X c. Paquet | 2023 QCCS 1351 | |||||
COUR SUPÉRIEURE (Chambre civile) | ||||||
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CANADA | ||||||
PROVINCE DE QUÉBEC | ||||||
DISTRICT DE | BEAUCE | |||||
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N° : | 350-17-000061-203 | |||||
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DATE : | 31 mars 2023 | |||||
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE : | L’HONORABLE | BENOIT MOULIN, J.C.S. | ||||
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X Y Z | ||||||
Demanderesses | ||||||
c. | ||||||
ANDRÉ PAQUET TANDEM RESTO TRAITEUR INC. | ||||||
Défendeurs | ||||||
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JUGEMENT (sur réclamation en dommages-intérêts et dommages punitifs) | ||||||
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[1] Chacune des demanderesses réclame aux défendeurs solidairement 100 000 $ pour préjudices moraux et physiques et inconvénients avec intérêt et l’indemnité additionnelle prévue à l’article
[2] Les demanderesses allèguent que le défendeur, administrateur de leur employeur, la défenderesse, s’est livré sur chacune d’elles, à plusieurs reprises à l’été 2019, à des attouchements de nature sexuelle, leur causant ainsi des dommages.
[3] Le défendeur nie avoir commis quelque geste répréhensible que ce soit à leur endroit et tout comme la défenderesse, conteste le bien-fondé de leurs réclamations.
* * *
[4] Le litige s’inscrit dans le contexte suivant.
[5] Le défendeur, André Paquet, est le seul actionnaire et administrateur de Tandem Resto Traiteur inc. (Tandem), une entreprise immatriculée au Québec en 2015, offrant des services de traiteur et de mets à emporter.
[6] Tandem a offert ses services de traiteur à une organisation opérant un camp de vacances situé à Haliburton en Ontario (le camp), et ce, notamment, en 2017, 2018 et 2019. Plusieurs centaines d’enfants fréquentent ce camp pendant l’été. Tandem s’est chargée de préparer et servir les repas à ces enfants et au personnel chargé des opérations, et ce, à partir des locaux appartenant à l’organisation.
[7] Pour ce faire, Tandem a eu besoin des services de quelque trente personnes, en majeure partie de jeunes étudiants et étudiantes engagés pour une partie de l’été. Tandem leur offrait le gîte, le couvert et un salaire.
[8] Ainsi, madame X a travaillé pour Tandem sous la gouverne de monsieur Paquet à Haliburton en 2017, 2018 et 2019. Madame Y et madame Z ont, pour leur part, été recrutées pour y travailler à l’été 2019.
[9] Selon les trois demanderesses, monsieur Paquet s’est livré, en 2019, sur elles et sur d’autres, à des attouchements alors qu’elles se trouvaient sur leur lieu de travail, et ce, principalement pendant les heures de travail. Elles ont quitté leur emploi le 1er juillet 2019.
[10] Les demanderesses et deux autres employées de Tandem ont dénoncé ces attouchements auprès des autorités policières ontariennes. Elles leur ont fourni des déclarations.
[11] Monsieur Paquet a été arrêté. Il a été accusé d’agression sexuelle (art.
[12] Il a aussi été accusé de bris de probation. L’accusation résulte du fait qu’il a, le 11 janvier 2019, reconnu sa culpabilité à une accusation de tentative de voyeurisme sur une enfant mineure (14 ans) survenue entre le 1er janvier 2018 et le 22 février 2018 et a bénéficié d’une absolution conditionnelle au respect d’une ordonnance de probation comportant, entre autres conditions, celle de ne pas troubler l’ordre public et d’avoir une bonne conduite.
[13] Monsieur Paquet n’a pas été reconnu coupable de ces accusations. Il a, le 13 octobre 2021, reconnu sa culpabilité à une infraction moindre et incluse de voies de fait simple (art.
[14] Il a, à nouveau, bénéficié d’une absolution conditionnelle au respect d’une ordonnance de probation d’une durée de deux ans comportant, entre autres conditions, celle de ne pas communiquer directement ou indirectement avec l’une ou l’autre des demanderesses et de ne pas se trouver à moins de 200 mètres de l’endroit où l’une ou l’autre, à sa connaissance, pouvait se trouver.
[15] Selon la transcription des débats tenus le 13 octobre 2021 devant le tribunal ontarien compétent, si monsieur Paquet n’a pas reconnu sa culpabilité au chef d’accusation impliquant les demanderesses, il n’en a pas non plus été acquitté formellement : ces chefs d’accusation ont, à la demande du ministère public, été retirés.
* * *
[16] Les gestes reprochés à monsieur Paquet se sont déroulés dans le milieu de travail des demanderesses et, au surplus, en Ontario. Se pose alors la question de la compétence de la Cour supérieure du Québec à se saisir du litige.
[17] Cette question de compétence d’attribution est d’ordre public. Elle peut être soulevée d’office. Elle l’a été au début de l’instruction; les parties ont eu l’occasion de faire part de leur position à ce sujet. Cette question doit maintenant être tranchée. Les faits et le droit permettent de reconnaître à la Cour supérieure du Québec la compétence. Voici pourquoi.
[18] Le litige consiste en une réclamation pour des gestes posés par un représentant de l’employeur à l’égard d’employées, notamment et principalement pendant les heures de travail et sur les lieux de travail.
[19] Partant, le litige met en cause les règles du droit du travail, plus précisément celles applicables à un accident du travail ayant causé une lésion professionnelle.
[20] Toutes les parties au litige sont domiciliées au Québec. Par contre, les faits se sont déroulés en Ontario. Il y a alors lieu d’appliquer les règles du droit international privé prévues au livre dixième du Code civil du Québec, notamment celles que prévoit l’article
3118. Le choix par les parties de la loi applicable au contrat de travail ne peut avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi de l’État où il accomplit habituellement son travail, même s’il est affecté à titre temporaire dans un autre État ou, s’il n’accomplit pas habituellement son travail dans un même État, de la loi de l’État où son employeur a son domicile ou son établissement.
En l’absence de désignation par les parties, la loi de l’État où le travailleur accomplit habituellement son travail ou la loi de l’État où son employeur a son domicile ou son établissement sont, dans les mêmes circonstances, applicables au contrat de travail.
[21] Cette disposition devrait nous amener au droit ontarien. Or, il n’est ni allégué ni prouvé. En vertu de l’article
2809. Le tribunal peut prendre connaissance d’office du droit des autres provinces ou territoires du Canada et du droit d’un État étranger, pourvu qu’il ait été allégué. Il peut aussi demander que la preuve en soit faite, laquelle peut l’être, entre autres, par le témoignage d’un expert ou par la production d’un certificat établi par un jurisconsulte.
Lorsque ce droit n’a pas été allégué ou que sa teneur n’a pas été établie, il applique le droit en vigueur au Québec.
[22] Au sujet du droit applicable au Québec, les articles
4. La présente loi est d’ordre public.
Cependant, une convention ou une entente ou un décret qui y donne effet peut prévoir pour un travailleur des dispositions plus avantageuses que celles que prévoit la présente loi.
(…)
8. La présente loi s’applique au travailleur victime d’un accident du travail survenu hors du Québec ou d’une maladie professionnelle contractée hors du Québec si, lorsque l’accident survient ou la maladie est contractée, il est domicilié au Québec et son employeur a un établissement au Québec.
