Capital Augusta inc. c. Yneang | 2022 QCTAL 20219 |
TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT | ||||
Bureau de Montréal | ||||
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No dossier: | 613830 31 20220217 F | No demande: | 3467345 | |
RN :
| 3489122
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Date : | 20 juillet 2022 | |||
Devant le greffier spécial : | Me Gabriel Miron | |||
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Capital Augusta Inc. | ||||
Locateur - Partie demanderesse | ||||
c. | ||||
Michel YNeang | ||||
Locataire - Partie défenderesse | ||||
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DÉCISION
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[1] Le locateur a produit une demande de fixation de loyer conformément aux dispositions de l’article 1947 du Code civil du Québec et de remboursement des frais.
[2] Les parties sont liées par un bail du 1er juillet 2021 au 30 juin 2022, à un loyer mensuel de 685,00 $.
[3] Tel que le prévoit la loi, le Tribunal a entendu plusieurs dossiers simultanément, puisque la preuve était la même, car les locataires concernés demeurent dans le même ensemble immobilier. Mais une décision sera rendue pour chacun des dossiers individuellement.
[4] Le locateur est représenté lors de l’audience et fait entendre un témoin pour expliquer les documents déposés.
[5] Quant aux locataires, la majorité sont présents à l’audience et font valoir leur point de vue sur le dossier.
[6] Le Tribunal comprend des commentaires et explications de ceux-ci, qu’ils se montrent insatisfaits de certains aspects de leur logement, et de la façon dont les gestionnaires administrent l’immeuble.
[7] Le Tribunal a bien entendu leurs demandes, mais a pu préciser aux locataires que la demande de fixation de loyer dont il est saisi n’est pas le bon forum pour faire valoir leurs plaintes et insatisfactions au sujet de ces éléments.
[8] Un des locataires a également fait état de l’absence de système de chauffage fonctionnel dans son logement. Le locateur lui a d’ailleurs installé un système temporaire de chauffage durant une portion de l’hiver (chaufferette portative).
[9] Il est inconcevable que le locateur puisse laisser plusieurs semaines ce chauffage d’appoint dans le logement.
[10] Le locateur doit rapidement y voir avant le début de l’automne prochain, et le Tribunal encourage le locataire impliqué à exiger des correctifs de la part du locateur, sans quoi il paraîtra approprié d’en saisir le Tribunal.
[11] Le Tribunal encourage les parties à communiquer entre elles leurs diverses demandes afin de trouver des solutions de cette façon, avant de saisir le Tribunal. Advenant divergence entre elles malgré les échanges et communications, d’autres recours existent.
Avis de modification transmis du locateur
[12] Le Tribunal ne peut passer sous silence certains éléments relevés dans les avis d’augmentation de loyer reçus des locataires, avant l’ouverture des dossiers devant le TAL.
[13] Bien que les mandataires du locateur aient précisé en audience que leur demande de fixation de loyer ne comprenait pas de demande de modification du bail pour y ajouter les clauses annoncées dans l’avis d’augmentation, le Tribunal trouve cette façon de faire douteuse et discutable.
[14] Ces avis, que le Tribunal a pu consulter, induisent en erreur quiconque n’est pas valablement informé de ses droits.
[15] Le Tribunal soulève que les informations transmises aux locataires dans l’avis d’augmentation de loyer, et qui peuvent modifier les clauses du bail convenu entre le locateur et les locataires, ne sauraient être applicables que si elles ont été faites conformément aux dispositions prévues au Code civil du Québec, ce qui n’est évidemment pas le cas ici. Le locateur affirme en audience que ces changements ne sont pas demandés dans les présentes demandes. Il n’en demeure pas moins qu’elles ne font que créer de la confusion et de la frustration chez les locataires ayant lu ces documents.
[16] Le Tribunal rappelle que lorsqu’un avis de modification de bail est acheminé à un locataire, et que celui-ci refuse les modifications annoncées, le locateur devra d’abord obtenir du Tribunal l’autorisation pour en modifier le bail.
[17] Il est choquant de lire que des directives, annoncées comme de simples rappels dans cet avis, sont en réalité non applicables puisqu’elles n’ont pas été acceptées par le locataire ou le Tribunal, au préalable.
[18] Lorsque le Tribunal constate que des directives prévoient que l’installation d’un climatiseur occasionnera des frais de 125 $ en sus du loyer prévu, il ne peut conclure qu’à une forme d’augmentation de loyer déguisé en cours de bail, ce que ne permet pas le Code civil du Québec.
