Décision

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Autorité des marchés financiers c. Weynant

2023 QCCA 122

COUR D’APPEL

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

GREFFE DE

 

MONTRÉAL

 :

500-09-029979-226

(500-17-115924-212)

 

DATE :

 31 janvier 2023

 

 

FORMATION :

LES HONORABLES

GENEVIÈVE MARCOTTE, J.C.A.

STÉPHANE SANSFAÇON, J.C.A.

PETER KALICHMAN, J.C.A.

 

 

AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS

APPELANTE – défenderesse

c.

 

ÉRIC WEYNANT

PHASOPTX INC.

INTIMÉS – demandeurs

 

 

ARRÊT

 

 

[1]                L’appelante, Autorité des marchés financiers (« AMF »), demande la réformation d’un jugement rendu le 16 février 2022 par la Cour supérieure, district de Montréal (l’honorable Marie-Claude Armstrong). Ce jugement rejette sa demande en irrecevabilité de la demande introductive d’instance  DII ») pour le motif qu’elle ne serait pas fondée en droit, quoique les faits allégués puissent être vrais, parce que le recours serait prescrit. La demande en irrecevabilité était présentée en vertu de l’article 168 C.p.c. seulement.

[2]                Pour les motifs du juge Sansfaçon, auxquels souscrivent les juges Marcotte et Kalichman, LA COUR :


 

[3]                REJETTE l’appel, avec les frais de justice en faveur de l’appelante.

 

 

 

 

 

GENEVIÈVE MARCOTTE, J.C.A.

 

 

 

 

 

STÉPHANE SANSFAÇON, J.C.A.

 

 

 

 

 

PETER KALICHMAN, J.C.A.

 

Me Geneviève Boisvert

Me Dominic Naud

Clyde & Cie Canada

Pour l'appelante

 

Me Daniel Rochefort

Rochefort & Associés

Pour les intimés

 

Date d’audience :

11 novembre 2022


 

 

MOTIFS DU JUGE SANSFAÇON

 

 

[4]                L’appelante, Autorité des marchés financiers (« AMF »), demande la réformation d’un jugement rendu le 16 février 2022 par la Cour supérieure, district de Montréal (l’honorable Marie-Claude Armstrong)[1]. Ce jugement rejette sa demande en irrecevabilité de la demande introductive d’instance  DII ») pour le motif qu’elle ne serait pas fondée en droit, quoique les faits allégués puissent être vrais, parce que le recours serait prescrit. La demande en irrecevabilité était présentée en vertu de l’article 168 C.p.c. seulement.

[5]                Les faits pertinents aux fins de l’appel sont simples.

[6]                En avril 2013, l’appelante délivre à l’intimé Éric Weynant un constat d’infraction comportant 41 chefs d’accusation pour des infractions à la Loi sur les valeurs mobilières[2]. L’audition du procès est fixée au 11 septembre 2017. Dans l’intervalle, la Cour suprême rend sa décision dans R. c. Jordan[3] par laquelle elle fixe un délai entre le dépôt des accusations et la conclusion réelle ou anticipée du procès, au-delà duquel il est présumé déraisonnable, sauf exception.

[7]                M. Weynant présente alors une requête en arrêt des procédures basée sur les articles 11b) et 24(1) de la Charte canadienne[4]. Le 10 août 2017, la juge Anne-Marie Lanctôt de la Cour du Québec accueille cette requête[5] et ordonne l’arrêt des procédures, après avoir conclu que le délai est déraisonnable et qu’il ne peut être réchappé par la mesure transitoire.

[8]                L’appelante envisage alors de porter ce jugement en appel et présente à cette fin une requête à la Cour supérieure afin de prolonger le délai d’appel jusqu’au 30 septembre 2017, demande qui lui est accordée. L’appelante ne déposera toutefois pas d’avis d’appel. Conséquemment, le jugement est devenu définitif le 30 septembre 2017.

[9]                Le 9 mars 2021, les intimés déposent leur DII au greffe de la Cour supérieure. Ils y allèguent avoir subi des dommages qui résulteraient de la décision fautive de l’appelante de déposer des constats d’infraction contre M. Weynant et de son comportement dans le cours de cette poursuite pénale. Ils ne signifient cette procédure à l'appelante que le 9 juin suivant.

[10]           Comme on le verra plus loin, la juge de première instance conclut que la DII était alors prescrite à sa face même depuis le 18 mai 2021, mais que les intimés ont démontré qu’ils avaient été dans l’impossibilité d’agir avant le 9 juin suivant, en raison des agissements de l’appelante.

* * *

[11]           Les parties conviennent que la prescription applicable est de trois ans et que le délai ne commence à courir qu'à compter de la fin des procédures pénales[6]. Elles ne s'entendent pas sur le moment auquel correspond la fin de ces procédures. L'appelante soutient qu'il s'agit de la date où le jugement est rendu alors que les intimés proposent plutôt come point de départ l’échéance du délai d’appel[7].