Cependant, si le travailleur n’est pas domicilié au Québec, la présente loi s’applique si ce travailleur était domicilié au Québec au moment de son affectation hors du Québec, la durée du travail hors du Québec n’excède pas cinq ans au moment où l’accident est survenu ou la maladie a été contractée et son employeur a alors un établissement au Québec.
(…)
438. Le travailleur victime d’une lésion professionnelle ne peut intenter une action en responsabilité civile contre son employeur en raison de sa lésion.
[23] L’une des demanderesses, madame Z, a présenté une demande d’indemnisation en vertu de cette loi. La CNESST[2], chargée de son application, a jugé la réclamation non recevable parce que l’employeur n’avait pas d’établissement au Québec au moment des faits.
[24] La LATMP, pour la définition d’établissement, renvoie à la Loi sur la santé et sécurité au travail[3], laquelle prévoit :
1. Dans la présente loi et les règlements, à moins que le contexte n’indique un sens différent, on entend par:
«établissement» : l’ensemble des installations et de l’équipement groupés sur un même site et organisés sous l’autorité d’une même personne ou de personnes liées, en vue de la production ou de la distribution de biens ou de services, à l’exception d’un chantier de construction; ce mot comprend notamment une école, une entreprise de construction ainsi que les locaux mis par l’employeur à la disposition du travailleur à des fins d’hébergement, d’alimentation ou de loisirs, à l’exception cependant des locaux privés à usage d’habitation;
[25] Madame Z s’est prévalue de son droit à la révision de cette décision. La CNESST a, par décision rendue le 5 février 2021, confirmé la décision initiale.
[26] Puisque la LATMP ne s’applique pas à la réclamation de madame Z, il y a lieu de considérer son recours comme en étant un en responsabilité civile. Or, l’article
3126. L’obligation de réparer le préjudice causé à autrui est régie par la loi de l’État où le fait générateur du préjudice est survenu. Toutefois, si le préjudice est apparu dans un autre État, la loi de cet État s’applique si l’auteur devait prévoir que le préjudice s’y manifesterait.
Dans tous les cas, si l’auteur et la victime ont leur domicile ou leur résidence dans le même État, c’est la loi de cet État qui s’applique.
[27] Le litige entre, d’une part, madame Z et, d’autre part, monsieur Paquet et Tandem, doit donc être tranché en fonction des articles
1457. Toute personne a le devoir de respecter les règles de conduite qui, suivant les circonstances, les usages ou la loi, s’imposent à elle, de manière à ne pas causer de préjudice à autrui.
Elle est, lorsqu’elle est douée de raison et qu’elle manque à ce devoir, responsable du préjudice qu’elle cause par cette faute à autrui et tenue de réparer ce préjudice, qu’il soit corporel, moral ou matériel.
Elle est aussi tenue, en certains cas, de réparer le préjudice causé à autrui par le fait ou la faute d’une autre personne ou par le fait des biens qu’elle a sous sa garde.
(…)
1463. Le commettant est tenu de réparer le préjudice causé par la faute de ses préposés dans l’exécution de leurs fonctions; il conserve, néanmoins, ses recours contre eux.
(…)
321. L’administrateur est considéré comme mandataire de la personne morale. Il doit, dans l’exercice de ses fonctions, respecter les obligations que la loi, l’acte constitutif et les règlements lui imposent et agir dans les limites des pouvoirs qui lui sont conférés.
(…)
2164. Le mandant répond du préjudice causé par la faute du mandataire dans l’exécution de son mandat, à moins qu’il ne prouve, lorsque le mandataire n’était pas son préposé, qu’il n’aurait pas pu empêcher le dommage.
[28] Madame X et madame Y n’ont pas formulé de demande d’indemnisation en vertu de la LATMP.
[29] En l’absence d’une décision de la CNESST quant à la recevabilité d’une réclamation de leur part, il appartient à la Cour supérieure de se prononcer[4].
[30] Madame X et madame Y allèguent des faits similaires à ceux de madame Z, commis dans des circonstances semblables. La réponse quant à la compétence de la Cour supérieure pour se saisir de leurs demandes est la même.
[31] Tandem n’avait pas, au moment des faits, d’établissement au Québec au sens de la LATMP. La preuve le confirme. Cette loi ne s’applique donc pas aux réclamations de madame X et de madame Y. Partant, vu le deuxième alinéa de l’article
* * *
[32] Pour réussir dans leur réclamation, les demanderesses doivent démontrer par prépondérance des probabilités une faute de la part du défendeur, un préjudice et un lien de causalité entre l’une et l’autre.
[33] La démonstration de la part de l’une ou l’autre des demanderesses d’une faute de la part du défendeur et d’un préjudice en découlant liera la défenderesse à titre de commettant ou de mandant. En l’absence d’une telle démonstration, la défenderesse sera exonérée. Cette question du lien entre la responsabilité du défendeur et celle de la défenderesse n’a pas fait l’objet d’un débat.
[34] Les demanderesses soutiennent avoir été victimes à répétition d’attouchements aux fesses et, à une occasion, à la poitrine, de la part du défendeur survenus sur les lieux de leur travail et pendant son exercice.
[35] Le défendeur soumet l’invraisemblance de leurs prétentions en regard de son horaire de travail, de la présence d’autres membres du personnel au moment où les gestes auraient été posés et de la configuration des lieux où ils se seraient produits.
[36] Il allègue aussi que les prétentions des demanderesses se veulent une réaction à une intervention de nature disciplinaire de sa part à l’égard d’une autre employée, amie de ces dernières et donc que leurs reproches consistent en des « allégations fallacieuses inventées ». L’autre employée en question est celle à l’égard de qui il a reconnu sa culpabilité à une accusation de voies de fait simple. En plaidoirie, le défendeur plaide de façon subsidiaire que si des gestes ont été posés, ils seraient involontaires et accidentels.
[37] En présence de versions contradictoires, le sort du litige repose essentiellement sur la crédibilité des témoins et la fiabilité de leurs versions. La crédibilité réfère à la sincérité ou à l’honnêteté du témoin alors que la fiabilité renvoie à la capacité d’un témoin d’observer, de se souvenir et de raconter les événements avec précision. Au final, le sort du litige repose sur la vraisemblance de la preuve dans le contexte de l’affaire[5].
[38] Par ailleurs, en procédant à l’évaluation de la preuve, il importe de ne pas tomber dans des mythes ou stéréotypes comme :
[39] Au surplus, la Cour d’appel souligne dans Construction GMR inc. c. Syndicat des copropriétaires du 521 de Cannes à Gatineau[7] :
[16] […]. Un témoignage peut contenir certaines inexactitudes sans par ailleurs perdre toute valeur.
[40] Elle précise aussi dans Droit de la famille – 2390[8] :
[4] Par ailleurs, il est bien établi que le juge de première instance n’a pas à « démontrer explicitement [qu’il] […] a tenu compte de tous les éléments de la preuve », qu’il n’est pas obligé « d’analyser chaque argument ou problème allégué pour arriver à une conclusion en particulier », qu’il « n’a pas à mentionner ni à relater les faits de manière exhaustive, selon un mode microscopique » et qu’il « peut rapporter seulement ce qui lui paraît le plus important, sans fausser la preuve ».
[Renvois omis]
[41] Dans Daigle c. R.[9], elle rappelle que la preuve s’apprécie au regard de la logique, du bon sens et de l’expérience humaine.
[42] Plusieurs de ces enseignements ressortent d’arrêts rendus en matière pénale. Ils s’appliquent aussi à l’évaluation de la preuve dans une matière civile en se rappelant toutefois que le fardeau de preuve en matière civile n’est pas celui du « hors de tout doute raisonnable » comme en matière criminelle, mais bien celui de la prépondérance des probabilités, comme le prescrit l’article
2804. La preuve qui rend l’existence d’un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n’exige une preuve plus convaincante.
