Place Bellevue c. Gosselin |
2011 QCRDL 36739 |
RÉGIE DU LOGEMENT |
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Bureau de Québec |
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No : |
18 100323 014 G 18 100531 032 G |
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Date : |
07 octobre 2011 |
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Régisseur : |
Serge Adam, juge administratif |
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Place Bellevue |
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Locateur - Partie demanderesse (18 100323 014 G) Partie défenderesse (18 100531 032 G) |
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c. |
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Catherine Gosselin
Steeve Mathieu |
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Locataires - Partie défenderesse (18 100323 014 G) Partie demanderesse (18 100531 032 G) |
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D É C I S I O N
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[1] Le locateur par sa demande amendée en date du 29 avril 2010 réclame la somme totale de 3 119,93 $, représentant une perte de revenu locatif et des frais de publicité et de dépistage et d’énergie.
[2] Les locataires déposaient quant à eux une demande afin de réclamer une somme de 2 274,52 $ en dommages avec les frais et intérêts et demandaient également de résilier le bail suite à un refus de cession par le locateur.
[3] Il s'agit d'un bail du 1er juillet 2009 au 30 juin 2010 au loyer mensuel de 525 $, payable le premier jour de chaque mois.
[4] Ces deux
dossiers ont été réunis pour instruction conjointe en vertu de
l'article
Allégations et preuve des parties
[5] Au soutien de sa demande, le locateur allègue que les locataires ont quitté leur logement en décembre 2009 et ont cessé de payer leur loyer à partir de février 2010 et qu’ils doivent la somme de 3 119,93 $ représentant les mois de février 2010 à juin 2010 inclusivement, le logement n’ayant pu être loué depuis lors (2 625 $) ainsi qu’une somme de 594,93 $ représentant des frais d’énergie, de publicité et de dépistage.
[6] Les locataires quant à eux admettent avoir quitté leur logement en décembre 2009, mais avoir préalablement averti le propriétaire qu’ils entendaient sous-louer ou céder leur logement.
[7] Ils expliquent avoir trouvé plusieurs cessionnaires et ont communiqué avec le propriétaire afin de lui demander la possibilité de céder le bail, le tout conformément aux articles du Code civil du Québec.
[8] Ainsi, ils ont expédié au locateur un premier avis de cession de bail en faveur d’une certaine Isabelle Gagnon, en date du 6 octobre 2009, laquelle fut refusée le lendemain le 7 octobre par le locateur indiquant qu’il refusait cette cession.
[9] Un autre avis de cession de bail fut alors expédié par les locataires en faveur de Ratefiarivony Tita Ando Tiana et de Rakutomacaca Rojo Maite Arivola en date du 20 janvier 2010.
[10] Les locataires déclarent ne pas avoir eu de réponse directement de la part du locateur, si ce n’est que le concierge de l’immeuble leur ait annoncé que le propriétaire ne pouvait pas accepter une telle cession, car tant les cessionnaires et leur caution n’avaient pas leur citoyenneté canadienne.
[11] Le représentant du locateur reconnaît ne pas avoir expédié une réponse écrite aux locataires concernant cette cession tout en corroborant qu’il ne pouvait pas accepter une telle cession, car soulignait-il à l’audience, ces cessionnaires étaient des étrangers venus s’instruire au Québec et qu’il ne pouvait pas, même avec des cautions également étrangères obtenir de ces derniers un rapport de crédit fiable et que de plus l’exécution de tout jugement pouvant ultérieurement obtenir contre eux est pratiquement irréalisable, voire impossible.
[12] Le 23 janvier 2010, un troisième avis de cession est expédié au locateur le 23 janvier 2010 en faveur de Vanessa Laprise, sans qu’il y ait eu réponse à cette cession de la part du locateur.
[13] Le représentant du locateur reconnaît ne pas avoir répondu à cette cession, car expliquait-il à l’audience, la cessionnaire ne voulait plus ce logement, préférant un autre logement appartenant au locateur.