[12]           L’appelante soutient en premier lieu que la juge a erré en fixant la date à laquelle correspond le point de départ du délai de prescription au jour où le délai d’appel a expiré, soit le 30 septembre 2017. Cette erreur serait ici déterminante puisque, si la juge avait plutôt fixé ce délai au jour où le jugement a été rendu (le 31 août 2017), la DII serait irrémédiablement prescrite puisque déposée au greffe et signifiée après que la prescription a été acquise (le 17 février 2021).

[13]           Ce premier moyen d’appel doit être rejeté.

[14]           Dans l’arrêt Popovic c. Montréal (Ville de)[8], la Cour écrit :

[71] En matière de poursuite criminelle abusive ou malicieuse, la doctrine et la jurisprudence reconnaissent qu'il y a suspension de la prescription à l'égard du recours civil jusqu'au jour du prononcé du jugement final sur le « recours abusif ou malicieux ». Si l'accusé est reconnu coupable, les allégations de poursuite abusive deviennent sans fondement. Si l'accusé est acquitté ou encore si les accusations sont retirées, la prescription du recours civil débute à ce moment.[9]

[Soulignement ajouté]

[15]           L’affaire Bourassa c. Del Rio-Abarca[10] comporte des similitudes intéressantes avec le cas d’espèce. Dans cette affaire, l’appelant avait été acquitté d’une accusation d’agression sexuelle déposée contre lui le 25 mars 1999, verdict confirmé par cette Cour le 2 juin 2003. Il intente ensuite une poursuite civile contre la plaignante et deux autres personnes, pour l’avoir accusé malicieusement. Le juge en première instance rejette le recours pour cause de prescription. Ce jugement est infirmé par la Cour, qui explique pourquoi le délai de prescription est suspendu jusqu’au jour où l’arrêt qui confirme l’acquittement est rendu :

[7] Les reproches allégués par l'appelant dans sa déclaration, à savoir que les intimés avaient occasionné, par leurs mensonges, une poursuite abusive lui causant un préjudice disparaissaient si le jugement final le reconnaissait coupable. Dans les circonstances, l'appelant a raison de soutenir qu'il a le droit de bénéficier de l'exception que la jurisprudence reconnaît quant à la suspension de la prescription qui s'applique en matière de procédure abusive.

 

[8] Il n'aurait pas été pour autant prématuré d'intenter un recours avant la date du jugement final, mais le point de départ de la prescription court du jour où le jugement final est rendu lorsque le recours en dommages est non seulement un recours en diffamation, mais également un recours pour abus de procédure.[11]

[Soulignements ajoutés]

[16]           De même, dans l’arrêt Laniel Supérieur inc. c. Régie des alcools, des courses et des jeux[12], la Cour écrit :

[49] La Cour reprend les mêmes principes dans 9106-0723 Québec inc. c. Baillargeon lorsque l’existence du préjudice dépend du jugement dans une autre affaire :

[1] Dans les circonstances fort particulières de l'affaire, il y a lieu d'appliquer l'enseignement découlant des arrêts D'Anjou c. Thériault et Daigle c. Mathieu, et de conclure que le point de départ de la prescription de l'action de l'appelante contre l'intimé coïncide avec la date à laquelle le jugement prononcé dans le recours intenté contre le cocontractant a acquis l'autorité de la chose jugée.

[2] En effet, ce n'est qu'à ce moment que se cristallise le préjudice encouru par l'appelante du fait de la faute qu'elle reproche à l'intimé […]

[Soulignements ajoutés]

[17]           En somme, en référant au « jugement définitif » ou au « jugement final », la Cour traite plutôt de celui qui a acquis l’autorité de la chose jugée, ce qui, selon l’article 321 al. 2 C.p.c., se produit « dès lors qu’il [le jugement] n’est pas susceptible d’appel ou ne l’est plus ».

[18]           Un autre motif explique la raison d’être de la suspension. Comme la Cour explique dans Popovic :

[76] […] des motifs d'intérêt public et d'équité militent en faveur d'une suspension de la prescription du recours en dommages-intérêts fondé sur une poursuite abusive ou malicieuse. Il serait inapproprié de forcer une partie à entreprendre une poursuite avant que ne soit tranché un élément essentiel à son recours (le rejet ou l'abandon de la poursuite qualifiée d'abusive). De même, il serait contraire aux intérêts de la justice d'être confronté à des jugements contradictoires sur une même question.[13]

[19]           Ainsi, fixer le point de départ au moment où le jugement est rendu, plutôt qu’au moment où il n’est plus susceptible d’appel, est contraire à la raison même de l’existence de cette suspension. S’il est « inapproprié de forcer une partie à entreprendre une poursuite avant que ne soit tranché un élément essentiel à son recours »[14], il l’est tout autant de le faire alors que cet élément essentiel peut encore être réformé en appel.

