Décision

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Décision

Milius c. Éramil

2018 QCRDL 39345

 

 

RÉGIE DU LOGEMENT

Bureau dE Montréal

 

Nos dossiers :

328386 31 20170328 T

331664 31 20170418 T

334526 31 20170502 T

Nos demandes :

2617599

 

 

Date :

27 novembre 2018

Régisseure :

Jocelyne Gravel, juge administrative

 

Lorraine Milius

 

Locatrice - Partie demanderesse

c.

Marie-Mona Éramil

 

Locataire - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]      La demanderesse requiert la rétractation de la décision du 25 octobre 2018 dans trois dossiers impliquant les mêmes parties.

[2]      Elle explique avoir mal noté la date de la continuation de l’audience pourtant fixée en sa présence. Elle admet ne pas avoir pris la peine de la noter le jour même et avoir commis l’erreur lors de la réception de l’avis d’audience.

[3]      La première audience a été tenue le 10 juillet 2018 et l’ajournement a été fixé au 2 octobre 2018. Elle plaide l’erreur commise de bonne foi et ajoute qu’elle n’avait aucun intérêt à ne pas se présenter pour faire sa preuve.

[4]      L’intimée conteste la demande et invoque qu’il n’appartient pas à sa cliente et au Tribunal de subir les conséquences de la négligence de la demanderesse. On note également le défaut de la demanderesse d’indiquer à sa procédure quels moyens de défense sa présence lui aurait permis de présenter.

[5]      La présente demande se fonde sur l'article 89 de la Loi sur la Régie du logement[1] (Loi) qui prévoit :

89. Si une décision a été rendue contre une partie qui a été empêchée de se présenter ou de fournir une preuve, par surprise, fraude ou autre cause jugée suffisante, cette partie peut en demander la rétractation.

Une partie peut également demander la rétractation d'une décision lorsque la Régie a omis de statuer sur une partie de la demande ou s'est prononcée au-delà de la demande.

La demande de rétractation doit être faite par écrit dans les dix jours de la connaissance de la décision ou, selon le cas, du moment où cesse l'empêchement.

La demande de rétractation suspend l'exécution de la décision et interrompt le délai d'appel ou de révision jusqu'à ce que les parties aient été avisées de la décision.


[6]      À maintes reprises, les tribunaux ont déterminé que la rétractation est un moyen procédural exceptionnel, car le principe de l'irrévocabilité des jugements est important. Ce principe a été réitéré par la Cour d'appel du Québec :

« Le principe de l'irrévocabilité des jugements est nécessaire à une saine administration de la justice, d'où le sérieux que doivent avoir les motifs de rétractation. La procédure doit contribuer à la protection des droits des deux parties et la remise en question des décisions doit demeurer l'exception et ne pas devenir la règle. »[2]

[7]      L'absence d'une partie ne donne pas ouverture systématiquement à la rétractation de jugement tel que le mentionnent les auteurs Rousseau-Houle et De Billy[3]:

« Le seul fait qu'une partie soit absente à l'audience ne lui donnera pas automatiquement droit à une demande en rétractation. En vertu de l'article 89, la partie doit motiver son absence par une cause jugée suffisante. »

[8]      Pour obtenir une rétractation, il faut de plus que le demandeur n'ait pas été négligent dans l'exercice de ses droits. Le Tribunal fait siens les propos de l'honorable Juge Louis Rochette de la Cour supérieure, dans l'affaire Mondex Import inc. c. Victorian Bottle inc. :

« Par ailleurs, en ce qui a trait à la partie elle-même, il n'y a pas d'ambiguïté, elle ne doit pas adopter un comportement négligent dans la défense de ses droits, sans quoi le principe de l'irrévocabilité des jugements pourra lui être opposé. Cela n'est que logique et en conséquence, une partie ne peut laisser cheminer une affaire judiciaire qui la concerne directement sans s'en préoccuper. Elle doit être empressée de faire valoir sa prétention et de préserver ses droits. Les règles de procédure ne peuvent être modulées pour tenir compte du laxisme d'une partie. »[4]

[9]      Le Tribunal conclut que la demanderesse a été négligente dans l'exercice de ses droits. Tout d’abord en ne notant pas la date de l’audience fixée en sa présence pour ensuite commettre l’erreur de mal la noter dans son agenda lors de la réception de l’avis d’audience. Le Tribunal a tenu compte de la courte période écoulée entre les deux audiences.

[10]   De plus, la preuve envisagée concernait notamment des périodes non couvertes par la diminution accordée. Finalement, la décision est essentiellement basée sur une preuve objective émanant des autorités municipales.

[11]   En l’instance, il est jugé que les principes de l’irrévocabilité des jugements et de la proportionnalité doivent avoir préséance sur celui d’être pleinement entendu.

[12]   À la lumière de ces principes, le Tribunal est d'avis que le demandeur n'a pas établi, par preuve prépondérante, un motif sérieux de rétractation.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[13]   REJETTE la demande en rétractation;

[14]   MAINTIENT la décision rendue le 25 octobre 2018.

 

 

 

 

 

 

 

 

Jocelyne Gravel

 

Présence(s) :

la locatrice

la locataire

Me Danny Ablacatoff, avocat de la locataire

Date de l’audience :  

21 novembre 2018

 

 

 


 



[1] RLRQ, c. R-8.1.

[2] Entreprises Roger Pilon inc. et al. c. Atlantis Real Estate Co., [1980] C.A. 218.

[3] Le bail de logement: analyse de la jurisprudence, Wilson & Lafleur Ltée (1989) Montréal, p. 307.

[4] Cour supérieure 200-17-001038-983, REJB 1999-12482.

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