9332-5579 Québec inc. c. Levy |
2020 QCRDL 16741 |
RÉGIE DU LOGEMENT |
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Bureau dE Montréal |
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No dossier : |
507714 31 20200213 G |
No demande : |
2957481 |
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Date : |
19 août 2020 |
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Régisseure : |
Francine Jodoin, juge administrative |
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9332-5579 Québec Inc. |
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Locateur - Partie demanderesse |
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c. |
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Shawn Levy |
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Locataire - Partie défenderesse |
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D É C I S I O N
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[1] La partie demanderesse demande la résiliation du bail au motif de non-paiement de loyer et retards fréquents dans le paiement du loyer.
[2] Elle demande également le recouvrement d’une somme de 11 960 $ ainsi que les loyers dus au moment de l’audience.
[3] La preuve révèle toutefois qu’il n’existe pas de lien de droit contractuel entre la partie demanderesse et le locataire. En effet, le bail a été conclu avec monsieur John Dimitrakopoulos, lequel est administrateur de la compagnie et sa conjointe personnellement.
[4] Dans les circonstances, et tel qu’expliqué lors de l’audience, la demande telle que produite est irrecevable.
[5] Celui qui forme une demande en justice doit être en mesure de démontrer un intérêt juridique suffisant.
[6] L'article
[Notre soulignement]
[7] L’irrecevabilité provient ici du fait que le bail suivant lequel la présente procédure est introduite désigne une autre partie comme locateur du logement. Il en découle que la partie demanderesse ne peut établir avoir un intérêt juridique à faire valoir en vertu d’un bail avec le locataire[1].
[8] Cette erreur peut-elle être corrigée?
[9] Dans la décision Ville de Longueuil c. 9198-2405 Québec inc.[2], la Cour du Québec fait une analyse étoffée de cette question et fait la distinction suivante :
« [306] En résumé, il appert de ce qui précède que les tribunaux permettent de corriger l’erreur commise de bonne foi dans les cas où il est possible, dans l’ensemble des procédures, de se rendre compte que la véritable partie demanderesse y a depuis le début, de fait, été partie. L’autre partie ne doit pas en subir préjudice.
[307] La Cour suprême dans Ladouceur c. Howarth énonce la question qu’implique cette distinction entre la substitution de parties et la mauvaise désignation :
La personne dirait-elle, si elle était défenderesse, « ce doit être à moi qu’on s’adresse, mais on m’a faussement nommée », ou ferait-elle des recherches ailleurs que dans le document lui-même pour savoir ce qu’il en est ? La personne dirait-elle, si elle était défenderesse, « ce demandeur dans le bref est nommé ainsi par erreur - je ne traite pas avec lui ? » (95)
[308] Les réponses à ces interrogations permettront de définir s’il s’agit de remédier à une mauvaise désignation de partie ou bien si le tribunal fait face à une substitution de parties, cette dernière option étant prohibée. »
[Références omises] [Notre soulignement]
[10] On conviendra que la partie demanderesse détient une personnalité juridique distincte de celles de monsieur Dimitrakopoulos et sa conjointe[3].
[11] On conviendra aussi qu’un amendement peut difficilement être effectué pour substituer le nom de la partie demanderesse. S’il était possible de corriger une telle erreur à chaque fois que le bon demandeur était identifié, le Tribunal voit mal à quoi servirait l’irrecevabilité liée à l’absence d’intérêt juridique.
[12] Il ne s’agit pas d’un cas où une partie est mal désignée à la procédure, ce qui peut justifier un amendement pour clarifier la situation[4].
[13] Suivant le principe bien connu en droit, « Nul ne peut plaider sous le nom d'autrui ».
[14] Dans l'affaire Industries James MacLaren Inc. c. Les Entreprises André inc.et Ronald Guérin[5], le mandataire d'un propriétaire avait entrepris, en son nom, une demande en dommages à la suite de l'inexécution fautive d'obligations contractuelles. L'honorable juge Frenette de la Cour supérieure fait une analyse des dispositions 55 et 59 du Code de procédure civile du Québec[6] pour conclure qu'il s'agit, suivant la jurisprudence établie, plus que de simples règles de procédures, mais plutôt de règles ayant un caractère substantif et d'ordre public. Il ajoute ce qui suit à la page 3 de 8 de cette décision :
« Il fut décidé clairement que des mandataires ne pouvaient pas ester en justice, pour réclamer une compensation due à leurs mandants. »
[15] Dans la décision Couillard c. Ekaireb[7], l'honorable juge Grammond de la Cour du Québec conclut, appuyé en cela par une décision précédente, Bolduc c. Théodore[8], que le mandataire du propriétaire n'a pas l'intérêt requis pour ester en justice au nom de son mandant.
[16] Dans les circonstances, le Tribunal doit conclure qu'il n'existe aucun lien de droit contractuel entre le demandeur et les locataires et que, partant, la demande est irrecevable. Il s’agit d’une irrecevabilité qui ne peut être couverte par la ratification ou un amendement.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[17] DÉCLARE IRRECEVABLE la demande introduite par 9332-5579 Québec inc.
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Francine Jodoin |
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Présence(s) : |
le mandataire du locateur le locataire |
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Date de l’audience : |
10 août 2020 |
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[1] Malouf
c. Roominex Corporation,
[2]
[3] Article
[4] 158924
Canada Inc. c. Vetoquinol n.a. Inc.,
[5] Cour supérieure, 27 mai 1999, REJB 99-13365.
[6] Remplacés depuis par l’article 85 du Nouveau Code de procédure civile et essentiellement au même effet.
[7] Jurisprudence-Express, 98-1448, (Cour du Québec).
[8] (1985) C.P. 297
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