Gendreau c. R.
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2015 QCCA 1910 |
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COUR D’APPEL |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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GREFFE DE
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N° : |
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(450-01-063634-104) |
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DATE : |
19 novembre 2015 |
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JACQUES GENDREAU |
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APPELANT - Accusé |
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c. |
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SA MAJESTÉ LA REINE |
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INTIMÉE - Poursuivante |
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[1]
Le 18 janvier 2012, un jury, présidé par l'honorable Gaétan Dumas, juge
de la Cour Supérieure, a reconnu l'appelant coupable d'avoir utilisé son arme à
feu d'une manière négligente (art.
[2] Pour les motifs du juge Gagnon, auxquels souscrivent les juges Bich et Kasirer;
LA COUR :
[3] Rejette l'appel.
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MOTIFS DU JUGE GAGNON |
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[4] Le 18 janvier 2012, un jury présidé par le juge Gaétan Dumas a déclaré l’appelant Jacques Gendreau coupable d’avoir utilisé son arme à feu de manière négligente durant une activité de chasse à l’orignal (chef 2). Il l’a cependant acquitté de l’accusation de négligence criminelle ayant causé des lésions corporelles à la personne blessée par son tir (chef 1)[1].
[5] L’appelant nous demande de substituer au verdict entrepris un verdict d’acquittement, sinon d’ordonner la tenue d’un nouveau procès. Essentiellement, ses moyens d’appel reposent sur l’insuffisance et l’imprécision des directives données au jury. Il reproche aussi au juge du procès de ne pas être intervenu pour corriger certaines erreurs contenues dans les observations du ministère public présentées au jury.
[6] L’appelant est un travailleur de la construction. Chaque automne, il se rend sur les terres de son frère Daniel, propriétaire de la maison familiale, pour y chasser l’orignal. Ce dernier possède une propriété de 180 acres, formée de prairies et de forêts, dont une sapinière avoisinant une rivière située près de la frontière américaine.
[7] Le samedi 17 octobre 2009 marque l’ouverture de la saison de la chasse à l’orignal avec arme à feu. La réglementation alors applicable autorise indistinctement l’abattage des mâles, des femelles et des veaux.
[8] Ce même jour, dès l’aube, les deux frères Gendreau quittent pour la chasse. Une fois rendus sur les lieux, ils décident de se séparer. Daniel choisit de se diriger vers une saline[2] située sur la terre voisine alors que l’appelant opte pour une cache située dans un lieu voisin.
[9] Après avoir bramé l’orignal[3], Daniel décèle certaines manifestations laissant suspecter la présence de ce gibier dans les environs. Son intuition le sert bien. Il discerne une femelle orignal non loin de son emplacement. Il fait feu, mais rate sa cible. L’animal apeuré fuit l’endroit, suivi d’un veau non loin derrière.
[10] Après cet épisode, les deux frères se retrouvent pour discuter de leur infortune. Daniel doit cependant mettre fin à son activité, car d’autres obligations prévues à l’horaire de la journée l’attendent. L’appelant décide également de suspendre sa chasse. Confiant dans le potentiel du territoire, il projette d’y revenir en milieu d’après-midi.
[11] Entre-temps, il se rend dans une gravière où les habitués de l’endroit s’exercent au tir à la carabine. Il y rencontre fortuitement une connaissance nommée Jérémie Rouleau accompagné de deux inconnus, Jean-Christophe Beloin et sa conjointe Vanessa Désorcy. Tous les quatre sont sur le point de partager un destin tragique.
[12] Vers 15 h 30, l’appelant retourne à l’endroit où Daniel avait auparavant fait feu. Rendu sur les lieux, il charge son arme en prenant soin d’enclencher le cran de sécurité. Peu après cette manœuvre, il entend un « flacottement » correspondant au bruit associé au passage d’un orignal dans un marécage. Il dit apercevoir « des pattes passer, des pattes grises ». Il observe ensuite « une masse, silhouette, noire, brun-noire que je vois au travers [d’un] sapin ». Il utilisera aussi le mot « ombrage » pour décrire ce qui allait devenir sa cible.
[13] Il affirme que dès cet instant : « [p]our moi, le gibier est identifié ». Il s’agit d’un veau. Il scrute la cible à l’œil nu. Il la regarde aussi à deux ou trois reprises avec son télescope placé sur le dessus de sa carabine. Au moment d’appuyer sur la gâchette, il témoigne s’être dit : « [f]aut pas que je le tire dans les fesses, parce que c’est pas un point vitaux ». Il vise plus haut, désengage le cran de sécurité et fait feu.
[14] Il atteint sa cible, mais constate que l'« orignal » essaye de se relever. Il se dirige en toute hâte vers l’endroit où l’animal se serait écrasé, tout en rechargeant promptement son arme. Il entend alors une personne (Jean-Christophe Beloin) lui crier : « Crisse, tu as tiré ma blonde ». Stupéfait, il découvre que sa cible est l’une des personnes rencontrées quelques heures plus tôt à la gravière. Il s’agit de Vanessa Désorcy (la « victime »).
[15] La victime est gravement blessée à l’abdomen. Elle survivra à ses blessures non sans avoir conservé des séquelles permanentes de ce tir.
[16] L’appelant nous demande de répondre à plusieurs questions que je résume de la manière suivante :
1. Le juge a-t-il erré en ne présentant aucune directive au jury relativement aux trois étapes de l’arrêt W.(D.)[4]?
2. Le juge a-t-il erré en ne présentant aucune directive au jury relativement à l’actus reus et à la mens rea applicables à l’infraction d’usage négligent d’une arme à feu et à celle de négligence criminelle causant des lésions corporelles (pour laquelle Gendreau a toutefois été acquitté)?
3. Le juge a-t-il erré en permettant à la victime de témoigner sur l’étendue de ses dommages physiques et psychologiques, et ce, en dépit de l’admission de l’appelant faite en début de procès portant précisément sur ce point?
4. Le juge a-t-il erré en permettant au jury d’examiner durant leur délibération la carabine de l’appelant sans que cette autorisation soit précédée d’une mise en garde?
5. Le juge a-t-il erré dans ses directives en ne corrigeant pas les inexactitudes contenues dans la plaidoirie du ministère public?
6. Le juge a-t-il erré dans ses directives en tenant des propos contradictoires sur la qualité d’expert du témoin Michel Brault?
[17] Sans en faire un moyen d’appel explicite, il se dégage aussi de la position adoptée par l’appelant que le verdict serait déraisonnable. Voyons ce qu’il en est.
[18] Il convient dès maintenant de reproduire l’article du Code criminel créant l’infraction pour laquelle l’appelant a été reconnu coupable :
Usage négligent 86(1) Commet une infraction quiconque, sans excuse légitime, utilise, porte, manipule, expédie, transporte ou entrepose une arme à feu, une arme prohibée, une arme à autorisation restreinte, un dispositif prohibé, des munitions ou des munitions prohibées d’une manière négligente ou sans prendre suffisamment de précautions pour la sécurité d’autrui. |
Careless use of firearm, etc. 86(1) Every person commits an offence who, without lawful excuse, uses, carries, handles, ships, transports or stores a firearm, a prohibited weapon, a restricted weapon, a prohibited device or any ammunition or prohibited ammunition in a careless manner or without reasonable precautions for the safety of other persons. |
[19] Les crimes de négligence pénale, comme celui en l’espèce, ne se laissent pas cerner facilement. À ce propos, le juge Sopinka écrivait que « [c]e domaine du droit, tant ici que dans les autres pays de common law, s’est révélé l’un des plus difficiles et des plus incertains de tout le droit criminel »[5]. La principale difficulté en matière de responsabilité criminelle objective provient probablement du fait que l’actus reus et la mens rea des infractions de cette nature sont des notions qui se côtoient étroitement, d’où le risque de les confondre l’une avec l’autre en raison du critère objectif qu’elles partagent.
