Guimont c. Fortier |
2021 QCTAL 2192 |
TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT |
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Bureau dE Salaberry-de-Valleyfield |
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No dossier : |
543819 27 20201106 G |
No demande : |
3106386 |
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Date : |
25 janvier 2021 |
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Devant le juge administratif : |
Michel Huot |
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Emmanuel Guimont |
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Locateur - Partie demanderesse |
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c. |
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Annie Fortier
NICOLE AUDETTE |
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Locataires - Partie défenderesse |
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D É C I S I O N
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[1] Le locateur demande l’autorisation du Tribunal pour reprendre le logement concerné afin de s’y loger à compter du 1er juillet 2021.
[2] Les parties sont liées par un bail renouvelé du 1er juillet 2020 au 30 juin 2021 au loyer mensuel de 710 $. Les locataires habitent les lieux loués depuis le 1er juillet 2013.
CONTEXTE
[3] La preuve démontre que, le 23 octobre 2020, le locateur faisait parvenir un avis de reprise aux locataires, pour les aviser de son intention de reprendre le logement pour s’y loger à compter du 1er juillet 2021. Les locataires ont répondu à l’avis le 30 octobre 2020. Elles ont refusé de quitter le logement.
[4] Le locateur est le propriétaire unique de l’immeuble qui est un duplex. Le locateur occupe le logement du 2e étage avec sa conjointe et leur enfant.
[5] Les locataires occupent le premier étage.
[6] Avant de se prononcer sur les motifs invoqués par le locateur pour obtenir l’autorisation de reprendre le logement, il y a lieu de reprendre les articles pertinents du Code civil du Québec qui traitent de la reprise de logement et qui se lisent comme suit :
« 1957. Le locateur d’un logement, s’il en est le propriétaire, peut le reprendre pour l’habiter lui-même ou y loger ses ascendants ou descendants au premier degré, ou tout autre parent ou allié dont il est le principal soutien.
Il peut aussi le reprendre pour y loger un conjoint dont il demeure le principal soutien après la séparation de corps, le divorce ou la dissolution de l’union civile. »
« 1958. Le propriétaire d’une part indivise d’un immeuble ne peut reprendre aucun logement s’y trouvant, à moins qu’il n’y ait qu’un seul autre propriétaire et que ce dernier soit son conjoint. »
« 1959.1. Le locateur ne peut reprendre un logement ou en évincer un locataire lorsque ce dernier ou son conjoint, au moment de la reprise ou de l’éviction, est âgé de 70 ans ou plus, occupe le logement depuis au moins 10 ans et a un revenu égal ou inférieur au revenu maximal lui permettant d’être admissible à un logement à loyer modique selon le Règlement sur l’attribution des logements à loyer modique (chapitre S-8, r.1).
Il peut toutefois reprendre le logement dans l’une ou l’autre des situations suivantes :
1° il est lui-même âgé de 70 ans ou plus et souhaite reprendre le logement pour s’y loger ;
2° le bénéficiaire de la reprise est âgé de 70 ans ou plus ;
3° il est un propriétaire occupant âgé de 70 ans ou plus et souhaite loger, dans le même immeuble que lui, un bénéficiaire âgé de moins de 70 ans.
La Société d’habitation du Québec publie sur son site Internet les seuils de revenu maximal permettant à un locataire d’être admissible à un logement à loyer modique. »
« 1960. Le locateur qui désire reprendre le logement ou évincer le locataire doit aviser celui-ci, au moins six mois avant l’expiration du bail à durée fixe ; si la durée du bail est de six mois ou moins, l’avis est d’un mois.
Toutefois, lorsque le bail est à durée indéterminée, l’avis doit être donné six mois avant la date de la reprise ou de l’éviction. »
« 1961. L’avis de reprise doit indiquer la date prévue pour l’exercer, le nom du bénéficiaire et, s’il y a lieu, le degré de parenté ou le lien du bénéficiaire avec le locateur.
L’avis d’éviction doit indiquer le motif et la date de l’éviction.
Ces avis doivent reproduire le contenu de l’article 1959.1.
La reprise ou l’éviction peut prendre effet à une date postérieure à celle qui est indiquée sur l’avis, à la demande du locataire et sur autorisation du tribunal. »
« 1962. Dans le mois de la réception de l’avis de reprise, le locataire est tenu d’aviser le locateur de son intention de s’y conformer ou non ; s’il omet de le faire, il est réputé avoir refusé de quitter le logement. »
« 1963. Lorsque le locataire refuse de quitter le logement, le locateur peut, néanmoins, le reprendre, avec l’autorisation du tribunal.
Cette demande doit être présentée dans le mois du refus et le locateur doit alors démontrer qu’il entend réellement reprendre le logement pour la fin mentionnée dans l’avis et qu’il ne s’agit pas d’un prétexte pour atteindre d’autres fins. »
« 1964. Le locateur ne peut, sans le consentement du locataire, se prévaloir du droit à la reprise, s’il est propriétaire d’un autre logement qui est vacant ou offert en location à la date prévue pour la reprise, et qui est du même genre que celui occupé par le locataire, situé dans les environs et d’un loyer équivalent. »
[7] L’avis de reprise du locateur, la réponse des locataires et le dépôt de la demande pour obtenir l’autorisation du tribunal furent faits dans les délais prévus.
[8] Toutefois,
l’avis de reprise qui fut envoyé par le locateur ne comporte pas le contenu du
texte de l’article
[9] Ces
articles étant d’ordre public en vertu de l’article
[10] Il y a lieu de reprendre l’analyse effectuée par la juge administrative Marie-Ève Marcil dans la décision Ciavaglia c. Gargour[1] :
« [12] L’article
[13] Ainsi, l’article
[14] En matière d’avis de reprise, la jurisprudence se montre exigeante. La Cour du Québec, dans l’affaire Eng c. Delisle (3), a rendu un avis invalide, car, à sa face même, il semblait imprécis quant au bénéficiaire de la reprise. Plusieurs autres décisions ont déclaré invalide un avis ne mentionnant pas le nom du bénéficiaire de la reprise (4).
[15] La juge administrative Jodoin écrivait :
« Ce que la jurisprudence vise à prohiber, ce sont les avis qui ne permettent pas au locataire de vérifier les informations communiquées l’empêchant ainsi de se préparer adéquatement pour en contester la teneur (5). » (6)
[16] De plus, s’il y a plusieurs locataires, chacun doit recevoir signification de l’avis sous peine de nullité (7).
[17] Dans le cas qui nous occupe, le locataire peut
se définir comme personne âgée. En effet, le locataire a plus de 70 ans.
Ainsi, l’information de l’article
[18] Or, en l’espèce, bien que le locataire ait
soulevé les principes sous-adjacents à l’article
[11] En appliquant cette
analyse aux faits mis en preuve, le Tribunal conclut que la reproduction du
contenu de l’article
[12] Le Tribunal conclut que l’avis de reprise envoyé le 23 octobre 2020 n’est pas valide. En conséquence, la demande pour obtenir l’autorisation de reprendre le logement doit être rejetée.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[13] REJETTE la demande du locateur, lequel en assume les frais.
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Michel Huot |
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Présence(s) : |
le locateur les locataires |
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Date de l’audience : |
17 décembre 2020 |
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AVIS :
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