Garrigo Meza c. Laframboise |
2018 QCRDL 22036 |
RÉGIE DU LOGEMENT |
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Bureau dE Montréal |
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Nos dossiers : |
394636 31 20180426 G 402005 31 20180601 G 402005 31 20180601 N |
Nos demandes : |
2486915 2516117 2516138 |
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Date : |
28 juin 2018 |
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Régisseure : |
Amélie Dion, juge administrative |
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Samuel Garrigo Meza |
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Locataire - Partie demanderesse (394636 31 20180426 G) Partie défenderesse (402005 31 20180601 G) (402005 31 20180601 N) |
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c. |
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Ghislaine Laframboise
Jean-Paul Fortier |
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Locateurs - Partie défenderesse (394636 31 20180426 G) Partie demanderesse (402005 31 20180601 G) (402005 31 20180601 N) |
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et |
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Antoine Sylvestre
Elisabeth Gendron |
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Candidats-cessionnaires
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D É C I S I O N
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[1] Par un recours introduit le 26 avril 2018, le locataire demande de statuer sur la validité d’une cession de bail débutant le 1er juin 2018. Le locataire considère injustifié le refus des locateurs de consentir à la cession de bail.
[2] De leur côté, les locateurs ont introduit un recours le 1er juin 2018 demandant de confirmer la résiliation de bail du locataire à compter du 1er juin 2018 et l’expulsion des occupants du logement.
[3] Les candidats-cessionnaires Élisabeth Gendron et Antoine Sylvestre sont des parties intéressées au litige.
[4] Le Tribunal a réuni les recours 394636 et 402005 pour disposer du litige comme lui permet l’article 57 de la Loi sur la Régie du logement[1].
Questions en litige
[5] Le refus des locateurs de consentir à la cession du bail est-il justifié?
[6] Le bail était-il résilié tacitement par le locataire?
[7] Dans l’affirmative, le Tribunal est-il justifié de rendre une ordonnance d’expulsion pour des occupants sans droit?
Le contexte
[8] Les parties étaient liées par un bail du 1er novembre 2015 au 30 juin 2016 au loyer de 625 $ par mois puis reconduit jusqu’au 30 juin 2019 au loyer mensuel de 640 $ par mois.
[9] Le 5 avril 2018, le locataire informe les locateurs de son désir de quitter le logement malgré un bail renouvelé jusqu’en juin 2019. Il mentionne aux locateurs vouloir céder son bail pour se décharger de ses obligations.
[10] Les locateurs offrent alors à ce dernier de le libérer de ses obligations à compter du 1er juin 2018 sans que cette offre soit formellement acceptée, plaide le locataire. Il concède cependant ne pas avoir manifesté un non clair et déterminé à l’offre des locateurs.
[11] Les 8 et 10 avril 2018, le locataire en accord avec les locateurs, fait visiter le logement à des candidats potentiels, dont madame Monsallier-Gingras recommandée par le locateur.
[12] Le 16 avril 2018, le locateur rencontre le locataire à son domicile, l’informant qu’ils ont signé un bail avec madame Monsallier-Gingras.
[13] Le même jour, celle-ci communique avec le locataire et l’informe avoir signé un bail avec les locateurs et lui précise avoir accepté un loyer supérieur à celui payé par le locataire.
[14] Le locataire informe alors Mme Monsallier-Gingras de ses droits notamment de l’illégalité d’une telle augmentation, mais celle-ci lui souligne qu’elle est contente de sa décision de le louer même à un nouveau loyer.
[15] Le locataire est mécontent de la situation et transmet le 16 avril 2018, un avis de cession de bail aux locateurs en faveur d’un autre candidat. Ces derniers refusent la cession prétextant le bail résilié et avoir signé un bail. Le candidat se désiste et n’est plus intéressé au logement.
[16] Le lendemain, le locataire remet une annonce sur Internet pour céder son bail qu’il considère non résilié, et ce, malgré la discussion avec le locateur et par texto avec madame Monsallier-Gingras.
[17] Pour lui, résilier un bail est un accord de volonté et il n’a jamais donné formellement son accord.
[18] Les parties intéressées au litige visitent le logement le 18 avril 2018. Un avis de cession de bail est signé en leurs faveurs et transmis aux locateurs le 21 avril 2018. Cet avis de cession est refusé par les locateurs, ce que contestent le locataire et les candidats cessionnaires.