[43] Au sujet de ce fardeau de preuve, la Cour d’appel, dans Nobert c. Lavoie[10] explique :
En matières civiles, le demandeur n'a pas à faire une preuve au-delà du doute raisonnable. Il lui suffit d'établir sa réclamation par simple prépondérance. C'est ce qu'exprime de façon claire l'article
C'est par la prépondérance de la preuve que les causes doivent être déterminées et c'est à la lumière de ce que révèlent les faits les plus probables que les responsabilités doivent être établies. (p. 380)
* * *
[44] La preuve est constituée des témoignages à l’audience, de la transcription des interrogatoires préalables auxquels les défendeurs ont soumis chacune des demanderesses et la mère de madame Y et de pièces dont des messages textes transmis ou reçus par l’une ou l’autre des demanderesses et de la déclaration fournie par chacune des demanderesses à des policiers ontariens. Les défendeurs produisent la transcription des interrogatoires préalables et les déclarations aux policiers ontariens.
[45] Cette preuve convainc du bien-fondé des réclamations. Voici pourquoi.
* * *
[46] Tandem offre ses services de traiteur au camp à compter du mois de mai. Jusqu’à la fin de juin, elle s’occupe de recevoir des groupes qui célèbrent un événement (mariage, naissance, etc.). À compter de la fin de juin jusqu’à la mi-août, le camp reçoit jusqu’à 800 personnes (enfants, adolescents, animateurs, etc.).
[47] Dans la première partie de ses activités, Tandem a évidemment besoin de moins d’employés que dans la seconde. À compter du 26 juin 2019, elle a eu quelque 30 employés à son service. Chacun bénéficie d’une journée de congé par semaine. Tenant compte de ces congés, de dix à douze employés sont affectés à la préparation des repas dans une cuisine, les autres, aussi de dix à douze, au service dans la salle à manger. Les deux pièces sont séparées par un mur. On passe de l’une à l’autre par des portes. Les gens qui se trouvent dans une pièce ne voient pas ce qui se passe dans l’autre, sauf de façon limitée, lors de l’ouverture d’une porte.
[48] Les employés dans la cuisine s’affairent à divers postes de travail à la préparation de salade de fruits ou de légumes, de pâtisseries, de pizzas, à la cuisson de viandes, au lavage de vaisselle, etc. Ils se trouvent sur place selon trois quarts de travail : pour le déjeuner, le dîner et le souper. Le père et la mère de monsieur Paquet ont fait partie de ce groupe en 2019. Comme les autres employés, ils travaillaient six jours sur sept et étaient en congé une journée sur sept.
[49] Les serveurs, lors des repas, distribuent la nourriture à partir de tables sur lesquelles sont déposés des bacs de nourriture. Ils travaillent debout, généralement le dos vers le mur qui sépare la cuisine de la cafétéria, derrière une table devant laquelle circulent les convives pour recevoir leur nourriture.
[50] Lors des repas, deux coursiers transportent des bacs de nourriture de la cuisine aux tables des serveurs pour que ces derniers la distribuent.
[51] Les repas se déroulent dans une certaine hâte et effervescence. Pour chacun, les cuisiniers débutent leur travail avant les serveurs et les coursiers. Tout est orchestré pour que les quelque 800 personnes soient servies dans une période limitée à environ une heure trente.
* * *
[52] Madame X a été à l’emploi de Tandem au camp en 2017, 2018 et 2019. Au début de son emploi, en 2017, elle était âgée de 18 ans. Elle fréquentait alors le cousin de monsieur Paquet qui, lui aussi, travaillait au camp. Elle a apprécié son expérience de travail. Malgré sa rupture avec ce cousin, elle est retournée, en 2018 et aussi en 2019. Elle était tombée en amour avec la vie de camp, dit-elle[11].
[53] Madame X, en 2019, a commencé à travailler au camp le 26 mai. Elle était alors âgée de 21 ans. Madame Y et madame Z et d’autres l’ont rejointe le 25 juin. Ces dernières ont commencé à travailler le 26 juin. Madame Y était alors âgée de 15 ans, madame Z de 16 ans.
[54] Madame X a travaillé dans la cuisine, affectée principalement aux pâtisseries, à l’occasion aux salades de fruits ou à la préparation de pains tressés. Madame Y a travaillé comme serveuse. Madame Z a travaillé principalement aux cuisines à couper des fruits ou des légumes. Elle a aussi servi des campeurs souffrant d’allergies. Ce service se déroule à partir d’une table dans la salle à manger distante des autres.
[55] Monsieur Paquet, en 2019, était surtout affecté à l’administration de Tandem : il voyait principalement à vérifier l’inventaire, placer les commandes chez les fournisseurs, recevoir les produits, les entreposer. Il recevait deux cargaisons par semaine. Leur déchargement nécessitait plusieurs heures de travail. Monsieur Paquet se déplaçait aussi chez des fournisseurs (épiciers ou autres) pour compléter les commandes lorsqu’elles étaient insuffisantes. Il travaillait à partir d’une table de travail installée dans une extrémité de la cuisine.
[56] Ses occupations, selon lui, requéraient quelque 95 % de son temps. Il reconnaît qu’il lui arrivait d’interagir à l’occasion avec les employés.
[57] Monsieur Paquet a été assisté dans l’administration de Tandem par son ex‑conjointe, madame E... G.... Cette dernière voyait à la comptabilité, à donner de la formation et de l’information aux employés. Elle se présentait dans la cuisine et la salle à manger à chaque repas. Sa fille, A, alors âgée de 15 ans, a aussi travaillé au camp en 2019. Elle a agi à titre de coursière. Elle était une amie de madame Y; les deux partageaient la même chambre.
* * *
[58] C’est dans ce contexte que monsieur Paquet a posé à l’endroit des demanderesses les gestes qu’on lui reproche.
[59] À diverses occasions alors qu’il se déplaçait dans la cuisine ou la salle à manger, en passant derrière l’une des demanderesses, sans s’arrêter, il lui touchait les fesses avec une main.
[60] Dans le cas de madame Y, ces attouchements ont débuté dès son premier jour de travail et sont survenus de deux à trois fois par jour jusqu’à son départ. En tout, il l’aurait touchée à quelque dix reprises. Elle affirme aussi que monsieur Paquet l’a touchée « à la poitrine » à une occasion. Elle explique le geste ainsi dans son interrogatoire préalable du 15 janvier 2021 :
R Euh ... en fait, c'est que j'étais à mon poste, pis j’avais comme la nourriture devant moi, pis il avait pris autre chose, il l'avait mis dedans, mais il avait passé sa main… euh … sur ma poitrine.[12]
[61] Madame Z relate des touchers aux fesses dans des circonstances similaires. Elle est au travail, il circule derrière elle et la touche. Elle se souvient de la première occasion, soit le 27 juin 2019, lors de sa deuxième journée de travail. Elle a pensé, alors, qu’il pouvait s’agir d’un accident. Il ne s’est toutefois pas excusé. Il a répété le geste par la suite à quelque dix reprises. Il l’a aussi touchée à un sein. Elle explique ainsi les circonstances :
Q. Vous dites, à un moment donné, qu’il vous a touché un sein. Ça s’est passé où et à quel moment?
R. Euh... ben en fait, j’étais dans la cuisine, au comptoir où est-ce que je coupais des melons d’eau, pis c’était dans une journée de travail.
