Décision

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Charron c. Cloutier

2023 QCCQ 3119

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

MONTRÉAL

« Chambre civile »

 :

500-32-713034-207

 

DATE :

Le 9 mai 2023

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

YVES HAMEL, J.C.Q.

______________________________________________________________________

 

 

Michelle Charron,

Partie demanderesse

c.

Guy Cloutier,

Partie défenderesse

 

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

______________________________________________________________________

 

[1]                La demanderesse réclame au défendeur 15 000 $ afin d’être dédommagée pour les traumatismes liés à la violence sexuelle au sens de 2926.1 du Code civil du Québec (C.c.Q.) qu’elle allègue avoir subi par ce dernier le ou vers le 25 février 1977.

[2]                Lorsqu’elle intente sa Demande, elle réclame, entre autres, pour sa perte de salaire, son traumatisme psychologique et sa carrière terminée.

[3]                Lors du procès, la demanderesse précise qu’elle réclame 15 000 $ pour ses dommages moraux liés au traumatisme psychologique qu’elle a subi et les séquelles de celui-ci jusqu’à ce jour.

[4]                La demanderesse intente le présent recours le 22 septembre 2020.

[5]                Le défendeur dépose au dossier de la Cour le ou vers le 14 octobre 2020 une Contestation dans laquelle il allègue :

« […]

La partie défenderesse conteste la réclamation pour les motifs suivants :

  1. La partie défenderesse conteste les faits : (1) Les gestes de nature sexuelle allégués par la demanderesse, prétendument survenue en février 1980, n’ont pas été commis. Ce sont de fausses accusations, qui n’ont aucun fondement de quelque nature que ce soit. (2) La demanderesse a déposé une plainte au Service de Police de la Ville de Montréal (le « SPVM ») relativement aux mêmes faits que ceux allégués dans la demande. Or, après une enquête du SPVM, la plainte de la demanderesse a été rejetée et le dossier a été fermé. Dans les faits, le SPVM n’a même pas cru bon de soumettre la plainte au Directeur des poursuites criminelles et pénales au motif que celle-ci était manifestement mal fondée. (3) La demanderesse a fait des menaces à l’égard du défendeur, dans le but de lui soutirer de l’argent si ce dernier ne concluait pas une entente de règlement rapide, sans vague et confidentielle. Le défendeur a déposé une plainte d’extorsion à la SQ à ce sujet et le dossier est actuellement entre les mains des autorités.
  2. La partie défenderesse conteste le montant réclamé pour les raisons suivantes : La réclamation de la somme de 15 000 $ n’est pas justifiée.
  3. La partie défenderesse conteste la demande et désire que celle-ci soit rejetée pour les raisons suivantes : Les éléments indiqués ci-dessus constituent des motifs sérieux nécessitant le rejet immédiat de la demande.

Pour ces raisons, la partie défenderesse demande à la cour de :

Accueillir la contestation de la partie défenderesse.

Condamner la partie demanderesse à payer à la partie défenderesse les frais de justice de la présente contestation

[…] »

(Reproduction intégrale/Soulignements ajoutés)

[6]                Aux termes de sa Contestation, le défendeur se porte demandeur reconventionnel alléguant que la poursuite de la demanderesse est abusive et il demande le remboursement des honoraires extrajudiciaires encourus pour se défendre dans le cadre de la présente réclamation pour un montant de 10 000 $.

[7]                Le défendeur n’est pas présent lors du procès. Il ne présente donc aucune preuve au soutien de sa Demande reconventionnelle ni quant aux dommages réclamés.

[8]                Le ou vers le 7 décembre 2022, une convocation à l’audience est adressée aux parties.

[9]                Le 20 janvier 2023, le défendeur dépose au dossier de la Cour une Déclaration sous serment accompagnée des pièces D-1 à D-8, laquelle Déclaration sous serment mentionne :

« […]

Je, soussigne, Guy Cloutier, domicilie et résident au […], affirme solennellement ce qui suit:

1.                 Je suis le Défendeur dans le présent dossier.

2.                 Je n’ai jamais abusé sexuellement ou violé la Demanderesse.

3.                 Les allégations de la Demande introductive d’instance du 22 septembre 2020 (la « Demande ») sont fausses.

4.                 Mme Charron a par ailleurs déjà déposé en 2018 une plainte au Service de Police de la Ville de Montreal (le « SPVM ») relativement aux mêmes faits que ceux allégués dans la Demande.

5.                 Or, après une enquête du SPVM et une rencontre avec moi, la plainte de la Défenderesse a été rejetée et le dossier a été fermé. Dans les faits, le SPVM n’a pas soumis la plainte de la Défenderesse au Directeur des poursuites criminelles et pénales, tel qu’il appert des courriels de Brigitte Dufresne, Sergent-Détective à au SPVM, Pièce D-1.

6.                 Je n’ai jamais rencontré la Demanderesse et jusqu’à 2018, je ne savais pas qui elle était.

7.                 De plus, une révision des publications de la Demanderesse sur les réseaux sociaux démontre des incongruités importantes quant aux allégations formulées par celle-ci.

8.                 Dans sa Demande, la Demanderesse affirme que les dommages auraient eu lieu « le ou vers le 25 mai 2006 » avant d’affirmer que les faits se seraient produits « le ou vers le 25 février 1977 ».

9.                 Toutefois, plusieurs affirmations et publications de la Demanderesse sur les réseaux sociaux contredisent ces affirmations. Ainsi :

(i)                  La Demanderesse indique dans une publication Facebook du 19 octobre 2017, Pièce D-2, avoir été agressée en 1982.

(ii)                Dans la lettre de mise en demeure du 11 août 2020,
Pièce D-3,l’avocat de la Demanderesse mentionnait cette fois que la Demanderesse aurait été agressée en 1980.

(iii)               La Demanderesse indique dans une publication Facebook du 7 novembre 2021, Pièce D-4 avoir été agressée en 1979;

(iv)              La Demanderesse indique dans une publication Facebook du 18 novembre 2022, Pièce D-5, avoir été agressée en 1981;

10.             De plus, j’ai fait des vérifications par le biais d’une firme externe, notamment auprès des archives nationales du Québec (BANQ), qui confirment (a) qu’aucune soirée à René Simard n’a été mentionnée dans les journaux publiés entre janvier et mars 1980; et (b) que les copies « Télé-Hebdo » de cette époque ne réfèrent aucunement à une telle soirée hommage, si sur les ondes de Télémétropole, ni sur les ondes d’aucune autre chaîne de télévision.

11.             Ensuite, la Demanderesse mentionne dans une publication du 29 avril 2019, Pièce D-6, : « Je suis une victime de Guy Cloutier et comme je n’ai pas assez de preuves je ne peut pas le poursuivre. Donc j’ai décidé décrire un scénario I histoire de ma vie pour me...[sic] [mon emphase]».

12.             Enfin, dans la lettre de mise en demeure (D-3), I’avocat de la Demanderesse mentionnait: « II vous est possible d’éviter ce recours judiciaire, sa médiatisation prévisible et le jugement recherché en convenant d’un règlement hors cours [sic]. Ma cliente est intéressée à un règlement rapide et sans vague si votre volonté est de I’indemniser convenablement. Elle est également disposée à ce que les termes de ce règlement soit [sic] visés par une clause de confidentialité pour vous assurer de sa non-diffusion ».

13.             La Demanderesse a également communiqué plusieurs courriels à mon entourage, et les procureurs initialement consultés, visant à m’encourager à régler ce dossier, sous I’effet d’une menace de médiatisation.

14.             Elle mentionne notamment dans un message Facebook, Pièce D-7, « je veux éviter les eclaboussures //Je ne voudrais pas étaler ca au media // On voudrais régler hors cour et sans scandale ».

