c. Compagnie américaine de Fers et Métaux, 2006 QCCA 1372, par. 23, requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée (C.S. Can., 2007-05-03), 31778.

[6]     Lavoie c. Vailles, 2013 QCCA 1482.

[7]     176283 Canada inc. c. St-Germain, 2010 QCCA 1957, par. 7; Fraternité des policières et policiers de Montréal c. Trudeau, 2012 QCCS 4056, par. 19.

[8]     Brassard c. Société zoologique de Québec, [1995] R.D.J. 573 (C.A.).

[9]     THQ Montréal inc. c. Ubisoft Divertissements inc., 2011 QCCA 2344, par. 66.; Bell Mobility Cellular Inc. c. Worthware Systems International Inc., J.E. 97-1439 (C.A.); Natrel c. F. Berardini inc., [1995] R.D.J. 383 (C.A.).

[10]    Natrel c. F. Berardini inc., précité, note 9.

[11]    Aubut c. Marois, J.E. 2000-1090 (C.A.).

[12]    Lavoie c. Caisse populaire Desjardins du Village Huron, 2007 QCCQ 1483, par. 69, 70.

[13]    Tremblay c. Cast Steel Products (Canada) Ltd., 2015 QCCA 1952.

[14]    Khuong c. Asselin, 2015 QCCS 3937, par. 57.

[15]    Pièce P-22 sous scellés et faisant l’objet d’une ordonnance de non-divulgation, non-diffusion et non-publication.

[16]    Zaria c. Gignac, 2016 QCCS 85, par. 14.

[17]    Extrait du site internet de la défenderesse, pièce P-1.

[18]    Déclaration sous serment de la demanderesse, par. 1.

[19]    Contrat de travail, pièce P-2.

[20]    Contrat de travail, pièce P-3, clause 4.1.

[21]    Interrogatoire sur déclaration sous serment de Pierre Martineau du 18 mai 2016, p. 3 et déclaration sous serment, par. 2.

[22]    Déclaration sous serment, par. 1 et interrogatoire sur déclaration sous serment de Patrick Bégin du 18 mai 2016, p. 17.

[23]    Déclaration sous serment, par. 1 et interrogatoire sur déclaration sous serment de Michel Lorrain du 18 mai 2016, p. 3.

[24]    Pièce P-19.

[25]    Interrogatoire sur déclaration sous serment de Pierre Martineau, p. 20, 21.

[26]    Pièce P-18.

[27]    Interrogatoire sur déclaration sous serment de Pierre Martineau, p. 17, 18.

[28]    Id., p. 7, 8, 18, 19 à 21, 25.

[29]    Pièce PM-8, p. 3.

[30]    Déclaration sous serment de Pierre Martineau, par. 18.

[31]    Article du Journal de Québec du 18 mars 2016, pièce PM-2.

[32]    Déclaration sous serment de Nathalie Normandeau du 4 mai 2016, par. 9.

[33]    Pièce PM-4.

[34]    Déclaration sous serment de Pierre Martineau, par. 38, pièce PM-4; déclaration sous serment de Michel Lorrain, par. 23, pièce ML-1.

[35]    Pièce P-11.

[36]    Pièce P-17 et interrogatoire sur déclaration sous serment de Pierre Martineau, p. 44 à 47.

[37]    Déclaration sous serment de Pierre Martineau.

[38]    Pièce P-4.

[39]    Pièce P-4.

[40]    Voir également les déclarations sous serment de Pierre Martineau, par. 29 et Michel Lorrain, par. 14.

[41]    Déclaration sous serment de M. Pierre Martineau, par. 28, 29.

[42]    Pièce P-4.

[43]    Déclaration sous serment de M. Pierre Martineau, par. 32, 33, 37.

[44]    Interrogatoire sur déclaration sous serment de Pierre Martineau, p. 54, 63.

[45]    Déclaration sous serment de M. Pierre Martineau.

[46]    Avis juridique du 24 mars 2016, pièce P-7.

[47]    Interrogatoire sur déclaration sous serment de Pierre Martineau, p. 137-138.

[48]    Cabiakman c. Industrielle Alliance, [2004] 3 R.C.S. 195, par. 56.

[49]    Id.

[50]    Déclaration sous serment de Pierre Martineau, par. 66; déclaration sous serment de Michel Lorrain, par. 33.

[51]    Lettre du 5 avril 2016, pièce P-8.

[52]    Déclaration sous serment de Pierre Martineau, par. 69; déclaration sous serment de Michel Lorrain, par. 35.

[53]    Précité, note 48, par. 62.

[54]    Pièce P-3.

[55]    Université de Sherbrooke c. Patenaude, 2010 QCCA 2358, par. 22, 23.

[56]    Déclaration sous serment de Pierre Martineau, par. 33, 39, 62 et 66 et déclaration sous serment de Michel Lorrain, par. 32, 33.

[57]    La pièce P-8 est l’avis de congédiement du 5 avril 2016.

[58]    Voir au même effet la déclaration sous serment de Michel Lorrain, par. 13.

[59]    Courriels pièces P-B-1, P-B-2, PM-5.

[60]    Université de Sherbrooke c. Patenaude, précité, note 55.

[61]    Pièce P-3.

[62]    Clause 5.2 c)(iii) du contrat de travail, pièce P-13.

[63]    RJR - Macdonald c. Canada, [1994] 1 R.C.S. 311; repris dans Placements Pellicano inc. c. Montréal (Ville de), 2012 QCCS 2805, par. 66, Manitoba (Procureur général) c. Metropolitain Stores Ltd, [1987] 1 R.C.S. 110, par. 34.

[64]    Université de Sherbrooke c. Patenaude, précité, note 55, par. 49; voir au même effet Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 2304 et Centre local de services communautaires / centre d’hébergement et de soins de longue durée La Pommeraie, AZ-50289986 (C.S.), par. 41.

[65]    Université de Sherbrooke c. Patenaude, précité, note 55, par. 52.

[66]    Id., par. 49.

[67]    D.C. c. Excellence (L’), Compagnie d’assurance-vie, 2011 QCCS 5189, par. 31.

[68]    Ferme J. et J. Saint-Pierre c. Ferme Côté, s.e.n.c., 2016 QCCS 772, par. 50.

[69]    ENN-9, ENN-10, ENN-12, ENN-14, sous scellés et faisant l’objet d’une ordonnance de non-divulgation, non-diffusion et non-publication.

[70]    Déclaration sous serment de Michel Lorrain, par. 37.

[71]    Déclaration sous serment de Nathalie Normandeau du 31 mai 2016.

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