Décision

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Penta c. Moretti

2010 QCRDL 18239

 

 

RÉGIE DU LOGEMENT

Bureau de Montréal

 

No :          

31 100211 107 T 100420

 

 

Date :

10 mai 2010

Régisseure :

Suzie Ducheine, juge administratif

 

Angelo Penta

 

Locateur - Partie demanderesse

c.

Ricardo Moretti

 

Stéphanie Chagnon

 

 

Locataires - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]         Le locateur demande la rétractation de la décision rendue le 8 avril 2010 qui rejette sa demande d’autorisation de reprise du logement des locataires.

[2]         Au soutien de sa demande, le locateur allègue qu’il était empêché de se présenter à l’audition de sa demande parce qu’il était à l’extérieur du pays.

[3]         Il explique qu’il avait mandaté un ami pour le représenter à l’audience. Cependant, son mandataire n’a pas su bien expliquer les faits au soutien de sa demande. Il veut obtenir la rétractation de la décision afin de démontrer qu’il avait avisé les locataires qu’il voulait reprendre le logement afin d’y loger son frère.

[4]         La rétractation d’une décision est prévue à l’article 89 de la Loi sur la Régie du logement. Ces dispositions permettent à une partie qui a été empêchée de se présenter ou de fournir une preuve par surprise, fraude ou autre cause jugée suffisante d’obtenir la rétractation de la décision. Une partie peut aussi demander la rétractation lorsque la Régie a omis de statuer sur une partie de la demande ou s’est prononcée au-delà de la demande.

[5]         La rétractation n’a pas pour but d’ouvrir un nouveau débat ou une nouvelle enquête. Lorsqu’une partie veut présenter une preuve additionnelle ou modifier la décision, le recours en rétraction n’est pas approprié. C’est alors le recours en révision ou en appel qui s’impose lorsque prévu par la loi.

[6]         À ce sujet, les auteurs Rousseau-Houle et De Billy écrivent :

« L’article 89 ne peut être utilisé à titre d’appel déguisé. Si une partie n’est pas satisfaite de la décision rendue, elle ne peut en demander la rétractation afin de présenter une meilleure preuve. »[1]

[7]         Dans le cas présent, il s’agit d’un appel déguisé. Le locateur qui est en voyage au moment de l’audience, décide de mandater un ami pour le représenter. Il ressort clairement de la lecture de la décision que le mandataire du locateur a eu l’opportunité de faire valoir ses droits durant un débat contradictoire. Il a présenté les faits. Le régisseur a apprécié la preuve et décidé de rejeter la demande. Il écrit :

« [2] Le ou vers le 16 décembre 2009, le locateur a expédié un avis de reprise de possession pour son usage personnel. Le 11 février 2010, le locateur a ouvert un dossier à la Régie du logement. Dans sa demande, il indique que la reprise est exercée pour son frère Agostino Penta. À l’audience, le mandataire du locateur soumet que l’intention du locateur a toujours été d’y loger son frère. Il n’a jamais eu l’intention de s’y loger personnellement. »

[8]         Et, il conclut ainsi :

« [6] La preuve soumise révèle donc clairement que la demande de reprise de logement n’est pas faite pour la fin mentionnée dans l’avis et le tribunal doit la rejeter.

[7] Le locateur devait indiquer expressément dans son avis le nom du bénéficiaire de la reprise.(1) »

[9]         Le locateur est insatisfait de la décision. Il l’avoue. Il veut modifier les conclusions du tribunal. Il n’a pas été empêché d’assister à l’audience, d’y participer ni d’y soumettre sa preuve, laquelle n’a pas été retenue par le tribunal. Il a choisi de se faire représenter par un mandataire au lieu de demander une remise de l’audience. Il a donné à un ami le pouvoir d’agir et de plaider en son nom en lui confiant le mandat de le représenter à l’audience. C’est de la nature même du mandat tel que défini par l’article 2130 du Code civil du Québec :

« Art. 2130.  Le mandat est le contrat par lequel une personne, le mandant, donne le pouvoir de la représenter dans l'accomplissement d'un acte juridique avec un tiers, à une autre personne, le mandataire qui, par le fait de son acceptation, s'oblige à l'exercer. »

[10]     Le locateur a participé à l’audience par le biais de son mandataire. Il ne peut utiliser le recours en rétractation pour faire apprécier de nouveau la preuve en espérant qu’un nouveau régisseur arrivera éventuellement à une conclusion différente.

[11]     La rétractation est une procédure qui déroge à la règle de l’irrévocabilité des jugements. Elle doit être appliquée avec rigueur et sérieux. Elle ne peut et ne doit pas servir à une partie qui cherche simplement à suppléer aux lacunes de sa preuve.

[12]     La demande du locateur n’est pas bien fondée en faits et en droit;

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[13]     REJETTE la demande de rétractation.

 

 

 

 

 

Suzie Ducheine

 

Présence(s) :

le locateur

les locataires

Date de l’audience :  

4 mai 2010

 


 



[1] Thérèse Rousseau-Houle et Martine De Billy, Le bail du logement : Analyse de la jurisprudence, Montréal, Les Éditions Wilson et Lafleur, 1989, p. 310.

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