15.             Elle mentionne aussi dans un courriel du 4 septembre 2020, Pièce D-8: « je suis prête à tout dévoiler aux medias et croyez moi je n irai pas avec le dos de la cueillere [sic] ».

16.             La Demande est mal fondée et tous les faits qui s’y trouvent sont faux.

[…] »

(Reproduction intégrale/Soulignements ajoutés)

[10]           Dans un envoi adressé au Greffe de la Cour du Québec, Division des petites créances (Greffe) le 20 janvier 2023, Mme Rosalie Rioux-Massé informe le Greffe que la Déclaration sous serment du défendeur qu’elle a assermenté sera transmise à la Cour par huissier ce jour, compte tenu que l’audition de la présente affaire est fixée au 21 février 2023.

[11]           Le ou vers le 7 février 2023, la demanderesse dépose au dossier de la Cour ses pièces au soutien de ses prétentions.

[12]           Ainsi, la demanderesse dépose, entre autres, au dossier de la Cour un article du journal Allo Vedettes qui mentionne :

« […]

MICHELINE CHARRON PRÉPARE SA RENTRÉE À LA TÉLÉVISION

 Parait-il que la télévision est à la recherche constante de nouveaux visages. À maintes reprises, d’ailleurs, on peut entendre le public se plaindre de ce que la boîte magique nous présente trop souvent les mêmes « faces ».

 Or, en voici un nouveau visage, très joli, qui fait lentement son chemin. Un journal à même déjà dit de cette charmante demoiselle qu’elle sera bientôt la nouvelle coqueluche des Québécois.

 Il s’agit de Micheline Charron dont la ressemblance avec Danièle Ouimet est, en personne, déroutante parfois. Cette blonde à la voix chaude et bien posée doit entrer bientôt au Conservatoire LaSalle, en communications, ce qui devrait la diriger, entre autres, vers la télévision.

 Native de Hull, Micheline est à Montréal depuis peu mais déjà elle compte les personnalités qu’elle a rencontrées en prenant, tantôt des cours de théâtre, tantôt des cours de mannequin (à Ottawa cette fois). Actuellement, Micheline suit des cours de chant et de danse avec Danièle Dorice, et doit donner un spectacle à l’Expo-Théâtre, fin juin.

 À la télévision, elle a déjà participé à un commercial avec Johnny Farago et on lui a assuré que ce ne serait pas le dernier enregistrement. En attendant que cela se produise, ce dont elle ne désespère pas, loin de là, Micheline Charron fait un excellent travail comme co-animatrice, avec Jean Beaulne, du Concours Mme Québec ’82.

 Ce qui prépare son chemin pour la télé, ne pensez-vous pas… ? À vous et à elle de le décider… »

(Reproduction intégrale/Soulignent ajouté)

[13]           Lors du procès, le Tribunal autorise la demanderesse à procéder sur sa réclamation en l’absence du défendeur.

[14]           Le 9 mars 2023, la demanderesse demande la réouverture des débats afin que le défendeur puisse rendre témoignage devant le Tribunal, vu son absence lors du procès.

[15]           Le Tribunal refuse cette demande en réouverture des débats le 4 avril 2023.[1]

[16]           Subséquemment au 4 avril 2023, la demanderesse dépose au dossier de la Cour, avec l’autorisation du Tribunal, un échange de messages texte entre cette dernière et une amie intervenu de façon contemporaine à l’institution du présent recours.

[17]           À la suite de cet envoi, le défendeur fait parvenir ses commentaires au Tribunal par écrit le 10 avril 2023.

QUESTIONS EN LITIGE

[18]           Il s’agit pour le Tribunal de déterminer si la demanderesse a été victime d’une violence sexuelle de la part du défendeur le ou vers le 25 février 1977.

[19]           Dans l’affirmative, le Tribunal doit déterminer le montant des dommages auquel la demanderesse a droit, s’il en est.

CONTEXTE

[20]           La demanderesse est aujourd’hui âgée de [...] ans.

[21]           La demanderesse est née au mois de [...] de l’année [...].

[22]           Au moment des faits qu’elle reproche au défendeur, cette dernière est âgée de 19 ans.

[23]           La demanderesse représente au Tribunal qu’elle a toujours rêvé d’être actrice depuis qu’elle est toute jeune.

[24]           Au moment de ses 19 ans, la demanderesse songe à déménager à Montréal pour améliorer ses chances de percer dans le milieu artistique puisqu’elle a un intérêt pour le chant et la danse.

[25]           À cette époque, on lui mentionne que ça prend des contacts pour réussir dans le milieu artistique.

[26]           Un soir que la demanderesse travaille comme serveuse dans un établissement de la région de Gatineau, elle voit entrer des vedettes dont notamment le gérant de René Simard, soit le défendeur en l’instance.

[27]           Lorsqu’elle constate la présence du défendeur dans l’établissement où elle travaille, la demanderesse s’arrange pour le rencontrer immédiatement.

[28]           La demanderesse précise qu’immédiatement elle et le défendeur s’entendent bien et qu’il y a un échange des numéros de téléphone des parties entre ces dernières.

[29]           Elle affirme l’avoir revu à Montréal quelques mois plus tard à la suite d’échanges téléphoniques. À ce moment, la demanderesse précise que le défendeur la courtise et lui promet une grande carrière artistique.

[30]           C’est ainsi que le défendeur organise pour la demanderesse qu’elle fasse un commercial avec Johnny Farago.

[31]           Elle ajoute que le défendeur a même pris soin, entre autres, de faire publier un article dans un journal style Échos Vedettes mentionnant qu’elle serait « la nouvelle coqueluche des québécois ».

[32]           Finalement, lors du tournage de la publicité avec Johnny Farago, c’est René Angélil qui accompagne la demanderesse puisque le défendeur aurait à cette époque des engagements à l’extérieur du Québec pour un autre artiste dont il s’occupe.

[33]           Ainsi, la demanderesse situe la violence sexuelle dont elle se dit victime du défendeur approximativement une semaine avant la publicité télévisée avec Johnny Farago.

[34]           La demanderesse décrit les faits liés à la violence sexuelle subie du défendeur dans un document qu’elle rédige au moment où elle a 60 ans, c’est-à-dire au courant de l’année 2017 en ces termes[2] :

« […] Cest vague février ou MARS 1976 Apres une soiree bien arose Guy m avais reserve une chambre d hotel et devais venir me rencontrer le lendemain vers 9 hrs du matin au restaurant. Cest un peu vague je ne sais pas si ma chum de fille etais venu me rejoindre le matin ou avais coucher dans la chambre mais toujours es til que elle a ouvert la porte il etait tres tot et Guy lui a donne des sous lui a dit de sortir et est venu pres de moi a clommencer a me courtiser a ouvert les couverture, je lui est demande de sortir il n a pas voulu. Il ma dit toutes les filles couchent avec leurs geranbt si ellent veulent réussir. IL a persiste même si je tirais les couverte sur moi. Je me sentais faible du a la veille et il me disais a cest pas bien de trop boire. IL a s est deshabiller a retirer la couverture m a ouvert les bras je disais non Guy j’avais dedain de lui je me sentais honteuse il etais marier a l epoque sa femme étais enceinte et il avait une fille de 2 ans. IL n etais pas appetissant pour une jeune fille de 19 ans qui commencait a peine a decouvrir la sexualite avec les hommes j avais eu ma premiere relation sexuelle a l age de 18 ans. A 19 ans j avais un corps d adolescente je pesais 106 livres et je n’avais pas beaucoup de sein de voir ce corps d homme sur le mien me repugnais. IL m a ouvert les bras les jambres m a penetre et a depose de largent sur la table de chevet en me disant « Laisse moi te payer ca m excite de payer » et il est partit. […] »

(Reproduction intégrale/Soulignements ajoutés)

[35]           Lors du procès, la demanderesse réitère essentiellement la même version des faits concernant la violence sexuelle subie du défendeur alors qu’elle a 19 ans.

