Décision

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Filato c. Bouillon

2010 QCRDL 19113

 

 

RÉGIE DU LOGEMENT

Bureau de Montréal

 

No :          

31 090501 010 F

RN :

 

09 1060

 

Date :

13 mai 2010

Greffière spéciale :

Me Isabelle Jodoin

 

Michael Filato

Locateur - Partie demanderesse

c.

Therese Bouillon

Locataire - Partie défenderesse

 

DÉCISION

 

 

[1]         Le locateur a produit une demande de fixation de loyer conformément aux dispositions de l’article 1947 du Code civil du Québec et de remboursement des frais.

[2]         Le locateur demande la fixation du loyer ainsi qu’une autre modification aux conditions du bail afin que la locataire soit responsable du paiement des frais reliés au chauffage de son logement.

[3]         Les parties sont liées par un bail du 1er juillet 2008 au 30 juin 2009, à un loyer mensuel de 608,00 $.

[4]         Les avis requis ont été donnés selon la loi.

Fixation du loyer

[5]         Le locateur a produit le formulaire de renseignements nécessaires à la fixation du loyer ainsi que les pièces justificatives et les factures au soutien de ces renseignements.

[6]         Après calcul, l’ajustement du loyer permis en vertu du Règlement sur les critères de fixation de loyer (c. R-8.1, r.1.01) est de 7,25 $ par mois, s’établissant comme suit :

 

Taxes municipales et scolaires

0,99 $

Assurances

 0,00 $

Gaz

 0,00 $

Électricité

 0,04 $

Mazout

 2,13 $

Frais d’entretien

0,27 $

Frais de services

0,00 $

Frais de gestion

 0,67 $

Réparations majeures, améliorations majeures,

mise en place d’un nouveau service

 

 1,13 $

Ajustement du revenu net

 2,02 $

 

TOTAL

 

 7,25 $

 


 

Frais de chauffage

 

[7]         La preuve démontre que le système de chauffage a été modifié en septembre 2009 pour un système de chauffage électrique individualisé pour chacun des logements.

[8]         La locataire ne conteste pas la modification mais plutôt la valeur de la réduction offerte par le locateur en contrepartie de la perte de ce service.

[9]         À cet égard, le locateur a offert un montant de 50 $.  Pour en arriver à ce montant, il a considéré un pourcentage de la dépense de chauffage de l’année précédente (7 669 $) dont la source d’énergie était le mazout.  Le pourcentage, qui équivaut à 8.65%, a été établi par le locateur en fonction du nombre de pieds carrés.  En fonction des données soumises par le locateur, le logement concerné mesure 900 pieds carrés alors que la surface totale de l’immeuble est de 10,404 pieds carrés.

[10]     La locataire, pour sa part, a déposé en preuve un historique de sa consommation d’électricité du 28 octobre 2008 au 23 février 2010.  Selon les calculs effectués, elle estime qu’elle doit maintenant assumer une différence d’environ 70 $ par mois depuis qu’elle assume ses frais de chauffage.

[11]     En réplique, le locateur soumet qu’il n’y a pas lieu de tenir compte de ce montant puisque cet écart tient aussi compte d’une augmentation du coût unitaire de l’électricité.

[12]     Lorsque le Tribunal accorde une telle modification, il doit réduire le loyer d’un montant équivalent à la perte de ce service en fonction de l’article 1952 du Code civil :

 

«1952. Le tribunal qui autorise la modification d'une condition du bail fixe le loyer exigible pour le logement, compte tenu de la valeur relative de la modification par rapport au loyer du logement.»

[13]     La jurisprudence n’est pas unanime en ce qui a trait à la façon de calculer cette réduction.  Dans le cas où la dépense était assumée par le locateur et que cette dépense n’était pas individualisée, la façon de procéder est habituellement la suivante :

« En l'espèce, il faut comprendre que le loyer de 530 $ payé mensuellement, compense le locateur de tous ses coûts de chauffage qui, d'année en année, sont indexés pour tenir compte de la dépense réellement engagée par le locateur.  Ainsi, pour tout son immeuble, le locateur a payé pour l'année de référence 2001, une somme globale de 13 177 $, montant qui dans les faits est assumé par l'ensemble des locataires au prorata du loyer payé par chacun.