* * *

[20]           Cela dit, même en prenant l’échéance du délai d’appel, soit la date du 30 septembre 2017 comme date de départ de la prescription, le recours en dommagesintérêts est manifestement prescrit, puisque bien que la DII ait été déposée au greffe de la Cour supérieure le 9 mars 2021, elle n'a été signifiée à l'appelante que le 9 juin 2021. Or, le délai de prescription de trois ans prévu à l'article 2925 C.c.Q. expirait, dans le meilleur des cas pour les intimés le 18 mai 2021, en tenant compte du délai additionnel de 60 jours pour signifier la DII prévu à l’article 2892 C.c.Q.

[21]           Il revenait alors aux intimés d’exposer dans leur DII les faits soutenant leur prétention d’interruption ou de suspension de prescription entre la date du dépôt de la DII et celle de la signification. Étonnamment, celle-ci n’en comporte aucun.

[22]           Confrontée à l’argument de prescription qui lui est soulevé, l’appelante dépose une demande en irrecevabilité au motif que la procédure « n'est pas fondée en droit, quoique les faits allégués puissent être vrais / is unfounded in law even if the facts alledged are true » (art. 168 C.p.c.). L'appelante n'y invoque pas le rejet en raison de son caractère manifestement mal fondé sous l’article 51 C.p.c. La distinction est importante puisque les règles de preuve diffèrent selon que le rejet est demandé en vertu de l’un plutôt que de l’autre. La demande en irrecevabilité de l’article 168 C.p.c. repose uniquement sur les faits allégués dans la DII, lesquels sont alors tenus pour avérés, et aux pièces qui y sont jointes, tel que réitéré récemment dans l’arrêt Province canadienne de la Congrégation de Sainte-Croix c. Centre de services scolaire Chemin-du-Roy[15] :

[9] La situation qui justifie le rejet d'une action à un stade préliminaire doit être claire et évidente [renvoi omis]. Cette situation doit « apparaître » à la lecture des allégations de la requête introductive d'instance et des différentes pièces invoquées à son soutien [renvoi omis]. Les faits allégués doivent être tenus pour avérés. Cependant leur qualification juridique ne lie pas le tribunal [renvoi omis]. Le « juge appelé à statuer sur la recevabilité d’un recours doit déterminer si les allégations de fait énoncées dans la requête introductive d’instance sont “de nature à donner ouverture aux conclusions recherchées” par le demandeur » [renvoi omis].

[10] La Cour énonçait les critères suivants dans l'arrêt Bohémier c. Barreau du Québec :

 Les allégations de la requête introductive d'instance sont tenues pour avérées, ce qui comprend les pièces déposées à son soutien;

 Seuls les faits allégués doivent être tenus pour avérés et non pas la qualification de ces faits par le demandeur;

 Le Tribunal n'a pas à décider des chances de succès du demandeur ni du bien-fondé des faits allégués. Il appartient au juge du fond de décider, après avoir entendu la preuve et les plaidoiries, si les allégations de faits ont été prouvées;

 Le Tribunal doit déclarer l'action recevable si les allégations de la requête introductive d'instance sont susceptibles de donner éventuellement ouverture aux conclusions recherchées;

 La requête en irrecevabilité n'a pas pour but de décider avant procès des prétentions légales des parties. Son seul but est de juger si les conditions de la procédure sont solidaires des faits allégués, ce qui nécessite un examen explicite, mais également implicite du droit invoqué;

 On ne peut rejeter une requête en irrecevabilité sous prétexte qu'elle soulève des questions complexes;

 En matière d'irrecevabilité, un principe de prudence s'applique. Dans l'incertitude, il faut éviter de mettre prématurément à un procès;

 En cas de doute, il faut laisser au demandeur la chance d'être entendu au fond.

[11] Le tribunal, en décidant de la recevabilité d'une demande, doit prendre en considération la requête introductive d'instance (ici l'Action en garantie), mais aussi les pièces produites au dossier [renvoi omis]. Toutefois, « [s]'il est nécessaire d’apprécier la preuve au dossier, il faut laisser la cause procéder au fond. » [Renvoi omis]. En cas de doute à cet égard, la demande d'irrecevabilité doit être rejetée [renvoi omis].[16]

[Soulignements ajoutés]

[23]           Ainsi, afin de déterminer si, dans un cas d’espèce, il y a absence de fondement juridique, le juge doit « s'en tenir aux allégations de la déclaration [DII] ainsi qu'aux documents produits par le demandeur au soutien de ces allégations. »[17]. Il s’agit de la règle générale, ce qui implique qu’un demandeur ne peut en principe présenter une preuve testimoniale ou documentaire supplémentaire à celle alléguée dans sa DII afin de contester la demande en irrecevabilité[18].