[36]           Par ailleurs, il ressort de l’ensemble des communications écrites de la demanderesse portées à la connaissance du Tribunal et de son témoignage que cette dernière met l’emphase sur le fait qu’au moment de la violence sexuelle subie du défendeur, elle est âgée de 19 ans, celle-ci se déroule fin février ou début mars et le défendeur a un enfant de deux ans.

[37]           Cette constance de la demanderesse sur son âge au moment des faits reprochés, la période de l’annéeceux-ci sont survenus et le fait que le défendeur a un enfant de deux ans est déterminante sur la force probante que le Tribunal doit accorder à la preuve présentée en lien avec la violence sexuelle qu’elle allègue avoir subie.

[38]           Dans une publication Facebook du 19 octobre 2017[3], la demanderesse allègue :

« […]

A se salopard de realisateur très connu qui m’a […] en 1982

[…] »

(Reproduction intégrale)

[39]           Le ou vers le 11 août 2020, la demanderesse, par l’intermédiaire de ses avocats, met en demeure le défendeur.

[40]           Dans la mise en demeure[4], les procureurs de la demanderesse précisent, entre autres :

« […]

Je vous rappelle les faits survenus en février 1980, faits qui seront allégués et mis en preuve dans le cadre de ce recours civil.

Vous étiez alors depuis peu le gérant de ma cliente.

Vous avez assuré à cette jeune artiste prometteuse que vous verriez à en faire une chanteuse, « une star », elle qui s’investissait dans sa carrière et suivait des cours de chants et de théâtre.

Vous l’avez invité à une soirée hommage à René Simard donné dans les studios de Télémétropole à Montréal. Comme ma cliente habitait Hull et n’avait que 19 ans, vous lui avez payé une chambre à l’hôtel Place Dupuis situé à proximité de ces studios, l’hôtel où vous aviez également réservé votre chambre.

Tôt le lendemain de cette soirée hommage, vous êtes rentré dans sa chambre. Notre cliente fut réveillée par votre arrivée non sollicitée. Vous lui avez affirmé qu’elle devait coucher avec vous au motif que tous les artistes couchent avec leur gérant. Malgré ses protestations, vous vous êtes déshabillés et l’avez violé. Avant de repartir, vous lui avez remis un billet de 100,00 $ en affirmant aimer « payer pour le sexe ».

[…]

Ma cliente s’est rapidement mise à avoir des crises de paniques. Elle a développé des problèmes de phobie sociale.

Sa vie de jeune adulte est devenue particulièrement difficile : troubles comportementaux, mésestime de soi, sentiment de honte et d’abandon, tentative de suicide, ultimement alcoolisme et toxicomanie.

Ses rapports avec les hommes sont devenus difficiles.

Par son viol, vous avez infligé à Michelle Charron un tord inqualifiable et quasi inestimable.

Michelle Charron n’a jamais pu se remettre des séquelles résultant de votre abus. Par votre comportement criminel et égoïste, vous avez empoisonné sa vie prometteuse pour en faire une vie de détresse, une vie hypothéquée et misérable, un rapport à l’argent malsain et une difficulté à établir des rapports de confiance.

[…]

Il vous est possible d’éviter ce recours judiciaire, sa médiatisation prévisible et le jugement recherché en convenant d’un règlement hors cours.

Ma cliente est intéressée à un règlement rapide et sans vagues si votre volonté est de l’indemniser convenablement.

Elle est également disposée à ce que les termes de ce règlement soit visés par une clause de confidentialité pour vous assurer de sa non-diffusion.

Vous avez dix (10) jours de la réception des présentes pour que votre procureur entame les discussions requises à finaliser ce règlement

Sachez enfin que si vous refusez ou négligez de donner suite à la présente, nos instructions sont d’entreprendre le recours civil annoncé sans autres avis ni délais.

VEUILLEZ AGIR EN CONSÉQUENCE.

[…] »

(Reproduction intégrale/Soulignements ajoutés)

[41]           Dans une publication Facebook du 29 avril 2019[5], la demanderesse mentionne :

« […] Je suis une victime de Guy Cloutier et comme je n’ai pas assez de preuves je ne peut pas le poursuivre. Donc j’ai décidé d’écrire un scénario l histoire de ma vie pour me […] »

(Reproduction intégrale)

[42]           Dans une autre publication Facebook de la demanderesse du 7 novembre 2021[6], cette dernière mentionne :

« […] je mappelle Michelle jai ete viole par Guy Cloutier en 1979 et je porte encore des séquelles. Je veux […] Michelle Charron needs your support for Mer too – gofundme.com

[…] »

(Reproduction intégrale)

[43]           Finalement, à la suite de l’envoi de sa mise en demeure, la demanderesse entre en contact avec une personne proche du défendeur par message texte[7] :

« […]

Je vous aimes beaucoup et même si […]

Mais jai des choses a régler avec Guy

Qui m a abuser alors que vous n aviez que 2 ans

Ca me prends beaucoup de courage

Je ne vous en veux pas

Cest paz votre faute

Mais justice doit etre rendu

Et je veux éviter les eclabboussures

Je ne voudrais pas etaler ca au media

On voudrais regler hors cour et sans scandale

Ca serais dur aussi pour mes enfants

Demandez a Guy de m appeler

XXX XXXXXXX 

Je m appellais micheline charron dans le temps jai changer mon nom pour michelle

Je peux vous donner les coordonnes de mon avocat si vous aimez mieux

[…] »

(Reproduction intégrale/Soulignements ajoutés)

[44]           Le ou vers le 4 septembre 2020, la demanderesse écrit à nouveau à un proche du défendeur en ces termes[8] :

« Mon avocat viens de me faire part de la lettre signifiant que je suis une menteuse alors malheureusement je devrai sortir la nouvelle au grand jour. Je suis prete a tout devoiler aux medias et croyez moi je n irai pas avec le dos de la cuillere. Je suis decide mais mon avocat veux que j attende lundi. Denis Levesques est le premier que je vais appeler. Comme je ne peux communiquer avec Guy Cloutier pour lui faire part de ma decision desole je dois passer par vous.

[…] »

(Reproduction intégrale/Soulignement ajouté)

[45]           Le ou vers le 16 janvier 2023, IVAC Indemnisation des victimes d’actes criminels informe la demanderesse que sa demande de qualification concernant l’infraction criminelle survenue le 15 février 1980 en vertu de la Loi sur l’indemnisation des victimes d’actes criminels « […] est acceptée à titre :

de personne qui a subi une atteinte à son intégrité en raison de l’infraction criminelle commise à son égard.

[…] »[9]

LE DROIT

1.    Le droit civil

[46]           Le moment de la commission de lacte susceptible de constituer une infraction criminelle est non seulement pertinent pour déterminer linfraction criminelle en question, mais il peut également avoir un impact sur l’analyse en droit civil.

[47]           Les faits allégués par la demanderesse sont survenus antérieurement au 1er janvier 1994, soit avant l’adoption du présent Code civil du Québec (C.c.Q.).

[48]           À cette époque, le droit privé au Québec était régi par le Code civil du Bas-Canada (C.c.B.C).

[49]           L’article 1053 C.c.B.C. prévoyait :

« Toute personne capable de discerner le bien du mal, est responsable du dommage causé par sa faute à autrui, soit par son fait, soit par imprudence, négligence ou inhabilité. »

(Soulignements ajoutés)

[50]           L’article 85 de la Loi sur l’application de la réforme du Code civil ainsi que les commentaires du ministre de la Justice illustrent le traitement des faits en matière de responsabilité extracontractuelle lorsqu’ils sont concernés par la transition législative.