Q. Pis ça s’est fait comment?
R. Euh... ben, j’avais été attitrée à couper les melons d’eau, faque je le faisais au meilleur de ma connaissance, pis enfin, André, il est venu me voir pour me... m’expliquer une meilleure technique de travail. Euh, fait que là, il est comme venu sur mon coin droit, il était derrière moi, il a pris sa main pis il a comme, il a frôlé mon sein pour aller chercher ma main avec le couteau, pour après ça me montrer comment couper les... les melons d’eau.
Q. C’est arrivé à combien de reprises, ça?
R Euh, qu’il m’a touché le sein? Une (1) fois.
Q. Pis on se situe à quel moment, là, par rapport à... Vous avez commencé à travailler vers le vingt-six (26) juin pis vous avez quitté le premier (1er) juillet, votre dernière journée de travail, premier (1er) juillet, on situe ça à quel moment, ça?
R. Euh, le vingt-neuf (29) juin.[13]
[62] Madame X relate des faits similaires survenus aussi dans des circonstances semblables.
[63] En défense, on soulève l’improbabilité que monsieur Paquet aurait posé les gestes qu’on lui reproche, sauf de façon purement accidentelle, et ce, vu la configuration des lieux et la présence d’autres personnes sur place.
[64] Quant à la configuration des lieux, les photos produites démontrent qu’une personne peut très bien circuler dans la cuisine, entre les différents postes de travail, et dans la salle à manger derrière les serveurs, sans avoir à déplacer ou toucher qui que ce soit.
[65] Quant à l’improbabilité que les gestes aient été posés, vu la présence sur place d’autres personnes au moment des faits, madame Z répond comme suit, de façon convaincante, à cette prétention quand on l’interroge sur une allégation de sa part que monsieur Paquet pouvait poser ces gestes quand ça pouvait passer inaperçu :
Q. Ok.
Vous dites que vous subissiez ces attouchements d'une (1) à trois (3) fois par jour et que le - mon client, le défendeur, faisait ces gestes-là quand ça pouvait passer inaperçu.
R. Oui.
Q. Qu'est-ce qui vous fait dire que mon client faisait ça pour que ça passe inaperçu?
R. Parce que, moi, je l'ai pas nécessairement vu aller toucher les autres pis que ça passait toujours comme s'il marchait en une direction.
C'était... c'est discret comme ... comme attouchement, là.
C'est pour ça que ça me fait dire que c'était volontaire que ses gestes passent inaperçus.
Q. O.K.
Selon vous, mon client, là, s'il posait des gestes, c'était de manière inaperçue?
T'sais, vous n'avez pas vu ça à l'égard des autres, là.
R. Ben, t'sais, quand, moi, ça m'est arri ... ça m'est arrivé qu'il me touchait les fesses, c'était tout le temps, admettons, j'étais au service des allergiques, j'étais seule dans mon coin, quand je travaillais ... tout le monde était concentré à travailler à leur comptoir là.
On regardait pas qu'est-ce qu'il faisait. Ça fait que, pour moi, c'est inaperçu, là, il l'a pas ''faite" devant tout le monde, là.
Ben, t'sais, il y en ayait d'autres qui travaillaient, mais, il a - t'sais, c'était pas «regardez, là, je vais toucher ses fesses», là.
Q. Je comprends.
Mais c'est parce que, là, vous indiquez spécifiquement « ... lorsque la conjointe du défendeur était absente de la cuisine et quand ses gestes pouvaient passer inaperçus.»
Donc, selon vous, il choisissait ses moments pour que ça passe inaperçu, mais qu'est-ce qui vous fait dire ça?
Là, vous avez mentionné que vous étiez dans un coin seul à un autre moment, mais, tout à l'heure, vous m'avez dit que c'était en plein milieu de la cuisine, qu'il y avait plein d'autre monde.
Donc, en quoi, ça, c'était «quand ça pouvait passer inaperçu»?
R. Parce que c'est ... c'est des petits gestes.
Quand il est venu me montrer comment couper le melon d'eau, là, pis qu'il m'a touché les seins, c'est des petits gestes que - il vient me montrer - personne regarde, non plus, qu'est-ce qu'il fait, sa main, elle va où quand il passe derrière moi.
T'sais, c'est inaperçu, parce que chaque personne travaille à son poste.
Pis, c'est ça, on regarde pas qu'est-ce qu'il fait.
«Inaperçu», c'est ça, il a pas attiré l'attention de tout le monde pour dire : « Regardez ici, je lui touche les fesses», là.
C'est ça qui m'a "faite" dire que c'était inaperçu.
Q. Parfait.[14]
[66] Madame X soutient que monsieur Paquet l’a touchée à un sein à une reprise et aux fesses à plusieurs reprises. Elle dit aussi qu’elle l’a vu toucher d’autres employées aux fesses, dont madame Z, à une reprise.
[67] En défense, pour attaquer sa crédibilité et affaiblir la valeur probante de son témoignage, on prétend qu’elle aurait dit le contraire à un policier. On attire l’attention sur une mention à la troisième page de la version dactylographiée de sa déclaration donnée à un policier ontarien le 2 juillet 2019 (D-19), à savoir :
She has not witnesses any touching.
[68] Or, cette phrase mérite d’être considérée dans son contexte.
[69] La déclaration comporte, au début, l’invitation à la prudence suivante :
The typed summary of an handwritten statement/recorded conversation is intended to be used for assistance purposes only. It does not purport to be an exact transcript of the conversation/handwritten statement. Please refer to the actual handwritten statement/audio/video recording for completeness and/or accuracy.
[70] La déclaration est dactylographiée en distinguant chaque élément d’information par des points de forme. La phrase précédente est comprise dans le point de forme suivant qui débute à la fin de la deuxième page et se termine au début de la troisième page et qui se lit :
She has not witnesses any touching.
[71] À la lecture de points de forme précédents dans la même déclaration, il est évident que la mention utilisée en défense pour tenter de discréditer madame X ne concerne qu’une autre employée, B. Dans ces points de forme, on peut lire, notamment :
[…]
[…]
[…]
[…]
[…]
[…]
[72] Le contenu de la déclaration de madame X à un policier, loin de contredire sa version qu’elle a vu monsieur Paquet toucher d’autres employées de façon inappropriée, la confirme plutôt.
[73] Les défendeurs opposent aussi à la version des demanderesses, celle de madame E... G..., l’ex-conjointe de monsieur Paquet. Pour les demanderesses, elle était encore la conjointe de ce dernier au moment des événements.
[74] Madame E... G... soutient qu’elle se trouvait constamment sur les lieux à l’heure des repas, à compter du 25 juin 2019, et ce, pendant les trois semaines subséquentes, période pendant laquelle sa supervision des employées était, selon elle, la plus nécessaire.
[75] Il ressort de son témoignage qu’elle n’a constaté aucun des gestes que les demanderesses reprochent à monsieur Paquet.
[76] Elle reconnaît, par contre, avoir été témoin du geste posé par lui à l’égard d’une autre employée pour lequel il a reconnu sa culpabilité à une accusation de voies de fait simple.
[77] Quant aux demanderesses, elle déclare ne pas croire « en leur histoire ». Elle concède toutefois que si les gestes reprochés ont été posés, ce serait inacceptable et qu’elle les aurait dénoncés si elle en avait été témoin.
