Décision

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Beaudoin c. Desrosiers

2023 QCTAL 34506

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Joliette

 

No dossier :

718624 29 20230628 G

No demande :

3952894

 

 

Date :

08 novembre 2023

Devant la juge administrative :

Annie Hallée

 

karine Beaudoin

 

Locatrice - Partie demanderesse

c.

Valérie Desrosiers

 

Locataire - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]         Le Tribunal est saisi d’une demande de la locatrice déposée, le 28 juin 2023, ainsi que d’un amendement, déposé le 3 août 2023, afin d’avoir accès au logement et que soit ordonné à la locataire de respecter ses obligations découlant du bail, en exécution provisoire de la décision malgré l’appel et pour les frais.

[2]         Les parties sont liées par un bail reconduit du 1er juillet 2023 au 30 juin 2024, au loyer mensuel de   900 $.

[3]         Lors de l’audience, la locataire est absente.

FAITS :

[4]         La locatrice demande que la locataire respecte ses obligations découlant du bail.

[5]         Tout d’abord, elle demande l’accès au logement de la locataire afin d’y faire une inspection pour en vérifier l’état puisque la locataire lui refuse cet accès sans raison valable. Une mise en demeure à cet effet a été envoyée à la locataire le 2 mai 2023.

[6]         Ensuite, elle allègue que la locataire exploite un élevage de chatons dans le logement alors que le bail permet de posséder un maximum de deux (2) chats. Elle demande, de plus, qu’il soit ordonné à la locataire de respecter la nature du bail loué à des fins résidentielles et non commerciales.

[7]         Elle demande également que la locataire lui remette une série de douze (12) chèques postdatés, tel que stipulé dans le bail.

[8]         Finalement, elle invoque que le logement n’est pas dans un bon état de propreté et demande une ordonnance à l’encontre de la locataire de respecter ses obligations quant à la sécurité et à la salubrité du logement. En effet, le logement est encombré et des détritus, de la nourriture et des excréments d’animaux sont répandus sur le sol.


ANALYSE ET DROIT APPLICABLE :

Fardeau de la preuve

[9]         Le Tribunal rappelle qu'il appartient à celui qui veut faire valoir un droit de prouver les faits qui soutiennent sa prétention, et ce, de façon prépondérante. La preuve qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence est suffisante. La force probante du témoignage est laissée à l'appréciation du Tribunal.[1]

[10]     Ainsi, il doit démontrer que le fait litigieux est non seulement possible, mais probable. Par ailleurs, la preuve offerte ne doit pas nécessairement conduire à une certitude absolue. Il suffit que le fait litigieux soit, par la preuve, probable.[2]

[11]     Si une partie ne s'acquitte pas de son fardeau, de convaincre le Tribunal, elle verra sa demande rejetée.

L’accès au logement

[12]     Relativement au droit d’accès afin de vérifier l’état du logement, les dispositions pertinentes du Code civil du Québec sont les suivantes :

 « 1931. Le locateur est tenu, à moins d'une urgence, de donner au locataire un préavis de 24 heures de son intention de vérifier l'état du logement, d'y effectuer des travaux ou de le faire visiter par un acquéreur éventuel. »

« 1932. Le locataire peut, à moins d'une urgence, refuser que le logement soit visité par un locataire ou un acquéreur éventuel, si la visite doit avoir lieu avant 9 heures et après 21 heures; il en est de même dans le cas où le locateur désire en vérifier l'état.

Il peut, dans tous les cas, refuser la visite si le locateur ne peut être présent. »

[13]     Également, parce que le locataire peut exiger la présence de la locatrice à chaque visite, le Tribunal rappelle que la présence de la locatrice comprend également la présence de son mandataire, le cas échéant.

[14]     En l’espèce, il n’y aucune preuve de raison valable pouvant justifier ces refus. Ainsi, il est opportun de faire droit à la demande de la locatrice de lui permettre l’accès au logement afin de vérifier l’état des lieux. Le Tribunal rappelle cependant à cette dernière ainsi qu’à ses mandataires qu’elle doit respecter les règles prévues au Code civil du Québec.