[51]           Plus spécifiquement, la conduite reprochée au défendeur est régie par la loi en vigueur au moment où les actions sont commises. Ces textes sont comme suit[10] :

« Art 85. Les conditions de la responsabilité civile sont régies par la loi en vigueur au moment de la faute ou du fait qui a causé le préjudice.

 

Références: C.C.B.C: articles 1053 à 1056, 1065, 1071, 1072

 

C.C.Q. : articles 1457 à 1481

 

Commentaire

Cet article pose, en accord avec le principe de la non-rétroactivité de la loi nouvelle, une règle maintes fois admise quant aux conditions de la responsabilité civile : ces conditions échappent à la loi nouvelle dès lors que le fait préjudiciable lui est antérieur, car c’est ce fait dommageable, cette faute, qui crée la situation juridique de responsabilité. »[11]

[52]           La définition de la faute est ainsi définie dans l’ouvrage La responsabilité civile :

« Celle-ci consiste donc en la violation, par une conduite se situant en dehors de la norme, du devoir de se “bien” comporter à l’égard d’autrui, tel que fixé par le législateur ou évalué par le juge. La notion de faute, constamment façonnée et définie par la loi et la jurisprudence à travers chaque cas d’espèce, est ainsi soumise à une évolution dynamique, fonction des transformations de la société elle-même. »[12]

(Soulignements ajoutés)

[53]           Il résulte de ce qui précède que la détermination de la faute, quelle soit analysée à travers la violation dune loi ou dune norme de raisonnabilité imposée par un tribunal, elle doit être analysée à la lumière des normes établies et imposées au moment où les actes reprochés au défendeur sont censés avoir été commis.

[54]           Quant à l’évaluation du préjudice réclamé par la demanderesse, soit les aspects concernant l’exécution même de l’obligation de réparer qui découle de la responsabilité civile du défendeur, s’il en est, seront assujettis à une loi différente de celle qui était en vigueur au moment de la faute ou du fait préjudiciable[13].

[55]           En l’espèce, le Code civil du Québec actuel pourra donc s’appliquer à l’évaluation pour le préjudice subi par la demanderesse postérieurement au 1er janvier 1994, en vertu du principe de l’effet immédiat, même si la faute ou le fait préjudiciable s’est produit antérieurement au 1er janvier 1994[14].

[56]           En conclusion, la détermination de la responsabilité civile du défendeur se fait en fonction des articles du C.c.B.C. en vigueur au moment où les faits préjudiciables allégués se sont produits, mais au niveau des dommages, le Tribunal considérera pour évaluer ceux-ci, le cas échéant, tant les règles applicables avant 1994 sous le C.c.B.C. qu’après 1994 sous le Code civil du Québec actuel.

2. L’imprescriptibilité des infractions sexuelles (art. 2926.1 C.c.Q.) et l’intention

           du législateur                                                             

[57]           Depuis le 12 juin 2020, l’article 2926.1 C.c.Q. rend les recours fondés sur une violence sexuelle, la violence conjugale ou la violence subie pendant l’enfance, imprescriptible, et ce, avec effet rétroactif[15].

[58]           L’article 2926.1 C.c.Q. précise :

« []

2926.1. L’action en réparation du préjudice corporel résultant d’un acte pouvant constituer une infraction criminelle se prescrit par 10 ans à compter du jour où la personne victime a connaissance que son préjudice est attribuable à cet acte. Cette action est cependant imprescriptible si le préjudice résulte de la violence subie pendant l’enfance, de la violence sexuelle ou de la violence conjugale. [] »

[59]           Ce résultat est l’aboutissement des efforts mis depuis plusieurs années afin de rendre une justice plus accessible pour les victimes de violences sexuelles[16].

[60]           Par ailleurs, dans une décision rendue en Colombie-Britannique en 2008, la Cour suprême du Canada[17] a reconnu l’impact que cette politique a sur la présentation de la preuve, plus précisément, la problématique du témoignage sur des évènements survenus plus de 30 ans auparavant. Le Tribunal note dans cet arrêt que la décision de lever la prescription appartient néanmoins au législateur.

[61]           Au Québec, cette décision du législateur démontre non seulement la reconnaissance du long cheminement[18] que doivent souvent emprunter les victimes de violence sexuelle avant de pouvoir concevoir la possibilité d’entamer un recours civil, mais aussi le désir d’offrir aux victimes l’espace et le temps nécessaire pour cheminer, et d’éliminer les obstacles qui pourrait les priver d’un outil qui pourrait être essentiel pour elles[19].

[62]           À ce sujet, l’auteur Jean-Sébastien D’Amours[20] écrit :

« Les recours en matière d’agression à caractère sexuel, dont la preuve des faits générateurs de droit est déjà complexe, sont désormais allégés. Dans toute action où la prescription est un enjeu, la victime se devait d’administrer une preuve d’impossibilité d’agir plus tôt, ce qui nécessitait temps et ressources. Ceci ne sera plus nécessaire. »

[63]           Finalement sur ce point, le Tribunal conclut que le fait que l’imprescriptibilité s’applique « sans égard à tout délai de prescription applicable avant l’entrée en vigueur de la présente loi »[21] démontre l’intention du législateur de faire « renaitre » un droit autrement prescrit, un engagement plutôt exceptionnel[22].

3.    Le fardeau de la preuve

[64]           Contrairement aux procès criminels qui imposent le fardeau de preuve hors de tout doute raisonnable, dans la présente instance, la norme applicable par le Tribunal est celle de la prépondérance des probabilités communément appelée « selon le critère de la prépondérance de la preuve » :

« La formule retenue (“un acte pouvant constituer une infraction criminelle”) montre clairement que l’application de l’article 2926.1 C.c.Q. n’est pas subordonnée aux règles propres à une poursuite criminelle. Nul besoin de faire la preuve de la commission de l’acte hors de tout doute raisonnable ni même de rapporter la preuve que des poursuites criminelles ont été entreprises à l’encontre du défendeur. La règle nouvelle s’applique dans un contexte de recours civil et il est logique que les exigences de preuve — par la balance des probabilités — soient les mêmes que pour les autres aspects de la poursuite. »[23]

(Soulignements ajoutés)

[65]           Toutefois, en l’espèce, il ne s’agit pas pour le Tribunal de déclarer coupable le défendeur d’avoir enfreint l’article 143 du Code criminel tel qu’il existait en 1977, mais plutôt de déterminer si les faits et gestes reprochés au défendeur en février ou mars 1977 constituent une violence sexuelle au sens de l’article 2926.1 C.c.Q. et une faute délictuelle engageant la responsabilité civile de ce dernier, au sens du C.c.B.C..

[66]           Il s’ensuit que le Tribunal n’a pas à choisir entre la version de la demanderesse et celle du défendeur, mais plutôt la version qui est la plus vraisemblable, voire probable. Une simple possibilité[24] n’est pas suffisant.

[67]           Même dans l’éventualité où la version écrite du défendeur ne serait pas retenue par le Tribunal, la demanderesse doit quand même démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que les faits qu’elle reproche au défendeur sont vraisemblablement survenus et que le préjudice qu’elle a subi est en lien avec ces événements.[25]

[68]           Dans l’arrêt F.H. c. McDougall[26], la Cour suprême du Canada reconnait la difficulté de la tâche du tribunal « lorsque la preuve consiste essentiellement dans les témoignages du demandeur et du défendeur, et que les faits allégués se sont produits longtemps auparavant ». 

