LSJPA — 1636 |
2016 QCCA 1795 |
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COUR D’APPEL |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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GREFFE DE
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N° : |
500-08-000479-156, 500-08-000481-152, 500-08-000482-150 |
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(525-03-057937-146, 525-03-057948-143) |
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DATE : |
4 novembre 2016 |
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N° 500-08-000479-156 (525-03-057937-146)
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X |
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APPELANT - accusé |
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c. |
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SA MAJESTÉ LA REINE |
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INTIMÉE - poursuivante
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N° 500-08-000481-152 (525-03-057948-143)
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MISE EN GARDE : La Loi sur le système de justice pénale pour adolescent interdit de publier le nom d’un adolescent ou d’un enfant ou tout autre renseignement de nature à révéler soit qu’il a fait l’objet de mesures prises sous le régime de cette loi, soit qu’il a été victime d’une infraction commise par un adolescent ou a témoigné dans le cadre de la poursuite d’une telle infraction, sauf sur ordonnance judiciaire. Quiconque contrevient à ces dispositions est susceptible de poursuite pénale (art. 75, 110 (1), 111 (1) et 138 L.S.J.P.A.)
[1]
L’appelant se pourvoit, dans le dossier portant le numéro 500-08-000479-156,
contre deux déclarations de culpabilité prononcées sur les chefs de vol
qualifié (art.
[2]
Il requiert également dans le dossier 500-08-000482-150, l’autorisation
d’appeler d’une peine l’obligeant d’effectuer 20 heures de travaux
communautaires pour avoir fait défaut de se conformer à une peine spécifique
lui ordonnant de « ne pas communiquer directement ou indirectement, ou de
se trouver en présence de Y et de Z ainsi que toutes les personnes qui, à ma
connaissance, font partie d’un gang de rue, dont les […] » (art.
* * * * *
[3] La juge a conclu que le soir des infractions, l’appelant faisait partie d’un groupe composé de Y, Z (« Z »), A et B (« B ») qui a abordé sur la rue C et D sous prétexte d’acheter de ce dernier de la drogue. D les invite à l’accompagner jusqu’à son domicile où il leur remettra la substance.
[4] Après avoir échangé un regard avec Z, B a déposé sur le sol une console de jeu et a frappé sournoisement C qui déambulait à ses côtés, d’un coup de poing à la tête assommant ce dernier qui s’effondre au sol. B se précipite aussitôt sur sa victime pour lui faire les poches.
[5] Au moment où D esquisse un mouvement pour porter assistance à son ami mal en point, d’autres membres du groupe s’approchent de lui et lui bloquent le passage. Z en profite pour asséner un coup de poing au visage de D qui s’écroule à son tour sur le sol où il demeure pendant quelques minutes inconscient.
* * * * *
[6] La juge constate d’abord que l’appelant est le plus passif du groupe et qu’il n’est pas l’auteur principal du vol qualifié et des voies de fait.
[7]
Elle retient néanmoins sa responsabilité criminelle pour ces deux chefs
d’accusation sur la base du paragraphe
[8]
L’application du paragraphe
1) une entente de poursuivre une fin illicite;
2) la perpétration d’une infraction, par l’une des parties à l‘entente, différente de celle projetée;
3) un lien de connexité entre l’infraction projetée et celle faisant l’objet de l’inculpation;
4) la prévisibilité subjective ou (dans la plupart des cas) objective de la perpétration de l’infraction faisant l’objet de l’inculpation[1];
[9] La preuve de l’adhésion de l’appelant au projet de poursuivre une fin illégale pouvait certes être déduite de son comportement lors de la réalisation d’une telle entente, mais encore faut-il, de façon minimale, que la preuve autorise cette inférence et permette d’identifier le dessein illégal envisagé par les parties à l’entente.
[10] Or, en l’espèce, la preuve n’est aucunement concluante à cet égard et les motifs du jugement entrepris démontrent essentiellement que la juge conclut erronément à sa participation à l’entente en raison de sa présence dans le groupe et de son indifférence devant les événements qui se déroulent sous ses yeux :
[111] En fait, sa présence, le gabarit de l’accusé et de ses compagnons, le fait qu’il n’ait pas tenté de dissuader ses amis, l’effet du nombre, sa connaissance du passé violent de certains d’entre eux, la violence et la gratuité des gestes alors que rien ne laissait présager une telle violence sont autant d’éléments que la Cour doit prendre en considération.
[...]
[113] Au départ, M. E se tenait derrière le groupe. Il avait largement le temps de quitter les lieux de l’infraction. Or, il n’en n’est rien, il est resté malgré tout. On ne peut parler d’insouciance devant la violence qui régnait alors.
[11] Une démonstration probante de l’adhésion d’un participant au projet commun de poursuivre une fin illégale et de s’y entraider nécessite davantage.
