Décision

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Locations Brigil c. Bélanger

2023 QCTAL 16100

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Gatineau

 

No dossier :

683853 22 20230223 G

No demande :

3815217

 

 

Date :

25 mai 2023

Devant le juge administratif :

Stéphane Sénécal

 

Les Locations Brigil

 

Locatrice - Partie demanderesse

c.

Martin Bélanger

 

Locataire - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]         La locatrice demande la résiliation du bail, le recouvrement des loyers dus au moment de l'audience, l’éviction du locataire, les frais, les intérêts ainsi que l'exécution provisoire de la décision malgré l'appel.

[2]         Les parties sont liées par un bail reconduit du 1er novembre 2022 au 31 octobre 2023, au loyer mensuel de 832 $ selon la locatrice et de 800 $ selon le locataire. Le montant du loyer mensuel est à l’origine du présent litige.

FAITS :

[3]         La mandataire de la locatrice allègue que le locataire doit la somme de 176,02 $, soit un solde pour le mois d’avril 2023, par imputation à la plus ancienne des dettes.

[4]         Elle avance qu’un avis d’augmentation de loyer daté du 15 juin 2022 a été notifié par le service Pronotif (P-1 en liasse). Il est proposé dans cet avis une modification au loyer mensuel, soit une augmentation de 32 $. Elle ajoute que le locataire a répondu le 15 juin 2022, par courriel, que la modification était acceptée et le tout est confirmé par la locatrice le 21 juin 2022. Cette dernière communication est restée sans réponse.

[5]         Le locataire, quant à lui, argue qu’il n’a jamais répondu à l’avis d’augmentation, qu’il était toujours en négociation avec la locatrice et que le tout est toujours resté sans réponse. En ce sens, il dépose des échanges courriel (L-1 en liasse) et deux (2) lettres (L-2 en liasse) qu’il a fait parvenir à la locatrice.

ANALYSE ET DROIT APPLICABLE :

[6]         Le Tribunal rappelle tout d'abord qu'il appartient à celui qui veut faire valoir un droit de prouver les faits qui soutiennent sa prétention, et ce, de façon prépondérante. La preuve qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence est suffisante. La force probante du témoignage est laissée à l'appréciation du Tribunal.[1]


[7]         Ainsi, il doit démontrer que le fait litigieux est non seulement possible, mais probable. Par ailleurs, la preuve offerte ne doit pas nécessairement conduire à une certitude absolue. Il suffit que le fait litigieux soit, par la preuve, probable.[2] Si une partie ne s'acquitte pas de son fardeau de convaincre le Tribunal, elle verra sa demande rejetée.

[8]         Dans le cas qui nous concerne, la preuve est prépondérante à l’effet que l’avis de reconduction et de modification du bail a été notifié le 15 juin 2022. Ainsi, la locatrice a respecté le délai prévu à l’article 1942 C.c.Q., soit au moins trois (3) mois avant la fin du bail :

« 1942. Le locateur peut, lors de la reconduction du bail, modifier les conditions de celui-ci, notamment la durée ou le loyer; il ne peut cependant le faire que s’il donne un avis de modification au locataire, au moins trois mois, mais pas plus de six mois, avant l’arrivée du terme. Si la durée du bail est de moins de 12 mois, l’avis doit être donné, au moins un mois, mais pas plus de deux mois, avant le terme.

Lorsque le bail est à durée indéterminée, le locateur ne peut le modifier, à moins de donner au locataire un avis d’au moins un mois, mais d’au plus deux mois. 

Ces délais sont respectivement réduits à 10 jours et 20 jours s’il s’agit du bail d’une chambre. »

[9]         L’article 1945 C.c.Q., quant à lui, précise le délai de réponse imposé à un locataire :

« 1945. Le locataire qui refuse la modification proposée par le locateur est tenu, dans le mois de la réception de l’avis de modification du bail, d’aviser le locateur de son refus ou de l’aviser qu’il quitte le logement; s’il omet de le faire, il est réputé avoir accepté la reconduction du bail aux conditions proposées par le locateur.

Toutefois, lorsque le bail porte sur un logement visé à l’article 1955, le locataire qui refuse la modification proposée doit quitter le logement à la fin du bail. »

[10]     La preuve, en l’espèce, révèle que le locataire a bien reçu l’avis de modification du bail le 15 juin 2022 et que le document a été ouvert à cette date. De plus, le jour même, il fait parvenir une réponse qui indique : « Oui c’est bon merci ». À la suite de ce courriel, le 21 juin 2022, la locatrice achemine une confirmation, toujours par courriel, qui mentionne entre autres : « […] confirme que votre bail est renouvelé au taux de 832,00 $ par mois pour la période du 1er novembre 2022 au 31 octobre 2023 comme aux conditions indiquées sur votre avis de modification. » (P-2 en liasse).

[11]     Ce dernier message est resté sans réponse. La seule preuve d’une quelconque réponse est la lettre du 2 septembre 2022 (L-2). Toutefois, même si le Tribunal considérait cette lettre comme un refus de modification du montant du loyer, le délai de réponse prévu à l’article 1945 C.c.Q. n’aurait pas été respecté. De toute manière, les échanges courriel du 15 juin et du 21 juin 2022 sont, pour le Tribunal, très éloquents sur le fait que le loyer mensuel a bel et bien été modifié de consentement pour le terme du 1er novembre 2022 au 31 octobre 2023.

[12]     Partant de ce qui précède, le locataire doit la somme de 176,02 $ en loyers impayés, soit un solde pour le mois d’avril 2023 par imputation à la plus ancienne des dettes.

[13]     De ce fait, au jour de l’audience, le locataire n’est pas en retard de plus de trois semaines dans le paiement de son loyer, ce motif de résiliation de bail n’est donc pas justifié en vertu de l’article 1971 C.c.Q.

[14]     Le préjudice causé au locateur ne justifie pas l'exécution provisoire de la décision, comme il est prévu à l'article 82.1 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement[3].

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[15]     CONSTATE selon la preuve que le loyer mensuel pour le terme du 1er novembre 2022 au 31 octobre 2023 est de 832 $;

[16]     CONDAMNE le locataire à payer à la locatrice la somme de 176,02 $, en plus les frais judiciaires de 91 $;


[17]     REJETTE quant au surplus.

 

 

 

 

 

 

 

 

Stéphane Sénécal

 

Présence(s) :

la mandataire de la locatrice

le locataire

Date de l’audience : 

18 avril 2023

 

 

 


 


[1] Articles 2803, 2804 et 2845 du Code civil du Québec, CCQ-1991.

[2] Les jardins du roi société en commandite c. Jean-François Plante, RDL, 419462 18 20180921 No demande : 2590921, 4 février 2019.

[3] RLRQ, chapitre T-15.01. 

AVIS :
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