Décision

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Senecal Perier c. Michaud

2023 QCTAL 3388

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT

Bureau dE Salaberry-de-Valleyfield

 

No dossier :

652743 27 20220908 T

No demande :

3725320

 

 

Date :

06 février 2023

Devant le juge administratif :

Michel Huot

 

Carolane Senecal Perier

 

Locataire - Partie demanderesse

c.

Éric Michaud

 

Locateur - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]         La locataire dépose une demande le 23 novembre 2022. Elle requiert la rétractation de la décision du 26 octobre 2022 de la juge administrative Danielle Deland.

[2]         Elle a pris connaissance de cette décision le 18 novembre 2022 et elle a déposé sa demande le 23 novembre 2022.

CONTEXTE

[3]         Le locateur déposait une demande contre la locataire le 8 septembre 2022. Il demandait la résiliation du bail et l’expulsion de la locataire, le recouvrement du loyer. Il demandait également la résiliation du bail au motif que la locataire payait fréquemment son loyer en retard.

[4]         Le 26 octobre 2022, une décision était rendue par la juge administrative Danielle Deland. Il y a lieu de reprendre les conclusions de la décision[1] :

« POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[22] RÉSILIE le bail et ORDONNE l’expulsion de la locataire et de tous les occupants du logement ;

[23] CONDAMNE la locataire à payer au locateur la somme de 5 400 $, plus les intérêts au taux légal et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q., à compter du 8 septembre 2022 sur la somme de 4 200 $, et sur le solde à compter de l’échéance de chaque loyer, plus les frais de justice de 80 $ ;

[24] En cas de paiement avant jugement, ORDONNE à la locataire de payer le loyer le premier jour de chaque terme. Cette ordonnance entrera en vigueur le 1er décembre 2022 et demeurera en vigueur jusqu’au terme du bail et d’une prochaine éventuelle reconduction. »


ANALYSE ET DÉCISION

[5]         La présente demande se fonde sur l’article 89 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement[2] (ci-après nommée « L.T.A.L. ») qui se lit comme suit :

« 89. Si une décision a été rendue contre une partie qui a été empêchée de se présenter ou de fournir une preuve, par surprise, fraude ou autre cause jugée suffisante, cette partie peut en demander la rétractation.

Une partie peut également demander la rétractation d’une décision lorsque le Tribunal a omis de statuer sur une partie de la demande ou s’est prononcé au-delà de la demande.

La demande de rétractation doit être faite par écrit dans les dix jours de la connaissance de la décision ou, selon le cas, du moment où cesse l’empêchement.

La demande de rétractation suspend l’exécution de la décision et interrompt le délai d’appel ou de révision jusqu’à ce que les parties aient été avisées de la décision.

Une partie qui fait défaut d’aviser de son changement d’adresse conformément à l’article 60.1 ne peut demander la rétractation d’une décision rendue contre elle en invoquant le fait qu’elle n’a pas reçu l’avis de convocation si cet avis a été transmis à son ancienne adresse. »

[6]         À maintes reprises, les tribunaux ont déterminé que la rétractation est un moyen procédural exceptionnel, car le principe de l’irrévocabilité des jugements est important. Ce principe a été réitéré par la Cour d’appel du Québec :

« Le principe de l’irrévocabilité des jugements est nécessaire à une saine administration de la justice, d’où le sérieux que doivent avoir les motifs de rétractation. La procédure doit contribuer à la protection des droits des deux parties et la remise en question des décisions doit demeurer l’exception et ne pas devenir la règle. »[3]

[7]         Pour qu’une demande de rétractation soit accordée, la partie qui demande la rétractation doit remplir trois conditions cumulatives. Premièrement, elle doit déposer sa demande de rétractation dans un délai de dix jours de la connaissance de la décision. Deuxièmement, elle doit alléguer les motifs justifiant son absence à la première audience. Troisièmement, elle doit alléguer les motifs de défense sur la demande originaire qu’elle entend faire valoir, et ce, en vertu de l’article 44 du Règlement sur la procédure devant le Tribunal administratif du logement[4] (ci-après nommé « R.P.T.A.L. ») qui se lit comme suit :

« 44. La demande de rétractation d’une décision doit contenir non seulement les motifs qui la justifient, mais, si elle est produite par le défendeur à la demande originaire, elle doit également contenir les moyens sommaires de défense à la demande originaire. »

[8]         Dans le présent cas, la locataire confond les motifs de rétractation avec les motifs d’appel de la décision. À cet effet, le Tribunal fait siens les propos de la juge administrative Francine Jodoin dans la cause O’Callagan c. Fattal[5] :

« Tel qu’expliqué lors de l’audience, la demande en rétractation ne doit pas constituer un appel déguisé de la décision rendue. Le tribunal n’a pas à juger de la justesse de celle-ci ni s’interroger sur les erreurs de faits ou de droit commises puisqu’il ne s’agit pas d’un appel de la décision rendue. Il s’agit plutôt de s’interroger sur l’application de l’article 89 précité et chercher à déterminer si la partie qui en fait la demande a pu démontrer un des motifs prévus à cette disposition. (...)

Il apparaît clair au tribunal que le locataire remet maintenant en cause la preuve soumise à l’audience en raison des conclusions de la décision. Il a donc plutôt été pris par surprise par la décision et il appert qu’ayant connu d’avance ses conclusions, il se serait préparé différemment. Il demande d’ailleurs la possibilité d’avoir une nouvelle audience pour lui permettre d’apporter des preuves additionnelles. »

[9]         En conséquence, le Tribunal considère que la locataire n’a pas entrepris le bon recours puisqu’elle conteste le fait que la demande ait procédé en sa présence, mais sans que la preuve de notification de la demande initiale du locateur ait été produite. Le Tribunal retient que la locataire a accepté de procéder malgré cela.


[10]     De plus, la locataire n’a aucun moyen défense à faire valoir en vertu de l’article R.P.T.A.L. Le Tribunal retient qu’elle doit un solde du loyer de juin 2022 ainsi que les loyers des mois de juillet 2022 à février 2023.

[11]     Il y a lieu de rejeter sa demande.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[12]     REJETTE la demande de rétractation de la locataire;

[13]     MAINTIENT la décision rendue le 26 octobre 2022.

 

 

 

 

 

 

 

 

Michel Huot

 

Présence(s) :

la locataire

le locateur

Date de l’audience : 

2 février 2023

 

 

 


 


[1]  Michaud c. Senécal Perier, 2022 QCTAL 31908.

[2]  RLRQ, chapitre T-15.01.

[3]   Entreprises Roger Pilon inc. et al. c. Atlantis Real Estate Co., (1980) C.A. 218.

[4]  RLRQ, chapitre T-15.01, r. 5.

[5]  Adam O’Callagan c. Salim Fattal [2003] J. L. 265.

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