[19] Le locateur aurait également intérêt à s’assurer lui-même que les installations visant la protection contre les incendies (détecteur de fumée) sont fonctionnelles. En effectuant ses propres vérifications dans un immeuble comptant plus de 80 logements il contribue à ne pas laisser au hasard le soin de décider de la survenance ou non d’un sinistre. Les locataires n’ont pas à supporter ce risque.
[20] De plus, les erreurs d’orthographe constatées par le Tribunal dans le libellé concernant les détecteurs de fumée ne font qu’ajouter à la confusion quant à cette obligation[1], qui rappelons-le n’en est pas une.
[21] L’obligation d’exiger du locataire une preuve d’assurance, sans que celui-ci ne soit d’accord, est également une forme d’augmentation du loyer déguisée en cours de bail. Le TAL s’est d’ailleurs prononcé sur ce point à plusieurs reprises par le passé dans la jurisprudence.
[22] Le Tribunal encourage les locataires à détenir une assurance-habitation advenant la survenance d’un sinistre, mais le locateur ne peut l’exiger en cours de bail, sans avoir obtenu leur accord au préalable.
[23] Sur ces éléments, le Tribunal encourage les mandataires du locateur à revoir la forme que prendront dans l’avenir ces documents.
[24] Puisqu’un des locataires présents en audience demandait expressément au Tribunal de rejeter les demandes de fixation sur la base de ces motifs, le Tribunal répondra d’abord à la question.
[25] Bien que ces avis portent grandement à confusion, les éléments soulevés ne peuvent permettre au Tribunal de rejeter les demandes soumises. Les exigences de l’article 1943 du Code civil du Québec sont rencontrées, quant à la forme minimale que doit revêtir l’avis d’augmentation de loyer :
« 1943. L’avis de modification qui vise à augmenter le loyer doit indiquer en dollars le nouveau loyer proposé, ou l’augmentation en dollars ou en pourcentage du loyer en cours. Cette augmentation peut être exprimée en pourcentage du loyer qui sera déterminé par le tribunal, si ce loyer fait déjà l’objet d’une demande de fixation ou de révision.
L’avis doit, de plus, indiquer la durée proposée du bail, si le locateur propose de la modifier, et le délai accordé au locataire pour refuser la modification proposée. »
[26] Les avis produits répondaient à ces exigences légales. Le moyen préliminaire soulevé pour rejeter les demandes du locateur sur cet élément est donc rejeté.
Fixation du loyer
[27] Le locateur a produit le formulaire de renseignements nécessaires à la fixation du loyer, ainsi que les pièces justificatives et les factures au soutien de ces renseignements.
[28] Tel que le constate le Tribunal lors de l’audience tenue, ainsi qu’après évaluation des pièces au soutien de la demande, les assurances de l’immeuble ont augmenté de façon significative, ce qui explique la majeure partie de la présente augmentation.
[29] Cette augmentation est toutefois autorisée et sera comptabilisée dans le calcul.
[30] Après calcul, l’ajustement du loyer permis en vertu du Règlement sur les critères de fixation de loyer[2] est de 18,06 $ par mois, s’établissant comme suit :
Taxes municipales et scolaires | 1,86 $ |
Assurances | 5,66 $ |
Gaz | 1,74 $ |
Électricité | 0,26 $ |
Mazout | 0,00 $ |
Frais d’entretien | 1,97 $ |
Frais de services | 0,00 $ |
Frais de gestion | 0,92 $ |
Réparations majeures, améliorations majeures, mise en place d’un nouveau service |
0,00 $ |
Ajustement du revenu net | 5,65 $ |
TOTAL |
18,06 $ |
[31] CONSIDÉRANT l'ensemble de la preuve faite à l'audience;
[32] CONSIDÉRANT qu’un ajustement mensuel de 18,06 $ est justifié;
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[33] FIXE le loyer, après arrondissement au dollar le plus près, à 703,00 $ par mois du 1er juillet 2022 au 30 juin 2023.
[34] Les autres conditions du bail demeurent inchangées.
[35] Le locateur assume les frais de la demande.
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Me Gabriel Miron, greffier spécial | ||
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Présence(s) : | le mandataire du locateur le locataire | ||
Date de l’audience : | 12 avril 2022 | ||
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[1] Le texte de l’avis semble confondre les termes locateur et locataire.
[2] RLRQ, c. T-15.01, r. 2.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.