Décision

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Décision

Palanca c. Maltais

2019 QCRDL 13153

 

 

RÉGIE DU LOGEMENT

Bureau dE Montréal

 

No dossier :

424670 31 20181024 G

No demande :

2613574

 

 

Date :

01 mai 2019

Régisseure :

Anne A. Laverdure, juge administrative

 

Cara Isabella Palanca

 

Damian Done Santana

 

Locataires - Partie demanderesse

c.

Karl Maltais

 

Locateur - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N   R E C T I F I É E

 

 

Le Tribunal rectifie le paragraphe 26.

CONTEXTE

[1]      Les locataires réclament une diminution de loyer et des dommages suite à la présence de punaises de lit dans le logement.

[2]      Les parties sont liées par un bail du 1er juillet 2018 au 30 juin 2019 au loyer mensuel de 635 $.

QUESTION EN LITIGE

[3]      Le locateur est-il responsable de la perte de jouissance subie par les locataires ainsi que de la perte de ses meubles?

ANALYSE ET DÉCISION

[4]      Les locataires témoignent qu'au cours du mois de juillet 2018, ils constatent la présence d’un insecte, mais ignorent alors qu’il s’agit d’une punaise de lit.

[5]      La locataire souffre particulièrement des piqûres de ce parasite.

[6]      Lorsqu’ils comprennent qu’il s’agit de punaises de lit, ils avisent verbalement le locateur. Nous sommes le 10 août 2018.

[7]      Le 15 août 2018, ils envoient un message texte au locateur[1].

[8]      Le 21 août 2018, Les entreprises Maheu font une inspection. Un traitement a lieu le 27 août, le 15 octobre puis le 17 décembre 2018. Toutefois, il ne traite que le logement des locataires.


[9]      Le problème n’est toujours pas résolu. La locataire souffre beaucoup de ces piqûres comme le démontrent les photos qu’ils ont prises. Les locataires quittent le logement pour les trois semaines qui suivent le traitement. À leur retour, ils ne peuvent que constater l’inefficacité du traitement.

[10]   Ils déposent une demande à la Régie du logement.

[11]   Au moment de la première audience, le problème n’est toujours pas réglé. Ils demandent la possibilité d’amender pour obtenir compensation monétaire pour la perte de certains meubles qu’ils disent infectés.

[12]   Ils veulent également obtenir la résiliation du bail.

[13]   Le locateur nie qu’il s’agisse d’une infestation et argumente que la cause de la présence des punaises de lit n’est pas établie.

[14]   Les locataires veulent déposer le message texte de la locataire précédente.

[15]   Le Tribunal propose d’ajourner le dossier afin que la preuve des locataires puisse être complétée.

[16]   À la reprise de l’audience, le locateur a vendu l’immeuble depuis le 21 janvier 2019.

[17]   Les locataires indiquent au Tribunal qu’ils quitteront en juin 2019.

[18]   Aucun témoin n’est assigné.

[19]   Il est difficile d'établir la cause de leur présence puisque la punaise de lit a pu être introduite par un livreur ou un visiteur quelconque.

[20]   Dans ces circonstances, le locateur peut-il être tenu responsable des désagréments vécus par les locataires?

[21]   C'est l'article 1859 du Code civil du Québec qui trouve ici application :

« 1859. Le locateur n'est pas tenu de réparer le préjudice qui résulte du trouble de fait qu'un tiers apporte à la jouissance du bien; il peut l'être lorsque le tiers est aussi locataire de ce bien ou est une personne à laquelle le locataire permet l'usage ou l'accès à celui-ci.

Toutefois, si la jouissance du bien en est diminuée, le locataire conserve ses autres recours contre le locateur. »

[22]   Aussi, comme l'expliquait la juge administrative Jocelyne Gravel dans la cause Garita c. Marcotte[2], cause souvent citée:

« [45] Il est normal que le locateur soit soumis à l'obligation de faire exterminer les punaises par des professionnels; comme l'exigent certaines réglementations municipales. En plus d'être soumis à des obligations de résultat à cet égard, il est celui qui a accès à tous les logements de l'immeuble et aux espaces communs. Dans cette optique, le législateur a voulu que les locataires victimes puissent généralement obtenir une diminution de loyer, l'exécution en nature des obligations du locateur et voire même la résiliation de leur bail en cas de préjudice sérieux.