Analyse
[19] Le droit à la cession
est prévu à l’article
« 1870. Le locataire peut sous-louer tout ou partie du bien loué ou céder le bail. Il est alors tenu d'aviser le locateur de son intention, de lui indiquer le nom et l'adresse de la personne à qui il entend sous-louer le bien ou céder le bail et d'obtenir le consentement du locateur à la sous-location ou à la cession.»
La finalité poursuivie par le législateur en est une de flexibilité pour le locataire et de protection des droits des parties.
« La sous-location ou la cession présentent une solution avantageuse pour le locateur et le locataire. Le locateur est assuré de la continuité de l’occupation de ses locaux et le locataire qui sous-loue ou cède son bail évite des frais inutiles »[2]
[20] Le droit des locateurs
de la refuser est encadré par l’article
« 1871. Le locateur ne peut refuser de consentir à la sous-location du bien ou à la cession du bail sans un motif sérieux.
Lorsqu'il refuse, le locateur est tenu d'indiquer au locataire, dans les quinze jours de la réception de l'avis, les motifs de son refus; s'il omet de le faire, il est réputé avoir consenti.»
[21] Le Tribunal rappelle l’obligation des parties d’être de bonne foi et de ne pas exercer leurs droits de façon excessive et déraisonnable ou dans l’intention de nuire à l’autre[3]. Cette exigence d’être de bonne foi fait aussi partie des obligations découlant du contrat de bail.
[22] Ainsi, la soussignée est d’avis que l’objectif de tout locataire raisonnable est de se défaire de ses obligations sans frais à compter de son départ et pour tout locateur d’assurer une continuité des obligations découlant du bail.
[23] En l’espèce, il n’était pas déraisonnable pour le locateur de croire après les discussions du 5 avril 2018, à une acceptation tacite du locataire d’une résiliation du bail à compter du 1er juin 2018. Ainsi, l’offre des locateurs de permettre le départ de ce dernier de son logement avant terme sans autres obligations pouvait laisser croire à un consentement, notamment en l’absence de refus ferme du locataire à une telle offre.
[24] Mais il y plus.
[25] Il est convenu par les parties de permettre la visite de ce logement par certains candidats potentiels. Or, à la suite d’une visite tenue le 10 avril 2018, madame Monsallier-Gingras est intéressée au logement, il est raisonnable de croire en l’absence d’avis de cession que le locataire avait tacitement consenti de résilier son bail et de renoncer à le céder.
[26] Ainsi, le 15 avril 2018, n’ayant pas eu de retour du locataire, les locateurs se croyaient justifiés, avec raison, de signer un nouveau bail avec madame Monsallier-Gingras.
[27] Le Tribunal conclut qu'une entente de résiliation tacite du bail à l'égard du locataire est intervenue. Le Tribunal veut bien comprendre la volonté du locataire de ne pas résilier le bail avant la fin du terme, mais les discussions entre le locataire et le locateur d'un départ prévu pour le début de juin 2018, probablement mal expliqué ou mal interprété par les locateurs, ont fait en sorte que les locateurs croyaient avec raison que le bail était résilié à partir du 1er juin 2018 et qu’il leur était possible de s’entendre avec la nouvelle locataire.
[28] Par conséquent, le Tribunal juge que les locateurs étaient justifiés de refuser l’avis de cession en faveur des parties intéressées, car un nouveau bail était déjà signé à la suite de la résiliation du bail.
[29] Compte tenu de la preuve et de l’urgence de la situation, il y a lieu d’ordonner l’exécution provisoire de la présente décision, en vertu de l’article 82.1 de la Loi sur la Régie du logement[4].
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
Dossier 394636
[30] REJETTE la demande du locataire.
Dossier 402005
[31] ORDONNE l’éviction de tous les occupants du logement concerné;
[32] ORDONNE l'exécution provisoire, malgré l'appel, de l'ordonnance d'expulsion à compter du 11e jour de sa date;
[33] CONDAMNE le locataire à payer aux locateurs les frais judiciaires de 75 $.
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Amélie Dion |
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Présence(s) : |
le locataire les locateurs Me Laureuce Guindon , avocate des locateurs les candidats-cessionnaires |
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Date de l’audience : |
8 juin 2018 |
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AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
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du plumitif s'avère une précaution utile.