[20]
La doctrine énonce ainsi le but
poursuivi par l’article
Cette disposition vise à protéger les personnes contre les actes de négligence, susceptibles d’entraîner des lésions corporelles pour autrui. Parce que les armes à feu et les munitions peuvent occasionner des blessures graves ou une perte de vie, le législateur a reconnu qu’il importe que les personnes en possession de ces articles aient l’obligation de les utiliser, de les porter, de les manipuler, de les expédier ou de les entreposer d’une manière prudente et sûre.[6]
[21] Pour sa part, la jurisprudence résume l’élément central de cette infraction en ces termes :
21. […]
L’élément essentiel de
l’infraction [art.
[22] Selon ce qui précède, on peut facilement affirmer que la disposition en cause oblige tout utilisateur à faire usage d’une arme à feu avec diligence ou encore avec suffisamment de précautions pour ne pas compromettre la sécurité d’autrui. À moins d’invoquer une excuse légitime, par exemple la défense d’un bien[8], l’accusé verra son comportement jugé selon une norme objective de prudence.
[23] La position majoritaire exprimée par la juge Charron dans l’arrêt Beatty de la Cour suprême[9] fournit le cadre analytique applicable à la présente affaire, et ce, avec les adaptations nécessaires.
[24]
Les enseignements tirés de cet arrêt nous invitent à définir l’actus
reus selon les termes de la disposition en cause. En l’espèce, l’aspect
matériel de l’infraction prévue à l’article
[25] En tenant compte de l’ensemble des circonstances, cette preuve repose essentiellement sur le comportement de l’accusé au moment d’utiliser l’arme à feu, du lieu de l’événement et du risque que représente la situation[10].
[26] La mens rea de cette infraction, quant à elle, repose sur la preuve hors de tout doute raisonnable que la manière négligente d’utiliser l’arme à feu constitue un écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait une personne raisonnable placée dans la même situation que l’accusé[11]. Encore une fois, le critère objectif constitue l’élément central pour trancher cette question.
[27] Je précise au passage que l’analyse de la mens rea en matière de négligence pénale ne repose pas seulement sur le comportement attendu de la personne raisonnable, ce qui nous rapprocherait trop de la norme de la conduite simplement imprudente, d’où l’importance du critère objectif « modifié » adopté par la Cour suprême dans Hundal[12]. En fait, la preuve doit plutôt démontrer un écart marqué par rapport au comportement qu’aurait adopté en pareille situation la personne dite « raisonnable ». La preuve de l’écart marqué demeure une question de degré laissée à l’appréciation du juge des faits.
[28] Si le ministère public n’a pas l’obligation de démontrer que l’accusé avait l’intention subjective de manier de façon négligente l’arme à feu, la mens rea objective n’ignore pas pour autant son état d’esprit. Cette preuve, si elle existe, repose principalement sur la démonstration de son état mental de diligence au moment des événements[13], c'est-à-dire celui de ne pas avoir accordé à l’activité en cause le degré de pensée et d’attention nécessaire[14]. Une telle preuve peut résider dans les précautions insuffisantes prises par l’utilisateur au moment de s’adonner à l’activité dangereuse.
[29] S’il est démontré que l’accusé possédait la capacité de discernement requise pour apprécier le risque inhérent à sa conduite et, en l’absence d’un état mental de diligence approprié, l’inférence tirée à partir du comportement négligent de l’accusé qui s’écarte de façon marquée de celui de la personne raisonnable suffit à établir la mens rea :
[…] Si une personne a commis un acte manifestement dangereux, il est raisonnable, en l’absence d’indications contraires, d’en déduire qu’elle n’a pas réfléchi au risque et à la nécessité de prudence.[15]
[30] Je tiens aussi à ajouter que la mens rea objective peut également s’inférer de la nature même de l’activité à l’occasion de laquelle le geste blâmable s’est produit. Dans l’affaire qui nous occupe, personne ne conteste que la chasse à l’orignal est une activité fortement réglementée (permis de chasse, permis de possession et d’acquisition, certificat d’enregistrement, etc.). Comme l’écrivait le juge Cory dans Hundal :
[…] les titulaires de permis choisissent de se livrer à l’exercice réglementé qu’est la conduite d’un véhicule automobile [ici, la chasse à l’orignal] […]. Ils assument ainsi une responsabilité envers tous les autres membres du public qui circulent sur les chemins [ici, les autres chasseurs].[16]
[31] À partir de cette citation, la juge Charron dans Beatty se dit d’avis que ceux qui décident de se livrer à une activité réglementée parce que dangereuse « et qui ne satisfont pas à la norme de diligence requise ne peuvent être considérés comme moralement innocents »[17].
[32] Cependant, lorsque l’accusé propose une explication, comme c’est le cas en l’espèce, le juge des faits doit alors se demander si une personne raisonnable placée dans des circonstances analogues « aurait dû être consciente du risque et du danger inhérents au comportement de l’accusé »[18].
[33]
Je résumerais donc de la manière suivante la tâche du juge des faits
appelé à décider de la culpabilité d’une personne accusée de l’infraction
prévue à l’article
[34]
La réalité des choses fait voir que le risque de préjudice lié à l’usage
d’une arme à feu est très grand. On s’attend de la personne raisonnable
s’adonnant à une activité de chasse de faire montre d’un niveau d’anticipation
élevé. La jurisprudence nous donne plusieurs exemples de comportement blâmable
en matière de négligence criminelle avec une arme à feu (art.
[35] Ainsi, et tout en se gardant bien de fixer une norme formelle en vue d’étayer une déclaration de culpabilité en matière de négligence impliquant une arme à feu, le juge Gonthier dans l’arrêt Morrisey de la Cour suprême y va de cette affirmation :
[…] Essentiellement, le fait de tirer sans avoir au préalable déterminé adéquatement la nature de la cible constitue une dérogation marquée par rapport à la conduite d’un chasseur prudent.[21]
[36] Les directives du juge au jury devaient être en harmonie avec les critères d’analyse ci-devant énoncés. Avant de vérifier si tel est le cas, je souhaite rappeler que l’appelant a été acquitté de l’accusation de négligence criminelle ayant causé des lésions corporelles (chef 1). Il s’agit d’une infraction apparentée jusqu’à un certain point à celle d’usage négligent d’une arme à feu (chef 2). Dès lors, il s’impose à l’esprit que les directives inadéquates du juge au jury à l’égard du chef 2, telles que plaidées par l’appelant, n’ont pas interféré avec son acquittement sur le chef 1. Ce constat ne pourra être occulté dans l’analyse qui va suivre.
1) La décision du juge de ne présenter aucune directive selon W.(D.)
[37] L’appelant soutient qu’en présence d’une preuve contradictoire le juge devait nécessairement instruire le jury sur les trois étapes proposées dans l’arrêt W.(D.). Il a tort. Voici pourquoi.
[38] Tout d’abord, la preuve portant sur les aspects factuels déterminants découlant des événements du 17 octobre 2009 n’est pas contradictoire. L’appelant admet, alors qu’il était à la chasse à l’orignal, avoir tiré sur une cible qui s’est avérée être la victime. Les circonstances entourant son geste sont pour l’essentiel acceptées. Le véritable débat en première instance se situait à un autre niveau. Il s’agissait pour le jury de décider si la conduite de l’appelant démontrait un écart marqué par rapport à la norme du comportement de la personne raisonnable.