[24]           Évidemment, un demandeur confronté à un moyen d’irrecevabilité alléguant prescription qui propose de démontrer que son recours n’est pas prescrit, par exemple parce qu’il aurait été dans l’impossibilité en fait d’agir soit par lui-même, soit en se faisant représenter par d’autres (art. 2904 C.c.Q.), peut, comme le permet expressément l’article 168 al. 4 C.p.c. et s’il le fait en temps utile, modifier sa DII afin d'y alléguer des faits ou des pièces additionnels qui le démontreraient[19]. Dans l’éventualité où le juge constaterait que les nouvelles allégations (alors tenues pour avérées[20]) démontrent qu’il y a eu suspension ou interruption de la prescription, il rejettera le moyen d’irrecevabilité sans se prononcer sur le fond de ce moyen de défense, et le dossier suivra son cours[21]. Ce n’est qu’au moment de l’audition sur le fond que la preuve des faits relatifs à la prescription, tout comme la preuve que le demandeur était dans l’impossibilité d’agir, le cas échéant, sera présentée et décidée en fonction de la prépondérance de la preuve.

[25]           En l’espèce, les intimés n’ont pas modifié leur DII afin d’y exposer les faits qui, alors tenus pour avérés aux fins de trancher le moyen d’irrecevabilité, auraient possiblement pu permettre de conclure, du moins jusqu’à ce qu’il en soit décidé sur le fond, qu’ils ont été dans l’impossibilité en fait d’agir et donc qu’il y a eu interruption de la prescription. Plutôt, ils ont déposé une procédure bicéphale intitulée Demande des demandeurs en rejet de la demande de la défenderesse en irrecevabilité de la demande introductive d’instance de l’AMF et demande de déclaration d’abus (art. 51 et s. C.p.c.).

[26]           Cette façon de procéder est à proscrire pour trois raisons.

[27]           Premièrement, la règle veut que toute demande en cours d’instance « ne peut être contestée qu’oralement / can only be contested orally » (art. 101 C.p.c.), sauf si le tribunal autorise la contestation écrite. Une règle similaire est aussi prévue à l’article 52 C.p.c. en matière d’abus et à l’article 74 du Règlement de la Cour d’appel du Québec en matière civile[22]. Cette règle procédurale participe au souci d’améliorer l’efficacité du processus judiciaire et à la réduction des coûts qui s’y rattachent. Bien que ces articles prévoient qu’une requête puisse aussi être contestée par écrit[23], une permission de le faire doit être obtenue au préalable, laquelle ne sera accordée que par exception, si l’intérêt de la justice le justifie. En l’espèce, les intimés n’ont pas demandé une telle autorisation de contester par écrit la demande en irrecevabilité.

[28]           Deuxièmement, la présentation d’une demande en irrecevabilité et d’une demande en rejet pour abus de procédure afin de contrer un moyen d’irrecevabilité est susceptible de permettre à la partie qui la présente de faire indirectement ce que la loi ne lui permet pas de faire directement, soit, en plus de contourner la règle de l’oralité, d’introduire dans la première une preuve apportée au soutien de la seconde. Le risque est alors que le juge tienne compte de cette preuve afin de trancher la demande en irrecevabilité.

[29]           Le présent dossier illustre bien ce risque, puisque la juge a tenu compte de la déclaration sous serment déposée au soutien de la demande en rejet et pour abus de procédure afin de trancher la demande en irrecevabilité qui opposait la prescription.

[30]           Troisièmement, les présentations simultanées d’une demande en irrecevabilité et d’une demande en rejet et pour abus font appel à des règles de démonstration difficilement compatibles : alors que le fardeau associé à la demande présentée en vertu de l’article 168 C.p.c. incombe à la personne qui la présente, le fardeau applicable lorsque la demande l’est en vertu de l’article 51 C.p.c. est renversé aussitôt que la partie requérante établit sommairement que l’acte de procédure peut constituer un abus, auquel cas il revient à la partie demanderesse de démontrer que son geste n’est pas exercé de manière excessive ou déraisonnable et se justifie en droit (art. 52 al. 1 C.p.c.). Cela explique en partie pourquoi, lorsque ces deux procédures sont présentées simultanément, la demande en irrecevabilité de l’article 168 C.p.c. doit être tranchée en premier[24]. Il est vrai que cette règle a été établie alors que les demandes en irrecevabilité et en rejet étaient présentées dans une même procédure, ce qui n’est pas le cas en l’espèce, mais cela ne réduit en rien son application à un cas comme le nôtre étant donné la distinction qui s’applique aux fardeaux de preuve distincts de chacune de ces demandes.