[14] La locataire admet avoir obtenu l’information de la cessionnaire voulant qu’elle ne voulût plus ce logement plusieurs semaines après l’expédition de cet avis de cession, car un autre logement lui avait été proposé par le concierge de l’époque à de meilleures conditions.
[15] Un quatrième et dernier avis de cession de bail est expédié par les locataires au locateur, le 14 avril 2010 concernant la cession en faveur de Martin D’aigle Blais et Cynthia Pouliot, ces derniers ayant été référés, par ailleurs, par le locateur lui-même.
[16] Or, le locateur dans une lettre datée du 21 avril 2010 aux locataires informe ces derniers que la cession est refusée et que les motifs du refus de même que les alternatives possibles ont été expliqués aux cessionnaires qui les ont refusés (sic).
[17] Au soutien de leur demande, les locataires allèguent donc que le locateur les a illégalement empêchés de céder leur bail à de tierces personnes, de sorte qu'il doit leur rembourser l'équivalent du loyer payé après leur départ, soit les mois de décembre 2009 et janvier 2010, de même que leurs frais d’enquêtes de crédit qu’ils ont payés au locateur lors de l’envoi de leurs avis (2 X 75 $), l’essence utilisée (170 $), leurs frais de publicité qu’ils ont payés durant le temps où ils ont tenté de céder leur bail (189,52$) de même que les heures de travail perdues tant pour la visite de leur logement aux cessionnaires proposés (215 $) que les deux jours perdus pour des convocations inutiles à la Cour (500 $).
Décision
[18] Dans ces deux dossiers, le tribunal doit répondre à la question suivante : est-ce que les raisons invoquées par le locateur sont suffisamment sérieuses pour déclarer invalide(s) une ou les cessions expédiée(s) par les locataires?
[19] Les articles pertinents reliés à la cession de bail ou à la sous-location sont les suivants :
« 1870. Le locataire peut sous-louer tout ou partie du bien loué ou céder le bail. Il est alors tenu d'aviser le locateur de son intention, de lui indiquer le nom et l'adresse de la personne à qui il entend sous-louer le bien ou céder le bail et d'obtenir le consentement du locateur à la sous-location ou à la cession.»
« 1871. Le locateur ne peut refuser de consentir à la sous-location du bien ou à la cession du bail sans un motif sérieux.
Lorsqu'il refuse, le locateur est tenu d'indiquer au locataire, dans les quinze jours de la réception de l'avis, les motifs de son refus; s'il omet de le faire, il est réputé avoir consenti.»
« 1873. La cession de bail décharge l'ancien locataire de ses obligations, à moins que, s'agissant d'un bail autre que le bail d'un logement, les parties n'aient convenu autrement.»
[20] Après avoir été informé d’une cession par les locataires, le locateur se devait de répondre aux locataires et d’indiquer les motifs de son refus, le cas échéant.
[21] Or, non seulement le locateur ne donne aucune réponse dans les 15 jours de la réception de l'avis donné le 23 janvier 2010 concernant l’avis de cession à une certaine Vanessa Laprise, justifiant un refus, mais en plus, cette sous-locataire proposée signe un bail avec le même locateur pour un autre logement leur appartenant. Ce faisant, le locateur, par son attitude, acceptait de résilier le bail avec les locataires et tentait de proposer un nouveau logement à cette cessionnaire.
[22] Par conséquent, uniquement sur cette base la demande du locateur doit être rejetée. En effet, la cession de bail en faveur de Vanessa Laprise à compter du 23 janvier 2010 était valide et opposable au locateur.
[23] Qui plus est, aucune réponse n’est transmise aux locataires concernant l’avis de cession expédiée du 20 janvier 2010 au couple d’étudiants étrangers, si ce n’est qu’ils entendent par la bouche du concierge que ce refus serait attribuable parce que les cessionnaires proposés et même leurs possibles cautions n’avaient pas la citoyenneté canadienne.