[39] Ensuite, la démarche analytique proposée dans W.(D.) « ne constitue pas une formule sacro-sainte emprisonnant les tribunaux d’instance dans un carcan »[22]. En cette matière, et si tant est que la crédibilité des principaux acteurs dans cette affaire était en cause, une méthode d’analyse flexible adaptée au contexte demeurerait la meilleure approche :
[L’]appréciation de la crédibilité ne se prête pas toujours à l’application des trois étapes distinctes proposées dans W.(D.), tout dépend du contexte. Ce qui importe, c’est de respecter la substance des directives formulées dans W.(D.).[23]
[40] J’ajoute que l’incarnation tripartite littérale de W.(D.) ne convient pas toujours à l’analyse d’une preuve portant sur la responsabilité criminelle objective. Ici, même si le jury croyait l’appelant sur sa perception subjective des faits, la question demeurait entière. L’infraction en cause repose sur la négligence de l’appelant et non sur son intention coupable d’agir négligemment. Une croyance déraisonnable même si elle est sincère peut tout de même être entretenue de façon négligente ou ne pas avoir été l’objet de précautions suffisantes[24].
[41] En l’espèce, même si le jury avait cru à la sincérité des croyances subjectives de l’appelant, il ne pouvait manifestement pas prêter foi à ses affirmations selon lesquelles il avait pris pour cible un véritable « orignal » :
- J'ai mis une croix sur l'orignal.
- [J]'ai vu que l'orignal essayait de se relever.
- [D]ans le télescope, c'était le petit orignal que je voyais.
- [M]ême aujourd'hui, c’est encore un orignal.
- Là, c'était un orignal.
- Oui, c'était l'orignal.
- [C]'est ça que je voyais, l'orignal essayé de se relever.
- Les fesses, le dos [du haut de l'orignal].
- Mais, moi, c'était un orignal.
[42] En fait, ce qu’a vu l’appelant ne pouvait être autre chose qu’« une masse, silhouette, noire, brun-noire […] » ou encore un « ombrage ». Cette conclusion est inéluctable en raison même du résultat du tir. À ce chapitre, la victime et le témoin Beloin n’ont pas témoigné avoir décelé dans leur environnement immédiat la présence d’un orignal susceptible de confondre l’appelant. Quant à sa prétention selon laquelle il aurait vu « des pattes grises », il s’avère que la victime portait des bottes noires.
[43] Finalement, le juge a aussi rappelé au jury à près de 20 reprises l’obligation de considérer l’existence d’un doute raisonnable à toutes les étapes de son analyse. Il n’en faut pas davantage pour respecter l’esprit de W.(D.).
2) L’insuffisance des directives quant à l’actus reus et à la mens rea des infractions d’usage négligent d’une arme à feu (chef 2) et de négligence criminelle causant des lésions corporelles (chef 1)
[44] À l’appui de sa prétention selon laquelle le juge aurait donné au jury des directives insuffisantes quant à l’actus reus et à la mens rea de l’infraction d’usage négligent d’une arme à feu, l’appelant avance cinq moyens censés démontrer son point de vue.
[45] Avant de trancher chacune de ces sous-questions, j’estime que l’affirmation selon laquelle le juge a refusé de fournir au jury des directives portant sur l’actus reus et la mens rea des deux infractions pour lesquelles l’appelant subissait son procès ne se vérifie pas à la lecture de la transcription des débats en première instance.
[46] Quant à l’actus reus de l’infraction de négligence criminelle causant des lésions corporelles, le juge a clairement expliqué au jury les éléments essentiels de cette infraction, en l’occurrence l’identité de l’auteur, le lieu des événements, le geste reproché à l’appelant en lien avec les termes mêmes de l’accusation et sa causalité avec les lésions corporelles identifiées chez la victime.
[47] Quant à la mens rea de cette infraction, voici un extrait des directives qui traite de ce point :
Une petite erreur, ou un manque d’attention momentané, qui a pour résultat tragique des lésions corporelles, n’est pas suffisant pour constituer une négligence criminelle.
La poursuite n’a pas à démontrer que Jacques Gendreau avait l’intention de blesser Vanessa Désorcy ou quiconque. Ce que la poursuite doit prouver hors de tout doute raisonnable est que Jacques Gendreau, lorsqu’il a fait feu sans identifier sa cible ou en ne manipulant pas son arme avec prudence, a fait montre d’une insouciance outrancière et téméraire des conséquences de ses actions.
La négligence criminelle nécessite plus qu’une insouciance de la part de l’accusé. Ce que l’accusé a fait ou n’a pas fait doit se démarquer de façon substantielle de ce qu’une personne raisonnable prudente aurait fait dans les mêmes circonstances.[25]
[48] En ce qui a trait à l’infraction d’usage négligent d’une arme à feu, même si dans ses directives le juge n’a pas fait de mentions explicites renvoyant aux notions d’actus reus et de mens rea, comme je le soulignerai plus loin, celles-ci n’en contenaient pas moins tous les ingrédients.
[49] Il convient maintenant de répondre à chacune des propositions avancées par l’appelant concernant l’insuffisance des directives portant sur ces notions.
i) La distinction entre la négligence civile et la négligence criminelle
[50] L’appelant a plaidé devant notre Cour que le juge aurait dû souligner au jury la distinction fondamentale entre la négligence civile et la négligence criminelle.
[51] Le juge au moment d’instruire le jury sur l’accusation de négligence criminelle causant des lésions corporelles a pourtant discuté de cette question. Je reprends les extraits pertinents :
[…] N’oubliez pas que la conduite de Jacques Gendreau doit montrer une insouciance outrancière, téméraire de la vie ou de la sécurité d’autrui. Une petite erreur, ou un manque d’attention momentané, qui a pour résultat tragique des lésions corporelles, n’est pas suffisant pour constituer une négligence criminelle.
[…]
La négligence criminelle nécessite plus qu’une insouciance de la part de l’accusé. Ce que l’accusé a fait ou n’a pas fait doit se démarquer de façon substantielle de ce qu’une personne raisonnable prudente aurait fait dans les mêmes circonstances.[26]
[Je souligne.]
[52] Le juge n’avait pas à confondre le jury avec des distinctions plus ou moins subtiles entre les notions relatives à la norme de la négligence civile et de la négligence criminelle. L’usage négligent ou le manquement à une obligation de précautions suffisantes se qualifie maintenant de « négligence pénale ». Il s’agit désormais du standard applicable à cette infraction, et ce, depuis les arrêts de la Cour suprême rendus dans les affaires Gosset[27] et Naglik[28]. Comme le signale la juge Charron dans Beatty, « [i]l importe toutefois de ne pas amalgamer la norme de la négligence civile et le critère pour statuer sur la négligence pénale »[29].
[53] Il est vrai cependant que les directives concernant l’accusation d’usage négligent d’une arme à feu ne distinguent pas avec précision les éléments reliés à l’actus reus de cette infraction de ceux composant la mens rea. J’estime que cette omission, s’il en est, n’a pu avoir pour conséquence d’égarer le jury.
[54] Le fait que le juge n’a pas employé des expressions techniques comme actus reus et mens rea est loin de constituer une erreur, bien au contraire. Les juges appelés à présider des procès avec jury sont invités lors de leurs directives à utiliser un langage simple et compréhensible[30]. Ce qui importe, c’est le message transmis qui doit exprimer clairement la charge de la preuve applicable au ministère public et non une formule sacramentelle quelconque mal adaptée aux circonstances de l’affaire de laquelle on ne pourrait jamais dévier.
[55]
Je note que les jurés se sont vu remettre une version écrite de l’article
[56] Cet extrait tiré des directives écrites remises au jury porte précisément sur la première étape de l’analyse à laquelle il devait se livrer :
Jacques Gendreau a-t-il utilisé une arme à feu d’une manière négligente ou sans prendre suffisamment de précautions pour la sécurité d’autrui?