[31]           Cela dit, certaines circonstances particulières peuvent néanmoins justifier le juge d’accepter qu’un document déposé par la partie visée par le moyen d’irrecevabilité puisse être considéré afin de démontrer l’impossibilité en fait d’agir d’un demandeur. Cette façon de procéder a été acceptée par la Cour dans Gagné c. Fortin[25] alors que la partie visée par le moyen d’irrecevabilité n’était pas représentée par avocat et semblait éprouver certaines difficultés à comprendre les règles de procédure de même que les invitations de la Cour à parfaire son dossier. Faisant appel à la règle selon laquelle la procédure ne doit pas être la maîtresse du droit, la Cour a alors accepté de considérer une procédure innomée déposée par le justiciable et a tenu les faits qui y étaient allégués pour avérés, tout comme s’ils avaient été ajoutés dans sa DII, avant de conclure que le recours était néanmoins prescrit.

[32]           Enfin, dans le cadre d’un jugement sur le fond, l’impossibilité d’agir est une question de fait ou une question mixte de fait et de droit[26]. Dans un cas comme dans l’autre, la Cour doit donc faire preuve de déférence et n’intervenir que devant une erreur manifeste et déterminante[27] qui peut être pointée avec précision dans le jugement[28]. L’intervention n’est justifiée que « lorsque le processus inférentiel lui-même est manifestement erroné »[29]. Toutefois, en matière d’irrecevabilité, c’est la norme de la décision correcte qui doit guider l’analyse de la Cour[30], puisque les faits allégués doivent alors être tenus pour vrai et que la Cour se trouve dans la même situation que le juge de première instance.

* * *

[33]           En l'espèce, la juge de première instance a tranché simultanément la demande en irrecevabilité de l’appelante et la demande en rejet de cette demande telle que présentée par les intimés, et elle a erronément considéré la déclaration sous serment de l’intimé Weynant déposée au soutien de celle-ci au moment d’accueillir l’irrecevabilité en droit.

[34]           Il serait injuste d’en faire reproche à la juge, les deux procédures ayant été toutes deux fixées pour audition commune devant elle, sans que l’appelante s'y oppose. 

[35]           Dans sa déclaration sous serment, M. Weynant explique pour la première fois (puisque ces faits n'apparaissaient ni dans la DII ni dans le dossier de la Cour supérieure) que ses avocats auraient tenté de signifier la DII à l'appelante à ses bureaux de Montréal le 12 mars 2021. Il y écrit qu'ils n'ont alors pu le faire puisque « ceux-ci [l’appelante] en ont refusé signification, en maintenant leurs bureaux fermés en raison de la pandémie de COVID-19 »[31].

[36]           M. Weynant y affirme aussi que les bureaux montréalais de l'appelante ont été maintenus fermés par la suite pendant plusieurs mois, ce qui justifierait le fait que la signification de la DII n'a pu avoir lieu avant le 9 juin suivant, et encore, non pas aux bureaux de l'appelante à Montréal, mais à ceux de Québec. M. Weynant n’y mentionne pas que d’autres tentatives de signification auraient eu lieu entre le 12 mars et le 9 juin, par huissier, par voie électronique ou par une autre méthode qui aurait pu être autorisée par le greffier en vertu de l’article 120 C.p.c. Il ne mentionne pas plus les raisons pour lesquelles cette signification n’a pas été faite par voie électronique telle que spécifiquement autorisée durant la période de la pandémie par l’arrêté de la juge en chef du Québec et de la ministre de la Justice signé le 27 mars 2020[32].

[37]           La seule explication offerte quant à cette absence de toute autre tentative de signification est celle rapportée par M. Weynant, telle que donnée par son avocat (non identifié) voulant que « bien que des démarches régulières aient été faites auprès de l’AMF pour tenter de signifier dans les jours suivants, les bureaux de l’AMF à Montréal sont restés fermés pendant des jours, des semaines et des mois » et que « les membres du personnel de Rochefort et associés m’ont informé qu’ils ont communiqué par téléphone à diverses occasions auprès de l’AMF pour tenter d’avoir des réponses, ce qui a été impossible d’obtenir ». Cette explication ne précise toutefois pas les dates auxquelles ces démarches auraient été faites ni auprès de quel employé de l’AMF ni les avocats de Rochefort et associés qui auraient été mandatés pour ce faire ni même pourquoi il a été impossible d’obtenir des réponses. De plus, aucune déclaration sous serment des avocats ou autres membres du personnel de Rochefort et associés impliqués n’a été produite.

[38]           M. Weynant ajoute dans sa déclaration sous serment que cette « situation créée de toute pièce par l'AMF et l'impossibilité de leur signifier la procédure » aurait finalement incité l’un de ses avocats à communiquer avec une avocate du contentieux de l'AMF situé à Québec, qui lui aurait dit que leur bureau de Québec était ouvert, ce qui aurait amené ses avocats à faire signifier la DII aux bureaux de l'appelante à Québec.