[46] L'octroi de dommages-intérêts n'est cependant pas absolu et selon l'origine du trouble, le locateur bénéficiera de moyen de défense accru. L'un d'eux est le trouble de fait d'un tiers de l'article 1859 du Code civil du Québec. Il s'agit d'un régime, qui de l'avis du tribunal, est le plus conforme à l'intention du législateur lorsque l'origine ou la prolifération des punaises ne résulte pas d'une quelconque négligence. Car il a pour effet de rétablir l'équilibre des droits et obligations des cocontractants. Il a comme avantage de faire supporter à chacun des cocontractants une partie des conséquences de la présence des punaises dans un logement. Il s'agit en effet, d'une situation où les cocontractants ne sont habituellement pas fautifs et envers laquelle ils ont bien peu de contrôle. L'établissement d'une présomption de fait semble être le meilleur moyen de contrer le déséquilibre observé et faciliter la preuve à toutes les parties. Car tout comme le locateur en l'instance, un locataire pourrait bénéficier de cette présomption de fait advenant une poursuite à son encontre. »

[23]   La réclamation des locataires quant à la perte de ses meubles et les dommages moraux ne peut donc être accordée puisque la faute du locateur n’a pas été démontrée[3].


[24]   Toutefois, il est clair que les locataires ont subi une perte de jouissance. Or, l'obligation du locateur à cet égard est une obligation de résultat[4].

[25]   Les seules défenses offertes au locateur sont la force majeure et la faute du locataire. Ici, le locateur ne peut invoquer ni l'une ni l'autre puisque la faute des locataires n’est pas démontrée et que la présence de punaises de lit ne rencontre pas les critères nécessaires à établir la force majeure[5].

[26]   Considérant que le problème subis depuis août 2018, le Tribunal octroie une diminution de 522,74 $ pour la période de 159 jours.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[27]   CONDAMNE le locateur à payer aux locataires 522,74 $, avec les intérêts au taux légal et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec, à compter du 21 janvier 2019, plus les frais judiciaires de 84 $.

 

 

 

 

 

 

 

 

Anne A. Laverdure

 

Présence(s) :

les locataires

le locateur

Date de l’audience :  

15 janvier 2019

Présence(s) :

le locateur

Date de l’audience :  

1er avril 2019

 

 


Palanca c. Maltais

2019 QCRDL 13153

 

 

RÉGIE DU LOGEMENT

Bureau dE Montréal

 

No dossier :

424670 31 20181024 G

No demande :

2613574

 

 

Date :

16 avril 2019

Régisseure :

Anne A. Laverdure, juge administrative

 

Cara Isabella Palanca

 

Damian Done Santana

 

Locataires - Partie demanderesse

c.

Karl Maltais

 

Locateur - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

CONTEXTE

[1]      Les locataires réclament une diminution de loyer et des dommages suite à la présence de punaises de lit dans le logement.

[2]      Les parties sont liées par un bail du 1er juillet 2018 au 30 juin 2019 au loyer mensuel de 635 $.

QUESTION EN LITIGE

[3]      Le locateur est-il responsable de la perte de jouissance subie par les locataires ainsi que de la perte de ses meubles?

ANALYSE ET DÉCISION

[4]      Les locataires témoignent qu'au cours du mois de juillet 2018, ils constatent la présence d’un insecte, mais ignorent alors qu’il s’agit d’une punaise de lit.

[5]      La locataire souffre particulièrement des piqûres de ce parasite.

[6]      Lorsqu’ils comprennent qu’il s’agit de punaises de lit, ils avisent verbalement le locateur. Nous sommes le 10 août 2018.

[7]      Le 15 août 2018, ils envoient un message texte au locateur[6].

[8]      Le 21 août 2018, Les entreprises Maheu font une inspection. Un traitement a lieu le 27 août, le 15 octobre puis le 17 décembre 2018. Toutefois, il ne traite que le logement des locataires.


[9]      Le problème n’est toujours pas résolu. La locataire souffre beaucoup de ces piqûres comme le démontrent les photos qu’ils ont prises. Les locataires quittent le logement pour les trois semaines qui suivent le traitement. À leur retour, ils ne peuvent que constater l’inefficacité du traitement.

[10]   Ils déposent une demande à la Régie du logement.

[11]   Au moment de la première audience, le problème n’est toujours pas réglé. Ils demandent la possibilité d’amender pour obtenir compensation monétaire pour la perte de certains meubles qu’ils disent infectés.

[12]   Ils veulent également obtenir la résiliation du bail.

[13]   Le locateur nie qu’il s’agisse d’une infestation et argumente que la cause de la présence des punaises de lit n’est pas établie.

[14]   Les locataires veulent déposer le message texte de la locataire précédente.

[15]   Le Tribunal propose d’ajourner le dossier afin que la preuve des locataires puisse être complétée.

[16]   À la reprise de l’audience, le locateur a vendu l’immeuble depuis le 21 janvier 2019.

[17]   Les locataires indiquent au Tribunal qu’ils quitteront en juin 2019.

[18]   Aucun témoin n’est assigné.