L’usage d’une arme à feu est une activité qui implique un contrôle sur un objet qui peut tuer ou blesser sérieusement une personne. Les lois criminelles portent une attention spéciale aux personnes qui ont un contrôle sur des armes à feu.
Nous nous attendons que les personnes qui utilisent volontairement des armes à feu, d’agir d’une façon qui manifeste un respect du risque inhérent qu’une arme peut blesser autrui.
Pour répondre à cette question, vous n’avez pas à décider ce que Jacques Gendreau avait à l’esprit au moment où il a utilisé l’arme à feu. La négligence est l’absence de prise de soins nécessaires. Pour déterminer cette question, vous devez regarder :
1. Ce que l’accusé a fait ou n’a pas fait;
2. Comment l’accusé a agi ou n’a pas agi.
Vous devez considérer toutes les circonstances, incluant toutes les caractéristiques personnelles de Jacques Gendreau qui auraient pu le priver d’une capacité de faire en sorte d’être conscient de l’obligation de diligence requise.[31]
[Je souligne.]
[57] L’arbre de décision remis par le juge à chaque membre du jury[32] est à cet égard encore plus explicite :
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Jacques Gendreau a-t-il utilisé une arme à feu? |
Non |
Verdict final |
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¯oui |
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Jacques Gendreau a-t-il utilisé une arme à feu d’une manière négligente ou sans prendre suffisamment de précautions pour la sécurité d’autrui? |
Non |
Verdict final |
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¯oui |
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La conduite de l’accusé constitue-t-elle un écart marqué par rapport à la norme de diligence qu’observerait une personne raisonnable dans les circonstances? |
Non |
Verdict final |
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¯oui |
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Verdict final de culpabilité |
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[58] Il ressort de cet outil d’analyse que les deux premières questions auxquelles le jury devait répondre visent précisément l’actus reus de l’infraction d’usage négligent d’une arme à feu, alors que la troisième se concentre sur la mens rea.
[59] J’ajoute qu’en l’espèce l’appelant n’a pu subir de préjudice provenant d’une directive qui n’a pas apporté une distinction nette entre les notions d’actus reus et de mens rea. Si le jury a pu comprendre des directives attaquées que la notion d’écart marqué s’appliquait à l’actus reus, ce que je ne décide pas, cela revient à dire que le ministère public s’est vu imposer un fardeau de preuve supplémentaire dès l’étape initiale en devant démontrer un niveau de négligence équivalant à un écart marqué par rapport à la norme de prudence d’une personne raisonnable. Or, la notion d’« écart marqué », on l’a vu, n’intervient qu’au stade de l’analyse de la mens rea.
[60] En ce qui a trait à ce dernier élément, les directives me paraissent adéquates et suffisamment compréhensibles pour atteindre le niveau d’efficacité requis en cette matière. J’ajoute que des directives inutilement complexes auraient pu desservir les fins de la justice en créant un risque pour le jury de se perdre en conjectures sur la nature véritable de l’élément moral de l’accusation en cause.
[61] Le juge a expliqué de façon appropriée ce qui était somme toute la question centrale que devait décider le jury, c’est-à-dire trancher si le comportement de l’appelant représentait un écart marqué par « rapport à la norme de diligence qu’observerait une personne raisonnable ». Voici les passages pertinents des directives sur lesquels je m’appuie pour conclure en ce sens :
Pour déterminer s’il y a négligence, le critère est objectif, soit celui d’un écart marqué par rapport à la norme de diligence qu’observerait une personne raisonnable.
Jacques Gendreau est un chasseur.
La question fondamentale est donc de savoir si les gestes de l’accusé constituaient un écart marqué par rapport à la conduite d’un membre raisonnable du groupe des chasseurs.
Vous devez donc examiner les questions suivantes :
1. La conduite de l’accusé constitue-t-elle un écart marqué par rapport à la norme de diligence qu’observerait une personne raisonnable dans les circonstances de l’infraction?
Lorsqu’ils chassent, les chasseurs ne doivent appuyer sur la détente de leur arme que s’ils ont la conviction raisonnable que leur cible n’est pas un être humain. Ils doivent s’assurer de façon raisonnable que leur cible est l’animal qu’ils ont le droit de chasser.
Pour répondre à cette question, vous devez analyser la preuve dans son ensemble.
Vous devez vous demander si un chasseur raisonnablement prudent, placé dans les mêmes circonstances, pouvait raisonnablement croire qu’il tirait sur un animal et non sur un être humain.
Le fait pour la victime de porter un vêtement se rapprochant des couleurs d’un orignal permet-il d’établir cette croyance raisonnable?
C'est à vous d'en décider.
Il vous appartient de décider si l’accusé a pris ses précautions et commis une erreur raisonnable.
La chasse donne lieu à des accidents raisonnables et déraisonnables, tout comme l’usage d’arme à feu peut donner lieu à des accidents raisonnables et déraisonnables dans d’autres contextes.
Chacun de ces accidents est tragique, mais ils ne sont pas tous sources de responsabilité criminelle.
C’est à vous d’en décider.[33]
[62] Je note que ces enseignements s’inspirent à quelques mots près du modèle de directive proposé par l’Institut national de la magistrature[34]. Sans pour autant affirmer que les suggestions de directives que propose cet organisme comportent en toute circonstance la garantie d’efficacité requise[35], il n’en demeure pas moins que l’appelant n’a pas porté à notre attention une décision remettant en cause le modèle emprunté par le juge.
[63] En fait, c’est plutôt une directive de même nature cette fois pour un crime de négligence criminelle qui a déjà été approuvée par la Cour d’appel de Colombie-Britannique[36] :
[43] The judge’s charge in this area closely followed the model instruction prepared under the auspices of The Canadien Judicial Council, […].
[…]
[48] The judge correctly made clear to the jury that they must find both the actus reus and the mens rea elements of the offence; there is no additional requirement that these elements must be satisfied independently from one another. Just as a person is presumed to intend the consequences of his or her actions, mens rea must always be inferred from conduct to some extent. […]
[64] Aussi, comme le fait voir cet extrait, et ce, même si le juge n’a pas abordé formellement cette question dans ses directives, le jury pouvait inférer à partir de la conduite négligente de l’appelant l’existence de la mens rea requise. Une telle inférence pouvait également être déduite de l’activité hautement réglementée à laquelle l’appelant se livrait. La loi tient en effet pour acquis que ceux qui s’adonnent à ce genre d’activité connaissent la norme de diligence nécessaire[37].
[65] À bien y penser, considérant les circonstances de l’espèce, des directives plus exhaustives sous ce rapport n’auraient pu que renforcer davantage la position du ministère public présentée au jury.
ii) La notion « d’écart marqué »
[66] L’appelant considère que le juge n’a pas suffisamment précisé au jury la portée véritable de la notion d’« écart marqué ». Je suis en désaccord avec cette proposition.
[67] Après avoir résumé les principaux faits mis en preuve, le juge a demandé au jury de trancher la culpabilité de l’appelant sur la base d’un critère objectif, à savoir si son comportement au moment des événements constituait « un écart marqué par rapport à la norme de diligence qu’observerait une personne raisonnable ».
