Décision

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Décision

Immeubles Difar ltée c. Lefebvre

2014 QCRDL 41180

 

 

RÉGIE DU LOGEMENT

Bureau dE Longueuil

 

No dossier :

37-120907-026 37 20120907 G

37-130610-010 37 20130610 G

No demande :

19136

19159

 

 

Date :

22 août 2014

Régisseur :

Robin-Martial Guay, juge administratif

 

IMMEUBLES DIFAR LTÉE

 

Locateur - Partie demanderesse

(37-120907-026 37 20120907 G)

Partie défenderesse

(37-130310-010 37 20130610 G)

c.

YVES LEFEBVRE

 

Locataire - Partie défenderesse

(37-120907-026 37 20120907 G)

Partie demanderesse

(37-130310-010 37 20130610 G)

 

D É C I S I O N

 

 

[1]      Par un recours introduit le 7 septembre 2012 devant le Tribunal de la Régie du logement, le locateur demande une indemnité de relocation de 3 410 $ pour le loyer des mois de février à juin 2012.

[2]      Aussi, le locateur demande les dommages-intérêts pour des frais d’énergie de 102,14 $, des frais de publicité de 214,63 $, des frais de dépistage et d’enquête de crédit de 86,23 $ et finalement, pour des dommages causés au logement de 127,30 $.

[3]      C’est dire que la demande du locateur à l’endroit du locataire totalise 3 940,30 $ auxquels s’ajoutent la condamnation au paiement des frais ainsi que les intérêts et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec.

[4]      La demande a été dûment signifiée au locataire.

[5]      Par un recours introduit le 10 juin 2013, le locataire réclame du locateur une diminution de loyer de 200 $ par mois du 1er juillet 2011 à la date de l’abandon du logement, soit janvier 2012 (sept mois), des dommages-intérêts de 575,99 $, la condamnation au paiement des frais, plus les intérêts au taux légal et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q.

[6]      Les dommages de 575,99 $ sont constitués d’un montant de 500 $ pour les troubles et inconvénients alors que l’autre montant de 75,99 $ vise l’achat de médicaments.

[7]      Aussi, le locataire demande au Tribunal de déclarer le bail résilié aux torts du locateur, à compter du 1er février 2012.


[8]      Pour connaître des motifs de la demande du locataire, le Tribunal doit se référer à la mise en demeure que le locataire a fait signifier au locateur le 7 mai 2013.

[9]      La demande a été dument signifiée au locateur.

[10]   Le Tribunal est donc saisi de deux dossiers : le premier a été introduit le 7 septembre 2012 par le locateur alors que l’autre fut introduit le 10 juin 2013 par le locataire.

[11]   Les deux dossiers ont été réunis en vertu de l’article 57 de la Loi sur la Régie du logement de manière à ce que la preuve effectuée dans l'un puisse être versée et servir dans l’autre.

Preuve et analyse - demande du locateur

[12]   La preuve révèle que le locataire a abandonné le logement concerné en emportant ses effets mobiliers en janvier 2012.

[13]   Le locataire fait valoir que le bail doit être résilié aux torts du locateur, puisque ce dernier a fait défaut d’exécuter ses obligations et que les manquements du locateur lui ont causé un préjudice grave et sérieux justifiant la résiliation du bail.

[14]   Cette prétention du locataire n’est pas retenue par le Tribunal et pour cause.

[15]   Bien que le locataire ait témoigné pour dire que, s’il a quitté le logement, cela est en raison du bruit excessif provenant du logement situé au-dessus du sien. La preuve a surtout démontré que la source du bruit provenait uniquement du chat des locataires, dont le bail comme celui des autres locataires de l’immeuble, tolérait la présence d’animaux en vertu de leurs baux.

[16]   En l’espèce, le locataire s’était plaint auprès du locateur en date du 15 août 2011 parce qu’il avait été réveillé à quelques trois occasions tôt le matin ou pendant la nuit entre le 9 et le 14 août 2011 en raison des activités du chat qui aurait fait tomber un objet; réveillant du coup le locataire.