[39]           Ainsi, selon la déclaration sous serment de M. Weynant, c'est l'appelante seule qui, par son comportement fautif et « abusif, dilatoire, hostile, empreint de mauvaise foi, fourbe, malicieux, intentionnel et/ou violant les droits fondamentaux », dont celui d’avoir « refusé réception [de leur DDI] en maintenant leurs bureaux fermés » « a empêché toute signification [de la DII] pendant des semaines et des mois ». M. Weynant ajoute même que les avocats de l’appelante auraient, dans leur demande en irrecevabilité de la DII, tenté d’induire la Cour supérieure en erreur en fabriquant « un faux » et en ayant « possiblement caché à la Cour » certains faits. Plus encore, M. Weynant reprend dans sa déclaration sous serment plusieurs des allégations contenues dans sa DII portant sur les fautes que l’appelante aurait commises dans le cadre de la poursuite pénale, fautes qui, faut-il le souligner, n’ont pas, à cette étape préliminaire du dossier, encore été prouvées.

[40]           C’est sur la base des allégations de cette déclaration sous serment, auxquelles elle donne foi, que la juge de première instance rejette la demande en irrecevabilité de l'appelante :

[53] En l’espèce, l’AMF connaît depuis novembre 2021 les allégations de la demande en rejet et de la déclaration solennelle de M. Weynant quant aux circonstances expliquant les raisons invoquées par les demandeurs pour les empêcher de signifier avec succès la demande introductive d’instance. Notons par ailleurs que les demandeurs n’invoquent pas ici avoir été empêchés de signifier la demande en raison de la situation d’urgence sanitaire en soi, mais en raison du manque de collaboration de l’AMF pour leur indiquer un moyen fonctionnel pour y procéder alors que les bureaux de Montréal de l’AMF étaient fermés pour une longue période à ce moment.

[54] Or, l’AMF ne laisse pas entendre que cette situation ne serait pas survenue, ni ne produit de preuve ou formule d’allégations contredisant celles de M. Weynant voulant qu’entre la mi-mars et le début-juin 2021, des contacts réguliers aient été effectués auprès de l’AMF pour procéder à la signification, mais sans progrès ni succès.

[55] Au soutien de sa demande en irrecevabilité l’AMF se conforte plutôt du fait que la signification réussie le 9 juin 2021 prend place quelques 22 jours trop tard, le délai des demandeurs pour ce faire expirant le 18 mai 2021.

[56] Vu le contexte de cette affaire, il serait contraire à l’intérêt de la justice de nier le droit des demandeurs d’introduire leur action pour ce motif ou encore en raison d’autres circonstances hors de leur contrôle.

[…]

[59] Le contexte des démarches pour procéder à cette signification crée, en l’espèce, une situation exceptionnelle pour laquelle il rebute au Tribunal d’empêcher le recours des demandeurs pour le motif de prescription.

[60] L’AMF s’est consacrée pendant plusieurs années, notamment entre 2013 et septembre 2017, à alimenter des accusations contre M. Weymant. Celui-ci n’est pas un inconnu pour elle, non plus que la demanderesse Phasoptx inc. L’AMF n’aurait pas dû agir de manière passive suivant les demandes d’information pour procéder à la signification de la demande introductive d’instance (selon les allégations de M. Weynant dans sa déclaration solennelle du 18 novembre 2021). Mais ce faisant, l’AMF semble être parvenue à esquiver la chose assez longtemps pour ensuite prétendre invoquer, en sa faveur, la prescription du recours.

[61]  Le Tribunal estime que sur la base des allégations de la déclaration solennelle de M. Weynant, la conduite de l’AMF à cet égard s’écarte de son devoir de collaboration dans le respect des principes directeurs de la procédure [Renvoi omis].

[62] Pour l’ensemble de ces considérations, le Tribunal conclut qu’entre la mi-mars et le début de juin 2021, les demandeurs bénéficient de la suspension de la prescription en vertu de l’article 2904 C.c.Q. de sorte que la signification de la demande introductive d’instance le 9 juin 2021 doit être considérée comme valide pour permettre l’introduction de leur recours contre l’AMF.[33]

[Soulignements ajoutés]

[41]           La juge fait donc reposer son jugement sur les affirmations de M. Weynant contenues dans sa déclaration sous serment et en retient un certain nombre de fautes commises tant par l’appelante que par ses avocats durant les trois mois de dépassement du délai de prescription, de même qu’au cours des années antérieures, alors que la preuve de ces faits n’a pas encore été présentée.