[68] Il avait aussi pris soin de pointer différents éléments dans la preuve permettant d’établir les facteurs de diligence reliés à une personne raisonnablement prudente. Il a aussi repris l’argument de l’appelant invoquant sa croyance raisonnable basée sur le fait que la victime portait un vêtement se rapprochant des couleurs d’un orignal. Puis, après avoir déclaré au jury qu’un chasseur raisonnablement diligent devait toujours s’assurer que sa cible était bien l’animal qu’il avait le droit de chasser, il ajoute :
Vous devez vous demander si un chasseur raisonnablement prudent, placé dans les mêmes circonstances, pouvait raisonnablement croire qu’il tirait sur un animal et non sur un être humain.[38]
[69] Cette directive correspond aux exemples retenus par le juge Gonthier dans l’arrêt Morrisey[39] et tirés de l’affaire Stewart[40].
iii) La défense d’erreur de fait
[70] Les directives du juge au jury laissaient largement place à la défense d’erreur de fait, et ce, en dépit de la plaidoirie peu élaborée de la défense portant sur cette question.
[71] Je rappelle que ce moyen de défense peut provenir de la preuve du ministère public ou encore d’une simple présentation de la part de l’accusé sans pour autant que cette démarche se transforme pour lui en un quelconque fardeau de preuve.
[72] Dans le contexte d’infractions de négligence pénale, l’actus reus, la mens rea et la défense d’erreur honnête mais raisonnable de fait sont des notions visant un but différent, mais qui demeurent inexorablement liées. Elles reposent principalement sur le critère de la personne raisonnable.
[73] La défense d’erreur honnête de fait en matière de négligence pénale consiste à déterminer si la personne raisonnable placée dans le même contexte que celui de l’accusé aurait eu la même perception erronée des faits si, bien entendu, son geste avait été précédé des précautions raisonnables d’usage en vue de prévenir le risque d’erreur[41].
[74] Dès l’instant où le juge des faits conclut que la preuve démontre hors de tout doute raisonnable qu’une personne raisonnable, compte tenu des circonstances, n’aurait pas agi comme l’accusé, il peut aussi inférer à partir de cette preuve que cette même personne raisonnable n’aurait pas commis la même erreur si elle avait été placée dans les mêmes circonstances que lui. C’est en quelque sorte les deux faces d’une même médaille.
[75] Je suis d’avis, à partir des extraits des directives repris précédemment, que le jury a été convenablement instruit sur cet aspect du débat maintenant soulevé en appel.
[76] L’appelant aurait souhaité que le juge associe ce moyen de défense à son état d’esprit véritable pour pouvoir ensuite en faire une mention spécifique au jury. La négligence pénale ne se préoccupe pas de la perception subjective de l’accusé. Quitte à le redire, la mens rea objective s’infère habituellement des faits mis en preuve. Or, l’appelant ne soutient pas que le résumé de faits narré par le juge au jury est vicié par des omissions ou des inexactitudes déterminantes.
[77] Par surcroît, l’état mental de diligence de l’appelant a abondamment été discuté tout au long du procès. L’appelant et son avocat ont eu l’occasion de longuement expliquer la nature des précautions prises avant de tirer sur la cible. Il appartenait au jury d’accorder à cet argument son poids véritable.
iv) L’excuse légitime
[78] L’appelant prétend que le juge aurait dû instruire le jury sur la possibilité d’une excuse légitime, en l’occurrence un moyen de défense disculpatoire intimement lié à sa situation. Outre la défense d’erreur de fait, on ignore de quelle excuse légitime il pourrait être ici question, la preuve n’en pointant aucune autre.
[79] Cela dit, en dépit du silence de la preuve sur ce point, le juge a tout de même pris soin de demander au jury de tenir compte de « toutes caractéristiques personnelles de Jacques Gendreau qui auraient pu le priver d’une capacité de faire en sorte d’être conscient de l’obligation de diligence requise »[42].
v) L’absence de mention au jury voulant que l’appelant n’avait enfreint aucune norme réglementaire
[80] Ce moyen n’est pas fondé.
[81] L’appelant pouvait bien espérer des directives les plus favorables à sa cause qui soient. Il ne pouvait cependant exiger qu’elles soient parfaites[43] ou correspondent en tout point à ses propres normes et attentes, alors que ses observations au jury passaient déjà sous silence plusieurs des enjeux qu’il tente maintenant de soulever en appel.
[82] Dans la présente affaire, il ne servait à rien de distraire le jury avec des directives portant sur une question étrangère à l’application du critère objectif servant à décider de la responsabilité criminelle de l’appelant.
3) Le témoignage de la victime
[83] L’appelant signale, durant l’administration de la preuve à charge, que le juge a autorisé la victime à témoigner sur ses séquelles physiques et psychologiques en lien avec les événements du 17 octobre 2009. Il rappelle que cette preuve avait déjà été l’objet d’une admission en début de procès. Il la considère comme irrégulière et avance l’idée qu’il s’agit d’une stratégie visant une fin indirecte, soit celle de susciter la sympathie du jury à l’égard de ce témoin.
[84] Le ministère public concède, à bon droit d’ailleurs, que la décision du juge de permettre cette preuve était illégale[44]. L’appelant a donc raison de dénoncer cette façon de faire. Cependant, cette erreur n’a pu avoir les conséquences qu’il lui prête.
[85] Lors de ses directives, le juge a rappelé au jury au moins à trois occasions son obligation de juger l’affaire sans tenir compte de la sympathie qu’il pourrait éprouver à l’égard de la victime. Il a même ajouté que cette question ne faisait pas partie de la preuve.
[86] De plus, lors de son témoignage, l’appelant a pris soin d’apporter un contrepoids à cet élément. Il a rappelé au jury que lui aussi était une victime dans cette affaire. Il a relaté l’ampleur de ses préjudices en mentionnant que sa vie avait été bouleversée par cet événement tragique et qu’il en avait conservé un souvenir pénible nécessitant un long suivi psychologique.
[87] Il faut aussi reconnaître que cette erreur n’a pas empêché le jury d’acquitter l’appelant pour l’infraction de négligence causant des lésions corporelles.
4) La remise de l’arme à feu au jury durant ses délibérations
[88] L’appelant affirme que le juge n’aurait pas dû permettre au jury d’examiner la carabine durant ses délibérations. Il estime que cette décision autorisait le jury à « procéder à une expérimentation, manipulation ou reproduction » de ses gestes, et ce, en son absence.
[89] Ce reproche tire son origine d’une objection à la preuve accueillie par le juge interdisant à la poursuite de produire à la onzième heure des photographies démontrant les différentes possibilités de rapprochement (zoom) qui s’offraient à l’appelant grâce au télescope de sa carabine. Le juge a rejeté cette preuve au motif que « c’est parce que là vous voulez peut-être tirer l’inférence que s’il l'avait mis à neuf (9), il l’aurait vu la fille ». Il ajoute :
Alors, ça va ajouter quoi de démontrer c’est combien à zéro (0), c’est combien à trois (3), combien à six (6), combien à neuf (9) si dans les faits vous voulez prouver qu’il était à 4.5 […].[45]
[90] L’appelant estime que la remise de la carabine au jury contournait cette décision.
[91] Je suis d’accord avec le ministère public pour dire que les jurés ont, sauf exceptions, le droit d’avoir en leur possession toutes les pièces déposées au procès[46].
[92] De plus, je constate que l’autorisation maintenant contestée a été rendue avec l’accord de l’avocate de l’appelant et que ce choix stratégique n’a pas depuis été répudié. Ensuite, l’affirmation que le jury s’est livré à « une expérimentation » n’est que spéculation. On ne peut inférer du fait qu’un jury s’intéresse durant le délibéré à une pièce déposée en preuve lors du procès qu’il s’agit nécessairement d’une preuve additionnelle en train de se dérouler en l’absence de l’accusé[47].
[93] Par cette décision, le juge a empêché la poursuite de faire la preuve de ce qu’une personne raisonnable aurait pu faire dans les mêmes conditions que celles où se trouvait l’appelant.