[78] La version de madame E... G... ne suffit pas à contrer celle des demanderesses :
[79] De plus, la situation suivante fragilise sa version. Madame E... G... est, en effet, une victime collatérale des gestes posés par monsieur Paquet. Elle déclare qu’elle et sa famille ont vécu des conséquences graves à la suite des accusations portées contre lui :
[80] Pour tenter de discréditer les demanderesses, les défendeurs prétendent aussi à de nombreuses imprécisions ou contradictions entre les versions des événements donnés par chacune aux autorités policières ontariennes lors de leur interrogatoire préalable lors de l’instruction.
[81] Ainsi, les défendeurs soutiennent, entre autres, que :
[82] Ces reproches sont non fondés. En fait, madame Y a suivi les conseils avisés de ses parents de porter plainte aux autorités policières quand ils ont été informés des agissements de monsieur Paquet à son endroit. Madame X et madame Z ont aussi été bien avisées de suivre la même démarche. La preuve ne révèle aucune influence indue de qui que ce soit sur quiconque. L’explication de madame X dans sa déclaration du 2 juillet 2019 quant au fait qu’elle se sentait mal à l’aise de dénoncer monsieur Paquet aux autorités du camp sont raisonnables et plausibles et s’appliquent tout autant à madame Y et à madame Z.
[83] Les défendeurs font aussi appel à des préjugés et des stéréotypes pour prétendre que la crédibilité de l’une ou l’autre des demanderesses est affectée. Par exemple, ils reprochent à madame Y et madame Z d’avoir porté attention à une intervention de la part de monsieur Paquet à l’endroit des employés du camp alors qu’elles avaient porté plainte contre lui. Ils prétendent que madame Y, alors qu’elle aurait subi plusieurs attouchements, s’est tout de même rendue la veille de son départ à une soirée organisée pour les employés par monsieur Paquet, ce dernier étant présent.
[84] Les défendeurs reprochent aussi à madame Y d’avoir, alors qu’elle se trouvait au camp, transmis un message texte à sa cochambreuse dans lequel elle fait part de son désir de rencontrer un collègue de travail, avec qui elle envisageait des contacts de nature sexuelle. Dans son message, elle utilise des mots définitivement plus crus et plus directs.
[85] Les défendeurs entendent donc utiliser le comportement sexuel de madame Y pour miner sa crédibilité, ce qui relève du préjugé, mais il y a plus.
[86] Ce message (D-24) a été transmis le 27 juin 2019 à 3h30 de l’après-midi, alors que les effets des attouchements n’ont pas atteint leur paroxysme. Il vise un collègue de travail d’âge mineur (16 ans environ).
[87] Le lendemain, 28 juin, elle fait part à des amies, par messages textes, qu’elle n’apprécie pas son emploi et s’ennuie de ses parents (D-6).
[88] Le 29 juin, en soirée, elle communique avec une cousine pour lui demander conseil; elle lui écrit (D-8):
J’ai besoin de ton aide ele
[…]
Y se passe une situation pis j’ai besoin de ton avis dessus avant d’en parler pcq je sais pas si c’est trop banal
[…]
Mon patron qui se trouve à être le beau père de … y me frôle les fesses avec sa main.
[89] Immédiatement après, elle échange des messages textes avec ses amies. Elle leur explique avoir deux motifs pour détester son emploi : elle s’ennuie de ses parents, son patron lui frôle les fesses avec la main (P-7, page 2) :
Dans lfond la première raison c’est parce que je m’ennuie fucking de chez moi de mes parents de ma maison de toute! La deuxième raison… les filles j’en reviens tellement pas je sais pas si vous allez me croire depuis les quelques jours que je travaille plusieurs fois par jour une main frole mes fesses mais là la main de qui? Celle de Andrée CRISS a chaque fois y’a pas de désolé pis sa arrive plusieurs fois sa peut juste pas être un accident. Comme j’ai dit tantôt j’en ai parler à B pis Z pis ils fait la même chose sur elles dans s’excuser plusieurs fois par jours y’a même une autres employés qui a avoué qu’il a les mains baladeuses vous comprenez pas à quel point je suis mal à l’aise la…
J’en ai déjà parler à B pis Z j’ai juste brailler toute la soirée sérieux
[Reproduction textuelle]
[90] Elle leur écrit aussi avoir peur de lui, ne pas vouloir que ça dégénère et avoir fait une crise d’anxiété.
[91] Dans la soirée du 30 juin, elle écrit à sa mère avoir besoin de lui parler par téléphone le lendemain (D-7). Dans la même soirée, peu après minuit, elle communique avec ses amies. Elle leur écrit notamment (P-7, page 8) :
Salut les filles je vous fait un petit résumé de je suis rendu ou, oui ça va être long à lire et désolé d’avance mais j’ai vraiment besoins de parler.
1) Les attouchement on pas arrêtées, aujourd’hui sa été les seins hier et les autres jours les fesses…
2) J’ai compris que c’est voulu parce que 6 autres filles dans les cuisines se font touchés de façon semblable (…)[15]
[Reproduction textuelle]
[92] Le 1er juillet, en matinée, elle fait part à sa mère de la situation. Ses parents décident de venir la chercher en voiture, un trajet de quelque huit heures. Suivent les déclarations et plaintes aux autorités policières, l’arrestation, la mise en accusation et la mise en liberté de monsieur Paquet sous conditions.
[93] Ceci amène à traiter d’une contradiction dans les versions de madame Y à l’égard de l’attouchement qu’elle a subi à un sein.
[94] Dans sa déclaration aux autorités policières livrée le 2 juillet 2019, on lit :
On the Sunday, Andre was putting in a new container of food onto the buffet and as he was doing that, his hand brushed against my breast. At that point, that was too much for me, I was very upset and anxious about it.
[95] Elle donne une explication similaire dans son interrogatoire préalable du 15 janvier 2021[16].
[96] Par contre, à l’audience, elle relate qu’elle s’est fait toucher au niveau de la poitrine quand elle coupait des légumes[17].. Il se serait placé derrière elle, aurait glissé ses mains vers l’avant pour lui montrer comment couper des légumes et, ce faisant, l’aurait touchée à la poitrine[18].
[97] Dans son interrogatoire préalable du 15 janvier 2021, elle relate aussi cet événement sans toutefois indiquer qu’il l’aurait alors touchée à la poitrine[19]. Par contre, quand on lui demande à l’audience s’il y a eu d’autres événements par rapport à ce genre d’attouchements, elle répond « non, je ne crois pas, non »[20].
[98] Monsieur Paquet reconnaît être intervenu auprès de madame Y pour lui apprendre comment utiliser un couteau pour couper des légumes en toute sécurité. Il nie tout attouchement inapproprié.
[99] Il produit comme témoin pour le confirmer la fille de sa conjointe d’alors, madame A. Cette dernière était, au moment des faits, âgée de 15 ans. Elle en a 18 au moment de son témoignage.
[100] Elle affirme :
[101] Ce témoignage étonne quelque peu. D’une part, madame A ne sait pas, à ce moment, que son amie se plaint d’attouchements sur elle. Madame Y a même dit à ses amies qu’elle ne pouvait pas lui en parler (P-7). Le fait que monsieur Paquet intervienne auprès d’une employée devait donc être, somme toute, banal. Ainsi, contrairement à madame Y, elle n’a aucune raison de se souvenir avec autant de détail de cet incident. De plus, les photos produites (D-1) rendent improbable que monsieur Paquet ait pu se positionner face à madame Y, si cette dernière se trouvait au comptoir où se préparent les salades.