[12] Ajoutons que la thèse de l’intimée relative à la fin illicite poursuivie par les parties à l’entente est évolutive. Au procès elle soutient que tous les membres du groupe projetaient de voler et d’agresser les victimes tandis qu’à l’audition du pourvoi, elle invoque d’abord un vol de drogue puis un achat de drogue.
[13]
Notons tout d’abord que la première hypothèse contrecarre l’application
du paragraphe
[14] La preuve ne permet en effet de tenir pour avérée que la dernière de ces trois hypothèses en ce qui concerne l’appelant, ce que concède d’ailleurs l’intimée à l’audience
[15] Or, dans le cas d’un achat et de la possession subséquente d’une drogue, il ne coule pas de source que la commission concomitante d’un vol qualifié ou de voies de fait causant des lésions corporelles soit une conséquence probable de l’infraction consistant à posséder une substance interdite.
[16] Au surplus, la responsabilité criminelle de l’appelant ne pouvait être retenue que s’il savait (dans le cas du vol)[2] ou devait savoir (dans les cas des voies de fait) que la commission de ces infractions serait la conséquence probable de la réalisation de la fin illicite.L’inférence tirée par la juge selon laquelle l’appelant savait ou devait savoir que les infractions secondaires seraient perpétrées est incompatible avec son autre conclusion selon laquelle « rien ne laissait présager une telle violence , faute de toute preuve établissant l’adhésion de l’appelant aux projets criminels initiaux.»
[17] Les erreurs commises ont, en l’espèce, eu un effet déterminant sur les verdicts de culpabilité et l’intimée ne démontre pas que la disposition réparatrice du sous- paragraphe 686 (B) iii) C.cr. trouve ici application.
[18] Il y a en conséquence lieu pour la Cour d’intervenir pour substituer des verdicts d’acquittement aux verdicts de culpabilité prononcés dans le dossier numéro 500-08-000479-156.
* * *
[19] En raison de ce qui précède, devient inopportune et doit également être infirmée la conclusion selon laquelle, en commettant le vol qualifié et les voies de fait causant des lésions corporelles, l’appelant aurait contrevenu à une peine spécifique en faisant défaut de respecter l’ordre public et de bien se conduire.
[20] En conséquence, l’appelant doit également être acquitté de l’accusation portée dans le dossier portant le numéro 500-08-000481-152.
* * *
[21]
Finalement, en ce qui concerne la peine imposée dans le dossier numéro
500-08-000482-150, la juge, qui avait déjà considéré la détention provisoire
aux fins de l’imposition de la peine sur les chefs de vol qualifié et de voies
de fait causant des lésions corporelles, a ordonné à l’appelant d’effectuer 20
heures de travaux communautaires sur chacun des deux chefs relatifs aux
contraventions à l’article
[22] En raison des verdicts d’acquittement dans les dossiers numéros 500-08-000479-156 et 500-08-000481-142, il y a maintenant lieu de prendre en compte cette période passée sous garde dans l’attente du procès (du 6 juillet 2014 au 11 mars 2015) pour déterminer la peine juste et appropriée sur le chef d’accusation qui subsiste, de ne pas s’être conformé à une peine spécifique infligée antérieurement.
[23] Compte tenu de cette période de garde fermée importante, il y a lieu d’infirmer la peine prononcée pour lui substituer une probation avec suivi d’une durée de six (6) mois, assortie des conditions :
· Ne pas troubler l’ordre public et bien se conduire;
· D’informer sa mère de ses allées et venues;
· De se présenter à son délégué à la jeunesse aux dates et aux heures où il sera convoqué;
· Ne pas communiquer directement ou indirectement (notamment par le biais des réseaux sociaux) ou de se trouver en présence de Y, Z, B et A;
POUR CES MOTIFS, LA COUR :
[24] ACCUEILLE les appels dans les dossiers portant les numéros 500-08-000479-156 et 500-08-000481-152;
[25] INFIRME les déclarations de culpabilité prononcées sur les chefs de vol qualifié, voies de fait causant des lésions corporelles ainsi que pour le défaut de se conformer à une peine spécifique et leur substitue des verdicts d’acquittement;
[26] ACCUEILLE la demande de permission d’appeler de la peine dans le dossier portant le numéro 500-08-000482-150;
[27] ACCUEILLE le pourvoi et INFIRME la peine infligée et la remplace par une période probatoire de six (6) mois avec suivi, assortie des conditions suivantes :
· Ne pas troubler l’ordre public et bien se conduire;
· D’informer sa mère de ses allées et venues;
· De se présenter à son délégué à la jeunesse aux dates et aux heures où il sera convoqué;
· Ne pas communiquer directement ou indirectement (notamment par le biais des réseaux sociaux) ou de se trouver en présence de Y, Z, B et A;
AVIS :
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