[69]           Cependant, la force probante accordée aux témoignages des parties est laissée à l’appréciation du Tribunal[27] :

« Lorsque la norme de preuve applicable est celle de la prépondérance des probabilités, il n’y a pas de règle quant aux circonstances dans lesquelles les contradictions relevées dans le témoignage du demandeur amèneront le juge du procès à conclure que le témoignage n’est pas crédible ou digne de foi. En première instance, le juge ne doit pas considérer le témoignage du demandeur en vase clos. Il doit plutôt examiner l’ensemble de la preuve et déterminer l’incidence des contradictions sur les questions de crédibilité touchant au cœur du litige »[28].

(Soulignements ajoutés)

[70]           En résumé, le Tribunal bénéficie d’une grande discrétion, eu égard à la force probante de l’ensemble de la preuve offerte.

[71]           Le Tribunal doit considérer les contradictions, déterminer si elles sont banales, anodines ou déterminantes, pour pouvoir ultimement déterminer leur impact dans l’évaluation globale de la fiabilité et de la crédibilité de la preuve offerte. « L’analyse de contradictions n’est pas mathématique et le nombre, quoique toujours sujet à préoccupation, n’est pas en soi un motif de rejet du témoignage ».[29].

4. La recevabilité d’une déclaration sous serment du défendeur en
           remplacement de son témoignage au procès
                                 

[72]           La Déclaration sous serment prévue au Code de procédure civile (C.p.c.), ou communément appelé autrefois l’Affidavit, est une déclaration appuyée du serment du défendeur (ou de son affirmation solennelle), reçue et attestée par toute personne autorisée à cette fin par la loi[30].

[73]           Le serment est, pour la personne qui le prête, un engagement solennel de dire la vérité[31]. Elle atteste la véracité des faits qu’elle déclare[32].

[74]           Par ailleurs, les articles 544, 555, 559 et 560 C.p.c., en matière de petites créances, précisent, entre autres :

« […]

292. Une partie peut produire à titre de témoignage, outre une déclaration prévue au livre De la preuve du Code civil, la déclaration écrite de son témoin, y compris un constat d’huissier, pourvu que cette déclaration ne vise à prouver qu’un fait secondaire du litige et qu’elle ait été préalablement notifiée aux autres parties.

[…]

544. La demande indique les faits sur lesquels elle est fondée, la nature de la créance, le montant de celle-ci et des intérêts, ainsi que les conclusions recherchées et elle contient la liste des pièces qui la soutiennent. Elle est appuyée d’une déclaration du demandeur, laquelle est réputée faite sous serment, attestant de la véracité des faits allégués et de l’exigibilité de la créance. La demande indique aussi le nom et le domicile ou la résidence du demandeur et, le cas échéant, de son mandataire, ainsi que le nom et le domicile ou la dernière résidence connue du défendeur. Enfin, elle indique l’intérêt ou non du demandeur à participer à une médiation.

[…]

555. Si une partie produit au greffe au moins 30 jours avant la date fixée pour l’audience la déclaration d’une personne, à titre de témoignage de fait ou pour valoir rapport de l’expert, le greffier la notifie à l’autre partie. Au moins 15 jours avant cette date, cette dernière peut demander au greffier, si elle l’estime nécessaire, la convocation du déclarant.

[…]

559. Au temps fixé pour l’audience, si l’une des parties ou les parties sont absentes, le tribunal, s’il ne reporte pas l’affaire, peut rendre le jugement suivant la preuve offerte.

560. À l’audience, le tribunal explique sommairement aux parties les règles de preuve qu’il est tenu de suivre et la procédure qui lui paraît appropriée. À l’invitation du tribunal, chacune des parties expose ses prétentions et présente ses témoins. Le tribunal procède lui-même aux interrogatoires; il apporte à chacun une aide équitable et impartiale de façon à faire apparaître le droit et à en assurer la sanction. Il peut suppléer d’office le moyen résultant de la prescription en permettant aux parties d’y répondre.

[…] »

(Soulignements ajoutés)

[75]           Ainsi, à la Cour du Québec, Division des petites créances, l’article 555 C.p.c. établit les règles encadrant le recours à la déclaration écrite pour valoir témoignage.

[76]           Le législateur précise que la déclaration pour valoir témoignage peut être utilisée pour les témoins de fait ou pour valoir rapport de l’expert.

[77]           Dans ce contexte, l’article 292 C.p.c. prévoit certaines balises, notamment que la déclaration pour valoir témoignage ne vise à prouver qu’un fait secondaire du litige.[33]

[78]           Le ministre de la Justice commente l’article 292 C.p.c en soulignant que cet article permet d’accepter plus largement, à titre de témoignage, une déclaration écrite et d’éviter le déplacement de ce témoin lorsque sa présence n’est pas indispensable[34] :

« Il faut noter que l’article 292 N.C.P.C. s’applique à tout témoignage portant sur des faits secondaires puisque les faits au cœur du litige devront être prouvés par les témoins à l’audience ou par une déclaration antérieure du témoin qui répond aux exigences de l’article 2870 C.c.Q., comme l’indique l’auteur Chamberland dans son ouvrage sur le nouveau Code de procédure civil »[35].

(Soulignements ajoutés)

[79]           Il ressort de ce qui précède que le principe général veut que les parties rendent témoignage en présence du Tribunal afin que le Tribunal procède lui-même aux interrogatoires de celles-ci et apprécie la crédibilité, la force probante et la fiabilité de l’ensemble de la preuve « de façon à faire apparaître le droit et en assurer la sanction ».

[80]           Ainsi, l’article 555 C.p.c. n’a pas pour objet de permettre, à proprement parler, le dépôt d’une déclaration sous serment pour valoir témoignage d’une des parties en lieu et place du témoignage de vive voix de celle-ci sur les éléments essentiels et centraux de sa réclamation ou sa Contestation.

[81]           Dit autrement, l’article 555 C.p.c. est utilisé essentiellement pour faire la preuve de faits secondaires non déterminants sur l’issue de la réclamation de l’une ou l’autre des parties.

[82]           Conclure autrement empêche le Tribunal de pouvoir exercer judicieusement la discrétion judiciaire dont il dispose pour apprécier la crédibilité, la valeur probante et la fiabilité de la preuve offerte par les parties.

[83]           Ainsi, il suffirait de déposer une déclaration sous serment du défendeur au dossier niant la réclamation en demande pour automatiquement faire rejeter la réclamation de la demanderesse, ce qui n’est certes pas la volonté recherchée par le Législateur aux termes des articles 292 et 555 C.p.c..

[84]           De la même façon, l’article 544 C.p.c. précise que la déclaration de la demanderesse est réputée faite sous serment afin d’attester de la véracité des faits allégués et de l’exigibilité de sa créance, mais il n’en demeure pas moins que le Tribunal doit procéder à vérifier la crédibilité, la valeur probante et la fiabilité de la preuve offerte en demande par le biais, entre autres, du témoignage de la demanderesse au procès.

[85]           Ainsi, advenant que la demanderesse avait fait le choix de ne pas se présenter à la Cour afin de rendre témoignage et de s’en remettre à une déclaration sous serment, le Tribunal, à moins d’un aveu du défendeur, rejetterait une telle réclamation parce que le fardeau de la preuve n’aurait pas été rencontré suivant la prépondérance des probabilités.

[86]           En d’autres mots, la preuve à présenter par le défendeur sur les éléments essentiels de sa Contestation dans un contexte contradictoire a grandement avantage, sauf dans de rares exceptions non applicables dans la présente affaire, d’être étayée et corroborée par le biais du témoignage du défendeur en présence du Tribunal afin que le Tribunal puisse évaluer la force probante de l’ensemble de la preuve de ce dernier.