[42]           La juge reproche aussi à l'appelante de ne pas avoir présenté de preuve afin de contrer les allégations de l’affiant et de ne pas l’avoir interrogé sur sa déclaration sous serment. En outre, non seulement conclut-elle que les intimés ont été dans l’impossibilité d’agir avant le 9 juin 2021 en raison des « esquives » et autres fautes de l’appelante et de ses avocats, elle précise que sa conclusion à cet égard est définitive et liera le juge du fond puisqu’il serait déraisonnable « de laisser planer au-dessus de la tête des demandeurs, comme une épée de Damoclès, la question de la prescription de leur recours »[34].

[43]           Avec égards pour la position adoptée par la juge, rien n'obligeait l'appelante à présenter une preuve à l'encontre des affirmations de l'intimé M. Weynant étant donné que sa demande en irrecevabilité fondée sur l’article 168 C.p.c. devait être tranchée sur la seule vue des allégations de la DII et de ses pièces. En acceptant, comme elle l’a fait, de prendre en considération la déclaration sous serment de M. Weynant, la juge ne pouvait tout au plus que tenir pour avérés les faits qui y étaient allégués, mais alors seulement afin de décider s’il y avait lieu d’accueillir la demande en irrecevabilité de la DII ou au contraire de la rejeter. L’audition de cette demande en irrecevabilité n’était pas le moment approprié pour tenter de prouver, par une preuve additionnelle, la véracité ou la fausseté des allégations contenues dans la DII ou dans la déclaration sous serment.

[44]           Le fait que la demande en irrecevabilité et la demande en rejet de celle-ci ont été présentées au même moment semble être la cause de l’imbroglio auquel la juge était confrontée. Bien qu'elle n'ait pas autorisé expressément le dépôt d'une contestation écrite de la demande en irrecevabilité (autorisation que les intimés ne lui avaient pas demandée), la juge semble l'avoir fait implicitement en acceptant que la demande en rejet puisse être présentée en même temps que la demande en irrecevabilité et en prenant en considération la déclaration sous serment qui l’accompagnait, en l'absence d'objection formelle de l’appelante. Toutefois, accepter ainsi de considérer les allégations contenues dans une telle déclaration sous serment ne pouvait avoir pour effet d’écarter les règles applicables en matière d’irrecevabilité présentée en vertu de l’article 168 C.p.c.

[45]           Par ailleurs, avec égards, la juge ne pouvait pas trancher la question de la prescription de façon définitive comme elle l’a fait. Elle pouvait tout au plus considérer les faits allégués dans la déclaration sous serment et alors conclure qu’à cette étape préliminaire, sans le bénéfice d’une preuve complète sur cette question, les intimés avaient fait une démonstration suffisante (présumée avérée pour les seules fins de trancher la demande en irrecevabilité) de leur impossibilité d'agir avant le 9 juin 2021.

[46]           La défense de prescription demeure entière et devra être tranchée au fond. Les intimés devront alors prouver par la prépondérance de la preuve les allégations contenues dans la déclaration sous serment de M. Weynant selon lesquelles ils ont été dans l’impossibilité de signifier leur DII avant le délai de prescription et que cette impossibilité résulte des gestes de l’appelante.

[47]           Enfin, aucune des erreurs relevées dans les motifs du jugement entrepris n’est déterminante à l’égard du dispositif lui-même. C’est pourquoi je propose de rejeter l’appel, mais avec les frais de justice en faveur de l’appelante.

 

 

 

 

STÉPHANE SANSFAÇON, J.C.A.

 


[1]  Weynant c. Autorité des marchés financiers, 2022 QCCS 506 [Jugement entrepris].

[2]  RLRQ, c. V-1.1 [LVM]

[3]  2016 CSC 27.

[4]  Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, constituant l’annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, c. 11.

[5]  Weynant c. Autorité des marchés financiers, 2017 QCCQ 15930. Bien que le dispositif ait alors été annoncé, les motifs ne seront déposés que le 31 août suivant.

[6]  Bien que l’article 2880 al. 2 C.c.Q. fixe le point de départ de la prescription extinctive au jour de la naissance du droit d’action, lorsque la réclamation découle, comme en l’espèce, d’une poursuite dont on allègue qu’elle serait abusive ou malicieuse, cette prescription est suspendue jusqu’au jour où le jugement final est rendu dans le dossier connexe : voir, par exemple : Popovic c. Montréal (Ville de), 2008 QCCA 2371, paragr. 71-72 [Popovic]; Restaurant Le Relais de Saint-Jean inc. c. Agence du revenu du Québec, 2020 QCCA 823, paragr. 51 (demande d’autorisation d’appel à la Cour suprême rejetée, 6 mai 2021, no 39434) [Restaurant Le Relais].

[7]  Les intimés proposent aussi que le délai de prescription n’a commencé à courir que le 17 octobre 2017, date de délivrance du certificat de non-appel. Cet argument est sans valeur, ce certificat ne faisant qu’attester un fait sans créer de droit.

