Décision

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Chouinard c. Daoud

2011 QCRDL 18951

 

 

RÉGIE DU LOGEMENT

Bureau de Montréal

 

No :          

31 110405 083 G

 

 

Date :

16 mai 2011

Régisseure :

Suzie Ducheine, juge administratif

 

Sylvie Chouinard

 

Locatrice - Partie demanderesse

c.

Nasir Daoud

 

Locataire - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]      Par une demande amendée, la locatrice demande la résiliation du bail et l'expulsion du locataire, le recouvrement du loyer (1 125 $) ainsi que le loyer dû au moment de l'audience et des dommages-intérêts au montant de 6 900 $, plus l'exécution provisoire de la décision malgré l'appel.

[2]      Il s'agit d’une entente de location pour une chambre au loyer mensuel de 360 $, payable le premier jour de chaque mois.

[3]      La preuve démontre que le locataire doit 720 $, soit le loyer des mois d'avril et mai 2011.

[4]      Le locataire admet devoir cette somme.

[5]      Le locataire est en retard de plus de trois semaines pour le paiement du loyer, la résiliation du bail est donc justifiée par l'application de l'article 1971 C.c.Q.

[6]      Au soutien de sa demande, la locatrice allègue comme second motif que le locataire ou les personnes à qui il permet l'accès du logement ont un comportement bruyant qui dérange la jouissance paisible des lieux. Elle allègue aussi que le locataire n'use pas du logement avec prudence et diligence. Elle allègue avoir perdu des locataires et du loyer en raison de ces troubles de jouissance. Elle réclame des dommages en conséquence.

[7]      Selon l'article 2803 du Code civil du Québec, il appartient à la locatrice de démontrer que le locataire contrevient à ses obligations et que sa conduite lui cause un préjudice sérieux qui justifie la résiliation du bail.

[8]      L'article 1855 du Code civil du Québec prévoit l'obligation générale pour tout locataire, pendant la durée du bail, d'user du bien loué avec prudence et diligence.

[9]      L'article 1860 du Code civil du Québec précise que tout locataire est tenu de se conduire de manière à ne pas troubler la jouissance normale des autres locataires, sous peine d'être tenu envers le locateur et les autres locataires de réparer le préjudice qui peut résulter de la violation de cette obligation, que cette violation soit due à son fait ou au fait des personnes auxquelles il permet l'usage du bien ou l'accès aux lieux.


[10]   L'article 976 du Code civil du Québec prescrit que les voisins doivent accepter les inconvénients normaux du voisinage qui n'excèdent pas les limites de la tolérance qu'ils se doivent, suivant la nature des lieux ou les usages locaux.

[11]   Ainsi pour conclure que le locataire contrevient à son obligation et qu'il trouble la jouissance des lieux, l'auteur Pierre-Gabriel Jobin[1] souligne que deux conditions essentielles doivent être rencontrées :

1. Il doit s'agir d'un inconvénient anormal ou excessif qui présente un caractère de persistance.

2. Les locataires auteurs du trouble doivent avoir agi de façon illégitime.

[12]   En l'instance, il revient à la locatrice de démontrer que les bruits et comportements reprochés au locataire sont déraisonnables, excessifs, anormaux et suffisamment répétés, continus et persistants pour justifier la résiliation du bail.

[13]   Dans l'affaire O.M.H.M. c. Goudreault[2], le tribunal établit des critères à considérer en matière de troubles de jouissance. Il fut décidé ainsi :

« Pour réussir en la présente cause, le locateur doit établir que le locataire ou une personne dont il est responsable ou à qui il permet l'accès du logement a eu, au cours d'une certaine période, des comportements et des attitudes qui par leurs répétitions et insistances agacent, excèdent ou importunent gravement les autres locataires du même immeuble, troublant ainsi la jouissance normale des lieux à laquelle ils ont droit. »

[14]   Or, la prépondérance de preuve n'est pas à cet effet. La preuve présentée est loin d'être convaincante et suffisante et ne permet pas d'arriver aux conclusions recherchées par le locateur.

[15]   La preuve est contradictoire. La locatrice ne présente aucune preuve probante à l’appui de son témoignage qui est contredit par le locataire.

[16]   La locatrice n'a pas cru nécessaire de faire entendre les policiers qui seraient intervenus ni les autres locataires de l'immeuble qui se sont plaints du comportement bruyant du locataire et de ses visiteurs.

[17]   En l'instance, la locatrice avait le fardeau de prouver le bien-fondé de ses prétentions. Mais, elle ne l'a pas rencontré.

[18]   Le tribunal ne peut, par conséquent, résilier le bail pour ce second motif ni accorder les dommages réclamés par la locatrice.

[19]   Le bail n'est toutefois pas résilié si le loyer dû, les intérêts et les frais sont payés avant jugement, conformément aux dispositions de l'article 1883 C.c.Q.

[20]   Le préjudice causé à la locatrice justifie l'exécution provisoire de la décision, comme il est prévu à l'article 82.1 L.R.L.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[21]   RÉSILIE le bail et ORDONNE l'expulsion du locataire et de tous les occupants du logement;

[22]   ORDONNE l'exécution provisoire, malgré l'appel, de l'ordonnance d'expulsion à compter du 5e jour de sa date;

[23]   CONDAMNE le locataire à payer à la locatrice la somme de 720 $, plus les intérêts au taux légal et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 C.c.Q., à compter du 5 avril 2011 sur la somme de 360 $, et sur le solde à compter de l'échéance de chaque loyer, plus les frais judiciaires de 66 $.

 

 

 

 

 

Suzie Ducheine

 

Présence(s) :

la locatrice

le locataire

Date de l’audience :  

16 mai 2011

 


 



[1] Pierre-Gabriel Jobin, Le louage, 2e édition, Cowansville, Les éditions Yvon Blais Inc., 1996, p. 252.

[2] Office Municipal d'Habitation de Montréal c. Marcel Goudreault, 31-950727-011 G, le 14 septembre 1995, Me Gérald Bernard.

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