[24] Ayant omis de répondre à cette cession, le locateur était réputé avoir consenti à celle-ci.
[25] Par conséquent, également sur cette absence de réponse de cette cession aux étudiants étrangers par écrit et signée par un représentant autorisé du locateur la demande du locateur doit être rejetée pour cet autre motif, car cette cession du 23 janvier 2010 était également valide et opposable au locateur.
[26] Mais il y a plus.
[27] Le tribunal est très perplexe par l’attitude du locateur dans ce dossier.
[28] En effet, par un amendement déposé en avril 2010, le locateur réclame des dommages-intérêts suite au déguerpissement des locataires de ce logement à partir de février 2010. D’ailleurs, le locateur réclame des frais de publicité pour les mois de janvier, février, mars et avril 2010.
[29] Si l’on se fie à cet
amendement, le bail fut donc résilié de plein droit conformément à l’article
[30] Chaque fois qu’un nouveau locataire se présente au locateur, ce dernier conserve-t-il les bons pour leur faire signer un bail pour un autre logement et tous les autres moins intéressants sont soumis par l’entremise de cession de bail afin ne pas perdre leur recours contre les locataires-défendeurs?
[31] Encore ici, le locateur, même dans l’hypothèse qu’il s’agisse d’une cession de bail validement faite, la preuve révèle que le locateur n'a donné aucun motif sérieux pour refuser cettedite cession de bail qui lui fut proposée en date du 14 avril 2010.
[32] En effet, le locateur ne donne aucun détail sur ces motifs ni même sur les alternatives possibles et expliquées aux cessionnaires. Est-ce que ces cessionnaires ont eu de la difficulté de payer leur logement? Leur crédit était mauvais? Ou encore avaient-ils de mauvaises habitudes de vie ou de comportements inacceptables? Bref, tout est possible, mais aucun détail ne vient ici éclairer les cédants du reproche que l’on leur attribue, afin de justifier un refus et même des alternatives discutées.
[33] Conséquemment, la cession de bail au profit de Martin D’aigle Blais et de Cynthia Pouliot à compter du 14 avril 2010 était elle aussi valide et opposable au locateur.
[34] La réclamation des locataires sera donc accordée partiellement.
[35] En effet, le bail avec les locataires ayant terminé le 24 janvier 2010 soit la date pour laquelle la deuxième cession prenait effet, le locateur devra donc rembourser aux locataires un montant de 135,50 $ représentant huit (8) jours du mois de janvier 2010, lequel fut payé par les locataires, soit entre le 24 et le 31 janvier 2010.
[36] De plus, le locateur devra rembourser aux locataires la somme de 150 $ représentant les frais de crédit payés au locateur pour les cessions postérieures à celle du 20 janvier 2010 et réclamée par les locataires.
[37] Quant à la demande de remboursement des frais de publicité, celle-ci ne peut être accordée, car ces frais ont été engagés pour les mois d’octobre, novembre, décembre 2009 et janvier 2010 pour permettre aux locataires de céder leur bail en janvier 2010. Ceux-ci sont donc de la responsabilité des locataires.
[38] En outre, la demande des locataires quant aux autres réclamations sera rejetée, ces dommages étant des frais indirects, pour lesquels le tribunal ne peut y faire droit.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
Dossier 18-100323-014 G
[39] REJETTE la demande du locateur.
Dossier 18-100531-032 G
[40]
CONDAMNE le locateur à payer aux locataires la somme de
285,50 $ avec les intérêts au taux légal et l'indemnité additionnelle
prévue à l'article
[41] REJETTE la demande des locataires quant au surplus.
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Serge Adam |
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Présence(s) : |
le mandataire du locateur les locataires |
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Date de l’audience : |
12 septembre 2011 |
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AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
appel; la consultation
du plumitif s'avère une précaution utile.