[17]   Il faut dire que sitôt que la plainte du locataire fut reçue par le locateur, celui-ci a pris action en avisant les propriétaires du chat et en organisant une rencontre entre les locataires pour résoudre cette affaire.

[18]   À la suite de cette rencontre, les locataires fautifs ont accepté d’isoler leur chat dans une des pièces de leur logement la nuit avec pour résultat que le locataire ne sera plus dérangé par l’animal pendant son sommeil.

[19]   Le locateur n’a pas manqué de faire remarquer au locataire qu’il faisait jouer de la musique forte pendant son absence du logement et ce, dans l’unique but qu’il accepte enfin sa demande de résilier son bail. Le locateur a souligné qu’il avait reçu plusieurs plaintes d’autres locataires pour ce motif; ce que le locataire viendra confesser en disant que c’est parce que «  j’en avais plein le dos que j’ai agi de la sorte ».

[20]   Et c’est là que le bât blesse, lorsque la preuve révèle que le locataire avait, en vain, demander au locateur en décembre 2011 de bien vouloir résilier son bail.

[21]   Ainsi peut-on lire à sa lettre du 22 décembre 2011 ce qui suit :

« Par la présente, je tiens a vous demander formellement de bien vouloir résilier mon bail.

Je vis une situation très difficile présentement a cause des déplacements fréquents requis par le travail que je dois effectuer en auto entre Boucherville et Saint-Eustache et le bruit incessant en provenance du logement situé au-dessus du mien (bruit qui est fortement amplifé par un plancher de bois flottant comparable a la surface d'une guitare acoustique).

Considérant:

a)     les travaux routiers majeurs qui rendent la circulation très difficile via le pont-tunnel Hyppolyte-Lafontaine,

b)     les conditions hivernales qui vont rendre la conduite automobile encore plus difficile,

c)     le diagnostic par le medecin, le 11 septembre dernier, d'une tendinite plantaire au pied droit qui rend ma conduite automobile encore plus aléatoire,


d)     du manque de repos et de sommeil causé par le bruit du chat du voisin d'en haut, bruit qui survient souvent a la fois très tard en soirée et très tôt le matin,

e)     de votre négligence a faire respecter le règlement de l'immeuble (section E du bail, animaux interdits), tel que démontré dans votre lettre adresée au vosins d'en haut datée du 22 août 2011.

JE CONSIDÈRE QUE VOTRE REFUS PERSISTANT DE RÉSILIER MON BAIL M'EXPOSE A UN PLUS GRAND RISQUE D'AVOIR UN ACCIDENT D'AUTOMOBILE ET DONC CONTRIBUE A METTRE MA VIE EN DANGER

Je tiens aussi a vous rappeler que je demeure a cette adresse depuis le 1er juillet 1999, et que j'ai toujours payé mon loyer régulièrement, et que cette fidélité devrait vous inciter a m'accorder la résiliation de mon bail.

Je profite aussi de cette lettre pour vous signifier que JE NE DÉSIRE PAS RENOUVELER MON BAIL venant a échéance le 30 juin 2012.

Bien à vous ». (sic)

[22]   En fait, le locataire, un docteur en chimie des matériaux venait de décrocher un contrat qu’il ne pouvait pas refuser, dira-t-il, même si cela l’obligeait à se rendre depuis Boucherville en la ville de St-Eustache au moins trois fois par semaine.

[23]   Épuisé par cette route et la congestion qui affectait sa qualité de vie mais aussi prétend-t-il sa santé, la seule solution qui semblait alors s’offrir au locataire résidait dans la résiliation de son bail: Ce qui lui permettrait de s’installer dans un logement situé à proximité de son nouveau lieu de travail.

[24]   C’est ainsi que le refus du locateur de résilier le bail marquera le début de ses plaintes à propos du chat des locataires du logement situé au-dessus du sien mais aussi d’un comportement inacceptable qui réussirait peut-être à convaincre son locateur de lui donner congé de son bail à partir de janvier 2012, face à l’impossibilité qu’il a eu de sous-louer ou de céder son bail.