[8]  Popovic, supra, note 6.

[9]  Id., paragr. 71. Voir aussi Johnson-Richard c. Montréal (Ville de), 2006 QCCS 2184, paragr. 31.

[10]  2005 QCCA 389.

[11]  Id., paragr. 7-8.

[12]  2019 QCCA 753, cité par la Cour dans Restaurant Le Relais, supra, note 6, paragr. 51.

[13]  Popovic, supra, note 6, paragr. 76.

[14]  Ibid.

[15]  2022 QCCA 227.

[16]  Province canadienne de la Congrégation de Sainte-Croix c. Centre de services scolaire Chemin-du-Roy, 2022 QCCA 227, paragr. 9-11. Dans le même sens, voir par ex. : Canada (Procureur général) c. Confédération des syndicats nationaux, 2014 CSC 49, paragr. 15-21; B.J. c. La Capitale assureur de l'administration publique inc., 2020 QCCA 615 [B.J.]; Mallat c. Autorité des marchés financiers de France, 2021 QCCA 1102, paragr. 122123 (demandes d’autorisation d’appel et d’appel incident à la Cour suprême rejetées 28 avril 2022, n° 39859) [Mallat]; Guimont c. Bussières, 2019 QCCA 280, paragr. 32 (demande d’autorisation d’appel à la Cour suprême rejetée, 16 décembre 2021, n° 38653); Parisien c. Hôtel du Lac Tremblant inc., 2018 QCCA 2217, paragr. 4-6; Chapman c. Procureure générale du Québec, 2018 QCCA 2013, paragr. 3234; Fanous c. Gauthier, 2018 QCCA 293 [Fanous]; 9213-1705 Québec inc. c. Geitzen, 2016 QCCA 71, paragr. 12 [9213-1705 Québec inc.].

[17]  Giroux c. Hydro-Québec, 2003 CanLII 11338 (QC CA), paragr. 20.

[18]  Grenier c. Château-Richer (Ville), 1996 CanLII 5889 (QC CA), paragr. 5.

[19]  Québec (Procureur général) c. Fay, J.E. 2005-1253.

[20]  Gagné c. Fortin, 2009 QCCA 659, paragr. 11 [Gagné].

[21]  À moins qu’il ne comporte déjà la démonstration de la fausseté des faits allégués au soutien de la prétention selon laquelle il y aurait eu interruption ou suspension : Id., paragr. 8.

[22]  RLRQ, c. C-25.01, r. 0.2.01.

[23]  Dans le cas de l’article 52 C.p.c., la permission peut être accordée en vertu de l’article 101 C.p.c.

[24]  Beauregard c. Boulanger (Succession de Boulanger), 2021 QCCA 728, paragr. 25; Brousseau c. Montréal (Ville de), 2011 QCCA 2434.

[25]  Gagné, supra, note 20.  

[26]  Heaslip c. McDonald, 2017 QCCA 1273, paragr. 29 (question de fait); Luft c. Greif (Succession de Magien), 2021 QCCA 1387, paragr. 27 (demande d’autorisation d’appel à la Cour suprême rejetée, 21 avril 2022, no 39912) (question mixte); F.B. c. Therrien (Succession de), 2014 QCCA 854, paragr. 48 (question mixte). 

[27]  Housen c. Nikolaisen, 2002 CSC 33, paragr. 10 et 30 [Housen]. Voir aussi : Hydro-Québec c. Matta, 2020 CSC 37, paragr. 33 [Hydro-Québec]; Benhaim c. St-Germain, 2016 CSC 48, paragr. 37.

[28]  P.L. c. Benchetrit, 2010 QCCA 1505, paragr. 24; Hydro-Québec, id., paragr. 33.

[29]  Housen, supra, note 27, paragr. 23.

[30]  Société de l'assurance automobile du Québec c. Ville de Montréal, 2022 QCCA 1165, paragr. 19; Mallat supra, note 16, paragr. 120; B.J., supra, note 16, paragr. 36; Fanous, supra, note 16, paragr. 17; 92131705 Québec inc., supra, note 16, paragr. 11.

[31]  Cette affirmation est de toute évidence une qualification démesurée des faits, étant donné qu’elle ne repose que sur la mention suivante du rapport de l’huissier qui explique la raison pour laquelle la signification n'a pu avoir lieu ce jour-là : « ce que je n'ai pu faire vu que le bureau est fermé (COVID19) ».

[32]  Arrêté no 4267 de la juge en chef du Québec et de la ministre de la Justice du 27 mars 2020, (2020) 152 Gaz. C. II, 1170A.

[33]  Jugement entrepris, supra, note 1, paragr. 53-56, 59-62.

[34]  Id., paragr. 68.

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