[102] L’ensemble de la preuve à l’égard de cette allégation d’un attouchement à la poitrine permet de retenir comme démontré, par prépondérance des probabilités, que madame Y en a, en effet, été victime et qu’il s’est vraisemblablement produit de la façon dont elle l’a décrite aux policiers, et ce, pour les motifs, suivants :
[103] Au surplus, madame A est aussi une victime collatérale de toute cette situation; elle vit de l’insatisfaction : il ressort de son témoignage que plusieurs des amies qu’elle partageait avec madame Y ont semblé lui préférer cette dernière.
[104] Les défendeurs prétendent aussi à une contradiction de la part de madame Z dans sa description de l’attouchement qu’elle dit avoir subi à un sein : dans son interrogatoire préalable, elle dit s’être fait toucher à la poitrine alors que monsieur Paquet est venu lui montrer comment couper un melon d’eau alors qu’elle ne mentionne pas d’attouchement à un sein dans sa déclaration aux policiers du 2 juillet 2019 (D-22) et qu’elle dit à son médecin consulté le 15 juillet 2019 s’être fait « frotter un peu un sein en se servant dans un plateau qu’elle tenait »[21].
[105] Or, madame Z a fourni à l’instruction une description de l’incident similaire à celle lors de son interrogatoire préalable (voir paragraphe 61 précédent). De plus, la déclaration aux policiers contient, au début, la même invitation à la prudence que celle de madame X (paragraphe 69 précédent). Enfin, le médecin n’est pas un enquêteur. Sa description ne fait pas le poids face à celle donnée à l’audience.
[106] Pour le reste, les défendeurs soulèvent ce qu’ils appellent aussi des contradictions ou imprécisions comme :
[107] En fait, les défendeurs abordent le recours en responsabilité intenté contre eux comme s’il s’agissait d’un procès en matière criminelle. Ils essaient de soulever un doute raisonnable quant à la culpabilité de monsieur Paquet à l’égard des faits reprochés.
[108] Or, faut-il le rappeler, les demanderesses ont le fardeau de démontrer, par prépondérance des probabilités, la survenance des faits fautifs.
[109] Outre celles traitées jusqu’à présent, il n’y a pas lieu de disposer de toutes les remarques des défendeurs quant à la qualité de la preuve présentée par les demanderesses.
[110] Le Tribunal conclut, en effet, que la version de chacune des demanderesses, dans ses grandes lignes, est crédible, vraisemblable, digne de foi. Chacune a été victime d’attouchements de la part de monsieur Paquet.
[111] Par ailleurs, il ne fait aucun doute que ces attouchements ne sont ni involontaires, ni accidentels et revêtent un caractère sexuel.
[112] La dénégation générale de monsieur Paquet ne fait pas le poids face aux versions des demanderesses.
[113] D’ailleurs, sans que ce soit interprété comme un aveu de sa part, il est tout de même singulier de constater que monsieur Paquet, qui s’est reconnu coupable, en janvier 2019, d’une tentative de voyeurisme commise en 2018, n’a consulté un psychologue qu’après les événements de l’été 2019. Il dit, à l’audience, avoir ainsi procédé par choix personnel. Il a cessé de rencontrer son psychologue au printemps 2022. Cette consultation a servi d’argument pour plaider en faveur d’une absolution conditionnelle lors du règlement de son dossier en matière pénale, le 13 octobre 2021.
* * *
[114] Les gestes que monsieur Paquet a posés à l’endroit des trois demanderesses sont fautifs. Il engage sa responsabilité et celle de la défenderesse à l’égard du préjudice subi par chacune d’elles.
[115] Dans 9145-0692 Québec inc. c. 9162-8974 Québec inc.[22], la Cour d’appel s’exprime comme suit au sujet de l’attribution de dommages-intérêts compensatoires :
[66] Or, les dommages-intérêts compensatoires qu’un tribunal peut accorder ont pour fonction de réparer le préjudice subi et non de punir un geste ou un comportement répréhensible[6]. Ils sont donc établis en fonction de l’étendue du préjudice subi et ne doivent pas être influencés par la gravité de la faute. Ce préjudice, pour pouvoir être indemnisé, doit aussi revêtir certaines caractéristiques, dont celle d’être certain (art.
1611. Les dommages-intérêts dus au créancier compensent la perte qu’il subit et le gain dont il est privé. On tient compte, pour les déterminer, du préjudice futur lorsqu’il est certain et qu’il est susceptible d’être évalué. | 1611. The damages due to the creditor compensate for the amount of the loss he has sustained and the profit of which he has been deprived. Future injury which is certain and assessable is taken into account in awarding damages. |
[116] Aucune des demanderesses ne produit une expertise médicale démontrant que les gestes posés à leur endroit ont causé, à l’une ou l’autre, des séquelles permanentes. Chacune réclame une indemnité pour le préjudice moral qu’elle a subi.
[117] Quantifier un tel préjudice ne relève pas de la science exacte. La Cour d’appel s’exprime comme suit à ce sujet dans M.G. c. Pinsonneault[23] :
306] D’abord, rappelons, comme nous l’avons vu, que la réparation des pertes non pécuniaires diffère qualitativement de l’indemnisation des pertes pécuniaires. Il s’agit là d’un préjudice qui, strictement, ne peut être réparé. Qu’il suffise de réitérer que « [l]e bonheur et la vie n’ont pas de prix », ce qui fait en sorte que l’évaluation de ces pertes est « plus un exercice philosophique et social qu’un exercice juridique ou logique ». L’indemnité allouée doit néanmoins être équitable et raisonnable.
[Renvois omis]
[118] Chaque cas doit être analysé en fonction de ses circonstances particulières dont la nature des gestes posés, leur fréquence, l’âge de la victime, leur impact sur cette dernière.
[119] Il existe peu ou pas de jurisprudence où un tribunal judiciaire a accordé un montant pour compenser un préjudice moral dans des circonstances similaires à la présente affaire. Les cas répertoriés concernent, pour la plupart, des agressions plus violentes, plus intrusives[24].
[120] Dans E.C. c. École Saint-Vincent-Marie[25], le tribunal retient la responsabilité d’une commission scolaire à l’égard du préjudice subi par une étudiante âgée de 11 ans, victime à l’école, pendant l’année scolaire 2010 – 2011, de gestes inappropriés de la part de cinq garçons, dont un incident à caractère sexuel. Bien qu’il entretienne des doutes entre les incidents et les problèmes allégués par l’étudiante[26], il lui accorde 10 000 $ en dommages-intérêts pour stress, trouble psychologique, perte de jouissance de la vie, inconvénients.
[121] Le Tribunal des droits de la personne, pour sa part, appelé à sanctionner des cas de harcèlement sexuel en milieu de travail, ce qui s’apparente davantage à la présente affaire, accorde des montants pouvant atteindre 7 500 $[27].
[122] En l’espèce, les reproches consistent en des attouchements de nature sexuelle sans usage de violence autre que celle intrinsèque aux gestes eux-mêmes.
[123] Par contre, ils ont été commis par un employeur dans le milieu de travail des victimes alors que ces dernières se trouvaient en situation de dépendance.
[124] Madame X avait alors 21 ans, madame Y 15, madame Z 16. L’on sait que plus une victime est jeune, plus elle est susceptible d’être affectée par des gestes constituant de la violence sexuelle.
* * *
[125] Madame X s’est sentie déstabilisée par les gestes posés à son endroit par monsieur Paquet et impuissante face à cela alors que pour lui, c’était « Comme si rien n’était, en fait, là »[28].