[87]           Or, en l’instance, le défendeur a fait le choix en toute connaissance de cause de ne pas se présenter à la Cour afin de rendre témoignage lors du procès. Ce faisant, le Tribunal n’est pas en mesure d’apprécier la force probante de la Contestation écrite et la Déclaration sous serment du défendeur.

[88]           En l’espèce, le Tribunal conclut que la Déclaration sous serment du défendeur déposée au dossier de la Cour ne remplace pas le témoignage de celui-ci puisque les faits relatés à celle-ci sont cruciaux, voire centraux à la question en litige que le Tribunal doit trancher. Il ne s’agit pas de faits secondaires. Le Tribunal doit être en mesure d’en apprécier le sérieux, la sincérité, l’exactitude et la véracité de ceux-ci, ce que le Tribunal n'a pu faire.

[89]           Dans ce contexte, le Tribunal accorde peu ou pas de force probante à la preuve écrite du défendeur.

5.    Le quantum des dommages-intérêts

[90]           Le quantum des dommages-intérêts varie de manière significative que ce soit en matière d’agression sexuelle ou voies de fait[36]. 

[91]           À titre d’exemple, une revue jurisprudentielle des réclamations pour la commission d’infractions sexuelles au Québec démontre que les indemnités octroyées par les Tribunaux pour dommages moraux varient entre 1 500 $ et 150 000 $, selon la gravité des agressions, la récurrence de celles-ci, les séquelles subies par les victimes et les circonstances particulières de chaque cas[37].

[92]           Il convient de souligner qu’il n’est pas nécessaire pour que le Tribunal octroie des dommages moraux qu’il y ait un témoignage d’expert pour établir la preuve des séquelles subies dans l’évaluation des dommages moraux réclamés par la demanderesse.

[93]           Il importe pour le Tribunal de fonder son jugement sur la preuve offerte par la demanderesse tout en tenant compte des précédents jurisprudentiels en semblable matière.

[94]           Ainsi, le Tribunal peut conclure à des dommages moraux et les évaluer sans rapport d’expert établissant un préjudice psychologique[38].

[95]           La Cour d’appel[39] nous rappelle que l’exercice du Tribunal consistant à évaluer l’impact psychologique sur la demanderesse et à accorder les dommages-intérêts correspondants est un exercice complexe et délicat[40]. 

[96]           Dans ce contexte, les dommages-intérêts accordés par le passé demeurent un des facteurs pris en compte par le Tribunal pour déterminer les sommes auxquelles la demanderesse a droit, si le Tribunal conclut à une faute délictuelle commise par le défendeur en février ou mars 1977 engageant sa responsabilité civile[41].

[97]           À titre indicatif, une liste détaillée de montants accordés par les tribunaux pour dommages moraux dans le cadre de violence sexuelle avec séquelles psychologiques importantes est jointe en Annexe 1 au jugement.

ANALYSE DE LA PREUVE

[98]           D’entrée de jeu, il y a lieu de souligner que le défendeur a fait le choix en toute connaissance de cause de ne pas se présenter à l’instruction de la présente affaire ayant eu lieu le 21 février 2023 afin de rendre témoignage.

[99]           Il s’en est remis au contenu de sa Déclaration écrite sous serment et des pièces jointes à celle-ci, sans égard au contenu du témoignage que la demanderesse a rendu lors du procès.

[100]      Ce choix affecte irrémédiablement la force probante de la Contestation écrite du défendeur.

[101]      Le Tribunal n’a pas eu l’opportunité de questionner le défendeur sur le contenu de ses affirmations et d’obtenir, le cas échéant, des précisions, des informations additionnelles, ses commentaires, sa réaction aux affirmations de la demanderesse, d’évaluer sa crédibilité et la fiabilité de ces affirmations, voire d’apprécier l’ensemble des circonstances et des prétentions du défendeur en lien avec l’ensemble de la preuve offerte par la demanderesse, ce qui affecte grandement sinon de façon irrémédiable la valeur probante de la Contestation écrite offerte par le défendeur.

[102]      De la même façon, même si les faits allégués à la Demande introductive d’instance sont réputés être faits sous serment par la demanderesse[42], il n’en demeure pas moins que cette dernière doit établir le bien-fondé en fait et en droit de sa réclamation, selon le critère de la prépondérance de la preuve[43] par le biais de son témoignage lors du procès, ce que cette dernière a fait.

[103]      Ceci étant, la Déclaration sous serment du défendeur n’est pas suffisante afin de mettre de côté ou d’affaiblir de façon importante la version détaillée et constante offerte par la demanderesse en lien avec les faits essentiels reprochés au défendeur survenus en 1977.

[104]      De surcroit, il convient de souligner que la Déclaration sous serment ne traite pas la publication de l’article dans le journal Échos Vedettes et/ou Allo Vedettes ainsi que la publicité télévisée que la demanderesse a faite avec Johnny Farago, et ce, par le biais du défendeur.

[105]      L’implication du défendeur dans les publicités écrites et télévisuelles corrobore le fait que le défendeur connaissait la demanderesse, contrairement à ce qui est mentionné au paragraphe 6 de sa Déclaration sous serment.

[106]      Il convient de noter que la demanderesse doit établir, suivant le critère de la prépondérance de la preuve[44], qu’elle a subi une violence sexuelle au sens de l’article 2926.1 C.c.Q. commise par le défendeur en février ou mars 1977 pour obtenir réparation, ce que la preuve a révélé.

[107]      Certes, le Tribunal constate que la demanderesse a offert plusieurs années différentes relativement à la violence sexuelle reprochée au défendeur en 1977, tel que le soulève d’ailleurs le défendeur dans sa Contestation écrite et sa Déclaration sous serment.

[108]      Toutefois, le fil conducteur relativement aux faits essentiels et cruciaux reprochés au défendeur demeure constant, c’est-à-dire la description de la violence sexuelle que la demanderesse a subit par le défendeur ainsi le fait qu’au moment de l’événement, la demanderesse est âgée de 19 ans, les faits reprochés se déroulent en février ou mars et le défendeur est père d’une fille de deux ans.

[109]      Ce fil conducteur sur les éléments essentiels de la violence sexuelle n’a jamais varié au fil du temps, malgré les différentes années auxquelles réfère la demanderesse dans ses communications écrites.

[110]      Cette variance sur l’année de la violence sexuelle dans les communications écrites de la demanderesse n’affecte pas la version non contredite de la demanderesse sur les éléments essentiels de celle-ci qu’elle a subit en 1977.

[111]      En d’autres mots, le Tribunal retient qu’au moment de la violence sexuelle subie, la demanderesse est âgée de 19 ans ce qui implique, compte tenu du mois et de l’année de naissance de la demanderesse, que l’événement est vraisemblablement survenu fin février ou début mars 1977, tel qu’allégué à l’origine par la demanderesse à sa Demande introductive d’instance.

[112]      Au moment de l’agression, le défendeur a une fille âgée de deux ans.

[113]      Ces différents éléments n’ont pas été contredits par le défendeur lors du procès.

[114]      Par ailleurs, il est normal, après approximativement 43 ans, d’avoir quelques oublis ou contradictions mineurs sur des éléments secondaires qui n’affectent en rien la fiabilité et la valeur probante de la preuve offerte au niveau des éléments essentiels de la violence sexuelle subie.

[115]      Ainsi, compte tenu que le défendeur n’a pas témoigné au procès, la preuve écrite offerte en défense ne permet pas au Tribunal de conclure que celle-ci a ébranlé ou affaibli de façon substantielle l’ensemble de la preuve offerte en demande.

[116]      Outre la Déclaration sous serment produite au dossier de la Cour qui, pour les motifs énoncés précédemment, n’a peu ou pas d’impact sur l’issue de la présente réclamation, aucune autre preuve probante en défense n’est présentée au Tribunal lors du procès.