 

Lorsque le locateur veut obtenir que chaque locataire de l'immeuble prenne charge du chauffage de son propre logement, il demande à la Régie du logement de ne plus assumer cette dépense d'exploitation, de modifier le bail en conséquence et de réduire le loyer des locataires d'un montant égal à la part que chacun assumait à même ses mensualités pour défrayer le coût de ce service.

 

Comme Yvonne Marion paye un loyer représentant 16% des revenus bruts de l'immeuble, elle doit donc assumer 16% de la dépense globale engagée, comme elle l'a fait à tous les ans depuis qu'elle habite son logement.  C'est donc à bon droit que l'adjudicateur de première instance détermine que la locataire payait, à même son loyer, une somme de 175,69 $ à chaque mois pour compenser le locateur de sa dépense en énergie, dépense qui à compter du 1er juillet 2002, ne sera plus assumée par elle.[1] »

 

[14]     Par ailleurs, dans une autre décision[2], le Bureau de révision de la Régie du logement a déterminé cette réduction en considérant d’autres facteurs:

Le règlement précité ne prévoit pas de méthode particulière pour évaluer une modification de la responsabilité des frais de chauffage pour un logement. La décision rendue en première instance ne mentionne pas non plus de quelle manière le montant de 98 $ par mois a été déterminé.

 

L'article 1952 du Code civil du Québec prévoit par ailleurs :

« 1952. Le tribunal qui autorise la modification d'une condition du bail fixe le loyer exigible pour le logement, compte tenu de la valeur relative de la modification par rapport au loyer du logement. »


 

Peu importe la méthode utilisée, le montant retenu doit respecter une certaine proportion avec le loyer payé.  De plus, le tribunal n'est pas nécessairement lié par les coûts assumés, soit par le locateur pendant l'année précédant la modification ou par le locataire pendant sa première année, puisque d'autres variables sont à considérer.  Le nombre d'occupant, les habitudes de vie, les variations au niveau de la rigueur du climat et bien sûr les caractéristiques de l'immeuble et du logement peuvent aussi être considérés. »

 

[15]     Le Tribunal retient donc que la réduction doit être établie en fonction de critères permettant de déterminer cette réduction de façon juste et équitable et chaque cas doit être évalué à son mérite et en considérant la preuve présentée.

[16]     Dans le cas présent, il ne serait pas approprié de prendre en considération la consommation réelle puisque le Tribunal ne dispose pas de la consommation pour une année entière.

[17]     Le Tribunal estime que la méthode de calcul employée par le locateur est acceptable et sera retenue.  Toutefois, en fonction de cette méthode, la réduction devrait être de 55 $ et non 50 $ tel que ce dernier aurait offert à la locataire.

[18]     CONSIDÉRANT l'ensemble de la preuve faite à l'audience;

[19]     CONSIDÉRANT qu’un ajustement mensuel de 7,25 $ est justifié;

[20]     CONSIDÉRANT que le Tribunal accorde la modification reliée au chauffage et qu’il en estime la valeur à 55 $ par mois;

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[21]     FIXE le loyer, après arrondissement au dollar le plus près, à 560,00 $ par mois du 1er juillet 2009 au 30 juin 2010.

[22]     ACCORDE la modification à l’effet que le chauffage soit à la charge de la locataire, à compter du 1er juillet 2009.

[23]     Les autres conditions du bail demeurent inchangées.

[24]     Le locateur supporte les frais de la demande.

 

 

 

 

 

Me Isabelle Jodoin, greffière spéciale

 

Présence(s) :

le locateur

la locataire

Date de l’audience :  

16 mars 2010

 


 



[1] Lechilli c. Marion, R.L. révision Montréal no 31-020412-014V-020912, le 3 février 2003, rr. Bernard et Gagnon-Trudel.

[2] Ducharme c. Duclos, R.L. révision Montréal no 31-040310-153V-040530, le 13 juillet 2005, rr. Thérien et Champigny.

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