[19]   Il est difficile d'établir la cause de leur présence puisque la punaise de lit a pu être introduite par un livreur ou un visiteur quelconque.

[20]   Dans ces circonstances, le locateur peut-il être tenu responsable des désagréments vécus par les locataires?

[21]   C'est l'article 1859 du Code civil du Québec qui trouve ici application :

« 1859. Le locateur n'est pas tenu de réparer le préjudice qui résulte du trouble de fait qu'un tiers apporte à la jouissance du bien; il peut l'être lorsque le tiers est aussi locataire de ce bien ou est une personne à laquelle le locataire permet l'usage ou l'accès à celui-ci.

Toutefois, si la jouissance du bien en est diminuée, le locataire conserve ses autres recours contre le locateur. »

[22]   Aussi, comme l'expliquait la juge administrative Jocelyne Gravel dans la cause Garita c. Marcotte[7], cause souvent citée:

« [45] Il est normal que le locateur soit soumis à l'obligation de faire exterminer les punaises par des professionnels; comme l'exigent certaines réglementations municipales. En plus d'être soumis à des obligations de résultat à cet égard, il est celui qui a accès à tous les logements de l'immeuble et aux espaces communs. Dans cette optique, le législateur a voulu que les locataires victimes puissent généralement obtenir une diminution de loyer, l'exécution en nature des obligations du locateur et voire même la résiliation de leur bail en cas de préjudice sérieux.

[46] L'octroi de dommages-intérêts n'est cependant pas absolu et selon l'origine du trouble, le locateur bénéficiera de moyen de défense accru. L'un d'eux est le trouble de fait d'un tiers de l'article 1859 du Code civil du Québec. Il s'agit d'un régime, qui de l'avis du tribunal, est le plus conforme à l'intention du législateur lorsque l'origine ou la prolifération des punaises ne résulte pas d'une quelconque négligence. Car il a pour effet de rétablir l'équilibre des droits et obligations des cocontractants. Il a comme avantage de faire supporter à chacun des cocontractants une partie des conséquences de la présence des punaises dans un logement. Il s'agit en effet, d'une situation où les cocontractants ne sont habituellement pas fautifs et envers laquelle ils ont bien peu de contrôle. L'établissement d'une présomption de fait semble être le meilleur moyen de contrer le déséquilibre observé et faciliter la preuve à toutes les parties. Car tout comme le locateur en l'instance, un locataire pourrait bénéficier de cette présomption de fait advenant une poursuite à son encontre. »

[23]   La réclamation des locataires quant à la perte de ses meubles et les dommages moraux ne peut donc être accordée puisque la faute du locateur n’a pas été démontrée[8].


[24]   Toutefois, il est clair que les locataires ont subi une perte de jouissance. Or, l'obligation du locateur à cet égard est une obligation de résultat[9].

[25]   Les seules défenses offertes au locateur sont la force majeure et la faute du locataire. Ici, le locateur ne peut invoquer ni l'une ni l'autre puisque la faute des locataires n’est pas démontrée et que la présence de punaises de lit ne rencontre pas les critères nécessaires à établir la force majeure[10].

[26]   Considérant que le problème subis depuis août 2018, le Tribunal octroie une diminution de 522,74 $ par mois pour une période de 159 jours.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[27]   CONDAMNE le locateur à payer aux locataires 522,74 $, avec les intérêts au taux légal et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec, à compter du 21 janvier 2019, plus les frais judiciaires de 84 $.

 

 

 

 

 

 

 

 

Anne A. Laverdure

 

Présence(s) :

les locataires

le locateur

Date de l’audience :  

15 janvier 2019

Présence(s) :

le locateur

Date de l’audience :  

1er avril 2019

 

 

 


 

 



[1]    Pièce L-2.

[2]    2013 QCRDL 21867.

[3]    Article 2804 du Code civil du Québec.

[4]    Boualouane c. De Michell 2018QCRDL 37768.

[5]    Voir notamment Bergeron c. Constructions Gilles & fils, 2018 QCRDL 20254, Aubé c. 9180-9699 Québec inc., 2015 QCRDL 18876, Aubé c. Patel, 2014 QCRDL 43263, Sterling c. Cawley, 2014 QCRDL 38425.

[6]    Pièce L-2.

[7]    2013 QCRDL 21867.

[8]    Article 2804 du Code civil du Québec.

[9]    Boualouane c. De Michell 2018QCRDL 37768.

[10]   Voir notamment Bergeron c. Constructions Gilles & fils, 2018 QCRDL 20254, Aubé c. 9180-9699 Québec inc., 2015 QCRDL 18876, Aubé c. Patel, 2014 QCRDL 43263, Sterling c. Cawley, 2014 QCRDL 38425.

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