[25]   Et là encore, le locataire estime que, s’il n’a pas réussi à sous-louer ou céder son bail, cela est dû à la présence d’un tapis dans son logement qui commandait d’être remplacé par un plancher flottant et d’une tuile de céramique qui demandait à être remplacé.

[26]   Sur ce point, autant souligner que le locateur a témoigné pour dire qu’il informait toujours les visiteurs du logement concerné, même après le départ du locataire du logement, que le tapis serait enlevé et remplacé et la tuile réparée avant l’entrée du prochain locataire.

[27]   Somme toute, qu’il suffise aussi de relire avec soin la lettre de mise en demeure que le locataire adressait au locateur en date du 7 mai 2013 et dans laquelle il réclame une diminution de loyer pour comprendre les motifs réels de son départ du logement en janvier 2012 lorsqu’il écrit :

« Je vous avais demandé de bien vouloir résilier mon bail, car je souffrais alors d’une fascite plantaire (tendinite) au pied droit  et que je devais utiliser le tunnel Hyppolite-Lafontaine (alors en travaux majeurs) pour me rendre au travail et que mon pied droit me fait souffrir. »

[28]   Compte tenu que le locataire n’a pas démontré, suivant la prépondérance de preuve, que le locateur avait manqué à ses obligations et qu’il avait souffert un préjudice sérieux en raison des manquements du locateur, le Tribunal ne saurait faire droit à la demande de résiliation du locataire.

[29]   La cause de résiliation du bail réside dans l’abandon du logement par le locataire en janvier 2012.

[30]   De fait, le bail a été résilié de plein droit suivant l’application de l’article 1975 du Code civil du Québec à la suite de l’abandon du logement; ce qui autorise le locateur à réclamer du locataire les dommages qu’il a subis à la suite de cette résiliation unilatérale du bail.

[31]   À cet égard, le Tribunal juge que la preuve du locateur démontre le bien-fondé de sa réclamation relativement à l’indemnité de relocation pour les mois de février à juin 2012 qui totalisent 3 410 $, ainsi que pour sa demande en dommages-intérêts pour des frais d’énergie de 102,14 $, des frais de publicité prouvés de 187,35 $, des frais de dépistage et d’enquête de crédit de 86,23 $. Tous ces montants forment la somme de 3 785,72 $ que le Tribunal accorde au locateur.


[32]   Quant aux dommages causés au logement de 127,30 $, celui-ci n’est pas accordé au locateur du fait qu’il faille tenir compte de l’usure normale des lieux.

[33]   Pour ce qui est de la demande de diminution de loyer du locataire, le Tribunal ne retient pas celle-ci puisque la perte alléguée de jouissance s’est révélée mineure, sans grande importance et ne résulte pas de bruit qui fut continuel et excessif.

[34]   Par ailleurs, la demande pour dommages moraux et dommages matériels du locataire, qui totalise 575,99 $ est aussi rejetée puisque la preuve de l’existence d’un lien de causalité entre les problèmes de santé allégués du locataire qui seraient liés à des troubles du sommeil et les activités du chat des locataires du logement situé au-dessus du logement concerné qu’il tient pour responsable, n’a pas été démontrée.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[35]   Dossier du locataire : 37-130610-010G :

[36]   REJETTE la demande;

[37]   Dossier du locateur : 37-120907-026G :

[38]   ACCUEILLE en partie la demande du locateur;

[39]   CONSTATE la résiliation du bail en janvier 2012;

[40]   CONDAMNE le locataire à payer au locateur la somme de 3 785,72 $, avec les intérêts au taux légal et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec, à compter du 7 septembre 2012, plus les frais judiciaires de 68 $ et de signification de 9 $;

[41]   REJETTE la demande quant au surplus.

 

 

 

 

 

 

 

 

Robin-Martial Guay

 

Présence(s) :

la mandataire du locateur

le locataire

Date de l’audience :  

18 août 2014

 


 

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