[94] Or, cette preuve ne visait pas à établir ce qu’il devait faire en pareille circonstance, mais plutôt ce qu’il aurait pu faire. Je signale au passage que les observations de la poursuite faites au jury sur cette question respectaient cette importante distinction. J’y reviendrai.
[95] De toute façon, le jury s’était déjà vu présenter une preuve selon laquelle le télescope de l’appelant était ajusté à un niveau de grossissement quatre ou cinq et que cette lunette avait une capacité de grossir l’image jusqu’à neuf fois.
[96] L’appelant a aussi déclaré avoir regardé à deux ou trois reprises dans le télescope avant de faire feu, laissant entendre que l’usage de cet instrument lui permettait de mieux voir sa cible. Cette preuve visait manifestement à souligner sa diligence compte tenu des circonstances.
[97] Ces informations concernant l’usage du télescope provenaient de l’appelant lui-même. Il ne s’agit donc pas de l’une de ces rares situations où un jury a été contaminé par un renseignement préjudiciable formellement exclu du procès.
[98] En l’espèce, le jury, en raison de la nature même de la preuve admise, pouvait examiner l’arme à feu en vue de se former sa propre opinion. Comme le fait remarquer la Cour suprême dans l’arrêt Pan[48] :
[61] L’on s’attend à ce que les jurés mettent à contribution tout leur bagage d’expériences dans l’accomplissement de leur tâche. C’est à partir de leurs connaissances sur le comportement humain, connaissances qu’ils ont évidemment acquises à l’extérieur de la salle d’audience, qu’on leur demande d’apprécier la crédibilité des témoins et de tirer des inférences des faits prouvés. […].
[99] Au final, j’estime que l’absence d’objection portant sur cette question me semble significative quant au peu de gravité de cette soi-disant irrégularité à laquelle l’appelant nous renvoie au stade de l’appel[49]. Si tant est que le juge ait commis une erreur en remettant la carabine au jury sans accompagner sa décision d’une directive spécifique[50], cette erreur, s’il en est, ne peut être à l’origine d’une erreur judiciaire compte tenu de l’importance de la preuve présentée contre l’appelant :
29. […] Pour reprendre les
propos tenus par le juge en chef Lamer au nom de la Cour dans R. c. Tran,
[…]
31. Outre les cas où l’erreur
commise n’est que mineure ou n’entraîne que des conséquences mineures, il
existe une autre catégorie de cas susceptibles de donner lieu à l’application
du sous-al. 686(1)b)(iii). Cette catégorie a été décrite dans
l’arrêt R. c. S. (P.L.),
Il existe cependant une exception à cette règle lorsque la preuve est à ce point accablante que le juge des faits conclurait forcément à la culpabilité. Dans ce cas, il est justifié de priver l’accusé d’un procès régulier puisque cette privation est minime lorsque le résultat serait forcément une autre déclaration de culpabilité.
Par conséquent, il est possible
d’appliquer la disposition réparatrice même lorsque les erreurs ne sont pas
mineures et ne peuvent être considérées comme n’ayant eu qu’une incidence
mineure sur le procès, mais uniquement lorsqu’il est clair que la preuve
tendant à établir la culpabilité de l’accusé est à ce point accablante qu’il
serait impossible d’obtenir un verdict autre qu’une déclaration de culpabilité
(voir R. c. Nijjar,
[Je souligne.]
[100] En affirmant ce qui précède, j’ai aussi à l’esprit que le même jury a acquitté l’appelant de négligence criminelle causant des lésions corporelles à la victime.
5) La faute du juge pour ne pas avoir corrigé les erreurs contenues dans la plaidoirie du ministère public au moment de faire part de ses directives au jury
[101] L’appelant propose sept inexactitudes ou exagérations contenues dans les plaidoiries du ministère public. Selon lui, le cumul de ces erreurs a eu comme conséquence de vicier le procès de façon irrémédiable. Il concède cependant que la plaidoirie de l’avocat de l’intimée n’était pas incendiaire.
[102] Encore une fois, avec le recul que procure l’instance d’appel, l’appelant soulève plus de points litigieux dans son pourvoi qu’il en a précisés lors de la conférence pré-directive tenue avec le juge.
i) Les observations du ministère public portant sur la notion d’« écart marqué »
[103] L’appelant soutient que le ministère public n’a laissé aucune place à un verdict d’acquittement au moment de plaider que le jury pouvait choisir entre un écart marqué substantiel[52] ou un écart marqué.
[104] Une lecture attentive de la transcription des observations du ministère public fait bien ressortir que la notion d’écart marqué substantiel présentée au jury était intimement associée à l’infraction de négligence criminelle causant des lésions corporelles pour laquelle l’appelant a d’ailleurs été acquitté.
[105] En ce qui a trait à l’accusation d’usage négligent d’une arme à feu, la poursuite a pris soin de préciser au jury que son fardeau consistait à « prouver un écart marqué face à ce qu’une personne […] raisonnable aurait fait »[53]. Cette déclaration respecte l’état du droit en matière d’usage négligent d’une arme à feu.
ii) Les observations du ministère public sur l’intérêt de l’appelant dans son procès
[106] L’appelant a raison de plaider que tout accusé a un intérêt à obtenir un acquittement surtout s’il se dit innocent de l’accusation portée contre lui. Les observations du ministère public portant sur l’intérêt de l’appelant quant à l’issue de son procès étaient déplacées et il va de soi que les remarques de cette nature devant un jury sont à proscrire. En l’espèce, elles n’ont toutefois pu avoir d’effets préjudiciables si l’on se fie à l’acquittement de l’appelant pour l’accusation de négligence criminelle.
iii) Les observations du ministère public sur l’absence d’indication de la part des témoins Désorcy et Beloin quant à la présence d’un animal dans leur environnement immédiat
[107] À mon avis, le ministère public a eu raison de rappeler au jury que la victime et son conjoint de l’époque, le témoin Beloin, n’ont pas témoigné avoir repéré la présence d’un gros gibier dans leur environnement immédiat.
[108] Selon la localisation du bruit associé au passage d’un orignal dans un marécage, comme le relate l’appelant, l’animal se serait trouvé à peu près au même endroit que ces deux témoins, ce qui aurait dû normalement attirer leur attention étant supposément plus rapprochés de la cible que ne l’était l’appelant lui-même. Il était donc logique d’inférer de ces circonstances que le témoin Beloin et la victime, tous deux accompagnés de Jérémie Rouleau, n’avaient pas vu un orignal à l’endroit même où cette dernière a été atteinte par balle.
iv) Les observations du ministère public sur la façon dont l’appelant a utilisé son télescope
[109] L’appelant suggère que le ministère public a induit le jury en erreur en déclarant que l’accusé aurait dû utiliser son télescope à pleine capacité. Or, contrairement à cette prétention, le ministère public n’a pas plaidé que l’appelant aurait dû ajuster son télescope à un degré plus élevé. Il a plutôt déclaré que l’appelant aurait pu régler son télescope à un niveau supérieur d’intensité, de sorte à grossir davantage l’image compte tenu des conditions incertaines qui prévalaient alors (vue sur une cible partiellement obstruée par un sapin).
[110] La distinction est ici importante. Dans le premier cas, si tels avaient été les propos du ministère public, ils auraient eu pour effet de créer une obligation absolue de diligence, ce qui aurait constitué une erreur manifeste en droit. Cependant, en voulant démontrer au jury que différentes options associées à des précautions suffisantes s’offraient à l’appelant au moment de tirer sur la cible, dont celle d’augmenter le niveau d’intensité de son télescope, le ministère public ne faisait que mettre de l’avant un élément de diligence pouvant correspondre à la conduite de la personne raisonnable.