[117]      Cela étant, force est de constater, relativement aux circonstances entourant la violence sexuelle reprochée au défendeur, que la version de la demanderesse a toujours été essentiellement la même, sauf pour l’année de celle-ci.

[118]      Le défendeur se devait de convaincre le Tribunal selon la prépondérance des probabilités, de la justesse, de l’exactitude, de la sincérité et de la véracité de sa Déclaration sous serment et de sa Contestation écrite, ce que le défendeur n’a pu faire, vu son absence lors du procès.

[119]      Conséquemment, le Tribunal conclut que la demanderesse a établi avoir subi une violence sexuelle au sens de l’article 2926.1 C.c.Q. commise par le défendeur fin février ou début mars 1977 tôt le matin dans une chambre de l’hôtel Place Dupuis qu’avait réservée le défendeur pour la demanderesse.

[120]      Au moment de la violence sexuelle, la demanderesse affirme avoir figé plutôt que de fuir ou se débattre ou combattre le défendeur, ce qui s’avère vraisemblable et plausible dans les circonstances.

[121]      Ce n’est que des années plus tard que la demanderesse accepte et reconnaît ce qu’elle a vécu comme étant une violence sexuelle commise par le défendeur en 1977.

[122]      Comme elle l’affirme, la demanderesse a enfoui la violence sexuelle subie au fond d’elle-même pendant de nombreuses années et ce n’est que dans le cadre de ses différentes thérapies avec l’aide de ses professionnels dans la mouvance du mouvement MeToo qu’elle a verbalisé et pris conscience de celle-ci et des séquelles importantes que celle-ci a eues tout au long de sa vie. Le Tribunal n’a pas de motif pour écarter cette preuve.

[123]      Dans ces circonstances, le Tribunal conclut de la preuve que la demanderesse a établi, selon la prépondérance des probabilités, avoir subi une violence sexuelle en 1977 de la part du défendeur, ce qui constitue en l’espèce une faute délictuelle, au sens du C.c.B.C.[45], engageant la responsabilité civile du défendeur.

[124]      En ce qui concerne le préjudice subi, le Tribunal conclut de l’ensemble de la preuve que la demanderesse a établi avoir subi des dommages-intérêts pour un montant de 15 000 $.

[125]      À n’en pas douter, les faits et gestes du défendeur en 1977 ont marqué à vie la demanderesse.

[126]      Les séquelles psychologiques occasionnées à la demanderesse à la suite de l’agression ont été importantes jusqu’à ce jour.

[127]      De façon concomitante à la survenance de la faute commise par le défendeur, la demanderesse commence à vivre des difficultés importantes dans sa vie qui ont engendré des conséquences psychologiques importantes pour cette dernière, et ce, jusqu’à ce jour.

[128]      La demanderesse affirme avoir suivi des thérapies avec psychologue et psychiatre pour atténuer et gérer les effets de la violence sexuelle subie.

[129]      La demanderesse témoigne des séquelles à long terme qui se manifestent, entre autres, par un sentiment de culpabilité, de honte et perte de son estime qui ont affecté cette dernière de façon importante à différentes périodes de sa vie.

[130]      À cet égard, la demanderesse attribue une partie importante de ses problèmes de boisson, de consommation et de sa désorganisation psychologique importante par moment à la violence sexuelle subie en 1977.

[131]      Cette preuve du préjudice subi par la demanderesse n’a pas été contredite par le défendeur.

[132]      Le montant réclamé de 15 000 $ par la demanderesse se situe dans la fourchette inférieure de ce que les tribunaux ont accordé par le passé pour des traumatismes de cette nature.

[133]      Cela étant, le Tribunal arbitre[46] et fixe le montant des dommages-intérêts subis par la demanderesse à titre de dommages moraux à la somme de 15 000 $.

[134]      Compte tenu de la conclusion à laquelle le Tribunal en arrive sur la réclamation de la demanderesse, le Tribunal rejette la Demande reconventionnelle du défendeur.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

ACCUEILLE la Demande de la demanderesse;

REJETTE la Contestation du défendeur;

REJETTE la Demande reconventionnelle du défendeur;

CONDAMNE le défendeur à payer à la demanderesse 15 000 $, avec intérêts au taux légal et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec, à compter de l’envoi de la mise en demeure, soit le 11 août 2020;

LE TOUT avec les frais de justice.

 

 

 

__________________________________

YVES HAMEL, J.C.Q.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Date d’audience :

21 février 2023

 


Annexe 1 :  Quantum de dommages moraux pour agression sexuelle avec séquelles psychologiques importantes.

 

Reference

Montant de dommages moraux

Circonstances particulières de la faute et des séquelles psychologiques correspondant

A. c. B.,
 2022 QCCS 768

150000 $

La victime est agressée sexuellement par son grand-père pendant une période de deux ans jusqu’à l’âge de 15 ans.

 

La victime s’est notamment automutilée et elle a été astreinte à prendre une lourde médication pour contrôler à la fois l’anxiété, la dépression, des problèmes de concentration et l’insomnie.

 

N.B. c. G. A., 2021 QCCS 3179.

100 000 $

La victime est agressée sexuellement à plusieurs reprises par son jeune oncle alors qu’elle est âgée entre 9 et 16 ans.

 

Les abus ont entraîné des séquelles importantes pour la victime qui fera notamment une tentative de suicide.

 

H.C. c. V.CI., 2016 QCCS 858.

125000 $

Il y a eu quatre épisodes d’abus sexuels sur la personne du demandeur répartis sur une période de huit ans, alors que ce dernier était mineur.

 

Il est incapable de développer des relations interpersonnelles et son intimité avec sa conjointe en a été affectée. Il a vécu avec la honte qui l’habitait constamment. Il se sentait coupable et responsable de ce qui lui est arrivé. Tout ce temps, il ne voulait pas en parler de peur de briser sa famille. Son estime personnelle a été grandement affectée.

Sa personnalité s’est modifiée à la suite des agressions. Il est devenu taciturne, angoissé, renfermé, colérique et peu souriant. Pendant plusieurs années, il a souffert d’alcoolisme et de toxicomanie.

Il éprouve beaucoup de difficulté à ressentir du plaisir, et ce, peu importe la situation

 

P. L. c. J. L., 2011 QCCA 1233.

100000 $

Une victime dinceste dans le contexte de quatre ans dabus par son frère aîné.

 

La victime est devenue enceinte à lâge de quinze ans, qu’elle a vécu un rejet par sa famille et l’isolement, elle a eu un accouchement très difficile, lequel lui a causé de grandes douleurs physiques et morales, elle a dû abandonner son fils et a grandement souffert de ce fait, elle a délaissé lécole ainsi que ses projets de carrière.

 

J.K. c. S.D., 2009 QCCS 2004.

100000 $

Une victime d’abus sexuels de la part du conjoint de sa mère lorsqu’elle était mineure, et ce pendant six ans.

Elle souffrait dun stress post-traumatique, dun manque destime delle-même, dune crainte des hommes, de timidité. Malgré une formation universitaire en traduction, elle ne réussissait pas à trouver un emploi correspondant à ses capacités.

 

 A. c. B.,
 2007 QCCS 5.

75000 $

La demanderesse de 65 ans est agressée sexuellement par ses deux frères, alors quelle était âgée entre 11 à 15 ans.

 

La demanderesse avait donné naissance à une petite fille, décédée deux jours plus tard. Plusieurs séquelles découlaient des agressions : difficultés scolaires, méfiance envers les hommes, isolement social, manque destime de soi, dégoût pour les relations sexuelles, difficultés dans sa vie maritale.