[126] Elle adorait le camp au point où elle s’est même demandé si elle devait continuer d’endurer cela.
[127] À son retour chez elle, elle s’est fait poser beaucoup de questions sur les raisons de son retour prématuré. Elle ne pouvait expliquer pourquoi; les policiers ontariens lui ont demandé de ne pas discuter de l’affaire.
[128] Dans sa déclaration aux autorités policières ontariennes du 2 juillet 2019, madame X minimise les conséquences des gestes de monsieur Paquet à son endroit; elle dit se sentir davantage témoin que victime. Par contre, quand on lui demande, en septembre 2022, comment ça se passe pour elle, elle répond :
Q. O.K. Et vous personnellement, ça se passe comment?
R. Euh, c’est sûr que c’est un choc, tu te poses beaucoup de questions, euh... tu te demandes pourquoi ça t’est arrivé. Tu te dis que... t’sais, l’Ontario, c’est une deuxième famille pour moi, fait que... ça me faisait vraiment beaucoup de peine de quitter.
Euh, c’est sûr que j’étais vraiment beaucoup chamboulée. Par contre, je voulais comme un peu oublier la situation, j’étais comme je suis revenue, je veux reprendre quelques activités pour pouvoir comme me libérer la tête.
Q. Avez-vous consulté?
R. Non. J’ai... non.
Q. Pour quelle raison vous consultez pas?
R. Euh, je me sentais vraiment mal à l’aise d’aller parler de ça. Je me demandais si... si j’en avais vraiment de besoin. Euh... pour moi, c’est un petit peu une honte d’avoir vécu ça.
Q. Pis aujourd’hui, là, quand vous relatez tout ça, là, ça vous fait quoi?
R. Heille, je suis vraiment pas bien.[29]
[129] À son retour du camp, madame X a rencontré un médecin, le 12 juillet 2019. Elle lui a rapporté se sentir stressée, avoir un sommeil difficile, faire des mauvais rêves. Par ailleurs, son appétit était stable et bon. Le médecin a noté qu’elle était cohérente avec une pensée structurée. Il a indiqué le 22 juillet 2019 comme date probable de consolidation.
[130] En plaidoirie, les défendeurs soumettent que madame X, parce qu’elle n’a consulté aucun professionnel, n’a pas mitigé ses dommages. Ils n’apportent toutefois aucun élément de preuve pour démontrer le bien-fondé de cet argument, comme, par exemple, l’effet potentiel d’une consultation sur la situation de madame X.
* * *
[131] Madame Y a décidé de quitter son emploi parce que les événements qu’elle a vécus l’ont rendue mal à l’aise. Même après plus de trois ans, leur rappel l’affecte profondément. Le Tribunal a même dû lui offrir de suspendre son témoignage pendant quelques minutes pour qu’elle puisse se ressaisir.
[132] À son retour du camp, elle s’est trouvé un autre emploi. Elle l’a occupé pendant quelques semaines. Elle ne se sentait pas capable de travailler.
[133] Elle a pu assister à un concert dans le cadre du Festival d’été de Québec, mais accompagnée de son père. Elle a perdu une amie, A. Elle a changé d’école à l’automne 2019. Elle a donc moins fréquenté son groupe d’amis.
[134] Elle a pensé qu’elle n’avait pas besoin d’aide pour gérer les conséquences de ces gestes. Elle s’est toutefois rendu compte qu’elle devait consulter. Elle a rencontré une psychoéducatrice. Elle est de nature anxieuse, elle le reconnaît. Elle n’avait toutefois jamais consulté un intervenant auparavant à ce sujet. De mai 2020 à février 2021, elle a rencontré la psychoéducatrice à douze reprises.
[135] Elle affirme dans son témoignage à l’audience continuer de la consulter. Elle ne discute toutefois plus avec elle des événements vécus à l’été 2019.
* * *
[136] Madame Z a aussi décidé de quitter son emploi parce que l’environnement de travail n’était pas sain. À son retour chez elle, elle a pu se trouver un autre emploi dans un restaurant où elle avait déjà travaillé auparavant. Elle a aussi pu accompagner ses parents en vacances. Elle a poursuivi ses études à l’automne 2019, à la même école que celle fréquentée dans les années antérieures. Elle a continué de côtoyer ses amis.
[137] Après son retour du camp, dans le cadre de sa réclamation à la CNESST, elle a rencontré un médecin le 15 juillet 2019. Elle lui a rapporté avoir vécu de l’anxiété pendant et à la suite des événements. Le médecin n’a pas noté de problèmes particuliers chez elle outre sa déception d’avoir subi des pertes financières. Toutefois, à l’audience, elle devient émotive et se dit encore affectée par les gestes posés à son endroit[30]. Elle a aussi rencontré une psychoéducatrice, la même que celle consultée par madame Y. Elle a cessé de la voir en 2021. Elle complète prochainement des études collégiales en technologie de l’architecture.
[138] À l’automne 2021, tout en complétant des études, elle a aussi occupé un emploi à temps partiel dans un restaurant doté d’un service à l’auto. Monsieur Paquet s’y est présenté alors qu’elle se trouvait au travail. Elle l’a aperçu. Elle en a été troublée. Elle explique à l’audience :
R. Euh, je peux pas dire, là, parce que moi, dès que j’ai regardé pis que j’ai vu que c’était lui, ben en fait, je... j’étais pas bien, t’sais, je stressais pis j’étais comme dans tous mes états, mais, c’est ça, j’ai pas pris la peine de regarder si lui m’avait vue ou quoi que ce soit, là. J’ai... j’ai comme continué mon travail pis, en fait, c’était comme je me dépêche à ce qu’il parte, là. Fait que, go qu’on emballe pis qu’il parte parce que je veux pas le revoir. T’sais, je... c’est ça.
Fait que je sais pas si lui m’a reconnue, là. Je sais pas s’il m’a vue, parce que j’ai pas porté attention à si lui m’avait reconnue.[31]
[139] Monsieur Paquet devait alors respecter des conditions d’une ordonnance de probation prévoyant, notamment, une interdiction de contacts avec l’une ou l’autre des demanderesses. Il n’a toutefois pas été poursuivi pour cet incident, vraisemblablement parce qu’on n’a pas été en mesure de démontrer qu’il savait madame Z présente au moment où il s’est présenté au service à l’auto de ce restaurant.
* * *
[140] Les demanderesses ont subi des attouchements semblables, dans les mêmes conditions, soit leur milieu de travail par celui qu’elles considéraient comme leur employeur alors qu’elles se trouvaient dépendantes de ce dernier. Toutefois, chacune présente un degré de vulnérabilité différent des autres. Voilà pourquoi, sans se défendre d’un certain arbitraire propre à l’exercice d’évaluation d’un préjudice moral, le Tribunal estime raisonnable et équitable d’accorder à chacune le montant suivant :
[141] À ces montants s’ajoutent les intérêts et l’indemnité additionnelle prévue à l’article
* * *
[142] Chacune des demanderesses réclame aussi des dommages-intérêts punitifs. L’article
1621. Lorsque la loi prévoit l’attribution de dommages-intérêts punitifs, ceux-ci ne peuvent excéder, en valeur, ce qui est suffisant pour assurer leur fonction préventive.
Ils s’apprécient en tenant compte de toutes les circonstances appropriées, notamment de la gravité de la faute du débiteur, de sa situation patrimoniale ou de l’étendue de la réparation à laquelle il est déjà tenu envers le créancier, ainsi que, le cas échéant, du fait que la prise en charge du paiement réparateur est, en tout ou en partie, assumée par un tiers.