[111] Au final, il appartenait au jury, selon le contexte prévalant au moment des événements, de déterminer si cette option identifiée par le ministère public et ajoutée à d’autres facteurs de diligence mis en preuve (telles les recommandations contenues au manuel du chasseur) correspondait à la norme de prudence d’une personne raisonnable.
v) Les observations du ministère public sur des éléments hors preuve
[112] L’appelant considère que le ministère public plaidait hors preuve lorsqu’il a déclaré au jury que son envie d’abattre un gibier l’a amené à croire que sa cible était un orignal, provoquant ainsi un tir à l’aveuglette. Ce reproche doit également échouer.
[113] Aux fins de mettre de l’avant son niveau de diligence ou en vue de démontrer la suffisance de ses précautions, l’appelant a insisté sur un élément du contexte entourant l’incident en rappelant que son frère avait, le même jour et dans le même secteur, fait feu sur un orignal. À ses dires, cette anecdote l’autorisait à croire raisonnablement que plusieurs heures plus tard, il était, lui aussi, en présence de cet animal. C’est sur la foi d’un événement vécu par un tiers et de son impact sur le raisonnement de l’appelant que le ministère public pouvait retenir l’idée d’un tir « à l'aveuglette ».
[114] De plus, l’appelant déclare avoir vu dans son télescope une masse, une silhouette brun-noir. La chose, sans plus d’explications, devient un orignal qui, après avoir été atteint, tente même de se relever. Comment viser un orignal, déclarer avoir identifié l’animal dans un télescope et atteindre l’objectif comme souhaité pour finalement tirer sur une personne?
[115] Pour paraphraser mon collègue le juge Louis Rochette dans l’arrêt Gougeon c. R.[54], les commentaires du ministère public avaient pour but de signaler au jury que la volonté de l’appelant d’abattre un orignal avait remplacé la raison, le mirage la réalité.
[116] La question de savoir si l’appelant s’était assuré de bien identifier la cible avant de faire feu constituait l’élément crucial du procès sur lequel il appartenait au ministère public d’attirer l’attention du jury.
vi) Les observations du ministère public quant aux croyances de l’appelant
[117] Le ministère public a eu raison de plaider que les croyances de l’appelant n’étaient pas nécessairement celles de la personne raisonnable compte tenu du critère objectif applicable à l’infraction en cause.
[118] Même si le jury croyait l’appelant, il ne pouvait pour autant l’acquitter sans se demander si les précautions prises par lui avant d’appuyer sur la gâchette correspondaient à celles de la personne raisonnable placée dans les mêmes conditions. Une réponse négative à cette question en entraînait une autre. Le jury devait alors se demander si la conduite de l’appelant constituait un écart marqué par rapport à la norme de la personne raisonnable.
[119] La plaidoirie du ministère public respectait ces critères d’analyse.
vii) Les observations du ministère public sur la preuve portant sur le manuel de formation des chasseurs
[120] L’appelant reproche au ministère public d’avoir considéré les manuels de formation des chasseurs mis en preuve comme étant l’équivalent d’une norme réglementaire à laquelle on ne peut déroger. L’argument est sans valeur.
[121] Les allusions du ministère public à cet élément de preuve constituaient une référence acceptable à l’une des composantes de son syllogisme liée au comportement de la personne raisonnable. Il ressort de cette documentation qu’un chasseur prudent doit bien identifier sa cible avant de tirer. Voici un extrait provenant de l’un de ces textes :
Un chasseur prudent reconnaît son gibier avant de tirer. Il ne fait jamais feu en direction d’un son, sur une tache colorée ou tout autre objet avant de savoir qu’il s’agit bien du gibier qu’il chasse. Il renoncera à une prise très importante plutôt que de prendre le moindre risque de commettre une erreur.[55]
[122] La jurisprudence considère aussi que l’identification positive de la cible constitue une précaution élémentaire[56]. L’avocate de l’appelant accepte ce niveau de précaution lorsqu’elle déclare au jury : « Il faut bien identifier le gibier avant de tirer, bien identifier le gibier »[57]. L’appelant lui-même souscrit à un tel niveau de diligence au moment d’affirmer : « Bien, avant de tirer, je vais être sûr que c’est vraiment un orignal »[58].
[123] Lorsque replacée dans son contexte, la plaidoirie du ministère public n’avait pas pour but d’élever au rang de loi la documentation déposée en preuve. L’exercice ne visait qu’à mettre l’accent sur un niveau de diligence en matière de chasse sur lequel toutes les parties s’entendent. Bref, le jury ne pouvait pas se méprendre sur la portée véritable de cette preuve.
6. L’expert Brault
[124] L’appelant se dit d’avis qu’il existe une ambigüité sur le statut d’expert du témoin Brault. Ce moyen d’appel doit être écarté.
[125] Le dossier fait voir que les parties ont convenu de la qualité d’expert de ce témoin dès la conférence préparatoire[59] et l’ont à nouveau reconnue lors de l’audition[60]. Il a aussi été présenté par le juge au jury comme étant un spécialiste en formation et sécurité des chasseurs et piégeurs du Québec.
[126] Ce témoin est venu relater les règles de sécurité élémentaires dans la manipulation des armes à feu dans un contexte de chasse. Il s’agissait d’une preuve pertinente et admissible que l’appelant n’a pas véritablement contestée. Quitte à le redire, cette preuve correspondait à bien des égards à un niveau de diligence accepté par l’appelant lui-même[61].
[127] La qualification d’expert du témoin Brault ne fait aucun doute et le jury n’a pu se méprendre sur cette question.
7) Le verdict déraisonnable
[128]
L’alinéa
[129] L’interprétation erronée de la preuve reprochée au juge des faits doit porter sur l’essence plutôt que sur les détails et avoir une incidence importante pour que le verdict puisse être qualifié de non fondé sur la preuve. Ainsi, les erreurs relevées doivent avoir joué un rôle capital dans le raisonnement à l’origine de la déclaration de culpabilité[64].
[130] En l’espèce, il ne fait aucun doute que l’appelant avait l’obligation minimale d’utiliser son arme à feu avec prudence. En situation de chasse, une personne raisonnable ne fait feu qu’après avoir identifié positivement son gibier.
[131] L’appelant affirme avoir fait montre de diligence et fait reposer cette assertion sur les facteurs suivants[65] :
· il avait une bonne vision en plein jour, et ce, dans des conditions climatiques convenables;
· il a vérifié deux ou trois fois dans son télescope pour bien identifier la cible;
· son frère avait raté un gibier dans le même secteur le matin même;
· son frère avait auparavant déposé à cet endroit de l’urine de jument en chaleur;
· le territoire est reconnu pour la présence d’orignaux;
· il a vu des pattes grises et une masse brunâtre;
· il est sur son territoire de chasse et personne ne l’a avisé de la présence d’autres chasseurs;
· les sentiers pédestres environnants sont fermés et personne n’est censé y avoir accès; et
· il est en droit de s’attendre que les autres chasseurs respectent la réglementation dont celle de porter un dossard orange, ce qui n’était pas le cas de la victime.
[132] Tout d’abord, plusieurs éléments invoqués par l’appelant au soutien de sa diligence font plutôt voir que ce dernier a baissé sa garde en raison d’une croyance subjective basée sur l’expérience récente vécue par son frère et sur des conditions prétendument favorables permettant d’espérer une rencontre avec le gibier convoité.