 

Ringuette c. Ringuette.,
2003 CanLII 23578 (QC CS)

 

40 000 $

La demanderesse de 75 ans qui a poursuivi son frère en dommages pour des agressions sexuelles survenues dans son enfance.

 

Il y a eu au moins cinquante agressions. La demanderesse souffrait dun stress post-traumatique, de maux de tête et de navoir jamais eu de vie sexuelle normale. Elle a été nerveuse, peureuse et méfiante toute sa vie.

 

M.D. c. C.D., 2004 CanLII 41488 (QC CS)

30 000 $

Une jeune fille de treize ans qui est agressée sexuellement par son oncle.

 

Plusieurs conséquences psychologiques ont résulté des agressions et il y a eu une psychothérapie. Elle est affectée par des changements brusques au niveau de lhumeur, ainsi quune peur constante de revoir son agresseur. Les cauchemars entourant ce thème et le souvenir des menaces de mort formulées par lagresseur étaient persistants. Elle était incapable de dormir seule. La peur a aussi été généralisée aux hommes en général. Elle se percevait plutôt négativement. Elle avait tendance à personnaliser les difficultés quelle vivait. Bref, elle se percevait comme étant lunique cause de ce qui arrivait et vivait énormément de culpabilité.

 

N.C. c. F. T., 2018 QCCS 3939

65 000 $

La demanderesse réclame de son ex-époux des dommages en raison d’abus physiques et sexuels répétés qu’il aurait commis envers elle au cours des années 2004 à 2013.

 

La demanderesse se dit démolie, incapable de faire confiance à quiconque ou de sengager dans une relation affective. Sa personnalité sest modifiée à la suite des faits fautifs. Alors quelle était autrefois une personne dynamique et entourée damis, elle se retrouve aujourdhui isolée et nest plus lombre delle-même. Sa santé en souffre.

 

É.S. c. C.D.,
2003 CanLII 28023 (QC CS)

 

20 000 $ pour l’incapacité partielle permanente et les douleurs, souffrances et inconvénients

La demanderesse poursuit le défendeur en dommages-intérêts à la suite d’une agression sexuelle dont elle a été victime de la part du défendeur, alors qu’elle était âgée de 14 ans.

 

Il ny a eu quun seul événement, mais il a laissé des traces. Bien que la procureure du défendeur plaide des situations préexistantes, la prépondérance de preuve est à leffet contraire. Ces problèmes de boulimie et danorexie comme établi par lexpert sont des conséquences directes de lagression du 31 octobre 1997. À la suite de cette agression également, bien quelle consommait certaines drogues auparavant, elle sest adonnée par la suite aux drogues dures. Elle sest renfermée sur elle-même et navait quune seule intention, quitter la région où elle était.

 

Lavallée c. Massé, 2000 CanLII 17503 (QC CQ)

 

1 500 $

Petites créances : Réclamations faites la suite dune agression sexuelle. Lintimé admet avoir posé les gestes reprochés.

 

C.T. c. Dudek, 2022 QCCS 4860

 

 

10 000 $

La plaignante a été séquestrée dans un contexte d’avances sexuelles non désirées.

 

La demanderesse conserve des séquelles psychologiques. Elle doit consulter en psychologie depuis des années. Depuis l’événement, elle est moins sereine, plus soucieuse et plus anxieuse. Sa vie professionnelle, sociale et familiale est affectée. Elle n’a pas travaillé pendant de nombreux mois et a ainsi été privée des sentiments de réalisation et d’accomplissement. Elle s’isole et a moins d’intérêt pour s’impliquer socialement, en plus d’être moins investie comme mère.

 

 


[1]  Voir la décision du Tribunal au dossier de la Cour.

[2]  Extrait pièce P-4.

[3]  Extrait pièce D-2.

[4]  Extrait pièce D-3.

[5]  Extrait pièce D-6.

[6]  Extrait pièce D-4.

[7]  Extrait pièce D-7.

[8]  Extrait pièce D-8.

[9]  Extrait pièce P-2.

[12]  Jean-Louis BAUDOUIN, Patrice DESLAURIERS et Benoît MOORE, La responsabilité civile, 8e éd., vol. 1 « Principes généraux », Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2014, par. 1-165, p. 166. ; N.C. c. F. T., 2018 QCCS 3939, par. 155-156.

[13]  Anders-Zieba c. Québec (Procureur général), 1997 CanLII 8429, par. 37.

[14]  Anders-Zieba c. Québec (Procureur général), 1997 CanLII 8429, par. 37.

[17]  F. H. c. McDougall, [2008] 3 R.C.S. 41.

[18]  Québec, Assemblée nationale, Journal des débats. Commissions parlementaires, Commission des institutions, 1re sess., 42e légis., vol. 45, no 76, 11 juin 2020, 11 h 30 (Mme Hélène David).

[21]  Loi modifiant le Code civil pour notamment rendre imprescriptibles les actions civiles en matière d’agression à caractère sexuel, de violence subie pendant l’enfance et de violence conjugale, LQ 2020, c. 13, a. 2. Art. 4.

[22]   Jean-Sébastien D’AMOURS, Commentaire sur la Loi modifiant le Code civil pour notamment rendre imprescriptibles les actions civiles en matière d’agression à caractère sexuel, de violence subie pendant l’enfance et de violence conjugale, LQ 2020, c. 13, Repères, octobre 2020, Éditions Yvon Blais, 2020.

[23]  Daniel GARNDER. Le préjudice corporel. Les conséquences de la qualification de préjudice corporel — La prescription. 4e éd., Éditions Yvon Blais, 2016. p.43-73.

[24]  La preuve civile, 4e édition, no 174, p. 126.

[25]  Code civil du Québec, art. 2803. ; Bolduc. c. Leclerc., 2022 QCCS 3238 par 25.

[26]  F. H. c. McDougall, [2008] 3 R.C.S. 41.

[27]  Code civil du Québec, art. 2845.

[28]  F. H. c. McDougall, [2008] 3 R.C.S. 41, par. 58.

[29]  LSJPA — 195, 2019 QCCA 379, par 53.

[30]  Hubert REID, Dictionnaire de droit québécois et canadien, 5e éd. Revisée, Montréal, Wilson & Lafleur, 2016, « Déclaration sous serment », en ligne : <http://dictionnairereid.caij.qc.ca> (JuriBistro eDICTIONNAIRE).

[31]  Code de procédure civile, art. 24.

[32]  Code de procédure civile, art. 105.

[33]  Code de procédure civile, art. 292.

[34]  Caroline MORIN. Guides sur les petites créances, 2021. p. 138,139.

[35]  La preuve devant le tribunal civil, Collection de droit 2015-16, École du Barreau du Québec, vol. 2, Procédure et preuve, Cowansville, Éditions Yvon Blais, p. 195, aux pages 233-243.

[36]  Bolduc c. Leclerc, 2022 QCCS 3238, par. 109.

[37]  H.C. c. V.Cl., 2016 QCCS 858.

[38]  C.T. c. Dudek, 2022 QCCS 486, par.76.

[39]  P.L. c. J.L., 2011 QCCA 1233; Les Stations de la Vallée St-Sauveur Inc. c. M.A., 2010 QCCA 1509.

[40]  Voir également H.C. c. V.Cl., 2016 QCCS 858, par. 167.

[41]  C.T. c. Dudek, 2022 QCCS 486, par. 81.

[42]  Article 544 C.p.c.

[43]  Article 2803 du Code civil du Québec.

[44]  Article 2803 du Code civil du Québec.

[45]  Article 1053 C.c.B.C.

[46]  Jacob Pollack c. The Canadian Imperial Bank of Commerce, C.A. Montréal, no 500-09-000208-777, 20 mai 1981, J. J. Kaufman, L'Heureux-Dubé, Laflamme, pp. 4-5.

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