[143] L’atteinte à l’intégrité physique d’une personne, comme en l’espèce, constitue une violation de l’article
1. Tout être humain a droit à la vie, ainsi qu’à la sûreté, à l’intégrité et à la liberté de sa personne.
(…)
49. Une atteinte illicite à un droit ou à une liberté reconnu par la présente Charte confère à la victime le droit d’obtenir la cessation de cette atteinte et la réparation du préjudice moral ou matériel qui en résulte.
En cas d’atteinte illicite et intentionnelle, le tribunal peut en outre condamner son auteur à des dommages-intérêts punitifs.
[144] Au sujet des conséquences illicites et intentionnelles d’une atteinte, la Cour suprême dans Québec (Curateur public) c. Syndicat national des employés de l’hôpital St-Ferdinand[33] explique :
116. Pour conclure à l’existence d’une atteinte illicite, il doit être démontré qu’un droit protégé par la Charte a été violé et que cette violation résulte d’un comportement fautif. Un comportement sera qualifié de fautif si, ce faisant, son auteur transgresse une norme de conduite jugée raisonnable dans les circonstances selon le droit commun ou, comme c’est le cas pour certains droits protégés, une norme dictée par la Charte elle-même: Roy, Les dommages exemplaires en droit québécois: instrument de revalorisation de la responsabilité civile, op. cit., aux pp. 350 à 358. L’existence d’une atteinte illicite établie, la victime peut, selon les termes du premier alinéa de l’art.
(…)
121 En conséquence, il y aura atteinte illicite et intentionnelle au sens du second alinéa de l'art.
[145] Par ailleurs, la Cour suprême précise au sujet de l’article
[155] L’article
[146] En l’espèce, il ne fait aucun doute, d’une part, que les gestes posés par le défendeur à l’endroit des demanderesses constituent non seulement une faute civile, mais aussi une atteinte illicite à leur intégrité et, d’autre part, que ce dernier ne pouvait ignorer les conséquences extrêmement probables de ses gestes à leur endroit.
[147] Ces gestes doivent être dénoncés et désapprouvés d’autant plus qu’ils ont été commis à l’égard d’employées, dans leur milieu de travail, par leur supérieur censé les protéger.
[148] Leur employeur, la défenderesse, est tenue solidairement responsable des dommages punitifs consécutifs à la faute intentionnelle de son seul dirigeant[35].
[149] La mesure de la dénonciation et de la désapprobation est circonscrite par les critères prévus à l’article
[150] Relativement à la situation patrimoniale des défendeurs, la preuve révèle que la défenderesse n’a pas vu son contrat de traiteur renouvelé après l’année 2019, qu’elle n’opère plus et qu’elle ne posséderait aucun bien.
[151] Quant à monsieur Paquet, il a cessé cette activité de traiteur. Il s’est trouvé un emploi de plombier, il gagne quelque 1 200 $ par semaine. Il vit en appartement. Il a vendu la résidence qu’il possédait. Le bénéfice qu’il a tiré de cette vente lui a servi à payer les honoraires de ses avocats. Il n’aurait pas d’économies.
[152] Tenant compte de l’ensemble de la situation, il y a lieu de fixer à 1 500 $ la somme payable à chacune des demanderesses à titre de dommages punitifs.
[153] À ces montants, s’ajoutent l’intérêt au taux légal et l’indemnité additionnelle prévue à l’article
[154] Les demanderesses demandent que le jugement soit rendu exécutoire nonobstant appel. Elles ne présentent toutefois aucun motif à l’appui de cette conclusion. Elle ne saurait être reçue.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[155] CONDAMNE solidairement les défendeurs, André Paquet et Tandem Resto Traiteur inc., à payer à la demanderesse, X :
[156] CONDAMNE solidairement les défendeurs, André Paquet et Tandem Resto Traiteur inc., à payer à la demanderesse, Y :
[157] CONDAMNE solidairement les défendeurs, André Paquet et Tandem Resto Traiteur inc., à payer à la demanderesse, Z :
[158] Le tout, avec les frais de justice.
| __________________________________ BENOIT MOULIN, j.c.s. | |
Me Charles Brochu | ||
Picard, Robert, Juster & Associés Avocats des demanderesses | ||
| ||
Me Élodie Drolet-French | ||
Jean-François Bertrand Avocats inc. Avocats des défendeurs | ||
Dates d’audience : | 19, 20, 21, 22 et 23 septembre 2022 | |
[1] Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, RLRQ, c. A-3.001.
[2] Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail.
[3] Loi sur la santé et la sécurité du travail, RLRQ, c. S-2.1.
[4] Larivière c. Ville de Montréal (Service de police de la Ville de Montréal),
[5] Thibeault c. R.,
[6] R. c. J.J.,
[7] Construction GMR inc. c. Syndicat des copropriétaires du 521 de Cannes à Gatineau,
[8] Droit de la famille – 2390,
[9] Daigle c. R.,
[10] Nobert c. Lavoie,
[11] Notes sténographiques, interrogatoire préalable du 15 janvier 2021, p. 29, ligne 10 à p. 30 ligne 13.
[12] Notes sténographiques, interrogatoire préalable du 15 janvier 2021, p. 46, ligne 25 à p. 47, ligne 4.
[13] Notes sténographiques du 20 septembre 2022, p. 25, ligne 11 à p. 26, ligne 10.
[14] Notes sténographiques de l’interrogatoire préalable du 15 janvier 2021, p. 65, ligne 5 à p. 67, ligne 23.
[15] Le message texte porte la date du 1er juillet 2019; il a été transmis à 00h59. Quand madame Y écrit « aujourd’hui », elle se réfère évidemment au 30 juin 2019.
[16] Notes sténographiques de l’interrogatoire préalable du 15 janvier 2021, p. 46 et 47.
[17] Notes sténographiques du 19 septembre 2022, p. 45, ligne 6.
[18] Notes sténographiques du 19 septembre 2022, p. 116, ligne 1 à p. 117, ligne 5.
[19] Notes sténographiques de l’interrogatoire préalable du 15 janvier 2021, p. 63, lignes 21 à 24.
[20] Notes sténographiques du 19 septembre 2022, p. 117, ligne 8.
[21] Rapport médical du 15 juillet 2019.
[22] 9145-0692 Québec inc. c. 9162-8974 Québec inc.,
[23] M.G. c. Pinsonneault,
[24] Voir, par exemple, N.B. c. G.A.,
[25] E.C. c. École Saint-Vincent-Marie,
[26] La jeune fille a aussi été victime d’une agression physique commise par deux hommes, survenue en avril 2011.
[27] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (H.R.) c. D.L.,
[28] Notes sténographiques du 20 septembre 2022, p. 119, ligne 11.
[29] Notes sténographiques du 20 septembre 2022, p. 151, ligne 24 à p. 152, ligne 20.
[30] L’avocate des défendeurs a même noté que madame Z a pleuré pendant son témoignage. Notes sténographiques du 20 septembre 2022, p. 49.
[31] Notes sténographiques du 20 septembre 2022, p. 94, lignes 12 à 25.
[32] Charte des droits et libertés de la personne, RLRQ, c. C-12.
[33] Québec (Curateur public) c. Syndicat national des employés de l'hôpital St-Ferdinand,
[34] Richard c. Time Inc.,
[35] Gauthier c. Beaumont,
[36] Succession de G.P. c. L.P.,
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