[133] Ensuite, l’appelant admet qu’au moment de faire feu « sa vision n’est pas parfaite à cause de la présence d’un petit sapin peu fourni devant la cible »[66]. Il reconnaît aussi n’avoir jamais vu la tête de l’animal, ayant choisi pour cible la colonne vertébrale, alors qu’à ses dires le veau se présente à lui de « derrière ». Une telle cible exigeait un tir de qualité précédé des précautions suffisantes permettant de bien identifier le haut du corps de l’animal. Or, je rappelle que la victime a été blessée à l’abdomen, alors qu’à ses dires elle avait les genoux légèrement fléchis au moment d’être atteinte.
[134] L’appelant est aussi venu dire, lors du procès, qu’un veau orignal offre une silhouette ressemblant « exactement » à celle d’une personne[67]. Même s'il est permis de douter de la justesse de cette affirmation, à supposer qu’elle soit exacte, une telle ressemblance commandait de redoubler de vigilance.
[135] De plus, la seule couleur d’une cible ne permet pas de l’identifier convenablement. Cela dit, la preuve fait voir qu’il y avait des activités forestières dans le secteur avoisinant l’endroit où se trouvait l’appelant. Cette réalité, connue de lui, pouvait aussi laisser suspecter la présence probable de travailleurs forestiers qui, eux, n’étaient pas astreints au respect du code vestimentaire du chasseur. Il s’agit donc d’une circonstance de plus qui devait inciter à encore plus de prudence.
[136] L’appelant savait aussi en raison de son expérience passée que le territoire où il se trouvait était régulièrement fréquenté par d’autres chasseurs, alors que ceux-ci pouvaient y avoir accès à partir de différents points d’entrée.
[137] Le jury a manifestement conclu qu’une personne raisonnable n’aurait pas fait feu dans de telles conditions et que le geste de l’appelant constituait un écart marqué par rapport au comportement qu’aurait adopté une personne raisonnable en pareille circonstance.
[138] J’ajoute que le jury ne pouvait ignorer la déclaration de l’appelant selon laquelle il avait formellement identifié un orignal, alors qu’en réalité il n’avait vu qu’une masse, une silhouette de couleur brun-noir ou encore un ombrage.
[139] Selon ce qui précède, il ne fait aucun doute que le verdict de culpabilité rendu par le jury reposait sur une preuve suffisante et que ce verdict appartenait à la catégorie de ceux qu’un jury ayant reçu les directives appropriées et agissant de manière judiciaire pouvait raisonnablement rendre.
[140] En terminant, je précise qu’il n’existe aucune incompatibilité entre le verdict d’acquittement rendu par le jury pour l’accusation de négligence criminelle causant des lésions corporelles et celui dont appel. Dans le premier cas, le ministère public devait démontrer un écart marqué important ou substantiel, alors que l’infraction d’usage négligent d’une arme à feu ne nécessitait que la preuve d’un écart marqué[68].
[141] Pour toutes ces raisons, l’appelant ne me convainc pas que ses différents moyens d’appel justifient l’intervention de la Cour. En conséquence, je propose de rejeter le pourvoi.
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GUY GAGNON, J.C.A. |
[1] R. c. Gendreau, C.S. Saint-François, no 500-01-063634-105, 18 janvier 2012, j. Dumas.
[2] Selon le témoin Michel Brault, une saline est un endroit où l’on retrouve du sel destiné aux gibiers qui s’en nourrissent pour la croissance de leur bois.
[3] Imitation de l’appel de la femelle orignal.
[4] R. c. W.(D.),
[5] R. c. Anderson,
[6] Hawley, Donna Lea,
[7] R. c. Gunning,
[8] Ibid.; R. c. Horvat, [1995] J.Q. no 7 (C.A. Qué) (QL),
[9] R. c. Beatty,
[10]
Gisèle Côté-Harper, Pierre Rainville et Jean Turgeon,
[11] R. c. Beatty, supra, note 9, paragr. 43.
[12] R. c. Hundal,
[13] R. c. Beatty, supra, note 9, paragr. 48.
[14] Ibid., paragr. 37.
[15] R. c. Creighton,
[16] R. c. Hundal, supra, note 12, 884.
[17] R. c. Beatty, supra, note 9, paragr. 31.
[18] R. c. Beatty, supra, note 9, paragr. 8. Lire aussi : Salame
c. R.,
[19] R. c. Hundal, supra, note 12, 882-883; R. c. Creighton, supra,
note 15; R. c. Finlay,
[20]
R. c. McCrea, [1970] 3 C.C.C. 77 (C.A. Sask.) et R. c. Weber, [1973] 1 W.W.R. 262
(C.A.C.-B.), cités dans R. c. Morrisey,
[21] R. c. Morrisey, supra, note 20, paragr. 23 s’inspirant de R. c. Stewart, [1993] O.J. No. 954 (Div. prov.) (QL).
[22]
R. c. Boucher,
[23]
R. c. Dinardo,
[24] R. c. Tutton, [1989] 1 R.C.S. 1393.
[25] Tiré des directives écrites du juge remises aux membres du jury.
[26] Ibid.
[27] R. c. Gosset, supra, note 6.
[28] R. c. Naglik, supra, note 19.
[29] R. c. Beatty, supra, note 9, paragr. 6.
[30]
R. c. Daley,
[31] Tiré des directives écrites du juge remises aux membres du jury.
[32] Arbre décisionnel déposé lors des directives.
[33] Tiré des directives écrites du juge remises aux membres du jury.
[34] Voir Institut national de la magistrature : https://www.nji-inm.ca/index.cfm/publications/model-jury-instructions/
[35]
R. c. Rodgerson,
[36]
R. v. Lilgert,
[37] R. c. Beatty, supra, note 9, paragr. 30.
[38] Tiré des directives écrites du juge remises aux membres du jury.
[39] R. c. Morrisey, supra, note 20.
[40] R. c. Stewart, supra, note 21.
[41] Lire : Gisèle Côté-Harper, Pierre Rainville et Jean Turgeon, supra, note 10, p. 1035 et suiv.
[42] Tiré des directives écrites du juge remises aux membres du jury.
[43]
R. c. Jacquard,
[44]
Sur l’illégalité de cette preuve, lire : Art.
[45] Discussion hors jury du 11 janvier 2012.
[46] R. v. Archer, (2005), 202 C.C.C. (3d) 60, (Ont. C.A.), paragr. 78.
[47] R. v. Lee, [2002] O.J. No 4758 (QL), 170 C.C.C. (3d) 225 (Ont. C.A.).
[48] R. v. Pan,
[49] R. c. Daley, supra, note 30.
[50]
Voir sur cette question R. c. Farinacci,
[51] R. c. Khan,
[52] Le ministère public utilise l’expression « une coche de plus » pour distinguer l’infraction de négligence criminelle de celle d’usage négligent d’une arme à feu.
[53] Plaidoiries de Me Andy du 16 janvier 2012.
[54]
Gougeon c. R.,
[55] Manuel de formation des chasseurs, p. 24, Pièce P-24.
[56] R. c. Morrisey, supra, note 20.
[57] Plaidoiries de Me Manocchio du 16 janvier 2012.
[58] Témoignage de Jacques Gendreau du 13 janvier 2012.
[59] Conférence préparatoire du 19 décembre 2011.
[60] Témoignage de Michel Brault du 12 janvier 2012.
[61] Audition du 16 janvier 2012.
[62] R. c. Yebes, [1987] 2 R.C.S.168, 185.
[63] R. c. Biniaris,
[64]
R. c. Lohrer,
[65] Tiré de la plaidoirie de Me Manocchio du 16 janvier 2012.
[66] Témoignage de Jacques Gendreau du 13 janvier 2012, dont il est fait référence dans le mémoire de l’appelant, paragr. 13.
[67] Témoignage de Jacques Gendreau du 13 janvier 2012.
[68]
Pour une analogie entre ces deux notions, lire : R. c. J.F.,
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