La clause limitant le nombre d’animaux

[15]     La preuve a clairement démontré que la locataire détient plusieurs chats, contrevenant ainsi au bail qui ne lui permet de n’en détenir que deux (2). Le Tribunal fait donc droit à la demande de la locatrice afin qu’une ordonnance soit émise à l’encontre de la locataire de respecter la clause du bail limitant à deux (2) le nombre d’animaux permis dans le logement.

L’exploitation d’un élevage de chatons

[16]     Quant au fait que la locataire exploite un élevage de chatons dans son logement, les articles 1855 et 1856 du Code civil du Québec (C.c.Q.) stipulent ce qui suit :

« 1855. Le locataire est tenu, pendant la durée du bail, de payer le loyer convenu et d’user du bien avec prudence et diligence. »

« 1856. Ni le locateur ni le locataire ne peuvent, au cours du bail, changer la forme ou la destination du bien loué. »

[17]     Ainsi, il ressort de la preuve que la locataire possède plusieurs chats dans le logement dans le but d’y exploiter un élevage de chatons, ce qui est contraire à l’article 1856 C.c.Q. puisque le logement lui a été loué à des fins résidentielles et non commerciales.

[18]     Dans les circonstances, il est justifié d’ordonner à la locataire de respecter la nature du bail de son logement loué à des fins résidentielles.

Logement impropre à l’habitation

[19]     En matière de logement impropre à l’habitation, les articles de loi pertinents en semblable matière sont les articles 1855, 1863, 1911 et 1912 du Code civil du Québec (C.c.Q.).

[20]     Ainsi, l'article 1855 du C.c.Q. prévoit qu’un locataire est tenu, pendant la durée du bail, d'user du bien avec prudence et diligence. Le locataire doit donc maintenir en bon état de propreté son logement, voir à sa conservation et éviter toute usure anormale.

[21]     Le locataire doit également maintenir le logement en bon état de propreté selon l’article 1911, al.1 C.c.Q. Également, selon l'article 1912 C.c.Q., tout manquement d'un locataire relatif à la sécurité ou à la salubrité d'un logement donne lieu aux mêmes recours qu'un manquement à une obligation prévue au bail.

[22]     La preuve démontre que la locataire ne respecte pas son obligation de maintenir le logement en bon état de propreté.

[23]     Par conséquent, l’émission d’une ordonnance demandant à la locataire de maintenir le logement en bon état de propreté et d’en assurer la sécurité et la salubrité est justifiée.

Remise de chèques postdatés

[24]     La preuve démontre que la locataire ne respecte pas son obligation de lui remettre une série de douze (12) chèques postdatés, et ce, tel qu’indiqué dans le bail. Absente lors de l’audience, la locataire n’a pu offrir un témoignage qui aurait contredit y avoir consenti de façon libre et volontaire.

[25]     Par conséquent, l’émission d’une ordonnance à cet effet est également justifiée.

Jouissance paisible des voisins

[26]     La locatrice n’ayant présenté aucune preuve à l’appui de sa demande à l’encontre de la locataire de ne pas troubler la jouissance paisible des voisins, le Tribunal ne peut y faire droit.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[27]     ACCUEILLE en partie la demande de la locatrice;

[28]     ORDONNE à la locataire de permettre l'accès au logement à la locatrice ou à ses mandataires afin d’en vérifier l’état, et ce, dans le respect des règles et avis prévus à la loi;

[29]     ORDONNE l'exécution provisoire immédiate concernant l’accès malgré appel;

[30]     ORDONNE à la locataire de respecter la nature du bail du logement loué à des fins résidentielles;

[31]     ORDONNE à la locataire de maintenir le logement en bon état de propreté et d’en assurer la sécurité et la salubrité;

[32]     ORDONNE à la locataire de remettre à la locatrice une série de (12) chèques postdatés, et ce, tel que stipulé dans le bail;

[33]     CONDAMNE le locataire à payer aux locateurs les frais judiciaires de 93,75 $;

[34]     REJETTE la demande quant aux autres conclusions.

 

 

 

 

 

 

 

 

Annie Hallée

 

Présence(s) :

la locatrice

Date de l’audience : 

6 septembre 2023

 

 

 


 


[1] Articles 2803, 2804 et 2845 du Code civil du Québec, CCQ-1991.

[2] Les jardins du roi société en commandite c. Jean-François Plante, RDL, 419462 18 20180921 No demande : 2590921, 4 février 2019.

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