Beaulieu c. Bernier | 2022 QCTAL 10120 |
TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT | ||||||
Bureau dE Rimouski | ||||||
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No dossier : | 603271 06 20211220 G | No demande : | 3423442 | |||
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Date : | 12 avril 2022 | |||||
Devant la juge administrative : | France Tremblay | |||||
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Bernard Beaulieu |
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Locateur - Partie demanderesse | ||||||
c. | ||||||
Claudine Bernier |
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Locataire - Partie défenderesse | ||||||
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D É C I S I O N
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[1] En date du 20 décembre 2021, le locateur a déposé une demande pour obtenir l'autorisation de reprendre le logement concerné afin d'y loger son fils, et ce, à l'expiration du bail, soit le 30 juin 2022.
[2] Les parties sont liées par un bail du 1er juillet 2004 au 30 juin 2005, lequel a été reconduit jusqu’au 30 juin 2022, au loyer mensuel de 567 $.
REPRISE DU LOGEMENT
[3] Le 17 novembre 2021, le locateur a signifié par huissier à la locataire un avis de reprise de logement, lequel l’informe qu’il entend reprendre le logement pour y loger son fils, Maxim Beaulieu, à compter du 30 juin 2022.
[4] L'avis de reprise est conforme aux dispositions des articles
[5] La locataire n’a pas répondu à l'avis de reprise de logement, de sorte qu'elle est présumée avoir refusé de quitter les lieux.
[6] L’article
« 1963. Lorsque le locataire refuse de quitter le logement, le locateur peut, néanmoins, le reprendre, avec l'autorisation du tribunal.
Cette demande doit être présentée dans le mois du refus et le locateur doit alors démontrer qu'il entend réellement reprendre le logement pour la fin mentionnée dans l'avis et qu'il ne s'agit pas d'un prétexte pour atteindre d'autres fins. »
[7] La demande du locateur a été présentée dans le délai prévu à l'article
[8] À l'audience, le locateur témoigne des faits donnant ouverture à sa demande de reprise de logement.
[10] À l’audience, Maxim Beaulieu, bénéficiaire de la reprise, corrobore en tous points le témoignage du locateur, en y ajoutant que le logement qu’il occupe présentement avec sa conjointe est loué à d’autres locataires à compter du 1ier juillet 2022, et ce, suivant l’avis de non-renouvellement de bail donné à cet effet.
[11] De plus, Maxim Beaulieu précise qu’il a choisi le logement en l’instance considérant sa disposition, la tranquillité des lieux, l’aménagement de la cour extérieure, la possibilité de posséder un animal, ainsi que l’accès à un espace de rangement extérieur.
[12] En outre, le locateur soumet que la locataire n’est pas prise par surprise car l’année dernière, il avait tenté de reprendre son logement pour le même motif, sans toutefois respecter toutes les mesures appropriées.
[13] Par ailleurs, le locateur explique au Tribunal que l’immeuble en l’instance représente le seul immeuble à logements qu’il détient personnellement.
[14] En défense, la locataire conteste la demande de reprise de logement au motif qu’elle doute du réel motif du locateur.
[15] À ce chapitre, la locataire témoigne qu’elle occupe son logement depuis plusieurs années sans occasionner de problème au locateur, lequel lui aurait souvent rappelé que son loyer payable était peu élevé, ce qui justifiait l’absence de réparations nécessaires.
[16] D’autre part, la locataire doute qu’elle puisse trouver un logis similaire et déplore le choix du bénéficiaire de la reprise à son encontre.
[17] À ce titre, tel que mentionné à l’audience, le Tribunal rappelle aux parties que s’il s’avère que le locateur ne reprend pas le logement au motif allégué en l’instance, la locataire conserve tous ses droits et recours en dommages-intérêts contre le locateur.
[18] Par conséquent, suivant la preuve soumise, le Tribunal est d’avis que le locateur s’est conformé de bonne foi aux modalités de la reprise du logement et juge la preuve probante à l’effet que le locateur entend réellement reprendre le logement pour les fins mentionnées à son avis et qu'il ne s'agit pas d'un prétexte pour atteindre d'autres fins.
[19] La locataire soulève essentiellement que des doutes ou des appréhensions quant aux intentions du locateur, lesquels ne sont toutefois pas supportés par une preuve prépondérante. Ainsi, la locataire n’a soumis aucune preuve permettant de douter de l'intention du locateur.
[20] L'autorisation à la reprise du logement est donc accordée.
[21] Toutefois, l'exécution provisoire de la décision malgré l'appel n'est pas pertinente en l'instance et le locateur devra assumer les frais de sa demande.
INDEMNITÉ
[23] Pour établir le montant de l'indemnité, le Tribunal fait siens les propos la juge administrative Isabelle Guiral, dans l’affaire Jessyline Graham c. Jean-Guy Michaud, laquelle énonce ce qui suit :
« [21] Pour établir le montant de l'indemnité, la jurisprudence indique que des facteurs tels que l'âge du locataire, son état de santé, la durée de l'occupation du logement, l'attachement au logement, le coût du transport des biens et les frais de rebranchement aux services publics (téléphone, électricité, câblodistribution, etc.), peuvent être pris en considération dans l'exercice de ce pouvoir discrétionnaire(3). Ces facteurs ne sont pas exhaustifs.
[22] Il faut se rappeler que la locatrice exerce un droit légitime reconnu par la loi. Il n'y a donc pas lieu de la pénaliser pour l'exercice de ce droit. Ainsi, l'indemnité doit donc viser à compenser le locataire adéquatement sans risquer de créer pour la locatrice une contrainte financière de tel que l'exercice même de ce droit s'en trouverait affecté.
[23] Dans les circonstances, le Tribunal est d'avis que le locataire a le droit d'être indemnisé pour les dépenses et inconvénients qu'il subira en raison du déménagement. »[1]
(Référence omise)
[24] Rappelons également qu'il s'agit d'une indemnité et non de l'octroi de dommages.
[25] En l’instance, le locataire demande au Tribunal de lui accorder une indemnité de l’ordre de 5 000 $, considérant notamment tous le stress et les frais de déménagement, sans toutefois soumettre une soumission.
[26] En revanche, le locateur propose une indemnité de 1 000 $, laquelle pourrait, selon lui, compenser amplement les frais de déménagement de la locataire.
[27] Dans les circonstances et suivant les principes applicables, le Tribunal exerce son pouvoir discrétionnaire et fixe de façon arbitraire une indemnité totale de 1 700 $, pour compenser les frais de déménagement et d’autres frais directement reliés au départ de la locataire, et ce, en l’absence d’une preuve plus spécifique quant aux déboursés.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[28] ACCUEILLE la demande du locateur;
[29] AUTORISE le locateur à reprendre le logement pour s’y loger, à compter du 1er juillet 2022;
[30] ORDONNE à la locataire et à tous les occupants de quitter les lieux loués au plus tard le 30 juin 2022, à minuit;
À DÉFAUT :
[31] ORDONNE l'expulsion de la locataire ainsi que de tout autre occupant du logement à compter du 1er juillet 2022;
[32] CONDANNE le locateur à payer à la locataire, à titre d’indemnité, la somme de 1 700 $;
[33] AUTORISE les parties à opérer compensation de cette condamnation à même le loyer restant, payable par la locataire au locateur;
[34] LE TOUT sans frais.
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France Tremblay | ||
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Présence(s) : | le locateur la locataire | ||
Date de l’audience : | 6 avril 2022 | ||
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[1] Jessyline Graham c. Jean-Guy Michaud, 499502 31 20200107 G, 14-07-2020.
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